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La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame"

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 10:04





Bravo ! ça, c'est envoyé !!!  Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing Laughing 
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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 10:10


Dominique Poulin a écrit:
Mer 13 Jan 2010 - 18:07



Suite du Chapitre III

La Princesse de Piémont 1775-1789


Quelques historiens ont pointé des lacunes dans son éducation de prince héritier, mais dans l'ensemble ses parents se sont souciés d'en faire un futur monarque à la hauteur de sa mission.
Son gouverneur, Malines, comte de Bruino, ne désirait pas privilégier pour lui une éducation ou l'érudition aurait toute sa place. Il donnait par exemple en histoire la priorité à l'interprétation des faits et la compréhension des événements. Les observations qu'il a laissé sur son élève traduisent l'intelligence du prince de Piémont et un sens de l'observation aigu pour un jeune homme de son âge "qui franchit dans un instant une longue chaîne d'idées et saisit le juste rapport de deux idées très éloignées l'une de l'autre" et il ajoutait qu'il saisissait "le véritable caractère de tout ce qu'il voit" "et son affection n'est point séduite par les apparences".

Mais les orientations du gouverneur semblent avoir connues des limites. Il ne put soustraire le jeune garçon à l'ambiance féminine de sa famille, ses sœurs surtout, auquel le prince se confortait et au surplus de précautions que l'on prenait pour lui en raison de sa santé délicate. Toutes ces attentions ne pouvaient selon Malines aguerrir l'héritier du trône dont il avait peut-être diagnostiqué lucidement la sensibilité à fleur de peau et l'hyper-émotivité.
De plus, les tiraillements au sein de la maison d'éducation du prince ne manquèrent pas de déstabiliser les valeurs fondamentales du futur Charles-Emmanuel IV dans sa manière de régner et de gouverner.
En effet, le gouverneur du prince héritier s'opposait au précepteur, Giacinto Sigismondo Gerdil. Le futur cardinal Gerdil contrastait avec Malines : le second était un observateur de la société de l'esprit des Lumières tandis que le premier se présentait comme un adversaire résolu du progrès social. Gerdil concevait l'État et la royauté sous une forme traditionnelle mais déjà obsolète au XVIIIe siècle. Il avait d'ailleurs écrit à propos de l'Émile de Jean-Jacques Rousseau que le dessein de cette oeuvre avait pour "but de préparer les esprits à un renversement de l'ordre civil" ! Sévère et inflexible, il s'appuyait sur "de rigoureux principes d'orthodoxie et de morale."

Le comte-gouverneur Malines ne remettait pas en cause les principes d'érudition du précepteur Gerdil, mais il déplorait les plans de lecture "sans femmes, ni amours" imposés au jeune homme.
Charles-Emmanuel semble avoir été de bonne heure conditionné dans un culte exagéré de la vertu, dont il ne sortira plus. Pour l'enseignement de l'histoire, les principes de morale l'emportaient toujours sur tout autre considération historique et politique de fond.
Ainsi, dans une étude des nombreux souverains de la Maison de Savoie, tous les ancêtres du prince héritier sont jugés selon des critères moraux en rapport avec la piété religieuse. L'histoire politique et diplomatique de la Maison de Savoie n'était manifestement pas la priorité essentielle du précepteur.

Alarmé sur l'avenir de son élève, le gouverneur écrira à Gerdil en guise d'avertissement : "Autre chose est parcourir les sciences et multiplier les connaissances, autre chose est la formation du prince qui doit régner." Malgré les appels du pied de Malines, les méthodes d'enseignement préceptorales de Gerdil furent maintenues, car elles étaient sans doute approuvées par le souverain de l'époque, le grand-père du jeune prince, Charles-Emmanuel III. Il est bien possible aussi que le précepteur ait bénéficié d'appuis influents à la Cour de Turin en dépit de sa subordination hiérarchique envers le gouverneur Malines.

De fait, et pour son infortune, le fond mélancolique de l'époux de Clotilde, chapitré dans un étroit moralisme religieux, ne fera que s'accentuer avec le temps. Le prince de Piémont, déchiré entre ses obligations de futur souverain et ses aspirations de piété mystique, s'enfermera progressivement dans un état de névrose dépressive dont les symptômes récurrents se manifestèrent de bonne heure.
La sensibilité naturelle de son enfance bridée et son émotivité mal canalisée, déboucheront sur des troubles nerveux et maniaques graves.

Les documents consultés pour les années 1775-1795 ne permettent pas d'étayer le détail et l'ampleur de ses troubles, car les sources qui nous les révèlent sont postérieures à cette période. Toutefois, un témoignage certes tardif d'un agent de renseignements autrichien, sans doute contemporain de la décade 1790, nous révèle l'esprit et l'état de vie spartiate que s'imposait Charles-Emmanuel, en inadéquation avec son statut royal :
"Il se lève avant le jour et reste quatre heures en prières. Il porte un cilice, il se donne la discipline, jeûne et se nourrit de légumes, même au temps non prescrits. Il vit dans la pénitence et la contemplation. Il est trop absorbé par le salut de son âme pour trouver le temps de songer à l'État.
"
L'aggravation de son état psychique s'amplifiera lors de son règne désastreux en 1796-1798 puis au cours de son exil les années suivantes, mais les conditions de cette déchéance semblent avoir été en germe bien avant son accession au trône.
Charles-Emmanuel de Savoie a-t-il été un jour jeune et charmant, insouciant et l'esprit en paix ?

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 10:11




Jesus, Marie, Joseph ! Clothilde n'a pas dû s'amuser tous les jours ...  Smileàè-è\': 
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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 11:24

Dominique Poulin a écrit:
Jeu 14 Jan 2010 - 13:35




Suite du Chapitre III

La Princesse de Piémont 1775-1789


On possède très peu d'éléments sur la vie de Clotilde lors de ses premières années à la Cour de Turin. Cette quasi-absence de documents rend la tâche bien difficile pour son biographe et ne permet pas de se faire une appréciation précise et détaillée sur de nombreux points. En outre, on relève une pénurie très préjudiciable de la correspondance de la princesse de Piémont à sa famille française. Les Archives Nationales de France ne la mentionne pas à l'exception d'infimes fragments isolés.

Objectivement, il parait impossible que la princesse n'aie pas entretenu de correspondance avec ses trois frères, sa sœur Madame Élisabeth, et ses tantes qu'elle adorait. De même, Clotilde a très certainement reçu des lettres de ses parents. La situation inverse semblerait absolument ahurissante et ne ses comprendrait pas. La Révolution a probablement mis à mal quantité de papiers provenant des archives de la famille royale avec la mise à sac des Tuileries le 10 août 1792, et l'occupation, le pillage ou la mise sous séquestre des propriétés de la Couronne et des biens privés des nombreux membres de la famille royale.
Devant ce fait établi, cette apparente absence de lettres s'explique par le fait qu'elle fut soit détruite pendant la Révolution ou lors des bouleversements politiques du XIXe siècle, soit qu'elle fut intégrée à un fond aux Archives Nationales de France qui n'ont pas retenu l'attention des historiens et des chercheurs, ou dans d'autres centres d'archives.
La seule correspondance de Madame Clotilde qui fut mise à jour par le vicomte de Reiset avant la guerre de 1914-1918, concerne la période 1799-1802 et relevait à l'époque des archives du roi d'Italie Victor-Emmanuel III et du duc de Gênes.

Il est pourtant des aspects importants sur lequel on doit émettre des hypothèses. Clotilde avait tout juste seize ans lorsqu'elle épousa le prince de Piémont avant d'intégrer une nouvelle famille et une nouvelle patrie. Comment vécut-elle ce déracinement de l'intérieur ? Quelle furent ses véritables relations avec Charles-Emmanuel, de huit ans son aîné ? Comment fut-elle perçue par ses beaux-parents et leurs nombreux enfants au fil du temps ?
Certes, les premiers témoignages sont élogieux en 1775, mais par la suite, qu'en fut-il vraiment ? Et en tant que deuxième dame du royaume de Piémont-Sardaigne jusqu'à la mort de la reine Maria-Antonia en 1785, quelles furent ses relations avec la Cour de Turin ?
Sur ce dernier point, l'épouse de prince héritier a vraisemblablement bien joué son rôle venant d'une Cour aussi policée que celle de Versailles, mais tout de même, on aimerait en savoir plus sur ses dames d'honneur, ses amitiés, ses réserves envers certains proches ou dignitaires, sa vie officielle et intime dans ses appartements du palais royal de Turin, les châteaux de Moncalieri, de Stupinigi et de La Vénerie...

Pour l'heure, tous ces articles demeurent presque totalement obscurs, faute de documents existants en France. Ils sont sans doute plus nombreux et plus faciles d'accès en Italie, mais il semblerait pourtant que peu d'historiens italiens aient étudié ces questions.
De la documentation disponible, les renseignements émergent très lentement au cours des années 1780. La décennie 1790 est beaucoup plus riche en matériaux. Contentons-nous donc pour l'instant de ce que nous savons de la vie de la princesse de Piémont entre 1775 et 1789 !



 Jeu 14 Jan 2010 - 14:55
Suite du chapitre III

La Princesse de Piémont 1775-1789


Dans l'âge tendre de ses seize printemps, Clotilde donna à la Cour de Turin, l'image de la princesse parfaite et accomplie. Le tempérament contrasté de Charles-Emmanuel ne semble pas l'avoir beaucoup déconcerté, du moins officiellement... Toute la famille royale de Savoie se déclarait enchantée de sa présence sous la plume de la princesse Félicité : "Elle fait notre joie à tous. Et les quatre jeunes frères du prince de Piémont n'y contredisent pas." Le chevalier Roze qui eut l'occasion de l'observer à Turin confiait dans son Journal qu'elle avait alors "une figure très gracieuse, son air est vif et sa taille bien prise, mais son embonpoint excessif la dépare et rend sa démarche pesante et son attitude gênée."

L'intérêt dynastique de ce mariage reste cependant muet sur sa consommation, aucun indice positif ou négatif n'ayant été divulgué. Nous savons que le ménage princier s'estimait tendrement et leurs vingt-sept années d'union corroborent ce sentiment par de nombreux indices mais le domaine conjugal est resté hermétiquement clos, faute de témoignage contemporain.
Sans aucune preuve tangible, on impute parfois l'obésité de Clotilde comme une source de stérilité, mais aussi la santé fragile du prince ayant entrainé une impuissance sexuelle.
Ces deux facteurs reposent sur des arguments aléatoires et spécieux d'autant plus qu'ils ne se fondent sur aucune source historique importante. Clotilde et Charles-Emmanuel n'ayant pas eu d'enfant, des bruits circulèrent à leur endroit, mais les arguments manquent sur la non-consommation, la stérilité ou l'impuissance de son mari.

Désormais princesse d'une nouvelle patrie, la pratique de l'italien ne lui posa guère de difficultés. La cour de France l'enseignait à ses princes et un de ses maîtres rapporta qu'elle "avait une facilité étonnante et avait une mémoire très heureuse... Mon auguste écolière malgré toutes ces interruptions mettait son temps à profit ; elle prononçait fort bien l'italien et le lisait encore mieux."
Des lettres exhumées par Mr de Reiset, écrites de sa main à la fin de sa vie, prouvent que la langue de Dante n'avait pas de secret pour elle. Toutefois, obsédée par le désir de plaire au roi et à la reine de Sardaigne, elle développera encore son instruction en Italie, en maitrisant le dialecte piémontais, grâce à son médecin Pipino qui lui composera un dictionnaire, une grammaire et un recueil de poésies piémontaises.

Son goût pour la musique ne se démentit pas à Turin. Clotilde collectionnait avec amour les œuvres des plus grands maitres de son temps et le prince de Piémont s'ingéniait à lui offrir les plus rares en exclusivité. La harpe et le chant avaient sa prédilection, des domaines ou une fois de plus la princesse puisait des ressources spirituelles quoique moins austères qu'à son habitude.

Cependant, les goûts privés de Clotilde et la représentation de la vie de Cour ne semblent pas avoir occupé beaucoup de temps dans sa vie, alors qu'elle n'avait pas encore vingt ans. Sa nature foncièrement dévouée et altruiste l'orienta naturellement vers les œuvres de charité. Nous ignorons hélas à quel rythme, dans quelles conditions et avec quels moyens elle entrepris ce sacerdoce intimement lié avec son intense foi religieuse. Elle patronna vraisemblablement des maisons de bienfaisance pour les pauvres, des hôpitaux, des orphelinats et des hospices et elle donna délibérément sa protection au Couvent de la Compagnie des dames de la Visitation de Turin. Nous aimerions en savoir davantage sur ce sujet, notamment sur l'efficacité de l'action "sociale" de Clotilde. Ce point nous parait important à soulever, mais une fois de plus les sources nous échappent.

