La Nef de table et les Cadenas

Cette pièce d'orfèvrerie trônait à la droite du roi à chacun de ses grands repas en public.
Son origine est très ancienne, ce serait un cadeau fait par la ville de Paris à un de nos rois, l'emblème de Paris étant une nef accompagnée de la célèbre formule Fluctuat nec mergitur. D'ailleurs, c'est le nom de "vaisseau" qui donna notre "vaisselle".
Au tout début, il s'agissait en fait de sculptures décoratives en sucre. Apparue au Moyen-Age, elle s'impose sous la Renaissance et à la cour des princes.
Très vite, grands seigneurs, princes et souverains prirent l'habitude de commander aux orfèvres les plus réputés et talentueux des nefs rivalisant parfois de luxe.

A la base, cette nef est un contenant dont le pont fait office de couvercle (l'objet est donc souvent démâté pour pouvoir l'ouvrir plus facilement). On y plaçait gobelets, serviettes, cuillère et salière, cure-dents, coupelles contenant des épices précieuses et les fameuses "épreuves", poudres et fioles, voire pierres et minéraux, servant de contrepoisons et d'antidote. A Versailles, très vite, on y trouve uniquement les serviettes présentées au roi, logées entre des coussins de senteur. Elle sera progressivement remplacée par le "cadenas", un plateau à petits compartiments, puis laissera place au "surtout" de table au XIXème.

Petit tour d'horizon…




Détails :




On voit qu'ici, c'est la nef entière qui sert de poignée pour ouvrir. Elle fût offerte par les tourangeaux à la reine Anne de Bretagne. Or, argent, pierres précieuses et émaux. La coque est en cornaline, en calcédoine rouge orangé, originaire du Brésil ou d'Extrême-Orient.






Chef-d'oeuvre de luxe, de raffinement et de minutie, en or et argent.
Il s'agît d'un automate et d'une boîte à musique : une fois remontée par une clef, la nef se déplaçait sur la table, les personnages s'animaient, sonnant du cor et du tambour. Au bout de sa course, la nef tirait une minuscule salve de poudre par ses petits canons… Ou comment faire oublier à vos invités ce qu'ils ont dans leur assiette…

Pour le plaisir du contraste, je vous invite à découvrir :




Nous poursuivons avec :




Pièce faisant partie d'une fabuleuse vaisselle en vermeil offerte au couple impérial par le ville de Paris.
Elle a bien sûr son pendant, la nef de l'empereur. Mais comme je n'aime pas Napoléon, je la montre pas, gniark, gniark, gniark…

Nous terminons, temporairement, avec :




Perles, joyaux et porcelaine précieuse. Entre autres...

Merveilleux !!!   Merci, mon cher Calonne !!!  

Calonne a écrit:

La nef de l'impératrice Joséphine (1805)

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La nef de l'impératrice.  ( photos de kiki dans le sujet sur l'exposition Joséphine au Luxembourg )
https://marie-antoinette.forumactif.org/t581p50-exposition-josephine-au-musee-du-luxembourg?highlight=JOSEPHINE

La nef en émeraude me fascine : à première vue, j'ai pensé à un objet du trésor de Topkapi avec sa forme (le croissant de l'Islam) et sa pierre et couleur (là aussi, pierre et couleur de l'Islam).

Etrange cette sobriété, cette épure. Peut-être un présent fait au cardinal ? Je vais me renseigner.
Je vous proposerai d'autres pièces demain également.

De précieuses nefs ornaient les tables des rois et des princes dès le XIVe siècle. La cour de Charles VI et des ducs de Bourgogne en possédaient dans leurs trésors.

Dès le XIVème, comme vous dites, Domi !  
Toutes ces petites nefs qui naviguent sur les nappes au milieu des convives :

Alors, je me suis complètement trompé à propos de la dernière présentée qui n'est pas du tout "chinoise".
Rectifions et voyons donc cela de plus près :



Elle est principalement en émail peint, enrichie de petits personnages en argent. Soutenue par une Néréide taillée dans une perle, ses flancs sont peints de scènes mythologiques dont le mariage de Neptune et d'Amphitrite. Sur le pont, au centre, est peint "Neptune sauvant Amymoné du Satyre." Des sirènes, tritons et hippocampes se poursuivent le long du vaisseau.

Calonne a écrit:
Son origine est très ancienne, ce serait un cadeau fait par la ville de Paris à un de nos rois, l'emblème de Paris étant une nef accompagnée de la célèbre formule Fluctuat nec mergitur. D'ailleurs, c'est le nom de "vaisseau" qui donna notre "vaisselle".

... ça, c'est vraiment le petit détail comme j'aime !
Je n'y aurais jamais pensé .

Participant autant du prestige de la table que les nefs, étaient les cadenas à la Cour de France, au point que cet usage fut copié à l'étranger.

Cette précieuse pièce d'orfèvrerie, fermant à clef (d'où son nom) était destinée à conserver le couvert, la serviette et les épices du roi. Devenu au XVIIème siècle un objet de pure ostentation à la Cour, son usage remontait à l'époque pas si lointaine où il fallait protéger ces ustensiles du poison  

Un des plus anciens exemples qui subsiste est le cadenas de Charles II d'Angleterre :





Clichés personnels

La Royal Collection nous le présente plus en détails ici.

