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Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène

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Message par La nuit, la neige Jeu 19 Oct 2017, 11:28

Toute proportion gardée quant à l'intérêt historique des deux écrits mémoriels et leurs qualités littéraires  Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène 3236493444 , voici une nouvelle publication qui promet d'intéressants contrastes entre une version publiée et des notes originales.
Voir ce que nous soulignions au sujet des Mémoires de Mme Campan... Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène 4099329125

Bref, le Mémorial de Sainte-Hélène, est le bréviaire romantique et politique des Bonapartistes depuis des lustres. Mais jusqu'à présent, on n'avait pas mis la main sur le manuscrit original.
C'est chose faite ! Et c'est ce qui est annoncé notamment sur le site de la Fondation Napoléon, qui présente cette publication que les historiens, et amateurs de l'histoire napoléonienne, ne manqueront pas de comparer à l'édition publiée et re-publiée depuis tant d'années... Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène 4099329125


Le Mémorial de Sainte-Hélène
Manuscrit original

Emmanuel de Las Cases
Texte établi et commenté par :
Thierry Lentz
Peter Hicks
François Houdecek
Chantal Prévot
Editions Perrin & Fondation Napoléon (Oct 17)

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène Memori11

Présentation des éditeurs :

Le document d’origine qui permit à Las Cases de publier le Mémorial de Sainte-Hélène avec le succès que l’on sait avait disparu. Une copie a été retrouvée et est éditée pour la première fois. Et cela change beaucoup de choses !

Il aura donc fallu deux siècles pour que soit retrouvé et publié le document qui servit à composer l’un des plus fameux ouvrages de l’histoire de France, le Mémorial de Sainte-Hélène.

En effet, le conseiller d’État Emmanuel de Las Cases, qui accompagna Napoléon dans son exil en 1815, dut le quitter seize mois plus tard.
Et ce n’est qu’en 1823 qu’il fit paraître son Mémorial, devenu la bible des nostalgiques de l’Empire et une source essentielle de l’historiographie napoléonienne, fondé sur ses conversations avec l’Empereur, réelles ou supposées, car il apparut vite que ce récit était parfois trop beau pour être tout à fait vrai.

Pour en juger, il aurait fallu disposer du manuscrit original, rédigé à Sainte-Hélène presque sous la dictée de Napoléon. Or les Anglais l’avaient confisqué en expulsant Las Cases.

Les quatre historiens de la Fondation Napoléon qui le publient aujourd’hui (Thierry Lentz, Peter Hicks, François Houdecek et Chantal Prévot) ont retrouvé récemment à la British Library une copie, qui y sommeillait incognito depuis deux cents ans.
Cette aventure éditoriale apporte un éclairage précieux et souvent inattendu sur ce que l’Empereur a vraiment dit, et que Las Cases avait enrichi et enjolivé.

Ainsi la voix de Napoléon se fait plus proche et plus authentique.


* Source : https://fondationnapoleon.org/2017/10/06/publication-dune-copie-du-manuscrit-original-du-memorial-de-sainte-helene-d-emmanuel-de-las-cases/
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Message par Mme de Sabran Jeu 19 Oct 2017, 12:21

La nuit, la neige a écrit:

Les quatre historiens de la Fondation Napoléon qui le publient aujourd’hui (Thierry Lentz, Peter Hicks, François Houdecek et Chantal Prévot) ont retrouvé récemment à la British Library une copie, qui y sommeillait incognito depuis deux cents ans.
Cette aventure éditoriale apporte un éclairage précieux et souvent inattendu sur ce que l’Empereur a vraiment dit, et que Las Cases avait enrichi et enjolivé.

Ainsi la voix de Napoléon se fait plus proche et plus authentique.