Trois ou quatre années passèrent ainsi, sans qu'aucun espoir de maternité ne s'annonce dans la vie de Clotilde. Il semble que le désir d'enfant fut largement partagé par le couple héritier et la famille royale. La princesse s'en faisait un devoir et une nécessité : sa mère et sa grand-mère n'avaient-elle pas mis au monde beaucoup d'enfants de même que sa belle-mère, la reine Maria-Antonia ?
Clotilde, dans cette épreuve de stérilité, confia à son entourage que "si Dieu voulait, pour la consolation de la famille royale, lui accorder la grâce de donner le jour à un fils, elle se soumettrait volontiers à souffrir dans son corps, les plus grandes souffrances."

Avec les ans, son embonpoint excessif ne s'était pas réduit, et sur les conseils des médecins de la Cour, elle commença courageusement à respecter leurs prescriptions pour le moins désastreuses ! La princesse prit ainsi des bains d'eau minérale, censés évacuer de l'intérieur ses mauvaises humeurs.
Devant l'inefficacité de ce traitement, on lui infligea des remèdes qui feraient tressaillir d'indignation nombre de médecins et de diététiciens modernes ! La pauvre femme dut se soumettre à des lavements incalculables, mais aussi à l'absorption de boissons purgatives peu ragoutantes qui effrayaient jusqu'à ses domestiques... Pour le moins, on peut supposer qu'avec le nombre de jeûnes et de mortifications que s'imposait Clotilde en accord avec sa foi mystique, toutes ces effarantes prescriptions ne facilitèrent en rien l'arrivée de l'enfant tant désiré. Elles n'eurent pour conséquence que de détraquer la santé et le système digestif de la princesse de Piémont. Au prix de tels désagréments, elle commença à maigrir, mais non sans mal.

Soudain, la Correspondance Secrète de Lescure mentionna cette nouvelle le 28 juillet 1778 :
"On avait dit que Madame la princesse de Piémont était morte d'une fièvre putride. Cette princesse en est guérie; et elle est enceinte de quatre ou cinq mois."
De fait, si Clotilde est peut-être tombée gravement malade en 1778, la nouvelle de l'heureux évènement n'est corroborée par aucune autre source de l'époque. Il est bien surprenant qu'aucun signe positif n'ait transpiré jusqu'à Versailles et l'ambassadeur de France à Turin, le baron de Choiseul, n'aurait pas manqué de communiquer la nouvelle à Louis XVI et Marie-Antoinette. Par ailleurs, la reine de France n'en dit mot dans sa correspondance.
Nous en resterons donc là sur la douloureuse question de la maternité.

Néanmoins; la succession au trône n'était nullement compromise. Après la prince Charles-Emmanuel, Victor-Amédée III ne disposait-il pas de quatre autres fils ? Au bout d'une dizaine d'années de mariage, il parut évident que le couple princier ne donnerait pas d'héritier à la Couronne de Savoie. Le roi de Sardaigne se tourna alors vers son fils cadet, le duc d'Aoste, afin de lui obtenir une épouse capable de perpétuer la dynastie.



  Ven 15 Jan 2010 - 18:18


La semaine prochaine je diffuse la fin du chapitre III. Et si vous avez des questions, des commentaires, n'hésitez pas !
:n,,;::::!!!: smiley12

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 11:40

Dominique Poulin a écrit:
Lun 18 Jan 2010 - 18:00



Suite et fin du chapitre III

La Princesse de Piémont 1775-1789


De la décennie 1780, deux portraits de Clotilde nous sont connus. Le premier, signé du peintre allemand Heinsius, est remarquable par sa transparente vérité. La jeune femme avait alors vingt-et un ans et malgré le régime de vie très austère qu'elle s'était imposé, la princesse apparaît empreinte de fraîcheur et dans l'épanouissement de sa vie d'épouse. Certes, il serait vain d'y chercher les attributs de son rang illustre, les bijoux, les riches étoffes ou les colonne à l'antique. La princesse, peinte de profil, apparaît dans un dépouillement délibéré, ou seule la lumière bienveillante de son regard attire l'attention.
A vingt ans, Clotilde a perdu les charmes innocents de l'adolescence si joliment reproduits par Drouais. L'ovale du visage a commencé à s'affiner, et le teint clair et lumineux n'est pas encore altéré par les prières. Une touche discrète de rouge rehausse la blancheur de la carnation, mais ses cheveux longs et abondants portés au naturel ont beaucoup foncé. Heinsius a superbement rendu l'aménité de ses yeux expressifs qui rappelaient ceux de sa grand-mère paternelle Marie Leszczynska.

Le deuxième portrait signé du peintre flamand Leclerc date de 1781. Cette fois, la princesse de Piémont pose davantage en conformité avec son rang. Sans doute, Clotilde ne porte pas la robe de cour à paniers, mais la robe parée, les rubans, les précieux bracelets, la richesse du canapé ou elle est assise et le coussin ou elle pose ses pieds rappelle son sang royal. Quelques détails toutefois trahissent cette volonté de figurer selon son statut. La jeune femme, nourrissant fort peu les innovations de la mode, dissimule sa gorge sous une garniture de dentelle, et ses cheveux sont surmontés d'un bonnet peu seyant pour son âge. De plus, le livre qu'elle tient de la main gauche, ressemble à une bible ou à un missel, éternel retour à ses aspirations religieuses.

Par choix et par volonté, la légèreté de la jeunesse s'applique difficilement pour Clotilde. D'année en année, son sacerdoce et son adoration envers Dieu deviennent de plus en plus absolus, elle sacrifie tous les privilèges de son âge et de sa position éminente devant sa foi.

Peu à peu, inexorablement son apparence va se modifier. D'obèse, ses rondeurs fondirent au point de se métamorphoser en une jeune femme à la maigreur inquiétante et desséchée. Son teint, encore lumineux vers 1780, se ternit. Ses dents ne résistent pas à ses habitudes spartiates ou à des maladies mal soignées. Pour paraître devant la Cour, elle acceptait à regret les vêtements d'apparat et les joyaux, mais sitôt rentrée dans ses appartements, elle se défaisait de tous ces harnachements qu'elle considérait frivoles. Cette revendication devant une extrême simplicité frappa ses contemporains, et jusqu'à la famille royale de Savoie. On sait que son beau-père, Victor-Amédée III aimait le décorum, et le roi de Sardaigne imposa sans doute certaines bornes à cette modestie excessive.

A la fin du XVIIIe siècle, la maison de Savoie représentait une puissance et une famille régnante recherchée au sein de ses pairs. On la sollicite volontiers sur la scène de l'Europe des rois.
En 1781, pour marier sa dernière fille, Caroline, Victor-Amédée III opte pour une alliance avec la dynastie électorale de Saxe. En cette occasion, quelques fêtes raniment Turin endormi, mais le deuil s'abat sur la Cour l'année suivante, lorsque Caroline meurt l'année suivante à Dresde. Lors de la grande tournée européenne du fils de Catherine II, le grand-duc Paul Pétrovich, son épouse Maria Fedérovna "s'était infiniment liée, pendant son voyage d'Italie, avec Madame la Princesse de Piémont".
La baronne d'Oberkirch, amie intime de la grande-duchesse décrit Clotilde "comme un ange de piété et de vertu, et certainement les catholiques ont dans leur calendrier, bien des saintes qui ne la valent pas."
Trois ans plus tard, en 1785, Turin recevait les souverains de Naples, Ferdinand IV et Marie-Caroline, sœur de la reine de France.

Le 19 septembre 1785, la reine Maria-Antonia expirait à cinquante-six ans. De la seconde place, la princesse de Piémont accédait au premier rang à la Cour de Turin.
De France, la crise de la société française et ses bouleversements politiques, n'allaient pas tarder à déstabiliser par contre-coup le royaume de Piémont-Sardaigne. La parenté française de Clotilde constitua inévitablement la première victime de la Révolution, et dans cette douloureuse épreuve, guidée dans sa foi exaltée et mystique, la princesse héréditaire, ne voulut, plus être selon ses propres paroles, que "la servante de Dieu."



Pauvre et triste Clothilde ! Je la préférais encore roudoudoune que maigrelette ...  Hop! 



Dominique Poulin a écrit:
Lun 18 Jan 2010 - 18:11

Voila pour le chapitre III... C'est fait, il est terminé celui-là !
J'en suis au plan du chapitre IV ou je dispose de davantage de sources documentaires et il s'intitulera :
"Quand la France devient l'Ennemie 1789-1796", c'est-à-dire de l'arrivée des premiers émigrés à Turin (le plus célèbre étant le comte d'Artois bien sûr) jusqu'à la mort de Victor-Amédée III en 1796.

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 11:48

Leos a écrit:
Ven 21 Mai 2010 - 8:13



LA POSSIBILITÉ DE LIRE ON-LINE :

http://www.archive.org/stream/sisteroflouisxvi00arterich#page/n7/mode/2up

LEOS

La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Sister10La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Oooooo13




Génial ! Merci, cher Leos !!!  :n,,;::::!!!: :n,,;::::!!!: :n,,;::::!!!: 



Dominique Poulin a écrit:
Mar 3 Aoû 2010 - 10:45


Bon... En remettant le nez dans mes dossiers j'ai de bonnes pages sur Madame Clotilde pour le chapitre IV, je taperais ça dans les jours suivants pour vous mes petits loups ! La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 70964811


...................
 :!,,,!!!: 

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 13:50




Dominique Poulin a écrit:
Ven 6 Aoû 2010 - 16:03



Chapitre IV

Quand la France devient l'ennemie



Au début de l'année 1789 la Maison de Savoie était occupée par le mariage de Victor-Emmanuel, duc d'Aoste. Pour marier son fils cadet, Victor-Amédée III avait fixé son choix sur une archiduchesse d'Autriche et après les trois alliances françaises de la décennie 1770, le souverain opérait un rapprochement avec la Maison de Habsbourg, démentant ainsi les rumeurs qui avaient courues sur un projet d'union entre le prince Victor-Emmanuel et Madame Élisabeth.
En effet, si cette idée avait peut-être germé dans l'esprit de la princesse Clotilde et des ambassadeurs de Sardaigne à Versailles, Madame Élisabeth marqua semble-t-il peu d'enthousiasme à cette éventualité et d'autre part la sœur de Clotilde n'aurait eut droit qu'à la seconde place à la Cour de Turin.
Le projet tomba à l'eau.

L'alliance sardo-autrichienne reposait sur un enjeu dynastique que le prince et la princesse de Piémont n'avaient pu réaliser : donner un héritier à la lignée pour assurer l'avenir de la dynastie de Savoie.
Au terme de quinze ans d'union, la stérilité de leur ménage avait fini par lever les dernières hésitations de Victor-Amédée III. Nul ne savait si cette situation de fait incombait sur le prince héritier Charles-Emmanuel ou sur son épouse Clotilde, mais la dégradation progressive de leur état de santé et leur vie commune de pénitence et de privations avait rendu caduque tout espoir de descendance. Et à leur détriment, cette fragile position pour le couple héritier affaiblissait leur crédit et leur influence dans l'État Piémonto-Sarde.

Pour sa part, Victor-Amédée III avait bien constaté que les mariages de ses enfants en France avaient déplu à la cour de Vienne qui n'entendait pas que la Maison de Savoie prit trop d'importance en Europe. De plus, l'Autriche, maitresse en Lombardie et en Toscane et bien présente à Parme et à Naples, savait parfaitement que la Maison de Savoie lorgnait avidement vers ses possessions italiennes, en particulier le Milanais.
Pourtant, en dépit de toutes ces conjectures politiques et malgré l'hypocrisie, voire la haine que se vouaient les Savoie et les Habsbourg, le duc d'Aoste épousait Marie-Thérèse d'Autriche-Este, fille de l'archiduc Ferdinand et de Marie-Béatrice d'Este.
L'équilibre même précaire de la sauvegarde entre États rivaux nécessitait aussi ce mariage et à ce titre le baron de Choiseul, ambassadeur de France à Turin, avait reçu cette instruction diplomatique sibylline :
"Personne n'ignore les progrès de la puissance à laquelle la Maison de Savoie est parvenue successivement par le système politique qu'elle a constamment suivi de s'attacher à la France ou à la Cour de Vienne, suivant le plus ou moins d'avantages que l'une et l'autre proposaient à la Cour de Turin pour l'associer à leurs querelles. Elle a été alternativement depuis plus d'un siècle l'alliée des Maisons de France et d'Autriche."


Suite de ce chapitre la semaine prochaine.

.



Marie-Thérèse Jeanne d'Autriche-Este, archiduchesse d'Autriche-Este, princesse de Modène, reine de la Sardaigne-Piémont
d'après une peinture de Giovanni Panealbo .


