Portrait(s) de la princesse de Lamballe à la prison de la Force, par Gabriel

Je souhaiterais revenir sur ce profil bien connu, que nous avons présenté de nombreuses fois ici, et en particulier dans le sujet consacré à la mort de la princesse de Lamballe.

Sur cette image, sont mentionnés le nom de l'auteur, la date, et un commentaire précisant le contexte de sa réalisation :




C'est le Musée du Louvre qui conserve ce dessin.
Avant qu'il n'en soit fait don au Musée, son dernier propriétaire était : Georges Clémenceau !  
Sur ses bases d'images d’œuvres référencées en ligne, est précisé :

Portrait présumé de la princesse de Lamballe,
attribué à Georges-François-Marie Gabriel,
première moitié du XIXè siècle.



Or nous ne retrouvons pas si distinctement les notes manuscrites sur les images mises en ligne...



J'ai retrouvé sur le net cet autre dessin, probablement une copie, mais à nouveau sans la mention manuscrite :




La bibliothèque municipale de Versailles conserve quant à elle, apparemment, cet autre portrait.
Qui semble être une aquarelle.
Signée et datée Gabriel (mais cela ne veut pas forcément dire grand chose), avec comme titre : "Princesse de Lamballe. Dessiné à la Force"




Je trouve tout ceci très étonnant...

Toutes ces versions n'ont pas pu être dessinées à la Force, en effet...
Il semble donc qu'un des deux profils légendés soit un mensonge...
Et jusqu'où va le mensonge ?  A-t-on vraiment affaire au profil de la Princesse ???

C'est étrange que le texte ne se distingue pas sur les photos du Louvre. Il semblerait cependant que quelque chose soit noté...





L'aquarelle conservée à Versailles ressemble déjà davantage à une esquisse prise sur l'instant, du moins si l'on considère son aspect nettement moins abouti.

A mon humble avis, ce dessin (le joli du moins) est postérieur aux évènements, quant à la mention manuscrite visible sur la première image postée dans ce sujet, elle me semble du coup plutôt suspecte.  


Durant la période révolutionnaire, il aurait réalisé ces esquisses de portraits de contemporains : les tristes sires Hanriot et Hébert.
Pour le coup nous avons ici : de vrais croquis pris "sur le vif", et ils sont annotés du même crayon que le dessin.

Qui est Georges-François-Marie Gabriel ?

Wikipédia (en anglais) précise :

A French miniature painter and designer, born in Paris in 1775, was a pupil of Naigeon and Regnault.
Among his designs are those ordered by the French Government for the great work of the Institute on Egypt ; and among his portraits is one of Madame de Maintenon, engraved by Mécou, which forms the frontispiece to her memoirs by Lafont d'Ausonne.
The date of his death is unknown.

Vers 1823, Gabriel a produit un Recueil de têtes d'aliénés dessinées à l'hôpital de Charenton.
Ils sont pratiquement tous annotés (pour ceux qui souhaiteraient comparer les écritures).

Il y en a beaucoup, mais voici quelques exemples, pour fêter cette nouvelle année... :



Maniaque


Mélancolique


Idiote


Ancien jardinier du roi Louis XVI à Versailles


Militaire se disant roi de Suède


Joueur, devenu fou


Couturière orgueilleuse


Idiote


Charretier devenu furieux


Officier, devenu fou par opinion politique


Fille publique, idiote, par suite de traitement...?


Fou par amour

S'il s'agit de portraits en second lieu, on dirait qu'il traite des maladies mentales de façon physiognomonique... àè-è\': 

La Nuit, la Neige a écrit:
Militaire se disant roi de Suède

Ce portrait ressemble étonnamment à Mads Mikkelsen, l'interprète de
Struense dans Royal Affair !

Majesté a écrit:S'il s'agit de portraits en second lieu,

En second lieu ? Je ne comprends pas...

La Nuit, la Neige a écrit:En second lieu ? Je ne comprends pas...  

Officier, devenu fou par opinion politique, Fille publique, idiote, par suite de traitement, Fou par amour, Ancien jardinier du roi Louis XVI à Versailles... ce semble davantage des cas de folie qu'il a eu à observer là-bas alors que Idiote, Mélancolique ou Maniaque semblent plutôt des cas standards de folie, non?


Bien à vous.

Non, non. Enfin je ne crois pas : il a dessiné ces portraits sur place, voilà tout.
Je ne suis pas spécialiste, mais il y a des handicaps psychologiques certainement de naissance, et d'autres suite à "quelque chose".
Ce ne sont que quelques exemples, il illustre aussi les visages d'épileptiques, de trépanés etc.
Tous les cas de figure sont représentés.

Sans doute que l'étude de la morpho-pyschologie supposée n'est pas innocente, elle se développera tout au long du XIXè et au XXè siècle.

La nuit, la neige a écrit:Sans doute que l'étude de la morpho-pyschologie supposée n'est pas innocente, elle se développera tout au long du XIXè et au XXè siècle.

On la lira dans la Comédie Humaine de Balzac, oui...Mais Charles Le Brun, le peintre de Louis XIV, l'étudiait déjà


Bien à vous.

Sera présenté prochainement en vente aux enchères, je cite (extraits) :

Attribué à GABRIEL Georges (1775-1846)
Portrait en buste de la princesse de Lamballe (1749-1792) à la prison de La Force, en 1792.
Dessin à la mine de plomb signé en bas à droite du monogramme de l'artiste avec identification du lieu en haut à droite «La Force 1792», conservé dans son encadrement d'époque en bois doré. (...)
À vue : H. : 19,5 cm - L. : 16 cm.
Cadre : H. : 37 cm - L. : 32 cm.





Référence : le Musée du Louvre conserve une autre version de ce dessin bien connu représentant la princesse de Lamballe emprisonnée, mais qui semble moins abouti que la version que nous présentons.
La nôtre est de plus signée de l'initiale de l'artiste «G» et situé «La Forge 1792». Avant qu'il n'en soit fait don au Musée du Louvre, son dernier propriétaire fut Georges Clemenceau.

D'autre version de ce portrait sont connues, dont l'une se trouve à la bibliothèque municipale de Versailles et dont les détails se rapprochent plus de notre version qui elle aussi est signée et identifiée. Enfin en 1845 Jules Perreau publie une gravure dont il s'inspire de la version du dessin réalisé par Gabriel, cette réalisation par certains détails peut faire penser que notre dessin en fut le modèle.

Historique : la prison de La Force était un hôtel particulier qui fut transformé en maison de détention et servit de prison pour la ville de Paris entre 1780 et 1845. C'est en ce lieu que la princesse de Lamballe fut emprisonnée du 19 août jusqu'au matin de sa mort le 3 septembre 1792.


* Source et infos complémentaires : Coutau-Bégarie & Associés - Vente Noblesse et Royauté du 18 novembre 2020


Les autres versions de ce portrait, évoquées dans le descriptif de la maison de vente, sont présentées dans ce sujet, messages précédents.
Quelle est l'originale, s'il s'agit bien de la princesse ?

Sinistre.

Ce portrait m'a toujours intrigué, j'ai du mal à y reconnaître la princesse de Lamballe telle que portraiturée par Callet par exemple.

Nous sommes 17 ans plus tard dans des circonstances particulières qui pourrait expliquer cette austère image.
Il me semble retrouver la pointe du nez légèrement plongeante du portrait de Callet.  
Moins évident, les proportions du front un peu bas, même si sur le dessin les cheveux le recouvre en partie.