/

... une copie oubliée depuis ? Oh, ça c'est formidable ! Very Happy

_________________
...    demain est un autre jour .
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Message par La nuit, la neige Jeu 19 Oct 2017, 13:53

Oui, c'est vraiment une découverte importante ! Smile
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Message par Mme de Sabran Mar 04 Mai 2021, 17:27

La nuit, la neige a écrit:

Bref, le Mémorial de Sainte-Hélène, est le bréviaire romantique et politique des Bonapartistes depuis des lustres. Mais jusqu'à présent, on n'avait pas mis la main sur le manuscrit original.
C'est chose faite ! Et c'est ce qui est annoncé notamment sur le site de la Fondation Napoléon, qui présente cette publication que les historiens, et amateurs de l'histoire napoléonienne, ne manqueront pas de comparer à l'édition publiée et re-publiée depuis tant d'années... Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène 4099329125


Las Cases

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène Fr-81110    

Emmanuel-Auguste-Dieudonné, comte de Las Cases  ( 1766 - 1842 )  est l'auteur de la relation des réflexions et des mémoires de Napoléon , qu'il accompagna dans son exil : le Mémorial de Sainte-Hélène.

A la Révolution française, il avait émigré plusieurs années en Allemagne et en Angleterre, et participé au désastre de l'expédition de Quiberon (1795). Il retourne à Londres, où il vit dans la pauvreté. Il est engagé comme tuteur pour les enfants de Lady Clavering, une dame d'origine française, de la région d'Angers. Il compose un monumental Atlas historique, généalogique chronologique et géographique,  qu'il publie sous le nom d’emprunt de Le Sage. Augmenté de notices historiques, l'ouvrage est réédité à Paris et réimprimé à plusieurs reprises entre 1804 et 1845 environ.

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène Md136110

Il revient clandestinement en France pendant le Consulat avec d'autres royalistes qui rallient Napoléon Ier, qui feront plus tard allégeance à l'Empereur,  et épouse son amie d'enfance Henriette de Kergariou. En 1810, il reçoit le titre de chambellan et de comte d'Empire (il était auparavant marquis par hérédité). Après l'abdication de l'empereur (11 avril 1814), il se retire en Angleterre, mais rejoint Napoléon durant les Cent-Jours.

Après la bataille de Waterloo, resté fidèle à Napoléon, il l'accompagne du départ de la Malmaison jusqu'à l'île de Sainte-Hélène, et partage son exil jusqu'en fin 1816.   Il y joue de façon informelle mais très assidûment un rôle de secrétaire particulier ...

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène Captu991

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène E79efa11

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène 48774711

...   prenant différentes notes de leurs conversations, qu'il va remettre ensuite en ordre dans son Mémorial de Sainte-Hélène.

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène 61491311

Ce Mémorial ( qui compte plus de 2 000 pages !  ) reste le vecteur de la légende de Napoléon Bonaparte, et le témoignage le plus complet et abouti sur la fin et la déchéance de l'Empereur.
« Le Mémorial présente le meilleur recueil, non seulement des pensées réelles de Napoléon Bonaparte, mais encore des opinions qu'il voulait faire passer pour telles »
(  Walter Scott. )

___________________

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène Captu992

Napoléon et le Mémorial de Sainte-Hélène. Las Cases a-t-il brodé,  était-il un affabulateur ?


En 2017, des historiens ont retrouvé le manuscrit du fameux Mémorial de Sainte-Hélène dicté par Napoléon en exil à Las Cases. Or, il semblerait que certaines des citations de l’Empereur les plus connues n’y figurent pas. Thierry Lentz, le directeur de la Fondation Napoléon, fait le point.

Historia - Une double-page consacrée au Mémorial de Las Cases à la une du Figaro ce 5 mai 2017, ce n’est pas banal.  

Thierry Lentz - Mais l’affaire n’est pas banale ! Jusqu’à ce matin, personne n’avait connaissance de l’existence de ce manuscrit. En fait le Mémorial est un grand livre du XIXe siècle et les historiens se sont toujours demandés quel était son degré d’authenticité parce qu’il est vraiment très détaillé ! Il y a des pages et des pages de conversations avec Napoléon et l’on s’interroge depuis longtemps sur la manière dont il a pu noter tout cela.
 Jusqu’à présent, nous n’avions pas les notes qu’avait prises Las Cases à Sainte-Hélène et nous ne pouvions que spéculer. Or, nous avons trouvé à la British Library la copie du manuscrit que Las Cases a établi à Sainte-Hélène et qu’il avait préparée pour être imprimée. C’est la base documentaire du Mémorial de Sainte-Hélène, les notes qu’il a prises sur place.  Or, en effet, il y a des différences importantes avec le Mémorial  

H.-  Il est question de citations qui n’y figureraient pas ?

