Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
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LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: La France et le Monde au XVIIIe siècle :: Histoire et événements en France
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Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
.
LES FEMMES ENCEINTES DEVANT LE TRIBUNAL REVOLUTIONNAIRE
( ... )
Le 24 janvier 1794, il fut décidé que l'Archevêché de Paris serait transformé en une infirmerie provisoire, uniquement destinée aux prisonniers de la Conciergerie. On nomma trois médecins, un économe, un portier, le citoyen Quinquet y jouait le rôle d'apothicaire . La sacristie devenait salle commune aux chirurgiens et officiers de santé, la basse sacristie amphithéâtre et dépôt mortuaire. Le concierge était personnellement responsable d'éventuelles évasions. Les bâtiments affectés aux malades se divisaient en un certain nombre de salles qui occupaient plusieurs étages .
Nous voyons bien sur cette gravure les maisons construites sur le pont de Notre Dame qui font l'objet de l'un de nos sujets, je le rappelle .
ICI : https://marie-antoinette.forumactif.org/t3131-l-habitat-parisien-au-xviiie-siecle-les-maisons-sur-les-ponts-de-paris?highlight=ponts
La discipline était sévère, si sévère même que la brutalité avec laquelle Tarcilly remplissait ses fonctions de geôlier-concierge provoqua un commencement de révolte que seul le chirurgien Bayard parvint à réprimer .
Les malades ne pouvaient être reçus à l'hospice que sur ordre écrit de l'accusateur public rendu d'après l'avis des médecins et, une fois guéris ( pour ceux d'eux qui guérissaient ) quittaient les lieux rapidement pour laisser place à de nouveaux patients. Ils étaient transférés dans l'une des nombreuses prisons de la capitale. Toujours est-il que les détenus malades se trouvaient à deux pas du ci-devant Palais de Justice, sous la main de Fouquier-Tinville et par conséquent à deux pas de l'échafaud.
Les confrères du docteur Bayard, médecins ou charlatans ? àè-è\':
LES FEMMES ENCEINTES OU SE DISANT ENCEINTES, GUILLOTINEES, FUSILLEES OU NOYEES.
C'est à l'Evêché que l'on envoyait les condamnées qui faisaient une déclaration de grossesse . Les médecins assistés de la citoyenne Prioux , sage-femme, derssaient un procès-verbal dont les conclusions étaient soumises à l'accusateur public . Si elles étaient défavorables on passait outre, et le bourreau faisait son office . Si les condamnées étaient reconnues en état de grossesse, on accordait aux futures mamans un sursis jusqu'à l'accouchement, puis on envoyait l'enfant à peine dans les langes à l'hospice, et la mère, toute chancelante encore, à l'échafaud .
FEMMES EXECUTEES APRES LEUR DELIVRANCE
Le 21 mars 1794, Hébert, accusé de comploter la restauration de Louis XVII, montait les marches du tribunal, accompagné de dix-neuf accusés parmi lesquels la citoyenne Marie-Anne-Latreille, 34 ans, veuve du général Quétineau. Elle se déclara enceinte, passa par les mains de la Prioux qui confirma une grossesse de quatre mois. Mme Quétineau fut envoyée à l'Evêché où elle rencontra Mme Roger ( que la guillotine avait récemment faite veuve elle aussi ), enceinte de huit mois.
Trois semaines après son internement à l'Evêché, Mme Quétineau faisait une fausse-couche tandis que Mme Roger accouchait .
Un mois plus tard, le 11 mai 1794, Mmes Quétineau et Roger, toutes deux intrépides et calmes, livraient leurs têtes au couteau. Leurs corps furent portés au cimetière des Errancis, dans ce petit angle détaché du parc Monceau où Danton, qui venait d'ouvrir les fosses, attendait Robespierre.
Madeleine Binet-Gasson, exécutée après sa délivrance, fut une victime de Carrier, le dément furieux qui venait d'inventer un nouvel instrument de mort . Elle était veuve de Louis-Henri de la Roche Saint-André ( ci-devant guillotiné ) et, qualifiée d'ex-noble devait partager son sort .
A SUIVRE ...
LES FEMMES ENCEINTES DEVANT LE TRIBUNAL REVOLUTIONNAIRE
( ... )
Le 24 janvier 1794, il fut décidé que l'Archevêché de Paris serait transformé en une infirmerie provisoire, uniquement destinée aux prisonniers de la Conciergerie. On nomma trois médecins, un économe, un portier, le citoyen Quinquet y jouait le rôle d'apothicaire . La sacristie devenait salle commune aux chirurgiens et officiers de santé, la basse sacristie amphithéâtre et dépôt mortuaire. Le concierge était personnellement responsable d'éventuelles évasions. Les bâtiments affectés aux malades se divisaient en un certain nombre de salles qui occupaient plusieurs étages .
Nous voyons bien sur cette gravure les maisons construites sur le pont de Notre Dame qui font l'objet de l'un de nos sujets, je le rappelle .
ICI : https://marie-antoinette.forumactif.org/t3131-l-habitat-parisien-au-xviiie-siecle-les-maisons-sur-les-ponts-de-paris?highlight=ponts
La discipline était sévère, si sévère même que la brutalité avec laquelle Tarcilly remplissait ses fonctions de geôlier-concierge provoqua un commencement de révolte que seul le chirurgien Bayard parvint à réprimer .
Les malades ne pouvaient être reçus à l'hospice que sur ordre écrit de l'accusateur public rendu d'après l'avis des médecins et, une fois guéris ( pour ceux d'eux qui guérissaient ) quittaient les lieux rapidement pour laisser place à de nouveaux patients. Ils étaient transférés dans l'une des nombreuses prisons de la capitale. Toujours est-il que les détenus malades se trouvaient à deux pas du ci-devant Palais de Justice, sous la main de Fouquier-Tinville et par conséquent à deux pas de l'échafaud.
Les confrères du docteur Bayard, médecins ou charlatans ? àè-è\':
LES FEMMES ENCEINTES OU SE DISANT ENCEINTES, GUILLOTINEES, FUSILLEES OU NOYEES.