La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Maria_10


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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 13:56




Dominique Poulin a écrit:
Mar 10 Aoû 2010 - 16:43



Suite du chapitre IV

Quand la France devient l'ennemie



L'ingénue duchesse d'Aoste apparut comme un ange tombé du ciel à la rigoriste Cour de Turin... Un émigré qui la vit peu de temps après son mariage la décrit "d'une figure charmante, grande, bien faite, d'une tournure naîve et enfantine, et parait dans cette Cour d'autant plus agréable que tout ce qui l'entoure est d'une laideur amère." L'angélique princesse contrastait singulièrement avec son époux Victor-Emmanuel jugé "extrêmement laid" par le même observateur !

La position de ce prince resta longtemps effacée, voire insignifiante du fait qu'il n'était pas destiné à régner. Mais la stérilité de son frère aîné le prince de Piémont acheva de rendre sa situation plus attractive pour la dynastie. Victor-Amédée III le maria alors dans l'espoir de stopper le risque d'extinction de la Maison de Savoie. Le dessein matrimonial du roi était cyniquement clair et représentait une sorte de camouflet pour le couple héréditaire Charles-Emmanuel et Clotilde.
Bien que sans culture de gouvernement , les appétits dynastiques et politiques du duc d'Aoste deviendront de plus en plus perceptibles au cours des années suivantes dans un contexte tourmenté et fièvreux causé par les alarmes de la France révolutionnaire toute proche. Son intelligence et son discernement sont fortement mis en doute par les historiens et les contemporains et si certes on lui reconnait d'honnêtes qualités , la scène politique où il sera malgré lui immergé dépassait largement ses compétences.
IL était d'esprit étroit et borné, "pauvre d'intelligence et de savoir" et pire encore"la proie de ce qui l'entoure".
Au juste, son frère, Charles-Emmanuel n'était pas exempt de faiblesse non plus, mais le prince héritier savait peser ses décisions tandis que le duc d'Aoste inspirait peu confiance.
A partir de son mariage en 1789, les voeux de paternité exprimés par la Cour ne manqueront pas de le convaincre de son "utilité" pour la monarchie , mais aussi de son rôle dans l'Etat.
Pour sa part, Clotilde finira peu à peu par le prendre en grippe car elle pensait que le tempérament faible et influençable de son beau-frère pouvait servir de noyau de rassemblement à la Cour pour discréditer son mari.

Toutefois, sans la duchesse d'Aoste, ce prince n'aurait pas suscité les tensions et les jalousies qui naitront dans la famille royale. Les relations de Clotilde avec sa belle-soeur semblent avoir évolué dans le temps. Elle n'eut pas de rancoeur lorsque la jeune femme donna des enfants à la dynastie et la duchesse écrivit un jour 'qu'elle n'oublierai jamais tout ce qu'elle a fait pour moi et pour nous tous, peut-être en secret, car elle a sans doute empêché bien du mal et fait du bien dans sa vie."

En revanche, lorsque la duchesse d'Aoste devint reine de Sardaigne en 1802 dans des circonstances tragiques, elle révélera une nature "fantasque, imprévue, livrée à ses impressions, obstinée dans ses idées" ou encore habitée par "une volonté implacable, une haine eternelle, toute ambition inextinguible. De sa mère, Béatrice d'Este, elle tenait la souplesse et l'intrigue, de son père, l'archiduc Ferdinand d'Autriche, le froid et inflexible orgueil des Habsbourgs." Mais pour l'heure, la première marche de ses ambitions, reposait dans la fécondité de son ventre.

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 14:01




Dominique Poulin a écrit:
Mar 10 Aoû 2010 - 17:27




Suite du chapitre IV



Pourtant les noces du duc d'Aoste ne représentèrent pas l'événement majeur de la dynastie piémontaise en 1789.
De France, les troubles révolutionnaires ne manquèrent pas d'inquiéter la Cour de Turin qui d'une part craignait pour ses frontières très exposées du côté de la Savoie et d'autre part pour ses intérêts dynastiques et familiaux à Versailles.
De plus, l'histoire de la royauté sardo-piémontaise au XVIIIe siècle, est marquée par une centralisation étatique excessive. Les institutions et corporations locales, modestes relais du pouvoir, sont supprimées ou fortement dépouillées de leurs prérogatives par un État de plus en plus arbitraire. En sus, le renforcement de l'appareil militaire encouragé par les rois de Sardaigne, tend à instaurer un ordre "prétorien" nuisible à l'ordre civil et judiciaire , les abus de l'administration militaire sont perceptibles dans la population.
En outre, la Savoie, reléguée à l'état de province, supporte mal l'absolutisme piémontais, ses fonctionnaires et ses majors et les savoyards se détachent imperceptiblement d'une dynastie lointaine installée sur le sol italien. Philosophes et intellectuels sont délibérément ignorés par le pouvoir et beaucoup d'entre eux choisissent l'exil pour éviter les les mesquineries du gouvernement. Ils ne représentent pour l'État que "le surplus d'une nation" qui invoque son territoire "trop peu étendu pour nourrir des gens inutiles." !

Ainsi, dès l'été 1789, les nouvelles de la prise de la Bastille, de l'abolition des droits féodaux et de la Grande Peur qui gagne les campagnes traversent facilement les frontières de part en part.
D'emblée, le duché de Savoie est contaminé et on relève rapidement des incidents, populaires dans les villages qui dégénèrent parfois en émeutes frumentaires. Le climat se durcit, les paysans crient "A la lanterne, vive le Tiers État !", les impôts rentrent mal.
La fermentation des esprits ne tardera pas à se propager en Piémont et de là dans toute l'Italie.

Pour la première fois, depuis son accession au trône en 1773, le roi de Piémont-Sardaigne est confronté à une crise politique majeure. La Cour de Turin constate que les difficultés s'amoncellent désormais de jour en jour et elle n'est pas complètement rassurée par la présence de deux de ses princesses en France, les comtesses de Provence et d'Artois, malgré le ton confiant de leur frère Charles-Félix, duc de Genevois : "Lecture d'une lettre de Madame. Dans cette horrible révolte qui a éclaté en France, nos deux sœurs, grâce à Dieu, n'ont rien à craindre, moyennant la bonne conduite qu'elles y ont toujours tenue."

Pourtant, c'est justement la Révolution Française qui va provoquer très vite le repli à Turin d'une grande partie de la famille de la princesse de Piémont.

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 14:15




Dominique Poulin a écrit:
Lun 30 Août 2010 - 16:38




Suite du chapitre IV

Quant la France devient l'ennemie


Le 17 juillet 1789, sur l'ordre de Louis XVI, le comte d'Artois et ses fils, les ducs d'Angoulême et de Berry quittent la France. Tous les cousins Condé suivent le même sort, de même que le prince et la princesse de Conti. La comtesse d'Artois, pour une raison mal déterminée, restait à Versailles.
Avec l'accord de Louis XVI, Victor-Amédée III qui aimait par nature se montrer bon et munificent, acceptait d'accueillir près de lui son gendre et sa famille, ainsi que les Condé.
Malgré les revers des siens, qui mieux que Clotilde de France pouvait se réjouir de l'arrivée d'un frère adulé, peut-être son préféré ? Elle n'avait rien oublié de ses origines françaises.
Quant aux évènements qui ébranlaient le trône de Louis XVI, son frère aîné, ainsi que l'impopularité de Marie-Antoinette, elle les percevait dans une émotion pessimiste et fataliste, qui correspondait bien à son tempérament nostalgique.

Le comte d'Artois fut reçu officiellement le 14 septembre 1789 au château de Moncalieri, résidence estivale de la Maison de Savoie. En dehors du contexte politique pesant qui précédait cette arrivée, qui pouvait prévoir la réaction et les sentiments de sa soeur Clotilde ?
Le prince Charles-Felix a observé la scène de leurs retrouvailles : "Le Roi le conduisit chez la princesse de Piémont et nous l'y avons suivi. Elle attendait dans son cabinet avec la duchesse d'Aoste et Madame Félicité, parce qu'elle ne se sentait pas la force de soutenir cette entrevue en présence de tout le monde. D'abord qu'elle l'aperçut, elle se jeta à son col et s'écria "Ha ! mon frère !". Ils restèrent tous les deux fort longtemps embrassés et se donnèrent les marques de la plus grande tendresse." tandis que le prince Joseph-Benoit, comte de Maurienne, ajoutait : "Ils s'embrassèrent si serrés qu'ils en devinrent cramoisis." !

Dans la suite des princes de France, nombre de gentilshommes découvrirent cette soeur méconnue de leur souverain. L'un deux, le comte d'Espinchal déclarait que celle que l'on appelait autrefois "Le Gros Madame aurait à peine été reconnue d'aucun de nous, tant elle est changée, vieillie, maigrie. Elle a perdu ses dents et toute apparence de fraîcheur. Elle a cependant aujourd'hui seulement trente ans. Elle n'a point d'enfant. Cela manque à son bonheur car elle est parfaitement heureuse avec son mari qui a pour elle les plus grands égards, sentiment qu'elle a inspiré à toute la Cour. Elle est d'une extrême dévotion et très scrupuleusement attachée à l'étiquette de cette Cour qui n'en est que plus triste."


Après le comte d'Artois, Clotilde retrouvait avec une particulière émotion "son amie intime dès la plus tendre enfance" Louise de Bourbon-Condé, abbesse de Remiremont. Près de vingt ans plus tôt, les deux princesses s'appréciaient déjà beaucoup et la longue parenthèse qui les avait séparées n'altéra en rien leur complicité. Celle qu'on appelait jadis "Hébé" pour la délicatesse de ses charmes accusait alors un singulier changement et se présentait alors comme "une grosse fille, fort grande qu'on dit avoir été fort jolie, mais à cette heure elle ne l'est plus. Elle est fort timide et parle peu." Les deux cousines semblaient nées pour s'entendre et partager une amitié réciproque à toute épreuve et il était public dans tout Turin que la princesse de Condé avait une "conduite, des goûts, une façon de penser et des sentiments entièrement conformes" avec la princesse de Piémont.

Toutefois le ballet des émigrés de marque était bien loin d'être terminé... Le 20 septembre 1789, la famille royale accueillait la comtesse d'Artois visiblement submergée d'émotion de retrouver ses parents après seize ans de séparation : "Elle se précipita comme elle put, n'ayant plus ni jambes, ni voix, dans l'excès de sa joie. Elle embrassait tout le monde, sans les connaitre distinctement."
Princesse à la santé physique et psychologique fragile, elle sollicita les conseils de Clotilde et puisa chez sa belle-soeur la force qui lui manquait dans une confiance sans malice.

Des princes de Bourbon aux suites qui les accompagnaient, une véritable communauté française s'installa dans les Etats de Victor-Amédée III. Beaucoup résidaient à Chambéry comme la princesse de Conti, d'autres demeuraient à Turin.
Néanmoins, la cohabitation avec les émigrés les plus importants se révéla rapidement problématique et sujette à toute sorte d'incidents. Dès le 26 septembre 1789, le prince héritier se plaignait "de la trop grande familiarité du comte d'Artois" tandis que le duc de Genevois reconnaissait "s'être horriblement emporté sur l'impertinence des Français"!.

Bien que codifiée sur les rites et le cérémonial de Versailles, la Cour de Turin représentait un milieu diamétralement opposée par ses moeurs, son langage, ses goûts, ses plaisirs.
La Maison de Savoie supportait mal le ton et les manières du frère de Louis XVI qu'elle considérait comme désinvolte, hautain, "étourdi et insolent." D'ailleurs, la présence de sa maîtresse, la comtesse de Polastron, posa d'insolubles problèmes et le comte d'Espinchal prévenait que "le prince doit user de beaucoup de ménagements. Il se trouve au milieu d'une Cour très sévère sur le chapitre des moeurs. Le séjour de Madame de Polastron ferait un mauvais effet s'il se prolongeait trop longtemps. Tout cela est très embarrassant."

L'entourage du comte d'Artois ne pensait pas s'éterniser à Turin, mais malgré tout Victor-Amédée III s'était montré très généreux envers son gendre en lui assurant une pension, la disposition du palais Cavaglia, des serviteurs, des voitures et des chevaux.
Le prince continuait de mener un train honorable selon son rang malgré le spectre de l'exil. En outre, peu éloigné de la Suisse et du Dauphiné lui permettant de recevoir et de transmettre des renseignements, il prit immédiatement les commandes de la contre-révolution en devenant le chef naturel des émigrés.

En privé, Victor-Amédée III apprécia peu le rôle de son beau-fils, il craignait surtout pour les conséquences que pouvaient susciter ses intrigues politiques entre l'Etat Piémontais et l'Etat Français, la Révolution lui inspirait de la peur.