T.L. - Oui, les grandes citations du Mémorial de Sainte-Hélène ne figurent pas dans le manuscrit ! Elles ont dont été  ajoutées après le retour de Las Cases en Europe.

H.- Avez-vous des exemples ?

T.L .- La plus connue, c’est « Quel roman que ma vie ! », qui est citée partout, y compris par moi ! Peut-être Napoléon l’a-t-il-dit ? En tout cas, elle n’y est pas.

H.-  Le Mémorial est l’un des piliers de la légende napoléonienne. Est-ce que cela va remettre en cause l’historiographie napoléonienne, ébranler le mythe ?

T.L . – La tonalité politique générale – notamment l’idée que Napoléon est un libéral, incompris par les forces de l’Ancien Régime - reste la même. On a dans le manuscrit quelques petites phrases évoquant cet aspect. Dans la version publiée ensuite, il y a de très longs passages entre guillemets, ce qui sous-entend que c’est Napoléon lui-même qui parle. Mais cela n’enlève rien au rôle historique qu’a eu le Mémorial au XIXe.  
En revanche, on ne pourra plus citer le Mémorial imprimé sans avoir vu le manuscrit. Il sera disponible à partir du 5 octobre aux éditions Perrin. Las Cases a récupéré son manuscrit en septembre 1821 et il l’a publié entre janvier et novembre 1823, donc il a eu près de deux ans pour reprendre son manuscrit. Et ce qu’il a ajouté représente 2/3 de son manuscrit  qui fait 1 000 pages. On savait que Las Cases a fait des ajouts, notamment tout ce qui est postérieur à son arrestation à Sainte-Hélène. Il a vraiment tiré à la ligne ! Il s’attendait à un succès de librairie et a du se dire pourquoi ne pas écrire 8 volumes au lieu de 5 !

H.- Cela remet tout de même en cause son sérieux de biographe et de témoin ?

T.L . – Oui, cela remet en question le Mémorial en tant que reportage sur le vif. Il y a une recomposition. On savait qu’il avait été voir dans des livres parus pour préciser certains faits et parfois il les raconte de la même façon.  

H.- Est-ce qu’il aurait pu prendre d’autres notes et les ajouter par la suite ?

T.L . – On n’en est pas sûr. On sait que tous ses papiers ont été saisis à Sainte-Hélène et qu’il est parti avec quelques pages, mais certainement pas des milliers ! Il a peut-être eu des réminiscences. Las Cases était un militant de la cause napoléonienne et il a fait le maximum pour traduire son militantisme par des Mémoires.

H.- Las Cases est-il un affabulateur ?

T.L . – Effectivement, on peut se poser la question...  il y a un exemple où dans le manuscrit il n’y a pas de détail sur une réponse de Napoléon et dans la version imprimée, on se retrouve avec une trentaine de pages de citations !

Propos recueillis par Véronique Dumas
https://www.historia.fr/napol%C3%A9on-et-le-m%C3%A9morial-de-sainte-h%C3%A9l%C3%A8ne-las-cases-%C3%A9tait-il-un-affabulateur


___________________

La Bibliothèque nationale de France conserve dans les Lowe Papers* un document d’un intérêt majeur pour les napoléonistes : la lettre d’adieu de l’Empereur à Emmanuel de Las Cases, futur-auteur du Mémorial de Sainte-Hélène. Comme bien des documents émanant du dernier exil, l’histoire de cette missive, de sa rédaction à sa publication, a connu bien des rebondissements.