C'est à l'Evêché que l'on envoyait les condamnées qui faisaient une déclaration de grossesse . Les médecins assistés de la citoyenne Prioux , sage-femme, derssaient un procès-verbal dont les conclusions étaient soumises à l'accusateur public . Si elles étaient défavorables on passait outre, et le bourreau faisait son office . Si les condamnées étaient reconnues en état de grossesse, on accordait aux futures mamans un sursis jusqu'à l'accouchement, puis on envoyait l'enfant à peine dans les langes à l'hospice, et la mère, toute chancelante encore, à l'échafaud .
FEMMES EXECUTEES APRES LEUR DELIVRANCE
Le 21 mars 1794, Hébert, accusé de comploter la restauration de Louis XVII, montait les marches du tribunal, accompagné de dix-neuf accusés parmi lesquels la citoyenne Marie-Anne-Latreille, 34 ans, veuve du général Quétineau. Elle se déclara enceinte, passa par les mains de la Prioux qui confirma une grossesse de quatre mois. Mme Quétineau fut envoyée à l'Evêché où elle rencontra Mme Roger ( que la guillotine avait récemment faite veuve elle aussi ), enceinte de huit mois.
Trois semaines après son internement à l'Evêché, Mme Quétineau faisait une fausse-couche tandis que Mme Roger accouchait .
Un mois plus tard, le 11 mai 1794, Mmes Quétineau et Roger, toutes deux intrépides et calmes, livraient leurs têtes au couteau. Leurs corps furent portés au cimetière des Errancis, dans ce petit angle détaché du parc Monceau où Danton, qui venait d'ouvrir les fosses, attendait Robespierre.
Madeleine Binet-Gasson, exécutée après sa délivrance, fut une victime de Carrier, le dément furieux qui venait d'inventer un nouvel instrument de mort . Elle était veuve de Louis-Henri de la Roche Saint-André ( ci-devant guillotiné ) et, qualifiée d'ex-noble devait partager son sort .
A SUIVRE ...
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
Je suis ravie de voir que ce rare ouvrage est à nouveau édité !!!!
Il est à signaler qu'il avait prévu de faire "évader" la Reine en l'installant à l'Archeveché, ce qui aurait permis de la faire partir par les sous-sols donnant sur la seine - le projet assez bien organisé, n'a pas eu de suite à cause de changements dans le personnel.
MARIE ANTOINETTE :
Il est à signaler qu'il avait prévu de faire "évader" la Reine en l'installant à l'Archeveché, ce qui aurait permis de la faire partir par les sous-sols donnant sur la seine - le projet assez bien organisé, n'a pas eu de suite à cause de changements dans le personnel.
MARIE ANTOINETTE :
MARIE ANTOINETTE- Messages : 3729
Date d'inscription : 22/12/2013
Age : 78
Localisation : P A R I S
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
Je ne sais pas s'il est à nouveau édité, mais il est consultable en ligne .
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Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
Max Billard poursuit avec
LES SIMULATRICES ET LES FEMMES NON RECONNUES ENCEINTES
PAR LE TRIBUNAL REVOLUTIONNAIRE
Dans cette sanglante tragédie, plus d'une femme ont eu recours à tous les subterfuges pour sauver leurs jours .
Bien sûr il y eut la princesse de Monaco : https://marie-antoinette.forumactif.org/t3140-francoise-therese-de-choiseul-stainville-princesse-de-monaco#92269
... mais le même sort allait réunir aussi Marguerite Goupil épouse Hébert, la mère Duchesne en quelque sorte, et Lucile Desmoulins, la veuve de Camille . Espérant gagner du temps, la mère Hébert se déclara enceinte . Mais les médecins après examen décrétèrent ne trouver aucun signe de grossesse et qu'il n'y avait donc pas lieu de surseoire .
Une couturière Catherine-Louise-Honorée Ruffin, veuve Hédon, épouse Drieux en secondes noces, déclara n'avoir point vu de quatre mois ses secours périodiques et donc se croire enceinte. La femme Prioux l'emmena dans une des salles du greffe où deux médecins, Théry et Soubervielle procédèrent à son examen et déclarèrent qu'elle ne pouvait être grosse . La responsabilité de Fouquier-Tinville était couverte par le certificat des médecins .
Deux jours plus tard la malheureuse était exécutée.
La princesse Lubomirska, née Rosalie Chodkiewicz, 24 ans,
fut arrêtée et écrouée à la Petite Force pour avoir entretenu avec Mme du Barry une correspondance contre-révolutionnaire .
Sa petite fille de 5ans fut mise en prison le même jour que sa mère :
Le prince Lubomirski, alors en Pologne, ignorait le sort de son enfant . Il l'apprit et " la fit réclamer " alors que sa mère venait d'être livrée à la guillotine et trois jours avant que l'enfant ne fut envoyée aux Enfants-Trouvés .
La princesse avait comparu le 19 avril devant le tribunal révolutionnaire . Elle avait écrit à la conspiratrice Dubarry : " La reine est encore à la Conciergerie. Il est faux qu'on ait le projet de la ramener au Temple; cependant je suis tranquille sur son sort ... " preuve évidente qu'elle comptait sur les trames formées alors par l'archiduchesse d'Autriche pour l'arracher des bras de la justice et lui assurer l'impunité de ses crimes .
Fouquier concluait à la mort.
Son défenseur, Chauveau-Lagarde ne put rien pour elle . La malheureuse se déclara enceinte de six semaines. Elle fut transférée à l'Archevêché.
La princesse, de désespoir, avait tout fait pour être enceinte . L'abbé de la Trémouille allait lui rendre ce service . Il le paya de sa vie sur dénonciation à l'accusateur public . Pendant ce temps, la sinistre Prioux et les médecins Enguchard et Naury concluaient que la princesse n'était pas enceinte .
