Solitude, la « mulâtresse »
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Solitude, la « mulâtresse »
Hier soir, sur ARTE, Xavier Mauduit nous contait le terrible destin de Solitude, égérie de l'antiesclavagisme.
Sa mémoire vient d'être honorée par l'érection d'une statue à Paris.
Solitude, de son prénom Rosalie, née vers 1772 en Guadeloupe et morte le 29 novembre 1802 sur la même île, est une figure historique incarnant a posteriori la résistance des esclaves noirs luttant contre le rétablissement de l'esclavage en 1802. À la suite de l'échec du mouvement de résistance de Louis Delgrès face aux forces coloniales, elle est condamnée à mort à l'âge de 30 ans.
À l’occasion de l’inauguration à Paris de la première statue représentant une femme noire, Xavier Mauduit revient sur l’histoire de Solitude, la Guadeloupéenne qui s’est soulevée contre l’esclavage en 1802.
Vous pouvez l'écouter ici :
https://www.arte.tv/fr/videos/109298-005-A/la-statue-de-solitude/
Victimes de l’esclavage : qui était Solitude, la « mulâtresse », dont la statue est inaugurée à Paris ?
Une statue de cette Guadeloupéenne, figure de la lutte contre l’esclavage, a été inaugurée, mardi, à Paris. Une première, pour une femme noire.
Le Monde
Publié le 10 mai 2022 à 20h46 -
Savez-vous qui était Solitude ? Mardi 10 mai, une statue de cette Guadeloupéenne, figure de la lutte contre l’esclavage, a été inaugurée par la maire de Paris, Anne Hidalgo, dans un jardin qui porte déjà son nom, dans le 17e arrondissement. La décision est hautement symbolique : il s’agit de la première statue de femme noire dans la capitale.
Des statues, Paris en compte environ un millier. Une écrasante majorité d’hommes, y compris de colonisateurs, comme Joseph Gallieni, responsable du massacre des Menalamba, à Madagascar. Très peu de femmes. Si l’on exclut les figures mythologiques et les allégories – la République, l’Abondance… –, une quarantaine de femmes seulement sont visibles dans l’espace public parisien. Parmi elles, Jeanne d’Arc, George Sand, Sarah Bernhardt, Edith Piaf ou encore Dalida. Mais aucune femme noire. Jusqu’à aujourd’hui.
Le choix de la date ne doit rien au hasard. En France, depuis 2006, le 10 mai est la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions. « Du XVe au XIXe siècle, plus de 11 millions d’hommes, de femmes et d’enfants ont été capturés en Afrique, transportés à travers l’Atlantique et réduits en esclavage pour travailler dans des conditions très dures au sein d’exploitations coloniales en Amérique », rappelle le site vie-publique.fr.
Le 10 mai a été choisi par Jacques Chirac, alors président de la République, en référence à la date d’adoption par le Parlement du texte définitif de la loi Taubira (2001), qui fait de la traite négrière et de l’esclavage un crime contre l’humanité.
Écouter aussi Loi Taubira : le long combat pour la mémoire de l’esclavage
Des monuments en l’honneur de Solitude existent déjà. En 1999, une statue de cette héroïne méconnue, réalisée par le sculpteur Jacky Poulier, a été érigée sur le boulevard des Héros, aux Abymes, en Guadeloupe. En 2007, une sculpture créée par Nicolas Alquin a été inaugurée avenue Henri-Barbusse, à Bagneux, dans les Hauts-de-Seine.
Insurgée contre l’esclavage avant d’être pendue
Solitude – de son vrai nom, Rosalie – est née vers 1772. Elle est l’enfant d’une esclave africaine violée par un marin blanc sur le navire négrier qui la déportait aux Antilles. Elle est donc une « mulâtresse », selon le vocable utilisé à l’époque par les colons pour désigner les personnes nées d’un parent blanc et d’un parent noir. La fillette est séparée de sa mère et devient esclave de maison. Elle a une vingtaine d’années lorsqu’elle bénéficie, en 1794, de la première abolition de l’esclavage par la France.
Huit ans plus tard, en 1802, Napoléon Bonaparte envoie des militaires rétablir l’esclavage en Guadeloupe. La jeune Rosalie change de nom et devient Solitude. Enceinte de quelques mois, elle participe à la résistance et se joint même aux combats. Mais les insurgés sont vaincus. Arrêtée et condamnée à mort par les troupes coloniales, Solitude est pendue le 29 novembre 1802, le lendemain de son accouchement.
Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Paroles d’anciens esclaves et autres parutions sur l’esclavage
L’historicité de Solitude est, de fait, bien maigre. Dans son livre Histoire de la Guadeloupe, publié en 1858, Auguste Lacour lui consacre une quinzaine de lignes. Son souvenir avait été sorti de l’oubli par la publication, en 1972, de La Mulâtresse Solitude, un roman de l’écrivain André Schwarz-Bart, qui a largement extrapolé les éléments du texte d’Auguste Lacour.
