La correspondance de Marie-Antoinette et Fersen : lettres, lettres chiffrées et mots raturés

Merci, cher Févicq .

Voici la transcription :

M. de Narbonne a eu une idée folle, que je croyais tombée, d'engager le duc de Brunswick à venir commander l'armée. Cette idée est si fort hors de sens que j'ai cru qu'on n'en parlerait plus. Hier, j'ai appris qu'on allait envoyer le petit Custine pour traiter cette affaire . Le comte de Ségur pourrait bien être chargé d'en parler aussi, sans que nous le sachions. Je vous préviens de tout cela, pour n'être pas grondée, et que le baron et vous puissiez prendre vos précautions. Je ne doute pas que le duc refuse, et c'est même nous servir. Adieu. Je n'ai point encore le paquet de M. Crawford .

.

Merci chère Eléonore d'avoir retranscrit cette lettre en clair, c'est très aimable à vous...
Je trouve très touchant que, dans cette lettre, la Reine ait peur de "se faire gronder"...

Je vous remercie .  
J'espérais bien que quelqu'un relèverait ces mots charmants !  

Imagine-t-on, je vous le demande, une Reine de France écrire à un simple quidam :  Je vous préviens de tout cela, pour n'être pas grondée ...   ???

Oui, elle a peur qu'"on" lui reproche de n'avoir pas dit à temps qu' elle s'oppose (en accord avec le Roi?) à ce que Brunswick prenne la tête d'une action armée, ce qui se fera néanmoins quelques mois plus tard (cf le Manifeste) à l'initiative de Fersen, avec, alors, l'assentiment de la Reine...
Mais de qui, pour le moment, craint-elle les reproches? De Fersen, sans doute, mais aussi du Baron, c'est à dire de Breteuil, figure paternelle admirée et redoutée...

Breteuil ne se permettrait pas .

Breteuil devait tout de même avoir un caractère assez difficile quand on voit la réaction de madame de Polignac à son égard.

Sans doute, mais Je vous préviens, pour ne pas être grondée, signifie Je vous préviens pour que vous ne me grondiez pas .

Mme de Sabran a écrit:Sans doute, mais Je vous préviens, pour ne pas être grondée, signifie Je vous préviens pour que vous ne me grondiez pas .

Toutefois, elle savait très bien que le plus aimé des hommes n'allait jamais la gronder boudoi30

Comte d'Hézècques a écrit: le plus aimé des hommes

... et le plus aimant .

La passion amoureuse n'exclut pas, que je sache, la rivalité, le reproche, l'agressivité, même s' il agit du (de la) "plus aimé(e), plus aimant(e)"...
Il y a de l'amour entre ces deux êtres, Marie Antoinette et Fersen, donc...du conflit !
Essayons un instant de désacraliser un peu la Reine, et d'en faire simplement une femme (c'est, à mon sens, le meilleur hommage qu'on puisse lui rendre):
Je dis que Fersen, bravant tous les dangers, vient à Paris le 13 février pour lui "remonter les bretelles", lui reprochant à la fois sa politique confuse à l'égard de l'Autriche et sa relation avec Barnave. Que cette confrontation se soit conclue par un dialogue amoureux (ce que, bien sûr, nous leur souhaitons), n'est pas incompatible...
Je dis aussi, et la lettre présentée en est une preuve, que la Reine a pour habitude de réagir, quand elle est prise en défaut, comme une petite fille coupable: elle a dû faire tant d'effort, à la Cour pour se montrer conforme à ce qu'on attendait d'elle...
Je dis enfin que Breteuil,vu son âge, la confiance que lui accordait le Roi et son histoire avec l'Autriche de Marie Thérèse, devait beaucoup l'impressionner, ce qui expliquerait qu' elle n'ait pas voulu le décevoir...

J'aime beaucoup cette analyse des sentiments réaliste, et très vraisemblable au vu de l'estime que Marie-Antoinette portait à chacune des personnes dont il est question ici ! :\\\\\\\\:

Bien à vous.

Nous avons déjà vu Marie-Antoinette, beaucoup plus jeune, dans l'attitude penaude de la petite fille qui se fait morigéner .
Mercy et Vermond se sont plusieurs fois permis cette liberté de ton avec elle.
Breteuil, pas à ma connaissance, mais elle pouvait le redouter peut-être ?

Vicq d Azir a écrit:
Il y a de l'amour entre ces deux êtres, Marie Antoinette et Fersen, donc...du conflit !
Essayons un instant de désacraliser un peu la Reine, et d'en faire simplement une femme (c'est, à mon sens, le meilleur hommage qu'on puisse lui rendre):...

D'accord, entièrement d'accord avec vous !
La sacralisation de la Reine est une pétrification glaciale absurde, un déni de sa réalité de femme .  

Vous dites amour, et nous devons en croire le médecin, spécialiste de l'âme, que vous êtes .    
Le conflit, que vous évoquez à juste titre, prend  des proportions terribles quand Fersen jalouse Barnave .

.

Tout a fait juste, ma chère Eléonore.
Fersen ne devait pas être si facile que ça...Peut être cela impressionnait-il la Reine? Peut être aussi cela n'était-il pas pour lui déplaire: qu'on lui résiste, qu'on la "gronde", elle qui,de par son rang, n'était accoutumée qu'à des postures de soumission (au moins de façade...) ou d'adulation ...