La veille de sa mort, la princesse Lubomirska écrivit à son amie la princesse de Hohenhöle pour lui confier sa petite fille :
" Adieu Amélie, je vais bientôt cesser de vivre . Souviens-toi de ton amie et aime-moi dans la personne de mon enfant. "
LES SIMULATRICES ET LES FEMMES NON RECONNUES ENCEINTES
PAR LE TRIBUNAL REVOLUTIONNAIRE
Dans cette sanglante tragédie, plus d'une femme ont eu recours à tous les subterfuges pour sauver leurs jours .
Bien sûr il y eut la princesse de Monaco : https://marie-antoinette.forumactif.org/t3140-francoise-therese-de-choiseul-stainville-princesse-de-monaco#92269
... mais le même sort allait réunir aussi Marguerite Goupil épouse Hébert, la mère Duchesne en quelque sorte, et Lucile Desmoulins, la veuve de Camille . Espérant gagner du temps, la mère Hébert se déclara enceinte . Mais les médecins après examen décrétèrent ne trouver aucun signe de grossesse et qu'il n'y avait donc pas lieu de surseoire .
Une couturière Catherine-Louise-Honorée Ruffin, veuve Hédon, épouse Drieux en secondes noces, déclara n'avoir point vu de quatre mois ses secours périodiques et donc se croire enceinte. La femme Prioux l'emmena dans une des salles du greffe où deux médecins, Théry et Soubervielle procédèrent à son examen et déclarèrent qu'elle ne pouvait être grosse . La responsabilité de Fouquier-Tinville était couverte par le certificat des médecins .
Deux jours plus tard la malheureuse était exécutée.
La princesse Lubomirska, née Rosalie Chodkiewicz, 24 ans,
fut arrêtée et écrouée à la Petite Force pour avoir entretenu avec Mme du Barry une correspondance contre-révolutionnaire .
Sa petite fille de 5ans fut mise en prison le même jour que sa mère :
Département de Police
Commune de Paris
Le concierge de la maison de Monprin ( rue Notre-Dame-des Champs ) recevra le prisonnier ci-après dénommé, savoir la citoyenne Labomiska ( sic ) âgée de cinq ans environ, qui lui est envoyée de la prisons des Anglaises, rue Saint-Victor, et il la gardera jusqu'à nouvel ordre .
Fait au département de police, Hôtel de la Mairie, le 29 germinal de l'an second de la République .
Les administrateurs de police
Hergot, beauvois
Commune de Paris
Le concierge de la maison de Monprin ( rue Notre-Dame-des Champs ) recevra le prisonnier ci-après dénommé, savoir la citoyenne Labomiska ( sic ) âgée de cinq ans environ, qui lui est envoyée de la prisons des Anglaises, rue Saint-Victor, et il la gardera jusqu'à nouvel ordre .
Fait au département de police, Hôtel de la Mairie, le 29 germinal de l'an second de la République .
Les administrateurs de police
Hergot, beauvois
Le prince Lubomirski, alors en Pologne, ignorait le sort de son enfant . Il l'apprit et " la fit réclamer " alors que sa mère venait d'être livrée à la guillotine et trois jours avant que l'enfant ne fut envoyée aux Enfants-Trouvés .
La princesse avait comparu le 19 avril devant le tribunal révolutionnaire . Elle avait écrit à la conspiratrice Dubarry : " La reine est encore à la Conciergerie. Il est faux qu'on ait le projet de la ramener au Temple; cependant je suis tranquille sur son sort ... " preuve évidente qu'elle comptait sur les trames formées alors par l'archiduchesse d'Autriche pour l'arracher des bras de la justice et lui assurer l'impunité de ses crimes .
Fouquier concluait à la mort.
Son défenseur, Chauveau-Lagarde ne put rien pour elle . La malheureuse se déclara enceinte de six semaines. Elle fut transférée à l'Archevêché.
La princesse, de désespoir, avait tout fait pour être enceinte . L'abbé de la Trémouille allait lui rendre ce service . Il le paya de sa vie sur dénonciation à l'accusateur public . Pendant ce temps, la sinistre Prioux et les médecins Enguchard et Naury concluaient que la princesse n'était pas enceinte .
La veille de sa mort, la princesse Lubomirska écrivit à son amie la princesse de Hohenhöle pour lui confier sa petite fille :
" Adieu Amélie, je vais bientôt cesser de vivre . Souviens-toi de ton amie et aime-moi dans la personne de mon enfant. "
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Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Comtesse Diane- Messages : 7397
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : TOURAINE
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
D'autres femmes tentèrent de se faire passer pour enceintes . Par exemple Mmes d'Hinnisdal, de Meursin et de Fleury .
Problème : les deux premières étaient divorcées quant à Mme Joly de Fleury, elle était veuve ! Ces dames durent nommer, sur une déposition signée, leurs amants réels ou supposés ...
Mme d'Hinnisdal prétendit s'être trouvée seule un instant avec un nommé Charles-Gustave Graindorge, à la maison de Saint-Lazare . Mme de Fleury désigna un certain François-Thibault Delagarde, et Mme de Meursin un sieur Gravier de Vergennes .
Les prévenues passèrent par les mains de la sinistre Prioux ( que nous connaissons bien maintenant ) et deux médecins qui ne diagnostiquèrent aucune grossesse.
Ces malheureuses moururent le 7 thermidor, l'avant veille de la chute de Robespierre ...
Le même jour que la princesse de Monaco se déclarèrent enceintes des oeuvres de co-détenus Mme Sabine de Viriville, épouse divorcée du neveu de Talleyrand, et la vicomtesse de Butler.
Même traitement : la Prioux, deux médecins ... et la mort, le surlendemain .
Problème : les deux premières étaient divorcées quant à Mme Joly de Fleury, elle était veuve ! Ces dames durent nommer, sur une déposition signée, leurs amants réels ou supposés ...
Mme d'Hinnisdal prétendit s'être trouvée seule un instant avec un nommé Charles-Gustave Graindorge, à la maison de Saint-Lazare . Mme de Fleury désigna un certain François-Thibault Delagarde, et Mme de Meursin un sieur Gravier de Vergennes .