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 14:18




Dominique Poulin a écrit:

Le comte d'Artois fut reçu officiellement le 14 septembre 1789 au château de Moncalieri, résidence estivale de la Maison de Savoie.

... que voici :

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Message par Invité Lun 10 Mar 2014, 14:29

D'extérieur, ça fait un peu prison.

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 14:39




Dominique Poulin a écrit:
D'ailleurs, la présence de sa maîtresse, la comtesse de Polastron, posa d'insolubles problèmes et le comte d'Espinchal prévenait que "le prince doit user de beaucoup de ménagements. Il se trouve au milieu d'une Cour très sévère sur le chapitre des moeurs. Le séjour de Madame de Polastron ferait un mauvais effet s'il se prolongeait trop longtemps. Tout cela est très embarrassant."





Oh, que oui ! Et d'autant plus que Louise n'est pas arrivée seule, comme un chien dans un jeu de quilles : que non point ! elle est au milieu de toute la petite smala Polignac en exil , plus Vaudreuil, plus l'abbé de Balivière ... ça craint un max !  Smileàè-è\': 
On fait entendre à Mme de Polignac que son séjour en Piémont déplairait si elle voulait le prolonger, et décision est prise pour les fugitifs de pousser jusqu'à Rome .

.
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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 14:41

Cosmo a écrit:D'extérieur, ça fait un peu prison.

Il faut voir, tu sais !  Very Happy  les jardins ... le soleil d'Italie ... La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Minisoleil
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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 14:59

Dominique Poulin a écrit:
Mar 15 Fév 2011 - 17:18



Après une longue absence de ma part, je vous présente la suite du chapitre IV consacré à Madame Clotilde, soeur de Louis XVI, mais il me faudra encore plusieurs jours pour taper tout ça !!! Shocked Shocked Shocked J'espère me faire pardonner avec ces premiers posts.



Suite du Chapitre IV

Quand la France devient l'ennemie 1789-1796




En 1790 les relations de la famille royale de Savoie continuent de se dégrader. Certes, Victor-Amédée III s'efforce de maintenir un semblant de concorde et il affiche publiquement sa tendresse pour ses petits-fils, les ducs d'Angoulême et de Berry qui l'appellent familièrement "Grand Papa". Mais s'il ne déteste pas son gendre, ses manœuvres politiques ne cessent de l'inquiéter. Le prince héritier Charles-Emmanuel joue un rôle équivoque au point que sa famille lui laisse "apercevoir que sa liaison avec cet étranger nous offensait beaucoup;"
Quant à la princesse Clotilde, après des retrouvailles très chaleureuses avec son frère, les chroniques, mémoires et journaux du temps se taisent sur ses sentiments envers ses parents exilés...
Peut-être faut-il voir dans ce silence, la volonté de ne pas se compromettre dans les projets contre-révolutionnaires de son frère qui de plus étaient susceptibles de provoquer des dissensions politiques entre l'État Piémontais et l'État Français.
A l'examen des sources, le seul parent que que la princesse de Piémont côtoie assidument est son amie, Louise de Condé qui "va fréquemment à la Cour autant pour y accompagner ses parents que pour voir Mme la princesse de Piémont". Aussi longtemps qu'elle le pourra, Clotilde soutiendra sa compagne d'enfance dans toutes sortes de services et de recommandations.

Cependant, aux yeux de la plupart des émigrés de marque en contact avec la Cour de Turin, la princesse de Piemont déstabilise les personnes non averties par l'extrême discrétion de sa vie quotidienne.
En dehors du rituel royal et des cérémonies officielles, Clotilde demeure invisible, plongée dans ses appartements dans l'humilité d'une piété rigoureuse. La Cour elle-même semble pétrifiée par le sérieux intransigeant de sa future reine et n'ose pas se démarquer de cette attitude hiératique : "Pour plaire à la princesse de Piémont et à son époux, on fréquente les églises et on remplit avec ostentation les devoirs de la religion. Je crois que si on consultait les goûts de ce pieux ménage, il n'y aurait pas de carnaval en Piémont. "
L'extrême dévotion du couple héritier et la rigueur monastique de sa vie finit par déconcerter la haute société Turinoise entrainant faux-semblants et mensonges dans le domaine des mœurs sévèrement surveillés par la Cour et "le prince et la princesse de Piémont paraissent y veiller."

Ainsi, tous les Français de passage à Turin paraissent déçus et accablés par l'impression de tristesse du couple héritier. Mme Vigée-Lebrun, peintre officiel de Marie-Antoinette alors en émigration, obtint une audience de la princesse dans l'espoir de la peindre "mais qu'ayant entièrement renoncé au monde, elle ne se ferait pas peindre. Ce que je voyais d'elle en effet, me semblait parfaitement d'accord avec ses paroles et ses résolutions ; cette princesse s'était fait couper les cheveux ; elle avait sur la tête un petit bonnet qui de même que toute sa toilette était le plus simple du monde. Sa maigreur me frappa d'autant plus que je l'avais vue très jeune avant son mariage, et qu'alors son embonpoint était si prodigieux, qu'on l'appelait en France appeler Le Gros Madame. Soit qu'une dévotion trop austère, soit que la douleur que lui faisaient éprouver les malheurs de sa famille, eussent causé ce changement, le fait est qu'elle n'était plus reconnaissable."
De l'apparence de son mari, Charles-Emmanuel, l'observation n'est pas plus rassurante : "Ce prince était si pâle, si maigre, que tous deux faisaient peine à voir."

Pourtant, si le couple héritier parait atypique par son style de de vie et la grande parcimonie de ses actes et de ses paroles -la princesse "ne parle qu'à très peu de monde"-, il ne manque assurément pas de discernement, de culture et de bonté.
L'ambassadeur de Russie à la Cour de Sardaigne, le prince Belosel'skyj décrit le prince Charles-Emmanuel comme "un homme plein d'esprit, qui pourrait émettre des opinions utiles et élevées, mais il les expose rarement."
Mais malgré ses réelles qualités, Charles-Emmanuel est à quarante ans un dépressif chronique que la médecine de l'époque est bien sur incapable de soigner et de soulager. Hypersensible, ses nerfs le plongent parfois dans des crises violentes qui le laissent prisonnier de ses accès d'angoisse et de mélancolie. De fait, cette santé psychologique fragile explique peut-être une volonté d'effacement et de discrétion dans sa vie : "on le connaissait peu, son caractère sombre et défiant l'avait tenu dans l'ombre."

La vie de la Cour de Sardaigne s'inspire largement de l'existence dévote et maniaque de sa famille royale ; le charme, la gaieté, la grâce et la spontanéité en sont bannis ! La réunion du cercle de la Cour ne prête pas à rire sous la plume du comte d'Espinchal ! :
"... Mme la princesse de Piémont et les princesses reçoivent le soir les dames. Voici ce qui se passe à ce sujet. Les princesses en grand habit sont assises, ayant derrière elles leurs dames de compagnie et leurs écuyers. Le roi et les princes se tiennent dans la pièce voisine, dont les portes sont ouvertes. On fait entrer toutes les dames. Au bout de quelques minutes, les princesses se lèvent et vont parler à toutes les dames, derrière laquelle se tiennent tous les hommes. Le cercle dure environ une heure. Je ne connais rien de si dignement ennuyeux. Quand on y a été une fois, on en a assez, à moins qu'un attachement pour une belle dame que l'on est bien aise de rencontrer, ne vous y ramène."

Néanmoins, si la Cour de Turin constituait un milieu mortellement maussade, elle n'en représentait pas moins la manne des faveurs et des prébendes, surtout dans le domaine militaire.
Le roi Victor-Amédée III se targuait de posséder une grande armée, ce dont il fut complètement abusé dès les premiers revers en 1792, mais pour l'heure il ne refusait rien aux solliciteurs. L'armée sardo-piémontaise comptait officiellement près de 100 000 hommes, mais dans la réalité elle ne disposait en situation d'affrontement que de 40 000 hommes ! Les soldats de Victor-Amédée III étaient capables de maintenir l'ordre dans les états de leurs souverain, mais pas de soutenir de longues campagnes. Il en fut ainsi en Savoie ou se multipliaient les rassemblements hostiles au contact de la fermentation française ; on renforça la troupe. Mais ce retour à un calme apparent ne trompa personne car après 1790 Turin commença sourdement à s'agiter par la réunion de sociétés secrètes d'inspiration jacobine.

C'est dans ce contexte de crise, qu'apparut les failles de Victor-Amédée III. Certes, son tempérament influençable et son penchant à l'indécision avaient déjà été relevés par les plus avertis, mais son manque de clairvoyance politique se révéla dans cette période critique. Certains notaient que sa propension à la bonté dépassait les limites de ses moyens ; elle était selon l'ambassadeur de Russie accrédité à Turin "dangereuse, voire même néfaste pour un roi" et de plus il ne savait pas réellement distinguer les hommes compétents ou méritants dans son entourage et son administration.
Cette déficience de discernement le desservira jusque dans le domaine de l'armée, sa passion, car "jusqu'à présent, il a été trompé sur l'héroïsme de ses officiers, la science et la valeur de ses généraux."



J'arrête pour aujourd'hui. J'ai encore beaucoup de pages à diffuser, mais j'ai mon manuscrit... A très bientôt !

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 15:25



Dominique Poulin a écrit:
Mer 16 Fév 2011 - 19:58


Suite chapitre IV



Quand la France devient l'ennemie



Avec le durcissement de la Révolution Française, l'émigration des fidèles de l'Ancien Régime redouble. C'est le cas des tantes de Madame Clotilde, Mesdames Adélaïde et Victoire de France. Ces princesses sexagénaires avaient alors choisi Rome comme refuge d'exil, mais auparavant de nombreuses étapes les attendaient en terre italienne.
Victor-Amédée III se fit un devoir d'accueillir les tantes de sa belle-fille le 12 mars 1791. L'arrivée des filles survivantes de Louis XV aviva la curiosité intéressée des Turinois car "un peuple immense et plus d'un millier de carrosses bordaient le chemin des princesses" ! Toutefois, les vicissitudes d'un voyage éprouvant altéraient beaucoup leur bonhommie et leur spontanéité, le duc de Genevois ayant remarqué "qu'elles parlèrent peu et parurent fort embarrassées."

En ce printemps 1791, le comte d'Artois quant à lui prenait définitivement congé de sa belle-famille, ce prince ne disposant plus des moyens politiques qu'il jugeait nécessaires dans ses visées contre-révolutionnaires. Il partait s'installer à Coblence en Allemagne Rhénane, chez son oncle maternel, le prince Clément-Wencesclas de Saxe, Électeur de Trèves.
De fait, sur ces deux événement familiaux, nous ne possédons pas de témoignage direct sur les sentiments de Clotilde. Il est permis de penser que pour les retrouvailles avec ses tantes, la princesse de Piémont manifesta dans l'intimité une émotion, caractéristique de son tempérament.

Par ailleurs, l'année 1791 fut décisive dans la position attentiste du Piémont-Sardaigne envers l'évolution constante de la Révolution Française. Les conséquences de la fuite avortée de Louis XVI et de Marie-Antoinette et de leur arrestation à Varennes convainquirent Victor-Amédée III que la monarchie française était plus que jamais en danger et que de surcroit ses propres États couraient un risque réel de propagation révolutionnaire. Dans le secret feutré des appartements royaux, le Journal du prince Charles-Félix nous renvoie quelques bribes du climat anxieux de la Maison de Savoie : "... Le Roi entra et nous annonça que Louis XVI, Marie-Antoinette avec le dauphin, la petite Madame et Madame Élisabeth avaient été arrêtés et qu'on les reconduisait à Paris... La pauvre princesse de Piémont s'est mise à pleurer et nous avons tous été très affligés de cette triste nouvelle."

Avec Varennes, les relations diplomatiques franco-sardes marquent un tournant. Louis XVI et Marie-Antoinette demeurent en termes cordiaux avec la famille royale de Savoie, mais le gouvernement et l'Assemblée émettent des divergences plus nuancées.
En premier lieu, le roi de Sardaigne a rappelé son ambassadeur en France, le marquis de Cordon, ce qui n'a pas produit un bon effet à Paris. Ces inquiétudes sont fondées, le souverain sarde ayant demandé l'aide militaire de l'Autriche en cas d'invasion de ses états, le risque de conflit généralisé entre la France et les puissances européennes se confirmant en 1792. Dans un premier temps, le cabinet de Vienne ne donnant que des réponses évasives et dilatoires, Victor-Amédée III ne peux compter que sur ses propres forces. Il va les exploiter en mobilisant son armée, ce qui n'échappe pas bien-sûr aux ministres et aux députés à Paris. Le général Dumouriez, ministre de la Guerre, le fait lourdement remarquer à Turin en écrivant que "les rassemblements de troupes qui se font dans le Piémont et le Milanais, le transport d'un gros train d'artillerie en Savoie, sont des circonstances selon lesquelles vous pouvez demander des réponses franches et promptes."