Objet inconnu à la Cour d'Angleterre avant la Restauration, il est fort vraisemblable que le souverain anglais en importât l'usage suite à son exil en France.

Pour l'anecdote, ne croyez pas les anglais plus conservateurs que nous  .  Ce cadenas et bien d'autres objets, une fois démodés, furent aliénés par l'administration royale à la fin du XVIIIème siècle, tout comme on l'aurait fait en France. Cependant, la Guilde des Orfèvres, qui les reçut en paiement pour leur simple valeur métalllique, renonça, face à leur somptuosité, à les envoyer à la fonte, ce qui permit aux collections royales de les racheter en 1975 .

Les cadenas royaux français ont eux bien disparu, et ne subsistent pour rappeler leur souvenir que ceux réalisés par Auguste pour Napoléon et Joséphine, aujourd'hui conservés à Fontainebleau. Voici celui de l'impératrice :



Cliché personnel

Merci, mon cher Momo ! Je découvre grâce à toi ce "cadenas ".
Coffret d'or ou de vermeil contenant le couteau, la cuiller, etc. qu'on sert à la table du roi et des princes.

Citations de Saint-Simon dans le Littré .

Le roi d'Angleterre ayant la reine sa femme à sa droite et le roi à sa gauche avec chacun leur cadenas
( Saint-Simon, 3, 57. )
Le roi était seul au milieu [des tables], dans son fauteuil, avec son cadenas
( Saint-Simon, 276, 227. )

Merci pour ces précisions chère Eléonore !  

Lorsqu'à Versailles on tenta, il y a quelques années et de manière provisoire, de reconstituer le Grand Couvert chez la Reine, l'absence de cadenas d'Ancien Régime posa problème.

Ainsi, si l'on avait pu suppléer à la vaisselle royale d'origine disparue en disposant celle, très similaire et contemporaine, exécutée par Auguste pour George III, et recréer fauteuils et tabourets gràce à Jacques Garcia...


*Source : Versailles 3 D

... l'absence de cadenas se faisait cruellement sentir. Il fut donc décidé d'en reconstituer sous forme de "silhouette", exécutées en bois doré à partir de leur dessin qui nous était connu :


(c) Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Jean-Marc Manaï


*Source : Versailles, le couvert du roi

Si je comprends bien, à la nef de table a succédé le surtout ?

Je dirais plutôt que les nefs ont subsisté comme élements symboliques - mais très décoratifs - de surtout sur la table des rois de France... et pas que/qu'eux...


(c) The Robert Capa and Cornell Capa Archive, Gift of Cornell and Edith Capa, 2004

Quelle table somptueuse !!!
Avec qui donc flirte Jackie ?! Reconnais-tu ce monsieur ?

Bonne question ! Le jeune Chirac ?

Non, sûr que non !  Pompidou non plus  .
C'est fou ça : placé auprès de Jackie, il doit être un V.I.P. de la plus haute volée, cet homme !

La Kennedymadia semble s'être emparée de la France. Jackie a en plus l'atout d'avoir des origines françaises et de parler assez correctement le Français. Cela fera dire à John au début d'un de ses discours lors de ce voyage : "Je suis l'homme qui accompagne Jacqueline Kennedy à Paris et j'en suis ravi." Eclats de rire de l'assistance assurés, Kennedy sait y faire. Ce 1er juin 1961 au soir, le couple présidentiel dîne au château de Versailles dans une galerie des Glaces éclairée aux bougies. "Je me crois transportée au ciel, je n'ai jamais rien vu de pareil" dira Jackie.
https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/histoires-d-info/histoires-d-info-quand-kennedy-se-faisait-devorer-par-khrouchtchev_2192611.html

J'ai cherchouillé sans succès ...
En revanche, voici le menu !

Au pif, Malraux, Debré?

Mme de Sabran a écrit:Avec qui donc flirte Jackie ?! Reconnais-tu ce monsieur ?

Le monsieur assis à côté de cette fort peu sympathique dame est Jacques Chaban-Delmas, président de l'Assemblée nationale depuis 1958...

... avec des cheveux ! Je le reconnais à peine. Merci, cher Bonnefoy !

Je me souviens qu'à l'époque, on l'appelait " Jacques Charmant-Delmas ". Il paraît que toutes les dames craquaient pour lui.

Jackie une fort peu sympathique dame ? Ah bon, vous croyez ?!
Elle était piquante et jolie, en tous cas, et fit ( à ce que l'on dit ) la conquête du grand Charles.

C est incroyable d avoir mis en évidence la nef impériale pour le grand Charles. Photo intéressante et menu d un autre âge.

Le menu est « Grand Siècle »
Pas de fromage !
Je comprends pas pourquoi un chaud-froid de volaille après un tournedos et ses légumes ?
Un parfait Viviane (glace vanille, fruits confits et chocolat chaud ! Au secours vous dis-je d un autre âge !