Les prévenues passèrent par les mains de la sinistre Prioux ( que nous connaissons bien maintenant ) et deux médecins qui ne diagnostiquèrent aucune grossesse.
Ces malheureuses moururent le 7 thermidor, l'avant veille de la chute de Robespierre ...
Le même jour que la princesse de Monaco se déclarèrent enceintes des oeuvres de co-détenus Mme Sabine de Viriville, épouse divorcée du neveu de Talleyrand, et la vicomtesse de Butler.
Même traitement : la Prioux, deux médecins ... et la mort, le surlendemain .
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Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
Cela fait froid dans le dos...
La nuit, la neige- Messages : 18137
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
;
Oui, n'est-ce pas ... brrrrr ! et encore, j'ai sauté les noyades de Nantes .
Dans toute cette horreur existait un paradis des prisonniers ( riches est-il besoin de le préciser ) :
La Maison des Oiseaux
On y était écroué par faveur et moyennant finances .
Les prix étaient exorbitants, mais quel écot n'eût-on pas payé pour échapper aux griffes de Fouquier ?
La section le savait bien, en tirait de jolis profits, choyait son petit troupeau, faisait le silence sur les incarcérées et cachait leurs noms aux oreilles indiscrètes .
Or voici que, depuis longtemps, ce monstre de Fouquier cherchait vainement la princesse de Chimay dans toutes les geôles, tous les cachots de Paris sans parvenir à la trouver . Un beau jour, par inadvertance, le commis-greffier Ducret, en parlant du beau domaine de la princesse à Issy, laissa échapper que sa propriétaire était encagée aux Oiseaux ! Le 7 thermidor, une charrette s'arrêta devant les Oiseaux . L'on chargea une fournée de ses précieux pensionnaires qui allèrent passer leur dernière nuit à la Conciergerie . Aux côtés de Mme de Chimay s'entassèrent la comtesse du Plessis-Chatillon de Narbonne-Pelet, le duc de Clermont-Tonnerre, le marquis de Crussol d'Amboise, M. de Saint-Simon, évêque d'Agde, la comtesse de Grammont, dame d'atours de Marie-Antoinette, Mme de Colbert-Maulevrier, Mme d'Armenthière et Louise-Cécile Quévrin, 32 ans, mariée à un sieur Lusigny, femme de chambre de la comtesse de Narbonne-Pelet . C'est elle seule qui nous occupe . C'est elle qui va se dire enceinte des suites d'un commerce charnel avec un certain Boucher, négociant .
La Prioux + 2 médecins = pas de grossesse = la mort ... pauvre Louise-Lucile, le 9 thermidor même, comme la princesse de Monaco !
Olympe de Gouges est arrêtée le 20 juillet 93 et transférée à la Petite Force . Bien-sûr condamnée à mort par le tribunal révolutionnaire, elle s'écrit, au prononcé du jugement, avec un geste impérieux et d'une voix dominatrice :
" Mes ennemis n'auront pas la gloire de voir couler mon sang . Je suis enceinte et donnerai à la République un citoyen et une citoyenne . "
Transfert à l'Evêché.
Pas de Prioux pour cette fois mais la sage-femme Paquin et les médecins Naury et Théry. Ils déclarèrent ne pas pouvoir porter un jugement définitif sur son état ... Fouquier estima qu'incarcérée depuis cinq mois sans communication avec l'extérieur la messe était dite, et qu'il fallait " passer outre dans les vingt-quatre heures à l'exécution ."
Adieu, Olympe !
Oui, n'est-ce pas ... brrrrr ! et encore, j'ai sauté les noyades de Nantes .
Dans toute cette horreur existait un paradis des prisonniers ( riches est-il besoin de le préciser ) :
La Maison des Oiseaux
On y était écroué par faveur et moyennant finances .
Les prix étaient exorbitants, mais quel écot n'eût-on pas payé pour échapper aux griffes de Fouquier ?
La section le savait bien, en tirait de jolis profits, choyait son petit troupeau, faisait le silence sur les incarcérées et cachait leurs noms aux oreilles indiscrètes .
Or voici que, depuis longtemps, ce monstre de Fouquier cherchait vainement la princesse de Chimay dans toutes les geôles, tous les cachots de Paris sans parvenir à la trouver . Un beau jour, par inadvertance, le commis-greffier Ducret, en parlant du beau domaine de la princesse à Issy, laissa échapper que sa propriétaire était encagée aux Oiseaux ! Le 7 thermidor, une charrette s'arrêta devant les Oiseaux . L'on chargea une fournée de ses précieux pensionnaires qui allèrent passer leur dernière nuit à la Conciergerie . Aux côtés de Mme de Chimay s'entassèrent la comtesse du Plessis-Chatillon de Narbonne-Pelet, le duc de Clermont-Tonnerre, le marquis de Crussol d'Amboise, M. de Saint-Simon, évêque d'Agde, la comtesse de Grammont, dame d'atours de Marie-Antoinette, Mme de Colbert-Maulevrier, Mme d'Armenthière et Louise-Cécile Quévrin, 32 ans, mariée à un sieur Lusigny, femme de chambre de la comtesse de Narbonne-Pelet . C'est elle seule qui nous occupe . C'est elle qui va se dire enceinte des suites d'un commerce charnel avec un certain Boucher, négociant .
La Prioux + 2 médecins = pas de grossesse = la mort ... pauvre Louise-Lucile, le 9 thermidor même, comme la princesse de Monaco !
Olympe de Gouges est arrêtée le 20 juillet 93 et transférée à la Petite Force . Bien-sûr condamnée à mort par le tribunal révolutionnaire, elle s'écrit, au prononcé du jugement, avec un geste impérieux et d'une voix dominatrice :
" Mes ennemis n'auront pas la gloire de voir couler mon sang . Je suis enceinte et donnerai à la République un citoyen et une citoyenne . "
Transfert à l'Evêché.
