Zoé-Victoire Talon, comtesse du Cayla

Solution de notre énigme ...  

La comtesse Achille de Baschi du Cayla, née  Zoé Victoire Talon  le 25 août 1785, nous est surtout connue comme la bonne amie ( relation platonique ) de Louis XVIII.
Mais son père, Omer Talon  ( cette fois nous voici chez les Simpson      ), je vous le disais, a sans doute joué un rôle primordial dans une particulièrement ténébreuse affaire pendant la Révolution .
Il s'agit de rien moins que de la conspiration de Favras.  

Au début de 1790, moins d'un an après la Prise de la Bastille, le père de la future comtesse du Cayla se rend dans la prison du Châtelet où est enfermé Thomas de Mahy, marquis de Favras, afin de l’interroger. Favras est alors accusé d'un complot visant à faire enlever Louis XVI, roi de France. Le marquis, agent officieux du comte de Provence, futur Louis XVIII, aurait reçu de celui-ci l’instruction de faire compromettre Louis XVI au bénéfice de son frère le comte de Provence. Conscient de ce qu'il risquait de finir sur l’échafaud, Favras aurait rédigé un rapport de quatre pages dans lequel il aurait consigné tous les détails de cette sombre machination. Omer Talon est effrayé en apprenant la vérité de la bouche du marquis. Il lui adjure de remettre le rapport en question et de n’en souffler mot à personne. Le marquis de Favras tient parole et monte sur l’échafaud le 19 février 1790 sans avoir rien révélé. De son côté, Talon a apporté la confession de Favras qu’il lègue à sa fille.

Voilà qui me rend son attachement à Louis XVIII encore plus suspect .  

De retour d'émigration,  Zoé fréquente l’institution de Mme Campan  où elle se lie d’amitié avec Hortense de Beauharnais ainsi que les futures princesses Bonaparte.
A 17 ans, elle épouse le comte Achille de Baschi du Cayla, marquis d’Aubais, mariage de convenance à la mode d'alors chacun vivant de son côté.

En 1804, Omer Talon est arrêté sur l'ordre de Napoléon comme résistant à l’autorité impériale, et passible de la peine de mort. Zoé désespérée, plaide si bien sa cause auprès de Savary  ( suivez ma pensée    ) que la peine du sieur Talon devient un exil à l’île Sainte-Marguerite où il est gand-père neuf mois plus tard  d'un garçon, Ugolin (qui meurt à 17 ans). En 1807, Zoé  a une fille qui deviendra princesse de Beauvau-Craon. La liaison de Zoé et de Savary (devenu duc de Rovigo) dure encore plusieurs années.



En 1814,  Zoé  arbore la cocarde blanche. Elle vit bientôt sous le même toit que son mari, cohabitation  impossible puis affrontement  en justice pour  la garde des enfants . Pour obtenir gain de cause, Zoé se rend aux Tuileries, demande la protection du roi, le met dans sa poche, et zou !  
Stautre, sexagénaire goutteux, obèse et répugnant au moral comme au physique,  s’amourache de ce tendron de trente ans de moins que lui ...

Selon Wiki , l’influence en politique de cette nouvelle favorite royale aurait aidé à la chute du duc de Richelieu, et favorisé la nomination de Villèle comme Premier ministre. Zoé aurait trempé aussi dans le licenciement ignominieux de Chateaubriand du ministère des Affaires étrangères . Elle aurait amené Louis XVIII à l'acceptation du projet de loi septennale de 1824 sur la liberté de presse, ainsi que d'autres mesures réactionnaires.

Beaucoup de favorites ont pesé d'une manière ou d'une autre aux manœuvres de la politique intérieure ou étrangère. Ce n'est pas évident au premier coup d'œil, mais en y regardant de plus près, il y a des zones d'influence.

Un portrait de la dernière "favorite", amie, et confidente de Louis XVIII, sera prochainement présenté en vente aux enchères. Je profite de la présentation au catalogue pour y ajouter quelques illustrations complémentaires.