Document > Les tribulations d’une lettre…  Les adieux de Napoléon au comte de Las Cases, Sainte-Hélène, 11 décembre 1816

Las Cases expulsé de Sainte-Hélène

Après treize mois de présence sur l’île, le comte de Las Cases fut arrêté le 25 novembre 1816 sur ordre du gouverneur Hudson Lowe. La veille, il avait confié à son serviteur James Scott, deux lettres – l’une à son amie Lady Clavering, l’autre à Lucien Bonaparte – que son fils Emmanuel-Pons avait copiées sur des carrés de taffetas . Lowe ne pouvait laisser passer une fraude aussi manifeste aux règles très strictes édictées pour éviter les correspondances clandestines. Il fit donc appréhender Las Cases et son fils, et saisir leurs papiers. Un mois plus tard, les deux hommes furent transférés au Cap, en Afrique du Sud.
Pendant que Las Cases subissait les interrogatoires du gouverneur, à Longwood se préparait une réplique à cette arrestation considérée comme abusive. Napoléon était particulièrement affecté de perdre celui qui était devenu son confident. Dès le lendemain de l’arrestation de Las Cases, le général Bertrand fut chargé de remettre à Hudson Lowe une réclamation dictée par l’Empereur contre l’arrestation du secrétaire. Cette démarche, comme les suivantes, pour faire revenir Las Cases et son Journal   n’eurent aucun impact sur le gouverneur.

Le 10 décembre 1816, Napoléon se résigna à faire ses adieux à son secrétaire, tout en lançant une nouvelle banderille à Lowe, son adversaire. Il écrivit une lettre à Las Cases dans un double but : piquer au vif le gouverneur, tout en adoptant un ton presque amical, reflétant peu le protocole impérial habituel, afin d’émouvoir Las Cases pourtant peu enclin à revenir à Longwood. Une première version de la lettre fut dictée par l’Empereur presque dans les termes de celle qui fut envoyée. Néanmoins, Napoléon la voulut la refaire pour que Las Cases n’y soit plus qualifié de « secrétaire », afin de ne pas donner « trop d’importance au Journal »  qu’il espérait récupérer en cas d’expulsion définitive de son confident .
Une seconde mouture fut donc dictée, le lendemain 11 décembre, au premier valet de chambre Louis Marchand. Ce dernier la mit au propre et la soumit à la signature de son maître .
Le 12 décembre, après dîner, et avant de parapher le document, Napoléon demanda à Gourgaud d’en donner lecture aux autres exilés . Le général, jaloux de Las Cases, s’émut devant l’Empereur des louanges qu’il faisait de son rival : selon lui, certains de ses plus proches fidèles, tels Lannes ou Duroc, n’avaient jamais reçu de tels compliments . Cette sortie lui valut les foudres impériales et une petite passe d’arme avec Albine de Montholon. Dans la foulée, exaspéré par le caprice de Gourgaud, Napoléon réclama une plume et signa la lettre d’un énergique « Napoléon ». Il fit précéder son paraphe d’un « Votre dévoué », mention presque unique dans toute la correspondance impériale.

La missive fut ensuite cachetée pour être expédiée le lendemain. Rien n’était simple à Sainte-Hélène : en application de la règle en vigueur qui voulait que seules les lettres ouvertes pouvaient être remises à Las Cases, Lowe la renvoya aussitôt à Longwood. Le 14 décembre, sur ordre de Napoléon, Bertrand brisa le sceau et remit la lettre à l’officier anglais Poppleton qui la porta au gouverneur dans la journée. Hudson Lowe en prit connaissance et la communiqua à son prisonnier. Fut-il offensé par ce que contenait la lettre, comme l’espérait Napoléon et comme le prétendit Las Cases ? Toujours est-il qu’il ne la communiqua au captif que le 16 décembre, en fin de journée, deux jours après l’avoir reçue.

Une copie partielle et une version complète
Si l’on en croit son témoignage, Las Cases fut fort ému des termes employés par l’Empereur. Il écrivit à Bertrand « que ce moment l’a[vait] payé de toutes ses peines » . Sitôt l’émotion passée, il demanda à prendre copie des parties qui le concernaient . Hudson Lowe autorisa la transcription des parties qu’il avait préalablement encadrées au crayon. Une fois cette copie faite par le jeune Emmanuel-Pons de Las Cases, l’original fut restitué au gouverneur qui le remisa dans ses papiers.