Pas de Prioux pour cette fois mais la sage-femme Paquin et les médecins Naury et Théry. Ils déclarèrent ne pas pouvoir porter un jugement définitif sur son état ... Fouquier estima qu'incarcérée depuis cinq mois sans communication avec l'extérieur la messe était dite, et qu'il fallait " passer outre dans les vingt-quatre heures à l'exécution ."
Adieu, Olympe !
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Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
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LES FEMMES ENCEINTES ÉCHAPPÉES À LA GUILLOTINE
.... car il y en eut !
Max Billard cite Mme de Bonchamps, Claire Sevin, Mme Mégret de Sérilly, Mme de Blamont, la femme Baty, la femme Malicornet, Mme de Beauvillier, Mme de Cornulier, les femmes Mourre, Cauvillets, Salmon, Bourgoin, Combe, Belisa Bastin, Berthelemot et Bridan.
Après le terrible drame du 9 thermidor, Tallien régnait à la place de Robespierre. La grande victoire de la Convention fut une journée qui dura cinq jours et cinq nuits. Le matin du 10, Barère vint dire que la justice nationale avait triomphé. Pourtant, après avoir abattu le tyran, les thermidoriens, pendant plusieurs jours, vont envoyer encore des victimes à l’échafaud ; leur patriotisme indécis va flotter longtemps entre l’assassinat et la justice, entre la révolution et la contre-révolution, et ce n’est que comme forcés par l’entraînement général des esprits, par l’élan que le supplice de Robespierre a imprimé aux Parisiens, que ses collègues en tyrannie et cruauté feront remiser la guillotine et se tourneront vers la clémence.
Toujours est-il que la grande épouvante était finie. Paris respirait.
Pons de Verdun, avocat au Parlement, prend la parole .
« Huit femmes ont été condamnées à mort par le ci-devant Tribunal révolutionnaire ; leur exécution n’a été suspendue que parce qu’elles ont été reconnues enceintes.
« Voici le projet de décret que je vous propose :
« La Convention nationale décrète qu’il est sursis au jugement portant peine de mort, rendu par l’ancien Tribunal révolutionnaire, contre les huit pétitionnaires, auquel jugement il avait déjà été sursis par le tribunal, parce que ces condamnées se sont déclarées et ont été reconnues enceintes ; renvoie leur pétition aux comités de législation de salut public et de sûreté générale, pour y être statué définitivement. »
Ce décret est adopté.
Pons de Verdun continue : « Maintenant, citoyens, permettez-moi de vous demander si vous avez jamais pu vous arrêter sans frémir à l’idée d’un être faible, d’une femme condamnée à mort, forcée en quelque sorte de la boire goutte à goutte pendant un sursis de plusieurs mois, et sûre de la recevoir après qu’elle aura donné la vie ; l’humanité s’afflige, le but politique est manqué. Pouvez-vous compter sur la conservation d’un enfant dont la mère a passé tout le temps de sa grossesse dans une situation qu’il est impossible de se peindre ? Vos cœurs et vos esprits sont pénétrés au premier mot de ces réflexions. Je demande que vous renvoyiez à votre comité de législation la proposition que je fais de décréter qu’à l’avenir aucune femme prévenue d’un crime comportant peine de mort ne pourra être mise en jugement sans qu’il ait été vérifié et reconnu qu’elle n’est pas enceinte. »
Cette proposition est décrétée 129, au milieu des plus chaleureuses acclamations.
Pons de Verdun, qui voulait inaugurer le triomphe désormais solide d’une dictature appuyée sur les lois éternelles du cœur humain, remontait à la tribune de la Convention le 23 germinal (12 avril 1795).
« Faire pour l’humanité, dans un temps de révolution, dit-il, ce que la philosophie n’avait pas même entrepris dans les temps plus tranquilles, c’est assurer à cette révolution autant d’amis qu’un système contraire lui en avait enlevés ; c’est prouver que, ramenée à son véritable objet, la liberté régénère les esprits et les cœurs, agrandit le domaine de la législation et perfectionne l’ordre social.
« J’étais vivement pénétré de cette consolante idée, de cette douce espérance, que l’heureuse révolution du 9 thermidor avait éveillée dans mon cœur, lorsque, après avoir excité votre justice et votre sensibilité en faveur de sept infortunées condamnées à mort par le Tribunal révolutionnaire, je vous proposai de décréter qu’à l’avenir aucune femme prévenue d’un crime comportant la peine de mort, ne pourrait être mise en jugement qu’il n’eût été constaté, de la manière ordinaire, qu’elle n’était pas enceinte.
« Cette proposition fut accueillie comme elle devait l’être par des législateurs humains. Plusieurs d’entre vous crurent qu’elle avait été à l’instant même convertie en loi, mais elle n’avait été que renvoyée à votre comité de législation, et je viens aujourd’hui vous proposer en son nom de décréter cette proposition, à laquelle il a cru devoir donner une plus grande extension, en appliquant son bénéfice, par un effet rétroactif, à toutes les femmes condamnées à mort, dont l’exécution a été suspendue pour cause de grossesse.
« Vous vous rappelez peut-être quels furent les motifs dont j’appuyai alors cette demande : aussi ne ferai-je que les reproduire rapidement, et je vous épargnerai leur développement, que je ne pourrais entreprendre sans attirer votre attention sur le tableau déchirant que présenterait l’humanité aux prises avec la justice.
« La plus forte peine que prononce votre code pénal contre l’homme atteint et convaincu du plus grand crime est la mort ; et cette mort, le législateur l’a voulue sans agonie, dégagée, pour ainsi dire, de toutes les angoisses qui la multiplient et qui ne font que prolonger les douleurs de ce triste moment ; il a voulu qu’elle ne pût être différée plus de vingt-quatre heures après la condamnation. Comment vous écarteriez-vous, sans injustice et sans vous mettre en contradiction avec cette loi, d’une de ses dispositions dictées par l’humanité, et consignée dans la Déclaration des Droits ? Pour qui vous en écarteriez-vous ? Pour un être faible, que la nature semble avoir particulièrement recommandé à la sensibilité du législateur.