Oui, nous savons combien elle aspirait à vivre en particulière et à se sentir telle

La baronne d'Oberkirch rapporte l'avoir entendue dire, chez Mme de Polignac :  
"Ici je ne suis pas la reine, je suis moi"

Vicq d Azir a écrit:
La passion amoureuse n'exclut pas, que je sache, la rivalité, le reproche, l'agressivité, même s' il agit du (de la) "plus aimé(e), plus aimant(e)"...
Il y a de l'amour entre ces deux êtres, Marie Antoinette et Fersen, donc...du conflit !
Essayons un instant de désacraliser un peu la Reine, et d'en faire simplement une femme (c'est, à mon sens, le meilleur hommage qu'on puisse lui rendre):
.

:\\\\\\\\:
Voilà ce que je m'efforce de faire aussi, je suis allergique aux icônes figés dans le temps et l'espace.
Evidemment que leur relation n'était pas un roman à l'eau de rose avec uniquement des moutons enrubannés à l'horizon du parc du Trianon... :

Vicq d Azir a écrit:
Fersen ne devait pas être si facile que ça...

Qui a dit que, Fersen, c'était du feu sous la glace ?
J'ai une vague réminiscence comme ça ...

J'ai retrouvé, dans l'excellente biographie de Fersen de Françoise Kermina, la lettre de Fersen à laquelle Marie-Antoinette répond:
Je vous préviens de tout cela pour ne pas être grondée .

Voici !
Fersen était furieux de l'influence de Barnave.
 Ce dernier avait poussé le roi à déclarer hautement à la tribune de l'Assemblée, le 14 du mois de décembre :
Il est temps de montrer aux nations étrangères que le peuple français, ses représentants et son roi ne font qu'un .

Fersen trempe sa plume dans la rancoeur la plus acerbe, et écrit à Marie-Antoinette :
Je crains qu'on ne vous ait donné un conseil perfide. Je sais que la confiance ne se donne pas, et je suis loin d'en demander plus que vous ne voulez m'en accorder.  (  !!!  ) Votre intérêt seul me guide et me guidera toujours .

Il est fou de jalousie de la confiance que la reine accorde à Barnave . Sa colère l'aveugle, le rend parfaitement injuste.
Il  prétend être lui-même privé de la confiance de Marie-Antoinette !!!!!!

C'est donc bien lui, Fersen, qui la gronde, et très vertement encore !
Ah ! Amour, amour quand tu nous tiens ....

.

 Pas si commode, malgré ses airs affables, et exigeant avec ça...

Je n'aime pas du tout ce portrait que je trouve très fade .
Les traits sont mous mous rata-mous .

J'adore celui-ci, de la pleine jeunesse ( je serais tombée moi aussi les pattes en croix ! ) :



J'aime bien cet autre, de la maturité ( beau portrait, mais vraiment très mauvaise photo ) :

Après la révolution, il devait ressembler à ça...
Quant au deuxième portrait que vous avez posté, chère Eléonore, je crois bien qu'il est posthume, fait je crois à la fin du XIXe, assez peu ressemblant, et assez idéalisé; mais peut-être me trompe-je...

Comme c'est dommage ! Il me plaisait bien ainsi .  Tant pis ...

Mme de Sabran a écrit:Il est fou de jalousie de la confiance que la reine accorde à Barnave . Sa colère l'aveugle, le rend parfaitement injuste.
Il  prétend être lui-même privé de la confiance de Marie-Antoinette !!!!!!

C'est donc bien lui, Fersen, qui la gronde, et très vertement encore !
Ah ! Amour, amour quand tu nous tiens ....

Voilà sans ce à quoi il fait allusion lorsqu'il écrit le 5 novembre 1793:
"Oh! Combien je me reproche mes torts envers elle et combien je sais à présent combien je l'aimais"...

Bien à vous.

Attention ! Mon Amour, amour quand tu nous tiens...  n'est pas une citation fersinienne !  


Amour, amour, quand tu nous tiens,
On peut bien dire : " Adieu prudence!"

( Le lion amoureux,  Jean de la Fontaine . )

.

J’ai retrouvé dans le fouillis de mon ordinateur une lettre que nous avions postée, mais il s’agissait d’une mauvaise copie, et l’image était rognée.
C’était ici : https://marie-antoinette.forumactif.org/t91p165-la-correspondance-de-marie-antoinette-et-fersen

Aussi je poste à nouveau cette première page d’une lettre de Fersen à Marie-Antoinette.
Datée du 10 octobre 1791 (voir la transcription dans le Lever p.632).

Ce soir, je ne comprends pas pourquoi l’on ne parvient pas à retrouver les mots raturés, puisque le cryptage apparaît ?  
Mais il est trop tard pour que je réfléchisse à ce genre de chose...

La nuit, la neige a écrit:

Ce soir, je ne comprends pas pourquoi l’on ne parvient pas à retrouver les mots raturés, puisque le cryptage apparaît ?  

Oui, n'est-ce pas ? Merci ... 3196910