De son coté, Victor-Amédée III confiait ses opinions dans sa correspondance avec le prince Belosel'skij, nouvel ambassadeur de Russie à sa Cour, le ton est donné, il abhorre la Révolution Française ! :
"Vous ne pouvez pas douter de la haine profonde que doivent inspirer à tout être pensant les menées criminelles des scélérats français. Mais vous voyez vous-même que je suis dans la gueule du loup. Je suis contraint de dissimuler jusqu'à ce que notre Cour de concert avec celle de Vienne et de Prusse, les obligent à trembler jusque dans leurs foyers. Ah ! si votre impératrice régnait plus près de nous, un désastre pareil serait-il jamais arrivé ? Croiriez-vous que je suis occupé depuis deux ans, qu'à repousser les traits envenimés de la politique de ces malheureux. Tous les jours, on arrête des émissaires qui sèment l'argent et des lettres incendiaires pour soulever ici le peuple et même l'armée."

En ce printemps 1792, la France commençait à savoir à quoi s'en tenir avec son voisin sardo-piémontais, la Cour de Turin ayant refusé d'accréditer son ambassadeur, Mr Sémonville. Toutefois, de Paris, la menace austro-prussienne paraissait d'autant plus urgente, et pour gagner du temps Victor-Amédée III s'entendait à user de toutes les subtilités diplomatiques.
Pour sa part, le prince héritier Charles-Emmanuel n'opinait pas dans la direction de son père sachant que la France était de loin bien supérieure en hommes et en moyens en blâmant l'augmentation ruineuse des dépenses militaires préconisées par son père. En outre, il était réservé envers les négociations d'alliance avec l'Autriche, insistant sur le fait que dans tous les cas, la Cour de Vienne privilégierait ses propres intérêts en n'hésitant pas au besoin à léser gravement les intérêts piémontais.
Pour la première fois, à quarante ans, le mari de Clotilde avouait son désaccord avec la politique royale, mais son tempérament contemplatif et son manque d'ambition limitèrent la portée de son influence. Par ailleurs, conscient des bouleversements politiques à venir en Europe, face au ferment révolutionnaire, il avait dit à cette époque : "Ceux qui ont envie de régner, n'ont qu'à se dépêcher...". Présageait-il déjà la dureté et l'inanité de son avenir ?

C'est dans ce contexte d'inquiétude générale que la vie de famille de la dynastie de Savoie continuait son cours. Au printemps de 1792, la princesse Marie-Joséphine de Savoie, comtesse de Provence faisait son entrée à Turin, suscitant l'intérêt de ses proches qui ne l'avaient vue depuis des années. Son père, ses frères et sœurs savaient qu'elle n'avait guère été heureuse à Versailles, entre un époux avec qui elle partageait peu de choses et une famille d'adoption où Marie-Antoinette plus brillante et charismatique occupait toute la scène de la Cour de France. Déçue dans la faillite de son mariage, sans influence, la princesse avait sombré peu à peu dans une mélancolie chronique que nous appellerions de nos jours une dépression nerveuse. Elle ne sut pas accommoder ses sentiments personnels et le plaisir d'une situation matérielle exceptionnellement somptueuse en tant qu'épouse de Monsieur, frère de Louis XVI, qui aurait pu lui permettre de jouir un peu de la vie. De complexion nerveuse, comme son frère le prince de Piémont et la comtesse d'Artois, elle avait sombré peu à peu dans un alcoolisme peu reluisant occasionnant "quelques scènes dégoutantes" selon le comte de Mercy-Argenteau. Le scandale avait été général à Versailles affaiblissant encore son peu de crédit.
En 1789, Madame avait été impliquée dans une ténébreuse affaire de mœurs révélant ses penchants pour les femmes. Affaire qui avait même provoqué l'envoi d'une lettre de cachet contre son amie et lectrice Madame de Gourbillon.
Bref, c'était pour le moins une princesse originale, intelligente et vive certes, mais fragilisée dans son corps et dans son psychisme que retrouvait sa famille de sang. La première impression fut favorable pour son frère Charles-Félix : "Elle a beaucoup d'esprit et de fermeté et est de ces personnes faites pour jouer un rôle". Mais libérée de son mari et des contraintes de la Cour de France, elle n'allait pas tarder à provoquer du charivari dans la monotonie compassée de sa famille ! Sa belle-sœur Clotilde qui l'appréciait beaucoup vingt ans plus tôt à Versailles, tentera de jouer un rôle de médiatrice dans les drames de la comtesse de Provence, mais peu habile pour ce rôle et probablement déconcertée par son extrême agitation, elle échouera. On le verra plus loin.

En revanche, la princesse de Piémont rencontra davantage de succès avec la comtesse d'Artois. Installée à Turin dès 1789, elle avait assisté dans la douleur aux départs de son mari et de ses enfants à Coblence. Bonne par nature, mais sans esprit et peu liante, elle vivait depuis longtemps une existence étriquée à travers de graves alertes de santé. Elle était fragile sur tous les points. Toutefois, une grande piété la soutenait, mais le goût de vivre la quittant, elle fit part de se retirer de toute vie publique. Elle était parvenue assez loin dans ce projet pour que son frère Charles-Félix confie : "Elle nous a dit qu'elle avait pris la résolution de ne plus retourner en France quand même les choses se seraient accommodées en France et qu'elle se retirerait dans un couvent."
Curieusement, Clotilde qui menait par bien des égards la vie d'une carmélite, convainquit sa belle-sœur de ne pas entrer en religion, lui démontrant que sa famille la désirait près d'elle et que mère de deux fils, ces derniers étaient trop jeunes pour la voir derrière la clôture.
Mais en religion ou pas, la comtesse d'Artois continua à broyer du noir en confiant un jour à sa dame d'honneur, la duchesse de Lorge : "Je deviens d'une sauvagerie terrible, je suis prête à tomber dans le découragement et l'apathie...".
Pour pessimiste qu'il soit, ce témoignage n'en est pas moins froidement lucide sur sa nature tourmentée !
La comtesse d'Artois aurait-elle été moins sotte qu'on l'a dit ?



La suite et fin du chapitre IV la semaine prochaine.




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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 15:33

Afin de laisser le temps à Dominique de souffler un peu, et pour le plaisir des yeux, voici deux forts beaux échantillons de la faïence de Turin, au XVIIIème ...    Very Happy 


La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Antics11


Zoomons !  :n,,;::::!!!: 

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 16:09

Dominique Poulin a écrit:
Lun 7 Mar - 16:50


Je continue de diffuser la suite du chapitre IV, mais je sais déjà que je n'aurai pas fini avec mon chapitre aujourd'hui...  Shocked . Mais j'avance, j'avance...  Very Happy 


Suite du Chapitre IV


Quand la France devient l'ennemie 1789-1796



C'est à cette époque que parvint à Turin le comte de Provence, gendre de Victor-Amédée III. L'accueil de la Maison de Savoie fut correct, mais sans chaleur marquée, le roi de Piémont-Sardaigne ayant préféré éviter l'hospitalité à un prince aussi politiquement gênant que l'était Monsieur.
Sans doute le roi ne désirait-il pas le retour dans sa capitale d'une coterie d'émigrés comme celle du comte d'Artois quelques années plus tôt. Mais en 1793, la situation des princes émigrés était diamétralement opposée à celle de 1789 : le comte de Provence n'avait plus d'argent, comptait ses soutiens politiques sur les doigts d'une main et ne parvenait pas à imposer son titre fictif de "Régent de France" auprès des souverains de l'Europe.
Même son beau-père refusait de le reconnaitre !

On aurait apprécié connaître l'attitude de la princesse Clotilde à l'égard de son frère car elle avait chaleureusement accueilli le comte d'Artois quatre ans plus tôt, mais pour le comte de Provence la documentation française est muette.
Nonobstant cette lacune, on peut légitimement penser que Madame Clotilde reçut son frère avec les égards filiaux que les liens de famille imposaient à un moment aussi troublé. A travers le comte de Provence aux manières cauteleuses et aux sentiments évanescents, sa sœur Clotilde apparaissait diamétralement différente. Dénuée d'affectation et de tempérament émotif, alors que Monsieur était réputé vaniteux et de nature flegmatique, la princesse de Piémont semblait manquer de jugement et peut-être de finesse d'esprit.
Elle n'avait pu totalement méconnaître la cabale feutrée du comte de Provence pendant le règne de Louis XVI et de plus la voie politique adoptée par Monsieur en 1791-1792 n'avait qu'exacerber davantage les tensions autour de la monarchie française.
Pensait-elle son frère capable d'un égoïsme sans mesure ? Ce n'est pas certain car elle l'appelait "Mon bon, cher et adorable frère" lorsque celui-ci devint en 1795, "Roi de France" en exil sous le nom de Louis XVIII. A Turin, son embonpoint colossal le fit paraitre "gros comme un ballon" et accablé par les crises de goutte, il rendait visite à sa belle-famille en chaise à porteurs. Monsieur ne devait rester que quelques mois à Turin, car dès le mois de mai 1794 il s'installait à Vérone.

Par contre, la femme de Monsieur avait rejoint les siens dès 1792 et la famille royale de Savoie constata rapidement les profonds changements dont la princesse était affectée. Il est probable que la Maison de Savoie connaissait depuis longtemps son goût pour l'ivresse mais la proximité désormais immédiate de la comtesse de Provence lui révéla l'ampleur de ses troubles. Ses colères, ses caprices, ses exigences et ses malaises divers devinrent la fable de la Cour de Turin. Un jour elle est "fort ivre", un autre, elle est "d'humeur noire"... A d'autre moments, elle ignore ostensiblement certaines parentes comme la duchesse d'Aoste ou la princesse Félicité. En somme, de cette famille royale sans talent, mais apparemment unie, elle attire la discorde et la division.
Mais davantage que sa santé "absolument détruite" selon sa sœur la comtesse d'Artois, la présence et l'influence de sa lectrice, Madame de Gourbillon, suscite commentaires oiseux et critiques malveillantes. Il est difficile de déterminer la nature de la relation des deux femmes sans pour autant édulcorer le goût de Marie-Joséphine de Savoie pour son sexe. Cependant, rien ne permet d'affirmer qu'elle eut des liens charnels avec sa lectrice et certaines de ses lettres tendraient à appuyer cette thèse. Car au-delà de la question de mœurs, Marguerite de Gourbillon, femme de tête envahissante, apparaissait comme un mauvais génie, une sorte de Léonora Galigaï, une "maudite saurcière" selon l'expression du duc de Genevois !
La famille royale la rendait responsable à tort des dérèglements de la comtesse de Provence et Clotilde faisait partie des détracteurs de l'amie de sa belle-sœur. Pourtant, il est probable que ni Clotilde, ni aucun proche, ne comprenait grand-chose à la "maladie" de Marie-Joséphine, les troubles psychiques comme tels ne faisaient pas partie de la science médicale. On reconnaissait bien les symptômes de son malaise à travers son "humeur noire" puis de ses crises d'abattement, mais on était bien incapable de faire un diagnostic.

De fait, bien que séparée de Monsieur, Madame n'en était pas moins liée par le mariage. C'est pourquoi, Victor-Amédée III et le couple héritier se concertèrent au milieu des années 1790, pour prévenir le comte de Provence des alarmes que leur occasionnaient le comportement étrange de Marie-Joséphine et sa relation équivoque avec Madame de Gourbillon. La comtesse de Provence à la fin de sa vie disposait d'assez d'éléments à charge pour faire savoir à sa chère amie que sa famille avait joué un rôle dans sa défaveur. La princesse associait sa belle-sœur Clotilde comme responsable de ses malheurs : "... Je vais vous dire le sujet de votre disgrâce. C'est mes parents qui ont fait un crime au Roi (Louis XVIII ex-comte de Provence) de trop de complaisance maritale. J'ai les preuves de ce que je vous dis : j'ai vu les lettres de mon père, de ma sœur la princesse de Piémont et de mon frère aîné."
Toutefois, faute d'autres documents directs sur le jugement de Clotilde envers "le couple" de sa belle-sœur, il serait aléatoire d'avancer d'autres arguments.