Portrait de la comtesse du Cayla (1785-1852)
Pascal François Gérard, dit Baron Gérard (Rome 1770-Paris 1837)
Toile d'origine du Belot
64 x 53 cm (Restaurations anciennes)



Présentation au catalogue

Notre tableau est l'étude prise sur le vif, devant le modèle, pour le "Portrait de Zoé Victoire Talon de Baschi, comtesse du Cayla et ses enfants, Valentine et Pierre-Ugolin sur la terrasse du château de Saint-Ouen", vers 1824-1825. Anciennement conservé au château d'Haroué, acquis par l'Etat en 2019, il est actuellement exposé par le Centre des monuments Nationaux au château de Maisons.

Portrait de Zoé Victoire Talon, comtesse du Cayla, et de ses enfants, par François Gérard (1770-1837).
François Gérard, dit le Baron Gérard
Huile sur toile, 228 x 177 cm.
Image : Sylvie Chan Liat/Centre des monuments nationaux

Image : Commons Wikimedia

Zoé-Victoire Talon, comtesse du Cayla,

Née en 1785 dans une famille de magistrats de la noblesse de robe, Zoé-Victoire Talon est la fille de Jeanne-Agnès-Gabrielle, née comtesse de Pestre et d'Antoine Omer Talon, marquis du Boullay-Thierry (1760-1811).

Sa famille s'exile en 1791 pour ne revenir qu'en 1795. En 1796 Zoé et sa soeur Aline entrent dans le pensionnat de jeunes filles que Madame Campan vient d'ouvrir à Saint-Germain-en-Laye afin de leur donner la meilleure éducation, tandis que leur mère est emprisonnée pendant trois ans à cause de ses sympathies royalistes.
Chez Madame Campan, elles côtoient l'élite des jeunes filles de retour d'exil et se lie d'amitié avec Hortense de Beauharnais et Caroline Bonaparte, future reine de Naples.

En 1802, alors qu'elle n'a que 17 ans, son père la marie à Achille-Pierre Baschi du Cayla, marquis d'Aubray et pair de France. La jeune fille possède l'art de la conversation et très vite appréciée dans les salons, où elle est décrite comme une personne « spirituelle et aimable ». Elle y fréquente Madame de Staël, Madame de Boigne, Chateaubriand.

Malgré la naissance de deux enfants, Valentine (1806-1885) et Ugolin (c.1811-1828), les relations avec le comte du Cayla se détériorent et ils divorcent le 6 mai 1818. Zoé devient la confidente du roi Louis XVIII, veuf depuis 1810, l'influençant jusque dans sa politique.

Extrait d'un album de lithographies érotiques (vers 1830)
Source : Sotheby's

Il en fait sa favorite en 1817, la couvre de cadeaux et fait bâtir pour elle le nouveau château de Saint-Ouen entre 1821 et 1823, lui donnant ainsi un statut officiel qu'elle conservera jusqu'à la mort du roi.

Chateau de Madame du Cayla (à Saint Ouen)
Image : Bibliothèque nationale de France
Voir notre sujet concernant l'ancien château, détruit sous Louis XVIII : Marie-Antoinette au château de Saint-Ouen chez le duc de Nivernais

Pour décorer cette demeure le roi fait appel aux meilleurs artistes de son époque : Pierre-Antoine Bellangé pour le mobilier, Thomire et Feuchère pour les luminaires et les chandeliers de bronze ; la manufacture de Sèvres pour la vaisselle, François Gérard pour les tableaux.
C'est pour le salon de musique Gérard peint deux oeuvres majeures : « Le portrait de la comtesse du Cayla et ses enfants » et le « portrait de Louis XVIII dans son cabinet des Tuileries ».

Image : Alexandre Marchi / L'Est Républicain

Le roi Louis XVIII dans son cabinet de travail des Tuileries
François-Pascal-Simon Gérard, Baron Gérard
Huile sur toile, 1823
291cm x 323cm
Image : Centre des monuments nationaux, château de Maisons (Maisons-Laffitte) /Benjamin Gavaudo

* Source et infos complémentaires : Bayeux Enchères - Bayeux, Vente du 10 avril 2023