Las Cases et le Mémorial de Sainte-Hélène Las-ca10


C’est donc avec la copie de cette lettre, mais amputée des deux tiers, que l’ancien secrétaire de Napoléon quitta l’île le 30 décembre 1816, non sans avoir refusé de retourner à Longwood, malgré la proposition du gouverneur en ce sens. Après une rétention au Cap de plusieurs mois, il retrouva l’Europe en novembre 1817 avec ces bribes de missive recopiées, qu’il considérait comme une relique.
Après la mort de Napoléon, le gouvernement rendit ses papiers à Las Cases (son Journal et probablement cette lettre) à l’automne 1821. Le secrétaire de l’Empereur défunt s’attela désormais à la publication des deux textes (12). Dans le huitième tome du Mémorial, il décrivit l’importance qu’il accordait à la lettre de Napoléon :

« Autre prix à mes yeux ; cette lettre portait la signature pleine et entière de l’Empereur, et je savais combien il y répugnait dans ses circonstances nouvelles ; c’était la première, je crois, qu’il ait donnée dans l’île, et il est aisé de voir, à l’original, que ce n’est pas sans hésitation, et qu’il a dû lui en coûter ; car il se contente d’abord d’écrire de sa main la simple date : Longwood, le 11 décembre 1816, terminant avec son paraphe accoutumé ; puis on voit qu’il se ravise, ne jugeant pas la chose suffisante, et ajoute plus loin : « Votre dévoué, Napoléon », renouvelant son paraphe. Le tout porte les traces évidentes d’une grande contrariété*. […]

*Cette lettre est écrite par un des gens de l’Empereur ; mais lui-même, a marqué, de sa propre main, la ponctuation ; j’observerai, en passant, à l’appui de la singularité que j’ai fait remarquer vol. VI, p. 299, que lui qui, quand il écrivait, ne mettait pas un mot d’orthographe, se trouve en avoir corrigé ici de légères imperfections.
»

Cette lettre, c’est le document de la BNF qui est transcrit ci-dessous. Cette lettre et d’autres inédits héléniens seront présents dans le quinzième et dernier volume de la Correspondance générale publiée par la Fondation Napoléon, au printemps 2018.

Au crayon de la main d’Hudson Lowe : «What is marked with pencil, C[oun]t Las Cases was allowed to take copy of.»