Pendant ce temps, de l'autre versant des Alpes, la marche de l'histoire poursuivait inexorablement son cours. La Révolution Française resserrait son étau sur les derniers vestiges de la monarchie et la princesse de Piémont assistait impuissante à la déchéance de son frère Louis XVI avec la prise des Tuileries le 10 août 1792, l'incarcération de la famille royale et la proclamation de la République le 22 septembre 1792. A ce moment, la Maison de Savoie comme toutes les autres dynasties européennes était pendue aux nouvelles d'une part sur la progression des armées austro-prussiennes sur la frontière nord-est de la France et d'autre part sur le sort réservé à Louis XVI et à sa famille.
Sur le premier point, le roi de Piémont-Sardaigne comptait ses maigres chances de succès, surtout pour la défense de ses possessions immédiates avec la France car le monarque s'attendait à un moment ou à un autre à une attaque d'envergure. Le souverain déclarait à l'ambassadeur de Russie :
"Vous voyez que pour le présent, je suis isolé...je ne suis pas assez fort... l'étendue de mes frontières de Genève à Nice est énorme, la Savoie et le comté de Nice sont des pays ouverts... Au surplus, chez nous il y a beaucoup de têtes gagnées par les idées insensées des français. Quant à mes troupes, elles sont dans un état satisfaisant. Je les ai disposées aussi bien que j'ai pu, pour l'avantage des armées Allemandes. Le corps autrichien qu'on m'a envoyé est très faible. Si je lui donne à présent l'ordre de marcher, Montesquiou en l'apprenant ne tarderait pas à faire irruption en Savoie avec sa bande de brigands. J'attends toujours des nouvelles de quelque victoire importante du duc de Brunswick, et provisoirement je reste suspendu comme l'araignée au fil de sa toile."

En second lieu, la position de la famille de Clotilde demeurait tout autant préoccupante et malgré l'absence de témoignage direct pour l'année 1792, on peut être persuadé de l'extrême affliction de la princesse de Piémont face à tant d'événements dramatiques. Mais contrairement aux alarmes, ce ne fut ni Louis XVI, ni Marie-Antoinette, ni les enfants royaux, ni Madame Élisabeth qui furent d'abord touchés dans leurs vies, mais une parente éloignée, la princesse de Lamballe.
Marie-Thérèse de Savoie-Carignan, princesse de Lamballe, appartenait par sa naissance à une branche cadette de la Maison de Savoie, les princes de Carignan, et par son mariage en 1767, à la Maison princière de Bourbon-Penthièvre issue de Louis XIV et de Mme de Montespan. Prématurément veuve, elle était devenue l'amie intime de Marie-Antoinette avant d'être éclipsée par Mme de Polignac.
Sous la Révolution, malgré l'éclatement de la Cour de Versailles et la fièvre anti-aristocratique qui sévissait, elle refusa de quitter Marie-Antoinette. C'est ce qui provoqua sa perte lors de la chute de la monarchie ; elle fut massacrée de façon ignominieuse, la tête fichée au bout d'une pique le 3 septembre 1792. Il est vrai que la princesse de Lamballe dans ce moment crucial cumulait de lourds handicaps : elle était par son mariage, princesse rattachée à la maison de Bourbon, ce qui n'était pas de bon augure. Elle avait surtout été l'amie et la surintendante de la maison d'honneur de Marie-Antoinette ce qui constituait une faute innommable pour certains sans-culottes qui n'avaient pas froid aux yeux pour la tuer. Pour eux, elle devait mourir.

La fin du mois de septembre 1792 sonna le glas des possessions ancestrales de la Maison de Savoie. En peu de jours, et avec une facilité déconcertante, la France républicaine arracha le duché de Savoie et le comté de Nice.
Le 24 septembre 1792, le général piémontais Lazary quittait la place de Chambéry et renonçait au contrôle de la Savoie face aux troupes du général de Montesquiou. En quelques jours, toute la province céda devant l'avance des "Soldats de La Liberté". La retraite et la débandade de Lazary sous la pluie et dans la boue ulcéra Victor-Amédée III au point de mettre le général aux arrêts et de le présenter devant un tribunal militaire. Nice céda aussi rapidement. Le général Anselme franchi le Var dans la seconde moitié de septembre tandis que la flottille de Truguet jettait l'ancre devant le port. La ville ouvrit ses portes le 29 septembre et les forts de Mont-Alban et de Villefranche capitulaient devant la cavalerie française.

Pour une bonne part, ces conquêtes-éclairs du grand voisin français étaient déshonorantes pour la royauté sardo-piémontaise, elles accréditaient la vulnérabilité de l'État et affaiblissaient son prestige auprès du peuple et des autres royautés européennes. Mais à travers cette conjecture, le fruit était mûr depuis longtemps : savoyards et niçois directement limitrophes avec la France s'inspiraient des idéaux de ce pays et la révolution n'avait fait qu'exacerber leurs sentiments avec dans leurs contrées avec le maintien des derniers vestiges de la féodalité comme les dimes.
Dès l'été 1789, des troubles avaient éclaté et beaucoup désiraient se mettre "sur le pied de France".
De surcroit, la rivalité qui les opposait depuis des décennies avec la tutelle de l'administration piémontaise sur leur sol, source de conflits et de rancœurs tenaces, les rejetait dans l'orbite de la France. D'ailleurs, pour bien manifester leur désaffection à Victor-Amédée III, les Chambériens s'étaient empresses d'arborer des cocardes blanches sur la queue de leurs chiens ! A Turin, l'amertume était évidente. Victor-Amédée qui s'était tant félicité de la réforme de son armée réalisait dans la douleur "qu'il avait besoin de troupes, non pas sur le papier, mais en effectif".
Sur cette question, un diplomate présentait ce constat : "... on voyait beaucoup d'états-majors, beaucoup d'officiers, beaucoup de régiments, de bataillons, mais très peu de véritables soldats ; plus d'officiers de la noblesse et de la cour, que de guerriers."



Voila ! je reviendrai pour la suite de mon chapitre ! J'espère en voir le bout... du tunnel !  :n,,;::::!!!: 


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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 16:24




Louis XVI n'avait pas du tout apprécié non plus la Gourbillon de sa belle-soeur  La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 3249736284  :

"De par le Roy, il est ordonné à la dame Gourbillon de se retirer aussitôt après la notification du présent ordre de la ville de Versailles et de se retirer incontinent en celle de Lille en Flandre auprès de son mari, faisant Sa Majesté défense à ladite dame Gourbillon de désemparer de ladite ville de Lille jusqu'à nouvel ordre de sa part à peine de désobéissance. Versailles, 19 février 1789."


La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 14e3pu10
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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 16:42

Dominique Poulin a écrit:
Mar 12 Avr - 17:48



Suite du chapitre IV


Quand la France devient l'ennemie 1789-1796



Les années 1793 et 1794 représentèrent pour Clotilde une période d'indicible douleur et l'imprimèrent à jamais dans une souffrance et une résignation morbide. Elle ne put surmonter vraiment tous les chocs répétés dont son corps et son psychisme furent victimes.
Au travers de la perte de sa famille française et de la lente désintégration de la monarchie sardo-piémontaise, seul le secours de la religion lui donna la force de continuer à vivre et de se tenir debout. Elle apprit le 4 février 1793 l'exécution de son frère Louis XVI et "faisait pitié et montrait une grande vertu" selon son beau-frère Charles-Felix, puis celle de Marie-Antoinette, enfin celle de Madame Elisabeth en mai 1794. Sa soeur cadette incarnait la mémoire de son enfance à Versailles, sa confidente et sa compagne de jeux autant que le miroir de son adoration mutuelle envers Dieu. De fait, déjà profondément éprouvée par la mort du roi et de la reine, la disparition de sa soeur cadette ne pouvait que la dévaster davantage.
La famille royale de Savoie savait combien la princesse de Piémont était attachée par un lien indestructible a sa soeur. Qui lui apprendrait cette traumatisante nouvelle ? Le chef de famille, Victor-Amédée III ? Non. Ce fut finalement l'époux de Clotilde qui se chargea de cette ingrate mission. Le prince héritier Charles-Emmanuel entra dans les appartements de sa femme, un crucifix à la main, puis contemplant Clotilde dans le fond des yeux, il eut le courage de lui dire :" Il faut faire à Dieu un grand sacrifice." La princesse comprit, mais rompue par l'émotion, elle s'évanouit.

De tous les menbres de la famille royale de Savoie, c'est sans aucun Clotilde qui porta le poids de la tragédie lors de ces années noires.
La Cour de Piémont-Sardaigne, déjà recroquevillée sur elle-même depuis bien longtemps, croulait sous la vieillesse attristée de son souverain Victor-Améde III et la neurasthénie du couple héritier. Quelques timides rayons de lumière percèrent parfois cette atmosphère plombée. La duchesse d'Aoste donne des enfants au monde.
A la fin de 1792, une fille, Marie-Béatrice, voit le jour. Un peu plus tard, un héritier, un petit Charles-Emmanuel, donnera l'illusion de la relève des générations, mais il ne passera pas la petite enfance.
Ainsi, sur le plan dynastique, c'est la duchesse d'Aoste qui portait les espoirs. La princesse de Piémont n'avait pas ou pu devenir mère, et bien qu'âgée de 33-34 ans, sa santé brisée avait définitivement fermé cette promesse.
C'est vers cette époque que le duc et la duchesse d'Aoste commencèrent timidement à prendre une importance accrue auprès des courtisans. L'avenir et la résistance de la monarchie piémontaise face aux périls intérieurs et extérieurs semblait reposer sur eux un jour face à un roi dépassé par la situation et par le prince et la princesse de Piémont murés dans leur isolement religieux et mystique.
Non pas que le mari de Clotilde n'ait abdiqué ses droits ! Il participait aux conseils et avait finalement à contre-coeur opté pour la carte de l'Autriche pour sauver son pays menacé d'une invasion française après l'occupation de la Savoie et de Nice. En 1793-1794, le danger paraissait si grand que seul l'Autriche paraissait suffisamment puissante pour protéger le trône de la dynastie, mais d'une part, la chancellerie de Vienne n'avait envoyé qu'à peine plus de 10 0000 hommes, effectif insuffisant pour dissuader les français, et de l'autre Victor-Amédée III avait dû accepter que son armée soit commandée par des généraux autrichiens !
Cette ingérence étrangère ne remporta pas les suffrages : "Les Allemands amis font plus de mal que les Français ennemis" disait-on. Pour conclure cette étroite collaboration, le roi avait signé avec l'Autriche le traité de Valenciennes le 29 mai 1794.

Après la perte de Nice et de la Savoie en 1792, s'ensuivit les années suivantes, un épisode peu connu, "La Guerre des Alpes" qui préfigure la Campagne d'Italie de 1796.
La Maison de Savoie ne s'estimait pas vaincue dans la perte de ses provinces périphériques et elle engagea au cours de l'été 1793 une contre-offensive afin de reconquérir les territoires perdus. Mais bien qu'ayant réinvesti les régions de Tarentaise et de Maurienne, les troupes Piémontaises durent refluer dès septembre devant l'avance du général Kellerman.
Il était clair qu'à moyen ou long terme, la France engagerait le moment voulu une vaste campagne contre la Maion de Savoie en Piémont et contre les autres trônes italiens. De plus, la déclaration officielle de guerre du Piémont-Sardaigne à la France au printemps 1793 qui entrait ainsi dans la coalition anti- française aux cotés de l'Autriche et de l'Angleterre justifiait ce calcul. Il ne restait plus à Victor-Amédée III qu'à fortifier ses forteresses militaires pour préserver ce qui lui restait de ses Etats.

Par ailleurs, à l'exception du prince héritier Charles-Emmanuel, peu porté sur les armes et à la santé vacillante, les princes de Savoie ne restaient pas inactifs. Les ducs d'Aoste et de Montferrat commandèrent des unités dans les Alpes, tandis que le duc de Chablais stationnait sur les hauteurs de Nice.
Pour l'époux de Clotilde, ce retrait de la scène militaire dans un contexte de crise, ne pouvait que le desservir, ce que les autres princes, en particulier son frère cadet, le duc d'Aoste ne manquerait pas d'exploiter en cas d'opportunité politique. Nous y reviendrons.

Face au péril extérieur des armées françaises, la monarchie sardo-piémontaise était confrontée au péril intérieur révolutionnaire de l'agitation jacobine. Ce mouvement alors peu étendu jusqu'en 1792, avait pris de l'importance surtout à Turin et dans des villes secondaires comme Alba ou Alexandrie. Mais de fait, l'émergence de ces clubs et sociétés secrètes aux tendances diverses, ne disposaient pas de ligne politique cohérente, en raison de leur clandestinité et de leur éclatement.
Ces faiblesses profitèrent au gouvernement central, en étendant la surveillance et la délation à la moindre susceptibilité d'activité jacobine... L'armée et la police répriment durement les promoteurs de la Révolution Française quand le trône de la dynastie de Savoie est en jeu. Plusieurs conspirations contre la monarchie échouent, des dirigeants révolutionnaires comme Francesco Junot et Giovanni Chantel sont pendus en 1794 et la répression disperse les clubs patriotiques découverts.

