Les joyaux de la Couronne de France portés par Marie-Antoinette

Gouverneur Morris a écrit:Sinon, Bernard Morel nous décrit par le menu les joyaux portés par la reine le 5 mai 1789 :

Merci pour cet extrait, cher Gouverneur. Elle devait être resplendissante.
Voici le Sancy et une réplique du miroir de Portugal, que Marie-Antoinette portait ce jour là :

Marie-Jeanne a écrit:

Duc d'Ostrogothie a écrit:Oui Marie-Antoinette portait le régent . J'ai lu qu'elle le portait lors de la procession d'ouverture des Etats Généraux en 1789.

Le diamant qu'elle arbore dans sa coiffe sur le portrait de Wertmüller y ressemble furieusement. Je rappelle que ce portrait était destiné à Gustave III et que la copie aujourd'hui exposée au château de Versailles a été réalisée sous Louis-Philippe.

Selon Marguerite Jallut, une première version de ce portrait avait beaucoup déplu, y compris à la reine. Wertmüller en avait été quitte pour recommencer, cette fois avec un mannequin coiffé par Léonard. Le diamant n'est peut être qu'un simple effet de style du coiffeur et du peintre pour les besoins du tableau.

Oui tout à fait chère Marie-Jeanne, nous en parlons dans notre sujet sur ce portrait : https://marie-antoinette.forumactif.org/t185-la-reine-et-ses-enfants-a-trianon-par-wertmuller?highlight=wertmüller
Gustave III estima que ce portrait était bien peint mais qu'il ne "ressemblait pas à la reine en beau".

Reste à savoir quel joyau Marie-Antoinette portait sur sa coiffe dans le portrait de Wertmüller ?

Il est vrai qu'il n'a pas tout à fait la forme du Régent, mais il n'a pas non plus celle du Sancy. En revanche, il est bien gros !  

J'ai du mal à croire que le port de ce bijou serait sorti de l'imagination de Wertmüller . Ce portrait était destiné à un souverain étranger, et je suppose que Marie-Antoinette souhaita être représentée dans ces habits et cette coiffe-là, non ?...

Que de questions sans réponse !  

La nuit, la neige a écrit:

Gouverneur Morris a écrit:Sinon, Bernard Morel nous décrit par le menu les joyaux portés par la reine le 5 mai 1789 :

Merci ! Nous tenterons d'illustrer ce passage...

Je te laisse le soin de nous retrouver une illustration du De Guise, ainsi que des 5ème et 6ème Mazarin. Bon courage...  

Effectivement, vous avez raison, Wertmüller n'y est sans doute pour rien. Léonard en revanche était bien placé pour connaître les envies de la reine dans l'agencement des diamants. En ce qui me concerne, le plus intéressant sur ce tableau est qu'au beau milieu de ses jardins, elle affiche une pierre de la couronne avec une tenue informelle très à la mode.

Je pense que le diamant de sa coiffure pourrait très bien être le Grand Mazarin, passé en vente il y a quelques années :



Pour en revenir au 5 mai 1789, voici un dessin reprenant la forme de chacun des Mazarins avant leur retaille sous Louis XVI, ainsi que la photo de certains d’entre eux prise lors de la désastreuse vente de 1887 :





La Reine portait donc aux oreilles ce qui semble être des brillolettes

Marie-Jeanne a écrit: En ce qui me concerne, le plus intéressant sur ce tableau est qu'au beau milieu de ses jardins, elle affiche une pierre de la couronne avec une tenue informelle très à la mode.

Oui, il s'avère que Marie-Antoinette avait une fâcheuse tendance à mélanger ses effets personnels avec ceux appartenant à la Couronne, notamment les joyaux.

Germain Bapst ("Les Joyaux de la couronne", Revue des Deux Mondes, 3e période, tome 73, 1886 (p. 861-878)" nous apprend ainsi que :

"Marie-Antoinette se servit naturellement des bijoux de la couronne. Elle affectionnait particulièrement une parure de rubis qui était estimée 145,000 francs.

