Constance-Marie Charpentier, peintre portraitiste
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Constance-Marie Charpentier, peintre portraitiste
... par Gildas Dacre-Wright
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AVANT - PROPOS
Personne, en dehors du milieu de la peinture, ne connait le nom de Constance-Marie Charpentier. Bien peu, dans ce milieu, s’y intéressent. Tout au plus sait-on qu’un tableau d’elle se trouve au musée de Picardie à Amiens et qu’un dessin qualifié d’autoportrait existe au musée Magnin de Dijon. Le néoclassicisme, surtout quand il ne s’agit pas de ses représentants les plus éminents, ne fait guère recette en ce début du XXIème siècle. Et la notoriété passagère que valut à Mme Charpentier l’attribution en 1951 d’un ravissant tableau exposé au Metropolitan museum of art de New-York s’estompe depuis qu’en 2007 il a été réattribué à une autre peintre de son temps. Ceux qui étaient tentés de lui attribuer tel ou tel tableau non signé et plus ou moins vaguement dans son style, histoire de faire monter les enchères dans les prisées, s’en désintéressent.
Personne, ou si peu de monde, ne sait qu’elle fut, par le seul jeu des circonstances, bien près du cœur de la Révolution et que si, finalement, elle ne fut pas personnellement menacée, cela n’alla pas sans de réelles frayeurs sous la Grande Terreur. Qui se préoccupe de savoir que, mère de deux filles, elle les perdit toutes les deux prématurément ? Le temps efface tout et deux siècles ont passé.
Reste la peinture qui fut sa passion quoi qu’il advint. Son œuvre est peu connue car, principalement portraitiste, elle vendit à des particuliers la plupart de ses tableaux qui, s’ils existent encore, pendent ici ou là aux murs de demeures ignorées. Il fallait bien vivre. Mais, ce que l’on peut en connaître aujourd’hui, comme les appréciations élogieuses de ses contemporains et les récompenses publiques qui lui furent décernées, révèlent une artiste d’une grande finesse qui ne mérite pas l’oubli dans lequel elle est tombée.
Ce petit ouvrage s’efforce de rassembler tout ce que l’on peut savoir aujourd’hui de cette femme sensible, dynamique, fidèle en amour comme en amitiés, peintre avant tout, qui vécut toute sa longue vie dans ce qui est l’actuel sixième arrondissement de Paris.
G. D. W.
Le Chesnay, 9 septembre 2009.
http://www.constance-charpentier.fr/
Extraits :
Constance baigne depuis vingt ans dans un milieu où l’on parle librement et sans contrainte. Les démêlés du Roi avec le Parlement sont l’objet de discussions animées. Vu de la Cour du Commerce, le pouvoir royal, confiné dans son château de Versailles, est bien loin. On comprend que Louis XIV ait fait de son château l’outil politique parfaitement adapté à son temps pour mettre un point final à la féodalité. Mais on estime que, maintenant, le Roi est coupé de la réalité et que la cour est le siège de trop de scandales, comme cette affaire du collier de la Reine qui a défrayé toutes les chroniques deux ans auparavant. On se demande ce que le roi Louis XVI et ceux qui l’entourent comprennent des idées agitées depuis près d’un demi-siècle par les encyclopédistes, par un Voltaire, par un Rousseau. On sait que les finances sont au plus bas et que la guerre faite à l’Angleterre pour soutenir les insurgés américains en est la cause. Le Parlement, tout proche, fulmine et les libelles politiques, satiriques, souvent haineux à l’égard de Versailles foisonnent dans les rues. Dans ce milieu de la bourgeoisie aisée, on s’efforce de démêler le sensé de l’excessif. Mais, tout de même, pense-t-on, ne faudrait-il pas évoluer un peu ? On ne récuse pas le principe de la monarchie et on reste fidèle à l’Eglise. Mais, décidément, tel qu’il est, l’ordre régnant est bien pesant et, peut-être, dépassé. On sent que quelque chose se prépare, mais quoi ?
Pierre-Alexandre-Hyacinthe et Marie-Angélique ont très tôt remarqué que leur petite Constance aimait dessiner. Beaucoup d’enfants adorent se saisir d’une feuille et d’un crayon pour y griffonner une maison, un arbre ou un bonhomme approximatif. Mais Constance allait plus loin. Elle saisissait, bien maladroitement mais quand même, un trait de lumière, une ombre, une couleur. Elle regardait et s’amusait à tenter de reproduire ce qu’autour d’elle on ne faisait que voir. Tout en assurant à leur fille l’instruction indispensable, ses parents en parlèrent autour d’eux. Après tout, si Constance avait des dispositions, pourquoi ne pas lui donner l’occasion de les faire fructifier ? On leur indiqua l’école de dessin fondée par Johann Georg Wille. Quand Constance avait dix ans, le maître avait 62 ans et son talent de graveur, son goût pour la peinture et son entregent de marchand d’art l’avaient fait reconnaître, depuis son installation à Paris en 1736, comme un artiste incontestable. Il avait accepté de prendre en charge la fillette et de développer chez elle ce qu’il avait reconnu comme un don naturel [9] . L’apprentissage avait duré sept longues années. Et à 17 ans, Constance rêvait de peinture. Le monde était-il en noir et blanc ? Avec ses parents d’abord, avec des amies ensuite, elle se précipitait au Salon lorsqu’il ouvrait ses portes. Elle était restée longtemps stupéfaite devant le « Bélisaire » exposé par David au Salon de 1781. Elle avait été bouleversée par l’Astyannax enfant de l’ « Andromaque » du même David au Salon de 1783. Elle rencontrait fréquemment leur voisin, Jean-Baptiste Regnault, dont elle avait admiré « L’éducation d’Achille » au Salon de 1783. Elle ressentait de façon irrépressible, l’envie et, pour tout dire, le besoin de découvrir enfin avec la peinture le jeu des ombres et de la lumière, les variations infinies de la couleur et l’art de la composition. Il lui fallait autre chose.