Les rumeurs de conjurations contre la Maison de Savoie parviennent rapidement à Naples ou la reine Marie-Caroline confiait au marquis de Gallo, attaché à Vienne : "Les lettres surprises à Turin ont fait découvrir une trahison infâme contre la vie et la sécurité du roi et de la famille royale. On a emprisonné un assez grand nombre de gens ; d'autres ont pu s'enfuir. On a trouvé deux pistolets chargés sur un garde du corps en faction à la porte du roi."

Mais comme dans toute l'Italie, de Turin à Milan, de Parme à Rome, de Florence à Naples, les lieux de réunion renaissent, s'organisent, commentent les évènements de France. La Révolution Française étend la toile de ses idées sur une grande partie de l'Europe et les monarques viscéralement attachés à l'Ancien Régime comme Victor-Amédée III, Charles IV en Espagne ou Ferdinand IV à Naples qui ne comprennent pas cette nouvelle donne le paieront au prix d'humiliants traités et certains d'entre eux y perdront leurs couronnes ou leurs possessions continentales.

En France, avec la chute de Robespierre le 9 Thermidor et la fin de la Terreur, une page de l'histoire politique de la Révolution s'achevait. La Convention Nationale, épurée de ses organes les plus extrémistes décida de traiter avec certains Etats monarchiques dans le but de les séparer de leurs alliances avec l'Autriche et l'Angleterre qui représentaient alors les ennemis les plus puissants de la République Française. "La diplomatie à coups de canon" selon l'expression du ministre Merlin de Douai n'était plus la règle priviligiée.

Après la Toscane en février 1795 puis la Prusse en avril, l'Espagne signa la Paix de Bâle le 22 juillet. L'article XV du traité de Bâle stipulait que la République acceptait la médiation du roi d'Espagne en faveur du roi de Sardaigne et des souverains et Etats italiens pour le rétablissement de la paix entre la France et chacun de ces princes et Etats. Dans cette optique, il est possible que le roi Charles IV d'Espagne ait ouvert des pourparlers avec Victor-Amédée III, les deux monarques étaient d'ailleurs beaux-frères.
Pourtant en 1795, la partie était loin d'être gagnée pour que le royaume sardo-piémontais cesse sa position hostile envers la France ! Le roi de Sardaigne n'avait pas de mots assez durs pour tous ceux qui de près ou de loin avaient pactisé avec le régime révolutionnaire, les égratignant au passage de "scélérats" et de "brigands"...

En outre, au même moment, l'animosité du souverain ne fit que se renforcer avec au nom de la France, la spoliation d'une partie de ses biens. En effet, en raison du coût de la guerre, les finances de la monarchie sardo-piémontaise étaient sérieusement obérées, et la perte de la Savoie, de Nice et la multiplication des désordres intérieurs au Piémont et en Sardaigne avaient diminué d'autant les recettes fiscales de l'Etat.
Afin de parer cette plaie financière, Victor-Amédée III se décida à emprunter en Hollande en juin 1794 auprès de la maison Renouard. Les agents du roi de Sardaigne obtinrent 760 000 florins tandis que le monarque remettait en garantie pour plus d'un million de joyaux qui furent déposés à la banque centrale d'Amsterdam. Ces bijoux étaient répartis dans six boites dans un amoncellement de diamants, de perles, de saphirs, de rubis et d'émeraudes, montés en colliers, aigrettes, boucles d'oreilles, bracelets, chaines, agrafes, croix, boucles de ceinture...
Victor-Amédée III et ses descendants ne reverront jamais ces trésors qui constituaient vraisemblablement une part de leur fortune patrimoiniale.

Moins d'un an plus tard, la France envahissait la Hollande et ne tarda pas à découvrir l'existence de cette manne. La République Française manquait elle aussi cruellement d'argent et ne s'embarrassait pas de scrupules pour s'en procurer ! Le 11 mai 1795, les représentants du peuple proclamèrent que "tous les objets appartenant aux gouvernements ennemis de la France se trouvant dans les Provinces-Unies étaient acquis à la République...".
Acheminés et expertisés à Paris, les trésors de la Maison de Savoie furent alors vendus à Constantinople qui représentait une grande plaque tournante sur le marché des gemmes.

Mais malgré la grande prévention du roi de Piémont-Sardaigne envers le régime républicain, de secrètes et tortueuses négociations furent nouées entre les deux belligérants. Toutefois, les intérêts particuliers de chacun étaient tout différents et la base d'une entente réciproque digne d'un Machiavel !
D'une part la France avait pour objectif d'abaisser la Maison d'Autriche en Italie par la prise du Milanais, puis dans un second temps, par la destruction du Saint-Siège à Rome. Dans l'optique du premier but, elle ne désepérait pas de gagner Turin à sa cause afin de s'allier avec elle dans un front offensif commun. En retour, en cas de victoire, Paris proposait à Victor-Amédée III, l'offre de la Lombardie, territoire enlevé aux Autrichiens, ou bien la Ligurie qui donnerait au Piémont un débouché sur la mer.
Ce point, il est vrai, correspondait à l'ambition angulaire de la Maison de Savoie qui souhaitait depuis longtemps s'emparer de l'Etat milano-lombard afin de s'implanter plus avant en Italie.
De part et d'autre, les négociations se déroulèrent en terrain neutre. L'une d'elle fut traitée entre Barthélemey, ambassadeur de France en Suisse et le marquis de San Fermo, ambassadeur de Sardaigne à Venise. La proposition de la légation française de Bâle à San Fermo reposait à première vue sur des sables mouvants !! :
"Le gouvernement sarde devrait s'allier secrètement à la France et tout en paraissant l'allié de l'Autriche, agir en dessous-main et travailler traitreutesement à livrer à la France les places occupées par les Autrichiens. Les places une fois reprises, le roi se rangerat ouvertement du coté des Français, ferait avec eux la guerre et recevrait une récompense."
Afin de se rendre crédible, la diplomatie française lissait ses arguments dans le but inavoué de flatter le cabinet piémontais : "Il faut chasser pour toujours les Autrichiens de l'Italie. Votre sureté à enir en dépend. La France veut vous délivrer pour toujours du joug autrichien. Notre dessein invariable est de faire votre souverain roi de Lombardie."
Turin n'accepta pas le marché.
Entre les deux parties, la méfiance, la duplicité et le manque de clarté politique achoppèrent devant trop de difficultés. Pour la Maison de Savoie, un retournement complet des alliances s'avérait extrêmement risqué si les choses tournaient mal.
En cas de trahison avérée, Vienne n'aurait pas hésité à causer le plus grand tort à Victor-Amédée III en démembrant ce qui restait de ses Etats. De surcroit, d'un point de vue moral, un rapprochement politique avec la France républicaine présentait des anomalies irréconciliables : comment Victor-Amédee III aurait-il pu s'allier avec Paris alors que trois de ses enfants étaient mariés avec des Bourbons ? de quels fondements le souverain pouvait-il user avec sa belle-fille devant une question ou les qualités de coeur et l'honnêteté n'avaient rien à faire ?
Clotilde, princesse de Piémont et épouse de de l'héritier du trône ne pouvait fondamentalement pas en 1795 souscrire à une telle orientation de sa famille d'adoption, alors que ses proches avaient subis tant d'avanies avant d'être exécutés. Certes, il ne semble pas qu'elle n'ait jamais eue une tête politique solide, mais son amour propre et sa dignité à travers une telle éventualité, auraient été éclaboussés et meurtris au point qu'elle aurait été en droit de quitter la Cour de Turin. Mais le roi et le prince héritier Charles-Emmanuel l'aimaient et la respectaient trop pour lui infliger un tel affront sachant d'ailleurs tant elle souffrait à cette époque.
Si Victor-Amédée III consentit à ouvrir des discussions avec les "brigands", il ne le fit que du bout des lèvres et il apparait à tout point de vue que cette initiative relevait davantage de son cabinet. Les ministres du roi dépendaient de la seule politique, mais le chef de la famille royale avait le devoir sacré de maintenir la cohésion dans la famille, contre quoi d'inextricables problèmes seraient survenus avec deux gendres, chefs naturels de la Contre-Révolution en France. Quelques années plus tard, Joseph de Maistre, ambasadeur de Sardaigne à Saint-Petersbourg, confiait sur cette affaire : "Si nous avions voulu nous allier avec les français, V.M serait dans ce moment roi d'Italie ; mais une alliance avec les hommes qui commandaient alors aurait été trop immorale, trop dangereuse...".

Au début de 1796, la France et le royaume de Piémont-Sardaigne activent leurs préparatifs de guerre ; elle est inévitable, Turin ayant finalement décliné toutes les propositions d'alliance de Paris. Le 2 mars, le Directoire nomme Bonaparte, Commandant en Chef de l'Armée d'Italie. Les principes de droiture et de loyauté de Victor-Amédée III ont eu raison de son cabinet, notamment du comte d'Hauteville, son ministre des Affaires Etrangères qui inclinait pour un rapprochement avec la France du Directoire. Le ministre déclarait au marquis Gherardini, ambassadeur d'Autriche à Turin que "Sa Majesté au comble de l'indignation m'a ordonné de répondre qu'elle s'ensevélirait plutôt sous les ruines de son pays que d'écouter des propositions contraires à son honneur et à sa religion...".
Devant l'annonce d'une invasion prochaine, le roi restait cependant confiant en disant à l'ambassadeur d'Angleterre Trévor que les soldats Français qui se rassemblaient sur la Riviera étaient trop peu nombreux et mal équipés pour en avoir peur. Pourtant Trévor pensait que le Piémont était perdu sans une aide énergique de l'Autriche qui se dérobait dans les ordres du plan de campagne à venir.
L'Autriche avait relativement peu foi envers la politique de Turin. L'alliance du 29 mai 1794 entre L'Empereur et le roi de Piémont-Sardaigne était sur le fond dénuée de confiance réciproque, la chancellerie de Vienne n'ayant pas hésité à envisager avec toute la morgue hautaine dont elle était capable "d'abandonner la Sardaigne à la générosité de la Cour de Vienne pour ses menus plaisirs et pour servir de leçon aux petits souverains qui tranchent du grand seigneur et veulent se méler de ce qui ne les regarde point" !!!.
Bref, alors que le général Bonaparte arrivait à Nice le 26 mars 1796 et s'apprêtait à entrer en campagne, la situation paraissait bien contrastée pour le royaume sardo-piémontais et l'avenir de sa dynastie incertain. Mais néanmoins, rien ne prédestinait le génie tactique et stratégique du futur empereur ; Bonaparte surprit tout le monde comme une tornade, le Directoire, et l'Autriche, et tous les monarques qui régnaient sur la botte italienne. L'une des premières instructions du Directoire au général en Chef de l'armée d'Italie précisait de "séparer les Autrichiens des Piémontais, de déterminer le roi de Sardaigne à faire la paix avec la France et d'attaquer le Milanais avec vigueur.
Le général en chef cherchera par tous les moyens en son pouvoir à animer les mécontents du Piémont et à les faire éclater contre la Cour de Turin d'une manière générale ou partielle." L'optimisme de façade de Victor-Amédée III paraissait bien compromis face à tant de facteurs déstabilisants pour l'avenir de la monarchie.



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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 17:46




Dominique Poulin a écrit:
Mer 13 Avr - 17:32


Suite et Fin du Chapitre IV



Quand la France devient l'ennemie 1789-1796



Au tournant de ce moment crucial pour la Maison de Savoie, que le lecteur me pardonne cette longue digression sachant que la princesse Clotilde de France n'est plus apparue depuis un certain temps.
Après la mort de sa soeur Madame Elisabeth en mai 1794, aucun témoignage aucune source quelconque, aucun détail ne transparaît de sa vie et cela pendant au moins une période de deux ans. Il est absolument certain que les deuils répétés de Louis XVI, de Marie-Antoinette et de sa soeur bien-aimée l'ont dévastée et traumatisée au plus profond d'elle-même.
Déjà à l'annonce de l'exécution de son frère ainé en janvier 1793, le prince Charles-Félix de Savoie, duc de Genevois écrivait : "En allant chez le roi, nous avons su que la triste nouvelle de la mort du roi de France se confirmait de toute part. Après la messe du roi, nous sommes montés tous chez la princesse, laquelle était au lit. Ele pleurait beaucoup, mais elle était d'une force et dune vertu dont on ne se fait pas idée."