En septembre 2020, l’acteur guadeloupéen Jacques Martial, adjoint chargé des outre-mer à la Mairie de Paris, résumait sobrement sa vie ainsi :
Cette femme s’est engagée politiquement, a pris les armes pour défendre les valeurs de la République, et l’a payé de sa vie.
Le Monde
https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/05/10/victimes-de-l-esclavage-qui-etait-solitude-la-mulatresse-dont-la-statue-est-inauguree-a-paris_6125538_823448.html
L'historien de la Guadeloupe Auguste Lacour, nous dit WIKI, écrit à son sujet :
« On a vu que les femmes et les enfants arrêtés sur les habitations avaient été envoyés à Palerme. Ces prisonniers d’un genre tout nouveau étaient au nombre de quatre-vingts. Leur existence, depuis leur arrestation, avait été affreuse. Il ne se passait pas d’instant qu’ils n’entendissent débattre la question de leur vie ou de leur mort. Le mulâtre Jean-Christophe insistait pour qu’on les fusillât, disant faussement que ce seraient de justes représailles ; que là où les blancs dominaient, c’était le sort qu’ils faisaient subir aux femmes de couleur. Les négresses et les mulâtresses surtout se montraient acharnées contre les femmes blanches. La mulâtresse Solitude, venue de la Pointe-à-Pitre à la Basse-Terre, était alors dans le camp de Palerme. Elle laissait éclater, dans toutes les occasions, sa haine et sa fureur. Elle avait des lapins. L’un d’eux s’étant échappé, elle s’arme d’une broche, court, le perce, le lève, et le présentant aux prisonnières : « tiens, dit-elle, en mêlant à ses paroles les épithètes les plus injurieuses, voilà comme je vais vous traiter quand il en sera temps ! ». Et cette malheureuse allait devenir mère ! Solitude n’abandonna pas les rebelles et resta près d’eux, comme leur mauvais génie, pour les exciter aux plus grands forfaits. Arrêtée enfin au milieu d’une bande d’insurgés, elle fut condamnée à mort ; mais on dut surseoir à l’exécution de la sentence. Elle fut suppliciée le 29 novembre après sa délivrance. »
On ne sait si Lacour utilise un document écrit aujourd'hui disparu (par exemple un bref rapport) ou s'il retranscrit un témoignage oral.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Solitude_(vers_1772-1802)
Sa mémoire vient d'être honorée par l'érection d'une statue à Paris.
Solitude, de son prénom Rosalie, née vers 1772 en Guadeloupe et morte le 29 novembre 1802 sur la même île, est une figure historique incarnant a posteriori la résistance des esclaves noirs luttant contre le rétablissement de l'esclavage en 1802. À la suite de l'échec du mouvement de résistance de Louis Delgrès face aux forces coloniales, elle est condamnée à mort à l'âge de 30 ans.
À l’occasion de l’inauguration à Paris de la première statue représentant une femme noire, Xavier Mauduit revient sur l’histoire de Solitude, la Guadeloupéenne qui s’est soulevée contre l’esclavage en 1802.
Vous pouvez l'écouter ici :
https://www.arte.tv/fr/videos/109298-005-A/la-statue-de-solitude/
Victimes de l’esclavage : qui était Solitude, la « mulâtresse », dont la statue est inaugurée à Paris ?
Une statue de cette Guadeloupéenne, figure de la lutte contre l’esclavage, a été inaugurée, mardi, à Paris. Une première, pour une femme noire.
Le Monde
Publié le 10 mai 2022 à 20h46 -
Savez-vous qui était Solitude ? Mardi 10 mai, une statue de cette Guadeloupéenne, figure de la lutte contre l’esclavage, a été inaugurée par la maire de Paris, Anne Hidalgo, dans un jardin qui porte déjà son nom, dans le 17e arrondissement. La décision est hautement symbolique : il s’agit de la première statue de femme noire dans la capitale.
Des statues, Paris en compte environ un millier. Une écrasante majorité d’hommes, y compris de colonisateurs, comme Joseph Gallieni, responsable du massacre des Menalamba, à Madagascar. Très peu de femmes. Si l’on exclut les figures mythologiques et les allégories – la République, l’Abondance… –, une quarantaine de femmes seulement sont visibles dans l’espace public parisien. Parmi elles, Jeanne d’Arc, George Sand, Sarah Bernhardt, Edith Piaf ou encore Dalida. Mais aucune femme noire. Jusqu’à aujourd’hui.