Pierre-Alexandre-Hyacinthe et Marie-Angélique l’encouragèrent. S’il l’acceptait, pourquoi ne pas tenter de la faire entrer dans l’atelier de Jacques-Louis David dont la réputation n’était déjà plus à faire ? Avec le soutien de Jean-Baptiste Regnault, qui suivait d’un œil intéressé les progrès de Constance et qui appréciait chez sa jeune voisine son enthousiasme et ce regard que seuls les artistes nés portent sur les choses, et avec celui du vieux maître Johann Georg Wille qui estimait ne plus rien avoir à apprendre à son élève en matière de dessin, cela ne fut pas trop difficile. Au début de l’année 1784, Constance prit pour la première fois le chemin du Louvre. A 17 ans, elle n’était pas la plus jeune. Un jeune garçon de 14 ans, François Gérard, venait d’y arriver. Et, une nouvelle fois, tout était à apprendre.
L'article tout entier : http://www.constance-charpentier.fr/
En vrac, quelques oeuvres de Constance ...
Mélancolie
Charlotte du Val d’Ognes, 1801, oil on canvas.
La jeune-fille à la perle
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Mme de Sabran- Messages : 55497
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Re: Constance-Marie Charpentier, peintre portraitiste
Lucius a écrit:
Elle était aussi élève de David.
Allons-y de ce pas !
L’atelier se trouve dans l’aile nord de la Colonnade. C’est une grande pièce, haute de plafond et bien éclairée par une grande baie vitrée. Enfin, bien éclairée ! A condition que la lumière du jour s’y prête, ce qui est généralement le cas à la belle saison mais se fait souvent désirer en hiver où fréquemment, à partir de quatre heures de l’après-midi, il faut allumer les chandelles. Tout bascule alors. Les couleurs, les ombres et les clartés sont bouleversées. Il vaut mieux s’arrêter. L’encombrement de l’atelier est incroyable. Il peut y avoir jusqu’à trente élèves entassés sur les gradins placés de chaque côté de l’estrade où se trouve le modèle vivant. La plupart travaillent sur un grand carton posé sur les genoux. Quand on manie le fusain, l’inconvénient n’est pas trop grand. Les choses deviennent difficiles lorsqu’il s’agit d’avoir un chevalet et de peindre. Il faut alors s’imposer dans un espace suffisant et le défendre. La bonne méthode est toujours d’arriver tôt. Constance n’y manque jamais et a ainsi fini par avoir un coin à l’abri des empiètements plus ou moins sournois de ses congénères. L’atelier est étouffant en été et glacial en hiver. On y respire des odeurs de peinture, de vernis et de tabac. Mais qu’importe ! Tous, garçons et filles dans leurs blouses maculées et emmitouflés dans des lainages informes quand le froid est trop vif, sont habités par la même passion, peindre avec talent, et ont la même ambition, être reconnus comme de vrais artistes. David passe régulièrement dans l’atelier, conseille, redresse ici une faute de perspective, là le modelé maladroit d’une main, là encore une couleur imparfaite. Tout au moins quand il n’est pas accaparé par ses propres travaux. D’octobre 1784 à août 1785, il a même quitté Paris pour Rome où il a réalisé le « Serment des Horaces », incontestable chef d’œuvre exposé au Salon de 1785 et qui a forcé l’admiration. Pendant ce temps, les élèves ont continué à travailler et le maître, à son retour, ravi du succès de son tableau, a repris ses conseils. Constance a progressé. Et, maîtrisant de mieux en mieux l’aspect purement technique de la peinture, elle a commencé à se lasser des sujets d’étude, des ébauches de composition, des tableaux mis de côté à peine réalisés et des portraits sans cesse recommencés. Elle a ressenti le désir de passer à autre chose, de se surpasser.
Gildas Dacre-Wright
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Mme de Sabran- Messages : 55497
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Re: Constance-Marie Charpentier, peintre portraitiste
La jeune fille à la perle !! Magnifique ! Un talent injustement méconnu, cette Constance-Marie Charpentier !
Dominique Poulin- Messages : 7009
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Comtesse Diane- Messages : 7397
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