« La voix de l’humanité ne se serait-elle donc fait entendre que pour ce malheureux fœtus, peut-être encore privé de la vie, de cette vie que vous commandez si inhumainement à sa mère de lui donner, et dont tout le prix sera la fin de l’horrible agonie que la loi lui a réservée ?
« Cependant, cette pénible agonie, aux horreurs de laquelle vous la laissez en proie, peut se prolonger pendant sept ou huit mois. En avons-nous bien calculé toute la durée ? Et de quel droit la société commanderait-elle une aussi longue souffrance contre un de ses membres qu’elle n’a voulu faire participer à aucun des nombreux avantages qu’elle réserve exclusivement aux hommes ?
« Quel barbare privilège ! Ah ! sans doute, citoyens, vous sentez, comme moi, que la société l’a fait beaucoup plus souffrir qu’elle n’en a réellement le droit.
« Pourquoi ce long, cet éternel supplice ? pour obtenir un enfant que sa mère ne connaîtra que par les douleurs qu’il lui aura causées, qu’elle ne devra voir que comme le terme de sa vie ; dont la naissance, ce moment qui éveille dans le sein maternel de si tendres sentiments, ne s’annoncera que pour ajouter aux douleurs de l’enfantement celle de la plus cruelle séparation, et elle ne présentera à son imagination en délire que la perspective désespérante de l’échafaud qui l’attend.
« Espérerions-nous donc ainsi, citoyens, pouvoir jamais atteindre le but politique qui nous fait retarder le supplice de cette mère infortunée !
« Si le désespoir ne l’entraînait pas à la cruelle résolution de frustrer vos espérances, cet avenir désespérant, cet échafaud, cette prison même, jusqu’aux plaintes que cette destinée affreuse arrache à tout ce qui l’entoure, tout ne concourt-il pas à altérer à la fois la santé de la mère et de l’enfant, et ne prépare-t-il pas au triste fruit de tant de douleurs une existence pénible, que les soins prévenants d’une mère tendre ne devront point alléger, et que ne remplacent jamais les secours mercenaires que vous lui destinez ?
« C’est ainsi que, marchant d’injustices en injustices, vous violez le premier vœu de la nature, qui veut impérieusement que la mère allaite son enfant, qui veut qu’elle soit sa première institutrice, comme son premier appui.
« C’est ainsi que, pour atteindre le but politique, dont elle seule ne peut espérer aucun avantage, dont elle n’est que le malheureux instrument, vous lui arrachez sans pitié son enfant pour l’envoyer à l’échafaud, et que vous ne le lui montrez que comme le signal de son supplice.
« Mais c’est trop longtemps, citoyens, arrêter vos regards sur ce tableau déchirant, dont j’aurais voulu vous épargner les tristes couleurs, et je me hâte de soulager votre cœur en vous proposant de mettre un terme à tant d’injustices par le décret que votre comité m’a chargé de vous soumettre.
« Vous verrez qu’une de ses dispositions a pour but d’arrêter votre humanité au moment où la société a droit de lui prescrire un terme ; car, sans doute, vous ne voulez pas rendre à la liberté une incendiaire, une empoisonneuse, ou toute autre grande coupable, dont l’impunité pourrait accroître la malveillance ou l’audace.
« Voici le projet de décret :
« La Convention nationale, ouï le rapport de son comité de législation, décrète ce qui suit :
Art. Ier. – À l’avenir, aucune femme prévenue de crime emportant la peine de mort ne pourra être mise en jugement qu’il n’ait été vérifié de la manière ordinaire quelle n’est pas enceinte.
Art. II. – Le sursis provisoire à tout jugement de mort rendu contre des femmes dont l’exécution a été suspendue pour cause de grossesse, est déclaré définitif.
Art. III. – Les comités de législation et de sûreté générale sont autorisés à statuer définitivement sur la mise en liberté ou la détention ultérieure desdites condamnées.
Art. IV. – Les accusateurs publics près les tribunaux criminels ordinaires et extraordinaires sont en conséquence tenus d’adresser audit comité de législation dans quinzaine à compter du jour de la publication de la présente loi tous les jugements de la nature de ceux ci-dessus, et les procédures et pièces sur lesquelles ils sont intervenus.
Art. V. – L’insertion de la présente loi au Bulletin lui tiendra lieu de promulgation.
Ce projet de décret est adopté par la Convention, qui applaudit au discours de Pons de Verdun. On reconnaissait dans cet homme sensible, qui prêchait l’humanité de manière si édifiante, le défenseur des Jeunes filles de Verdun, coupables d’avoir, deux ans auparavant, offert des dragées au roi de Prusse ( ) et condamnées à mort, malgré l’ancienneté de l’injure et les triomphes vengeurs de la République .
LES FEMMES ENCEINTES ÉCHAPPÉES À LA GUILLOTINE
.... car il y en eut !
Max Billard cite Mme de Bonchamps, Claire Sevin, Mme Mégret de Sérilly, Mme de Blamont, la femme Baty, la femme Malicornet, Mme de Beauvillier, Mme de Cornulier, les femmes Mourre, Cauvillets, Salmon, Bourgoin, Combe, Belisa Bastin, Berthelemot et Bridan.
Après le terrible drame du 9 thermidor, Tallien régnait à la place de Robespierre. La grande victoire de la Convention fut une journée qui dura cinq jours et cinq nuits. Le matin du 10, Barère vint dire que la justice nationale avait triomphé. Pourtant, après avoir abattu le tyran, les thermidoriens, pendant plusieurs jours, vont envoyer encore des victimes à l’échafaud ; leur patriotisme indécis va flotter longtemps entre l’assassinat et la justice, entre la révolution et la contre-révolution, et ce n’est que comme forcés par l’entraînement général des esprits, par l’élan que le supplice de Robespierre a imprimé aux Parisiens, que ses collègues en tyrannie et cruauté feront remiser la guillotine et se tourneront vers la clémence.
Toujours est-il que la grande épouvante était finie. Paris respirait.
Pons de Verdun, avocat au Parlement, prend la parole .