Le choix de la date ne doit rien au hasard. En France, depuis 2006, le 10 mai est la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions. « Du XVe au XIXe siècle, plus de 11 millions d’hommes, de femmes et d’enfants ont été capturés en Afrique, transportés à travers l’Atlantique et réduits en esclavage pour travailler dans des conditions très dures au sein d’exploitations coloniales en Amérique », rappelle le site vie-publique.fr.
Le 10 mai a été choisi par Jacques Chirac, alors président de la République, en référence à la date d’adoption par le Parlement du texte définitif de la loi Taubira (2001), qui fait de la traite négrière et de l’esclavage un crime contre l’humanité.
Écouter aussi Loi Taubira : le long combat pour la mémoire de l’esclavage
Des monuments en l’honneur de Solitude existent déjà. En 1999, une statue de cette héroïne méconnue, réalisée par le sculpteur Jacky Poulier, a été érigée sur le boulevard des Héros, aux Abymes, en Guadeloupe. En 2007, une sculpture créée par Nicolas Alquin a été inaugurée avenue Henri-Barbusse, à Bagneux, dans les Hauts-de-Seine.
Insurgée contre l’esclavage avant d’être pendue
Solitude – de son vrai nom, Rosalie – est née vers 1772. Elle est l’enfant d’une esclave africaine violée par un marin blanc sur le navire négrier qui la déportait aux Antilles. Elle est donc une « mulâtresse », selon le vocable utilisé à l’époque par les colons pour désigner les personnes nées d’un parent blanc et d’un parent noir. La fillette est séparée de sa mère et devient esclave de maison. Elle a une vingtaine d’années lorsqu’elle bénéficie, en 1794, de la première abolition de l’esclavage par la France.
Huit ans plus tard, en 1802, Napoléon Bonaparte envoie des militaires rétablir l’esclavage en Guadeloupe. La jeune Rosalie change de nom et devient Solitude. Enceinte de quelques mois, elle participe à la résistance et se joint même aux combats. Mais les insurgés sont vaincus. Arrêtée et condamnée à mort par les troupes coloniales, Solitude est pendue le 29 novembre 1802, le lendemain de son accouchement.
Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Paroles d’anciens esclaves et autres parutions sur l’esclavage
L’historicité de Solitude est, de fait, bien maigre. Dans son livre Histoire de la Guadeloupe, publié en 1858, Auguste Lacour lui consacre une quinzaine de lignes. Son souvenir avait été sorti de l’oubli par la publication, en 1972, de La Mulâtresse Solitude, un roman de l’écrivain André Schwarz-Bart, qui a largement extrapolé les éléments du texte d’Auguste Lacour.
En septembre 2020, l’acteur guadeloupéen Jacques Martial, adjoint chargé des outre-mer à la Mairie de Paris, résumait sobrement sa vie ainsi :
Cette femme s’est engagée politiquement, a pris les armes pour défendre les valeurs de la République, et l’a payé de sa vie.
Le Monde
https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/05/10/victimes-de-l-esclavage-qui-etait-solitude-la-mulatresse-dont-la-statue-est-inauguree-a-paris_6125538_823448.html
L'historien de la Guadeloupe Auguste Lacour, nous dit WIKI, écrit à son sujet :
« On a vu que les femmes et les enfants arrêtés sur les habitations avaient été envoyés à Palerme. Ces prisonniers d’un genre tout nouveau étaient au nombre de quatre-vingts. Leur existence, depuis leur arrestation, avait été affreuse. Il ne se passait pas d’instant qu’ils n’entendissent débattre la question de leur vie ou de leur mort. Le mulâtre Jean-Christophe insistait pour qu’on les fusillât, disant faussement que ce seraient de justes représailles ; que là où les blancs dominaient, c’était le sort qu’ils faisaient subir aux femmes de couleur. Les négresses et les mulâtresses surtout se montraient acharnées contre les femmes blanches. La mulâtresse Solitude, venue de la Pointe-à-Pitre à la Basse-Terre, était alors dans le camp de Palerme. Elle laissait éclater, dans toutes les occasions, sa haine et sa fureur. Elle avait des lapins. L’un d’eux s’étant échappé, elle s’arme d’une broche, court, le perce, le lève, et le présentant aux prisonnières : « tiens, dit-elle, en mêlant à ses paroles les épithètes les plus injurieuses, voilà comme je vais vous traiter quand il en sera temps ! ». Et cette malheureuse allait devenir mère ! Solitude n’abandonna pas les rebelles et resta près d’eux, comme leur mauvais génie, pour les exciter aux plus grands forfaits. Arrêtée enfin au milieu d’une bande d’insurgés, elle fut condamnée à mort ; mais on dut surseoir à l’exécution de la sentence. Elle fut suppliciée le 29 novembre après sa délivrance. »
On ne sait si Lacour utilise un document écrit aujourd'hui disparu (par exemple un bref rapport) ou s'il retranscrit un témoignage oral.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Solitude_(vers_1772-1802)
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