Un jour, la reine en fit modifier la monture, et pour la rendre beaucoup plus belle, elle y fit ajouter, avec l’agrément du roi, une si grande quantité de diamans précieux, qui lui appartenaient, qu’il devint bientôt impossible de distinguer ce qui était à la couronne de ce qui était à la reine. Aussi obtint-elle du roi que la parure entière lui fût donnée en propre. Mais Louis XVI crut devoir porter l’affaire devant son conseil, et, le 13 mars 1785, intervint un arrêt qui validait cette donation. De plus, comme les montures des bijoux et l’achat de nombreuses pierres avaient donné lieu à de fortes dépenses, Louis XVI, au lieu de payer en argent, remit au sieur Le Blanc, joaillier de la reine, un nombre équivalent de pierres qui sont désignées en l’inventaire de 1774."

https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Joyaux_de_la_Couronne#cite_note-12

C’est cette parure de rubis qui, envoyée par la Reine avec d’autres à Bruxelles, fut cédée par Mme Royale aux Habsbourgs pour couvrir son défraiement à Vienne. Elle fut malheureusement remontée pour Elisabeth de Bavière...

Duc d'Ostrogothie a écrit: Aussi obtint-elle du roi que la parure entière lui fût donnée en propre. Mais Louis XVI crut devoir porter l’affaire devant son conseil, et, le 13 mars 1785, intervint un arrêt qui validait cette donation.

Rooh ! Elle charriait tout de même, Toinette !

La Reine n’en était pas moins fière de pouvoir dire, dans un contexte de quasi-guerre civile, que les bijoux qu’elle avait envoyés à Bruxelles « n’avaient rien coûté à la France », car provenant de sa cassette personnelle et de sa dot.

Mme de Sabran a écrit:

Duc d'Ostrogothie a écrit: Aussi obtint-elle du roi que la parure entière lui fût donnée en propre. Mais Louis XVI crut devoir porter l’affaire devant son conseil, et, le 13 mars 1785, intervint un arrêt qui validait cette donation.

Rooh !  Elle charriait tout de même, Toinette !    

Cet usage perdurera jusque sous le Second Empire : Marie-Louise, puis la duchesse d’Angoulême, et enfin Eugénie se virent remettre des joyaux de la couronne à titre personnel du fait de leur mélange dans des parures avec des pierres qui leur appartenaient en propre.

Gouverneur Morris a écrit:La Reine n’en était pas moins fière de pouvoir dire, dans un contexte de quasi-guerre civile, que les bijoux qu’elle avait envoyés à Bruxelles « n’avaient rien coûté à la France », car provenant de sa cassette personnelle et de sa dot.

Entendu, mais sa "cassette personnelle" est-ce à dire les pierres acquises en France dès son mariage ?


A ce sujet, voici des extraits de l'article intéressant rédigé par Vincent Meylan, dans le catalogue de la vente Sotheby's que nous sommes en train de détailler, ici :

Bijoux de Marie-Antoinette : perles et diamants de la collection Bourbon Parme.

Je le cite (désolé, c'est en anglais) :

(...)
Queen Marie Antoinette (1755-1793) possessed an enormous collection of jewels.
Upon her marriage to the future King Louis XVI (1754-1793), the Archduchess Marie-Antoinette of Austria received jewels from both her mother, Empress Marie-Thérèse, and her grandfather-in-law, King Louis XV : millions of livres worth of pearls, diamonds and rubies.
Her collection was of course augmented during her reign.
(...)
In her Mémoires, Madame Campan, the Queen’s first chambermaid, wrote :
« Sa Majesté s’était établie avec moi dans un cabinet d’entresol donnant sur le jardin des Tuileries, et nous emballâmes dans une petite caisse tout ce qu’elle possédait en diamants, rubis et perles ».
This must have taken place at the beginning of 1791.
The royal family was already planning its escape from Paris.

The Queen secretly sent her jewels to Bruxelles, where her sister, Archduchess Marie Christine, was the governor. The jewellery was then sent to Vienna.
The person to whom the jewels was entrusted is the Comte de Mercy Argenteau, who was the
imperial ambassador to the Court of Versailles.