« Huit femmes ont été condamnées à mort par le ci-devant Tribunal révolutionnaire ; leur exécution n’a été suspendue que parce qu’elles ont été reconnues enceintes.
« Voici le projet de décret que je vous propose :
« La Convention nationale décrète qu’il est sursis au jugement portant peine de mort, rendu par l’ancien Tribunal révolutionnaire, contre les huit pétitionnaires, auquel jugement il avait déjà été sursis par le tribunal, parce que ces condamnées se sont déclarées et ont été reconnues enceintes ; renvoie leur pétition aux comités de législation de salut public et de sûreté générale, pour y être statué définitivement. »
Ce décret est adopté.
Pons de Verdun continue : « Maintenant, citoyens, permettez-moi de vous demander si vous avez jamais pu vous arrêter sans frémir à l’idée d’un être faible, d’une femme condamnée à mort, forcée en quelque sorte de la boire goutte à goutte pendant un sursis de plusieurs mois, et sûre de la recevoir après qu’elle aura donné la vie ; l’humanité s’afflige, le but politique est manqué. Pouvez-vous compter sur la conservation d’un enfant dont la mère a passé tout le temps de sa grossesse dans une situation qu’il est impossible de se peindre ? Vos cœurs et vos esprits sont pénétrés au premier mot de ces réflexions. Je demande que vous renvoyiez à votre comité de législation la proposition que je fais de décréter qu’à l’avenir aucune femme prévenue d’un crime comportant peine de mort ne pourra être mise en jugement sans qu’il ait été vérifié et reconnu qu’elle n’est pas enceinte. »
Cette proposition est décrétée 129, au milieu des plus chaleureuses acclamations.
Pons de Verdun, qui voulait inaugurer le triomphe désormais solide d’une dictature appuyée sur les lois éternelles du cœur humain, remontait à la tribune de la Convention le 23 germinal (12 avril 1795).
« Faire pour l’humanité, dans un temps de révolution, dit-il, ce que la philosophie n’avait pas même entrepris dans les temps plus tranquilles, c’est assurer à cette révolution autant d’amis qu’un système contraire lui en avait enlevés ; c’est prouver que, ramenée à son véritable objet, la liberté régénère les esprits et les cœurs, agrandit le domaine de la législation et perfectionne l’ordre social.
« J’étais vivement pénétré de cette consolante idée, de cette douce espérance, que l’heureuse révolution du 9 thermidor avait éveillée dans mon cœur, lorsque, après avoir excité votre justice et votre sensibilité en faveur de sept infortunées condamnées à mort par le Tribunal révolutionnaire, je vous proposai de décréter qu’à l’avenir aucune femme prévenue d’un crime comportant la peine de mort, ne pourrait être mise en jugement qu’il n’eût été constaté, de la manière ordinaire, qu’elle n’était pas enceinte.
« Cette proposition fut accueillie comme elle devait l’être par des législateurs humains. Plusieurs d’entre vous crurent qu’elle avait été à l’instant même convertie en loi, mais elle n’avait été que renvoyée à votre comité de législation, et je viens aujourd’hui vous proposer en son nom de décréter cette proposition, à laquelle il a cru devoir donner une plus grande extension, en appliquant son bénéfice, par un effet rétroactif, à toutes les femmes condamnées à mort, dont l’exécution a été suspendue pour cause de grossesse.
« Vous vous rappelez peut-être quels furent les motifs dont j’appuyai alors cette demande : aussi ne ferai-je que les reproduire rapidement, et je vous épargnerai leur développement, que je ne pourrais entreprendre sans attirer votre attention sur le tableau déchirant que présenterait l’humanité aux prises avec la justice.
« La plus forte peine que prononce votre code pénal contre l’homme atteint et convaincu du plus grand crime est la mort ; et cette mort, le législateur l’a voulue sans agonie, dégagée, pour ainsi dire, de toutes les angoisses qui la multiplient et qui ne font que prolonger les douleurs de ce triste moment ; il a voulu qu’elle ne pût être différée plus de vingt-quatre heures après la condamnation. Comment vous écarteriez-vous, sans injustice et sans vous mettre en contradiction avec cette loi, d’une de ses dispositions dictées par l’humanité, et consignée dans la Déclaration des Droits ? Pour qui vous en écarteriez-vous ? Pour un être faible, que la nature semble avoir particulièrement recommandé à la sensibilité du législateur.
« La voix de l’humanité ne se serait-elle donc fait entendre que pour ce malheureux fœtus, peut-être encore privé de la vie, de cette vie que vous commandez si inhumainement à sa mère de lui donner, et dont tout le prix sera la fin de l’horrible agonie que la loi lui a réservée ?
« Cependant, cette pénible agonie, aux horreurs de laquelle vous la laissez en proie, peut se prolonger pendant sept ou huit mois. En avons-nous bien calculé toute la durée ? Et de quel droit la société commanderait-elle une aussi longue souffrance contre un de ses membres qu’elle n’a voulu faire participer à aucun des nombreux avantages qu’elle réserve exclusivement aux hommes ?
« Quel barbare privilège ! Ah ! sans doute, citoyens, vous sentez, comme moi, que la société l’a fait beaucoup plus souffrir qu’elle n’en a réellement le droit.
« Pourquoi ce long, cet éternel supplice ? pour obtenir un enfant que sa mère ne connaîtra que par les douleurs qu’il lui aura causées, qu’elle ne devra voir que comme le terme de sa vie ; dont la naissance, ce moment qui éveille dans le sein maternel de si tendres sentiments, ne s’annoncera que pour ajouter aux douleurs de l’enfantement celle de la plus cruelle séparation, et elle ne présentera à son imagination en délire que la perspective désespérante de l’échafaud qui l’attend.
« Espérerions-nous donc ainsi, citoyens, pouvoir jamais atteindre le but politique qui nous fait retarder le supplice de cette mère infortunée !