AU COMTE LAS CASES

Longwood, 11 décembre 1816

Mon cher comte Las Cases, mon cœur sent vivement ce que vous éprouvez. Arraché, il y a 15 jours, d’auprès de moi, vous êtes enfermé depuis cette époque au secret, sans que j’aie pu recevoir ni vous donner aucune nouvelle, sans que vous ayez communiqué avec qui que ce soit, Français ou Anglais, privé même d’un domestique de votre choix.
Votre conduite à Sainte-Hélène a été, comme votre vie, honorable et sans reproche, j’aime à vous le dire.
Votre lettre à votre amie de Londres n’a rien de répréhensible. Vous y épanchiez votre cœur dans le sein de l’amitié. Cette lettre est pareille à huit ou dix autres que vous avez écrites à la même personne et que vous avez envoyées décachetées. Le commandant de ce pays ayant eu l’indélicatesse d’épier les expressions que vous confiiez à l’amitié, vous en a fait des reproches dernièrement, vous a menacé de vous renvoyer de l’île, si vos lettres contenaient davantage de plaintes contre lui. Il a par-là violé le premier devoir de sa place, le premier article de ses instructions, et le premier sentiment de l’honneur. Il vous a ainsi autorisé à chercher les moyens de faire arriver vos épanchements dans le sein de vos amis, et de leur faire connaître la conduite coupable de ce commandant. Mais vous avez été bien simple, votre confiance a été bien facile à surprendre !!
On attendait un prétexte de saisir de vos papiers, mais votre lettre à votre amie de Londres n’a pu autoriser une descente de police chez vous ; puisqu’elle ne contient aucune trame ni aucun mystère. Qu’elle n’est que l’expression d’un cœur noble et franc. La conduite illégale et précipitée qu’on a tenue en cette occasion porte le cachet d’une haine personnelle bien basse.
Dans les pays les moins civilisées, les exilés, les prisonniers, même les criminels, sont sous la protection des lois et des magistrats. Ceux qui sont préposés à leur garde ont des chefs dans l’ordre administratif et judiciaire qui les surveillent. Sur ce rocher, l’homme qui fait les règlements les plus absurdes, les exécute avec violence, il transgresse toutes les lois, personne ne contient les écarts de ses passions.
Le prince Régent ne pourra jamais être instruit de la conduite que l’on tient en son nom, on s’est refusé à lui faire passer mes lettres, on a renvoyé avec emportement les plaintes qu’adressaient le comte de Montholon, et depuis on a fait connaître au comte Bertrand qu’on ne recevrait aucune lettre si elles étaient libellés comme elles l’avaient été jusqu’à cette heure.
On environne Longwood d’un mystère qu’on voudrait rendre impénétrable, pour cacher une conduite criminelle, et qui laisse soupçonner les plus criminelles intentions.
Par des bruits répandus avec astuce, on voudrait donner le change aux officiers, aux voyageurs, aux habitants, et même aux agents que l’on dit que l’Autriche et la Russie entretiennent en ce pays. Sans doute que l’on trompe de même le gouvernement anglais, par des récits adroits et mensongers !
On a saisi vos papiers, parmi lesquels on savait qu’il y en avait qui m’appartenaient, sans aucune formalité, à côté de ma chambre, avec un éclat et une joie féroce. J’en fus prévenu peu de moments après. Je mis la tête à la fenêtre, et je vis qu’on vous enlevait. Un nombreux état-major caracolait autour de la maison. Il me parut voir les habitants de la mer du sud danser autour des prisonniers qu’ils allaient dévorer.
Votre société m’était nécessaire ; seul vous lisez, vous parlez, et entendez l’anglais. Combien vous avez passé de nuits pendant mes maladies !
Cependant, je vous engage, et au besoin je vous ordonne, de requérir le commandant de ce pays de vous renvoyer sur le continent. Il ne peut point s’y refuser, puisqu’il n’a action sur vous que par l’acte volontaire que vous avez signé. Ce sera pour moi une grande consolation de vous savoir en chemin pour de plus fortunés pays.
Arrivé en Europe, soit que vous alliez en Angleterre, ou que vous retourniez dans la patrie, oubliez le souvenir des maux qu’on vous a fait souffrir. Vantez-vous de la fidélité que vous m’avez montrée, et de toute l’affection que je vous porte.
Si vous voyez un jour ma femme et mon fils, embrassez-les. Depuis deux ans, je n’en ai aucune nouvelle directe ou indirecte.
Il y a dans ce pays, depuis six mois, un botaniste allemand qui les a vus dans le jardin de Schönbrunn, quelques mois avant son départ . Les barbares ont empêché qu’il vînt me donner de leurs nouvelles.
Toutefois, consolez-vous et consolez mes amis. Mon corps se trouve, il est vrai, au pouvoir de la haine de mes ennemis. Ils n’oublient rien de ce qui peut assouvir leur vengeance. Ils me tuent à coups d’épingles ; mais la Providence est trop juste pour qu’elle permette que cela se prolonge longtemps encore. L’insalubrité de ce climat dévorant, le manque de tout ce qui entretient la vie, mettront, je le sens, un terme prompt à cette existence,
dont les derniers moments seront un acte d’opprobre pour le caractère anglais et l’Europe signalera un jour avec horreur cet homme astucieux et méchant. Les vrais Anglais désavoueront pour Breton.
Comme tout porte à penser qu’on ne vous permettra pas de venir me voir avant votre départ, recevez mes embrassements, l’assurance de mon estime et de mon amitié. Soyez heureux.

Votre dévoué,

Napoléon

https://www.napoleon.org/histoire-des-2-empires/articles/les-tribulations-dune-lettre-les-adieux-de-napoleon-au-comte-de-las-cases-sainte-helene-11-decembre-1816/

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