Il est probable qu'elle se retira encore davantage de la vie publique pour vivre son deuil. Bien heureux en dehors de sa belle-famille et de ses serviteurs les plus immédiats, pouvait se targuer d'avoir entrevue celle qui se nommait "La Servante de Dieu".
Il existe un buste de Clotilde ciselé en 1794 par Felice Festa et il est terrible !
A trente-cinq ans, la princesse de Piémont présentait un visage fermé, sans expression, comme comprimée dans une douleur sourde et douloureuse. Toutefois sa réputation d'extrême maigreur attestée en 1789 par d'Espinchal et en 1791 par Mme Vigée-Lebrun ne semble pas totalement corroborée avec ce buste de 1794. Certes, le visage et le cou ont fondu de l'amas de graisse qui faisait la particularité de celle qu'on appelait autrefois "Le Gros Madame". Si les contours se distinguent, les traits semblent encore forts et le menton un peu lourd. Ses cheveux qui représentaient vingt ans plus tôt sa plus belle couronne ont été coupés courts, peut-être jusqu'à la nuque, et seul quelques mèches dissimulent les oreilles. Clotilde porte le bonnet sans prétention qu'avait décrit Mme Vigée-Lebrun et son fichu est rabattu très haut sur la poitrine. On ne s'étonnera pas à travers ses douleurs et son extrême pitié de ne voir dans ce buste aucune coquetterie, aucun rappel de sa naissance et de son avenir proche de reine de Piémont-Sardaigne.

Car le poids des années pèse désormais sur les épaules de Victor-Amédée III.
A près de soixante-dix ans en 1796, sa santé vacillante et la cristallisation des soucis politiques des dernières années ont assombri sa vieillesse. Un Français émigré remarquait qu"il avait l'air cassé et beaucoup plus vieux qu'il ne l'est en effet. Quand il est en uniforme et à cheval, il a un faux air du roi de Prusse."
En avril 1794, la reine Marie-Caroline de Naples apprenait qu'il "avait été très mal" évoquant même la possibilité de sa mort prochaine.

L'heure de coiffer la couronne multicentenaire de la Maison de Savoie se rapprochait inéluctablement pour le prince héritier Charles-Emmanuel et son épouse Clotilde. Les conditions de cette accession au trône s'annonçaient hérissées de difficultés avec le spectre d'une République Française belliqueuse pour la survie de la monarchie sardo-piémontaise et l'extension par contre-coup d'un courant révolutionnaire jacobin qui fomentait des complots contre la monarchie.
Le futur roi Charles-Emmanuel IV n'était point sot, loin s'en fallait, et à quarante-cinq ans c'était un homme fait qui pouvait inspirer l'expérience des affaires et le respect. Avisé et prudent dans ses opinions et ses paroles, son intellect et son discernement paraissent assez sûrs.
Le prince de Piémont avait désapprouvé quoique discrètement l'apparat dispendieux dont son père avait voulu s'entourer pour ne faire figure de souverain pauvre, et il n'avait pas cautionné davantage les dépenses disproportionnées que Victor-Amédée III octroyait dans son armée.
Charles-Emmanuel possédait un naturel doux et bon, sans aucune pointe de bellicisme. Il ne semble pas d'ailleurs avoir participé à la tentative de reconquête de la Savoie en 1793 comme l'avait fait son frère cadet, le duc d'Aoste. Il en sera de même lors de la Campagne d'Italie en 1796 ; il n'avait rien d'un militaire.
En revanche, le revers de son caractère et de son tempérament, les aléas de son équilibre psychique problématique, la nature même de sa vie privée monastique ne correspondaient pas à un prince appelé à régner à une période aussi troublée en Europe à l'extrême fin du XVIIIe siècle.

Il existe sur l'époux de Clotilde, un document très intéressant conservé aux Archives Nationales de France. Il s'agit d'un rapport d'un agent de renseignement, le citoyen Desportes en 1795 :
"Le prince de Piémont, doué d'un jugement sain et profond, annonce toute la sagesse, toute la mesure qui manquent à Victor-Amédée. Juste et bienfaisant, il a blâmé souvent en secret les opérations désastreuses de l'administration de son père. L'amour du peuple qu'il va commander l'appelle depuis longtemps au trône : objet de toutes les espérances, de tous les voeux de la nation. Un espoir si flatteur ne serait pas trompé peut-être si Charles-Emmanuel, moins paresseux et moins dévot, pouvait triompher de cette inactivité à laquelle ses préjugés religieux semblent le condamner, mais dont la véritable source est plutôt dans la faiblesse extrême de sa vue, qui lui permet à peine de se livrer aux moindres travaux de cabinet."
Enfin, Desportes termine son rapport en écrivant que "né populaire et bon, s'il n'était pas fils de roi, il aimerait la République" !.

La conclusion de cet émissaire n'est pas convaincante. Si le prince de Piémont ne validait ni les politiques trop louvoyantes de l'Autriche et de l'Angleterre envers son pays menacé par la France, il ne souscrivait pas davantage à celle de la France même après la chute du régime de Robespierre un an plus tôt. Il est vraisemblable que ce prince ne voulut pas entrer directement en conflit avec son père sur un certain nombre de décisions diplomatiques qu'il n'approuvait pas et qui furent prises par le cabinet piémontais entre 1792 et 1796, en particulier les traités signés avec l'Autriche et l'Angleterre.
La placidité apparente de Charles-Emmanuel de Savoie a pu tromper certains diplomates qui pensaient que sa bonté et sa discrétion farouche pouvaient le rendre malléable et conciliant à volonté. Ce dont ils se trompaient ! Pour le reste, dans le privé, le prince héritier souffrait beaucoup avec de sévères accès de mélancolie qui le rendaient peu apte au gouvernement, et une maladie d'origine nerveuse qui lui donnait des convulsions pendant des heures. Certains pensaient à l'époque qu'il était atteint d'épilepsie.

Dans ces conditions, il n'est pas douteux qu'un prince aussi maladif ait cultivé beaucoup le moment où il monterait un jour sur le trône. Le marquis Costa de Beauregard décrivait ainsi le triste état de sa situation personnelle : "Charles-Emmanuel IV n'eut pas jour d'illusion ou d'espérance. Ii était d'ailleurs souffrant dès son enfance d'une maladie nerveuse qui avait imprimé à tout son être une mélancolie inguérissable. Sans cesse hanté par les visions les plus funestes, il se comparait à son beau-frère Louis XVI et se disait condamné à une fin aussi tragique que la sienne. Rien n'était plus douloureux comme l'abattement dans lequel se trainait ce malheureux prince. Sa femme seule avait assez d'empire sur lui pour lui rendre quelque énergie."

Pour sa part, la future reine Clotilde possédait-elle assez de discernement politique pour influer sur les hommes et les événements à l'instar de la reine Marie-Caroline à Naples ? Cela parait peu plausible tant elle était détachée des réalités terrestres et immédiates du monde.
La famille royale sous la plume de son beau-frère, le prince Charles-Felix de Savoie écrivait crûment qu'elle était " sotte comme un pot ", sans connaissance, sans expérience. De même sa belle-soeur, la duchesse d'Aoste confiait que "la pauvre reine avait fort peu de connaissances du monde, avait sans doute de bien bonnes intentions ; mais son ignorance lui faisait faire bien du mal pour elle et pour les autres, et je ne crois pas que le roi fera plus de fautes que de son vivant."

Il restait bien sur les hommes d'Etat piémontais qui gravitaient autour du trône, des administrateurs zélés et compétents, d'habiles diplomates qui donnaient toujours du fil à retordre à leurs homologues étrangers.
Un comte d'Hauteville, un marquis de Priocca, un chevalier de Balbo, faisaient honneur à la monarchie sardo-piémontaise et le comte de Vaudreuil ne manquait pas d'avertir le comte d'Artois que "la Cour de Turin est très politique, les ministres en sont fins et habiles."

A l'épreuve de ce fatidique printemps 1796 qui allait plonger la Maison de Savoie dans l'engrenage du cyclone français, celle qui pensait "avoir eu le bonheur de porter la croix" pour "passer un jour dans ce beau paradis", s'acheminait désormais vers la couronne. Mais cette couronne que la diplomatie de Versailles lui avait destinée un quart de siècle plus tôt s'avérait un fardeau dans un contexte entièrement bouleversé.




A Suivre le Chapitre V : "C'est une Couronne d'épines que le ciel m'envoie" 1796-1798.


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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 17:55

Dominique Poulin a écrit:

Il existe un buste de Clotilde ciselé en 1794 par Felice Festa et il est terrible !
A trente-cinq ans, la princesse de Piémont présentait un visage fermé, sans expression ...

Le voici  boudoi32   :

La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Palazz10



Eh bien, moi qui voudrais illustrer le sujet pour l'égayer un peu, c'est raté .
Vous avez tout à fait raison, cher Dominique, ce buste est sinistre, comme était abominablement sinistre ce couple royal ... ( sinistre, mais bien assorti )

Ce que la religion peut faire de dégâts !!!  Smileàè-è\': 
C'est monstrueux !

La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Index20
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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 18:07



Princesse de Chimay a écrit:

Merci mon cher Dominique de nous faire partager votre travail. Je le lirais plus tard à tête reposée mais dîtes-moi , la parution de votre ouvrage est prévue pour quelle date ?  Very Happy 


Dominique Poulin a écrit:
Excellente question Princesse de Chimay ! La diffusion de cette biographie sur le Boudoir n'est pas destinée à l'édition, du moins pour le moment ! Vous direz peut-être que je suis dur, mais j'ai trouvé relativement peu de renseignements sur Madame Clotilde après son départ de Versailles en 1775 et je trouve que mon personnage manque d'épaisseur ; je me suis surtout intéressé à sa vie de princesse et de femme au détriment de sa vie de "carmélite", c'est un parti pris, car les austérités religieuses m'ennuie. De toute manière, je continuerai à travailler sur le personnage, je n'ai pas exploré toute la documentation beaucoup plus riche en Italie. A partir de ces nouvelles recherches et d'une refonte de mon travail, oui pourquoi pas, le projet me séduit. Encore faut-il qu'un éditeur accepte mon ouvrage, ce qui n'est pas évident du fait que je ne suis pas bardé de titres universitaires. On verra, mais cela demeure possible.
Par contre, je travaille sur un autre personnage du XVIIIe siècle dont le manuscrit est destiné à l'édition, mais je n'en dis pas plus. C'est chasse gardée.
Enchanté Madame, d'avoir échangé ce petit mot.  smiley12 



Fleurdelys a écrit:
En cherchant un livre sur Madame Royale j`ai trouver un rare livre sur Madame Clotilde
http://www.abebooks.fr/servlet/BookDetailsPL?bi=8081763929&searchurl=bsi%3D180%26kn%3Dmadame%2Broyale%26sortby%3D3%26x%3D78%26y%3D6
Fleurdelys


Marie-Antoinette a écrit:
Mer 25 Juil 2012 - 13:40


J'ai acheté il y a quelques temps un ouvrage XIX° sur MADAME CLOTHILDE qui dort actuellement dans la bibliothèque, non lu.
je vais le regarder plus sérieusement, mais je crois que cette biographie n'est pas orientée religieuse !!!!

Je reviens demain avec les références exactes.  :La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 2028181902 
MARIE ANTOINETTE



Marie-Antoinette a écrit:
Ven 27 Juil 2012 - 14:23


Le livre acheté sur MADAME CLOTHILDE est le même que proposé par FLEUR DE LYS !!!!biographie très orientée religion !!!!! dans la même édition joliment reliée de 1823 !!!! le prix est le même que mon achat !!!!

Je vais le lire un jour prochain, mais j'ai d'autres fers au feu dans les prochains jours !!!

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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 18:20




Dominique Poulin a écrit:
Mar 31 Juil 2012 - 11:06



Eh bien voila Dominique Poulin est de retour !!! J'ai terminé ma biographie sur Madame Clotilde, ce qui signifie que j'ai encore deux chapitres à diffuser sur le forum : encore de très longues heures de frappe à venir.

J'ai montré mon travail et mes dossiers à quelques amis qui m'ont dit qu'il était dommage que je n'envoie pas tout cela à des éditeurs. Pour me convaincre, ils m'ont dit que je n'avais pas à rougir de quoi que ce soit face à l'avalanche de "livres-poubelles" qui sortent régulièrement de nos jours et que secondement mes recherches étaient d'une toute autre portée. Soit, soit. Mais ceci dit, si je parviens un jour à publier quelque chose, Madame Clotilde ne représente pas la priorité.

Enfin, j'ai terminé aussi le fameux article sur la comtesse d'Artois et le scandale qui l'a éclaboussée en 1783. D'ailleurs, le terme "article" est il me semble un peu léger, car je n'ai consacré pas moins une trentaine de pages sur cet épisode peu connu. Encore d'autres heures de frappe pour vous en perspective !!!

Je vous retrouve pour de bon cette fois-ci ! Et de fait j'espère participer plus activement au forum et à ses participants si charmants.  Very Happy 


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Message par Mme de Sabran Lun 10 Mar 2014, 18:38

Eh bien, mon cher Dominique,  La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" - Page 3 Rftgyh10
sur cet élan d'enthousiasme de votre part s'achève mon bouturage !
Encore un grand merci, et encore plus grand bravo pour votre travail !!! :n,,;::::!!!: 

.
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