« Si le désespoir ne l’entraînait pas à la cruelle résolution de frustrer vos espérances, cet avenir désespérant, cet échafaud, cette prison même, jusqu’aux plaintes que cette destinée affreuse arrache à tout ce qui l’entoure, tout ne concourt-il pas à altérer à la fois la santé de la mère et de l’enfant, et ne prépare-t-il pas au triste fruit de tant de douleurs une existence pénible, que les soins prévenants d’une mère tendre ne devront point alléger, et que ne remplacent jamais les secours mercenaires que vous lui destinez ?
« C’est ainsi que, marchant d’injustices en injustices, vous violez le premier vœu de la nature, qui veut impérieusement que la mère allaite son enfant, qui veut qu’elle soit sa première institutrice, comme son premier appui.
« C’est ainsi que, pour atteindre le but politique, dont elle seule ne peut espérer aucun avantage, dont elle n’est que le malheureux instrument, vous lui arrachez sans pitié son enfant pour l’envoyer à l’échafaud, et que vous ne le lui montrez que comme le signal de son supplice.
« Mais c’est trop longtemps, citoyens, arrêter vos regards sur ce tableau déchirant, dont j’aurais voulu vous épargner les tristes couleurs, et je me hâte de soulager votre cœur en vous proposant de mettre un terme à tant d’injustices par le décret que votre comité m’a chargé de vous soumettre.
« Vous verrez qu’une de ses dispositions a pour but d’arrêter votre humanité au moment où la société a droit de lui prescrire un terme ; car, sans doute, vous ne voulez pas rendre à la liberté une incendiaire, une empoisonneuse, ou toute autre grande coupable, dont l’impunité pourrait accroître la malveillance ou l’audace.
« Voici le projet de décret :
« La Convention nationale, ouï le rapport de son comité de législation, décrète ce qui suit :
Art. Ier. – À l’avenir, aucune femme prévenue de crime emportant la peine de mort ne pourra être mise en jugement qu’il n’ait été vérifié de la manière ordinaire quelle n’est pas enceinte.
Art. II. – Le sursis provisoire à tout jugement de mort rendu contre des femmes dont l’exécution a été suspendue pour cause de grossesse, est déclaré définitif.
Art. III. – Les comités de législation et de sûreté générale sont autorisés à statuer définitivement sur la mise en liberté ou la détention ultérieure desdites condamnées.
Art. IV. – Les accusateurs publics près les tribunaux criminels ordinaires et extraordinaires sont en conséquence tenus d’adresser audit comité de législation dans quinzaine à compter du jour de la publication de la présente loi tous les jugements de la nature de ceux ci-dessus, et les procédures et pièces sur lesquelles ils sont intervenus.
Art. V. – L’insertion de la présente loi au Bulletin lui tiendra lieu de promulgation.
Ce projet de décret est adopté par la Convention, qui applaudit au discours de Pons de Verdun. On reconnaissait dans cet homme sensible, qui prêchait l’humanité de manière si édifiante, le défenseur des Jeunes filles de Verdun, coupables d’avoir, deux ans auparavant, offert des dragées au roi de Prusse ( ) et condamnées à mort, malgré l’ancienneté de l’injure et les triomphes vengeurs de la République .
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
Olympe de Gouges aussi !
_________________
Comtesse Diane- Messages : 7397
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : TOURAINE
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
Oui . C'est étonnant, n'est-ce pas !
LE SORT DES ENFANTS
DES FEMMES GUILLOTINÉES OU ÉCHAPPÉES À LA GUILLOTINE
Le drame ne s’arrête point là. Ces têtes fauchées, ces femmes supprimées en pleine jeunesse ou en pleine force d’âge laissaient des enfants.
Quel fut le sort des enfants des femmes guillotinées et des femmes enceintes qui échappèrent à l’instrument de mort ?
Tous les historiens se contentent de dire sur ce point qu’ils étaient envoyés aux Enfants-Trouvés.
Or, nous avons compulsé, à l’hospice des Enfants-Assistés, les, registres des Enfants-Trouvés et aussi les feuilles d’entrée et de dépôt ensevelies depuis plus de cent ans dans les liasses vermoulues, et nous n’avons pu constater aucune mention d’enfant provenant de l’Archevêché.
Ces morts de femmes furent terribles. Aussi, nous ne saurions trop, en finissant, payer un juste tribut d’éloges au sexe tout entier que la Terreur ne put terrifier et qui y développa des énergies viriles si inattendues.
Dr Max BILLARD, Les femmes enceintes
devant le tribunal révolutionnaire,
d’après des documents inédits, 1911.
https://archive.org/details/lesfemmesenceint00billuoft
LE SORT DES ENFANTS
DES FEMMES GUILLOTINÉES OU ÉCHAPPÉES À LA GUILLOTINE
Le drame ne s’arrête point là. Ces têtes fauchées, ces femmes supprimées en pleine jeunesse ou en pleine force d’âge laissaient des enfants.
Quel fut le sort des enfants des femmes guillotinées et des femmes enceintes qui échappèrent à l’instrument de mort ?
Tous les historiens se contentent de dire sur ce point qu’ils étaient envoyés aux Enfants-Trouvés.
Or, nous avons compulsé, à l’hospice des Enfants-Assistés, les, registres des Enfants-Trouvés et aussi les feuilles d’entrée et de dépôt ensevelies depuis plus de cent ans dans les liasses vermoulues, et nous n’avons pu constater aucune mention d’enfant provenant de l’Archevêché.
Ces morts de femmes furent terribles. Aussi, nous ne saurions trop, en finissant, payer un juste tribut d’éloges au sexe tout entier que la Terreur ne put terrifier et qui y développa des énergies viriles si inattendues.
Dr Max BILLARD, Les femmes enceintes
devant le tribunal révolutionnaire,
d’après des documents inédits, 1911.
https://archive.org/details/lesfemmesenceint00billuoft
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Les Femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire .
Mme de Sabran a écrit:Aussi, nous ne saurions trop, en finissant, payer un juste tribut d’éloges au sexe tout entier que la Terreur ne put terrifier
Belle formule !!! :\\\\\\\\: :\\\\\\\\: :\\\\\\\\:
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Comtesse Diane- Messages : 7397
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : TOURAINE
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