In a letter Marie Antoinette wrote to the Count on the 11th of January, 1791, she explained :
« Vous recevrez, monsieur le comte, une cassette à moi vers la fin du mois. Je vous prierais de me la garder, et, si vous quittiez Bruxelles, vous la remettrez à ma sœur pour moi ».
In another letter dated from the 3rd of February 1791 she mentioned again the « cassette containing her jewels » that should be arriving in a few weeks.
(...)

She (Marie-Thérèse de France, Madame Royale) was released from prison in December 1795, in exchange for French prisoners, and thus began her life of exile.
She first travelled to Vienna, where her cousin, Emperor Franz II of Austria (1768-1835) immediately returned the Queen’s jewels to her.

The Emperor gave Marie-Thérèse a pension, in exchange for which she gave him a ruby and diamond set.
Madame Royale also inherited a large sum of money that the king had sent abroad before their attempted escape.
(...)


Et plus loin dans l'article encore :

When she married the Dauphin of France, the future Louis XVI, in 1770, the Archduchess Marie Antoinette received 500,000 livres in jewels from her mother, Empress Marie Thérèse.

From her grandfather-in-law, King Louis XV, Marie-Antoinette received a box containing all the jewels left by the Dauphin’s mother, the late Marie-Josèphe de Saxe (1731-1767).
These jewels were worth 2 million livres.

* Article (extraits) : Vincent Meylan
* Source : Sotheby's - Royal Jewels from the Bourbon Parma Family

Gouverneur Morris a écrit:Je pense que le diamant de sa coiffure pourrait très bien être le Grand Mazarin, passé en vente il y a quelques années :

Bien vu ! Je pense également qu'il doit s'agir du Grand Mazarin. Ce qui rend encore plus triste sa vente aux enchères en 2012, sans que l'Etat français en fasse l'acquisition.

Gouverneur Morris a écrit:

Mme de Sabran a écrit:

Duc d'Ostrogothie a écrit: Aussi obtint-elle du roi que la parure entière lui fût donnée en propre. Mais Louis XVI crut devoir porter l’affaire devant son conseil, et, le 13 mars 1785, intervint un arrêt qui validait cette donation.

Rooh !  Elle charriait tout de même, Toinette !    

Cet usage perdurera jusque sous le Second Empire : Marie-Louise, puis la duchesse d’Angoulême, et enfin Eugénie se virent remettre des joyaux de la couronne à titre personnel du fait de leur mélange dans des parures avec des pierres qui leur appartenaient en propre.

Cela étant, Gérard Mabille explique qu'il était d'usage pour les reines de léguer leurs joyaux à la couronne à leur mort...

Sans doute, mais convenons que les dernières souveraines et princesse que j’ai évoquées, y inclus la Reine, n’ont eut guère le loisir de le faire lors de leur mort sur l’échafaud ou en exil

Comme tu dis. Pour vivre heureux, vivons cachés .

Mme de Sabran a écrit:

Duc d'Ostrogothie a écrit: Aussi obtint-elle du roi que la parure entière lui fût donnée en propre. Mais Louis XVI crut devoir porter l’affaire devant son conseil, et, le 13 mars 1785, intervint un arrêt qui validait cette donation.

Rooh ! Elle charriait tout de même, Toinette !

Ben oui !!!!

Le livre de Bapst est numérisé sur archives.org.
Demain j'irai consulter celui de Bernard Morel en bibliothèque. N'étant pas spécialiste des joyaux de la couronne j'avoue que tous vos échanges ont attisé ma curiosité.

Duc d'Ostrogothie a écrit:
Bien vu ! Je pense également qu'il doit s'agir du Grand Mazarin.

Si l'on admet l'hypothèse que le dessin de ce diamant ne soit pas une simple fantaisie "décorative" du peintre...en ce cas, pardon, mais cette pierre me semble avoir une forme bien plus arrondie.

Duc d'Ostrogothie a écrit:Ce qui rend encore plus triste sa vente aux enchères en 2012, sans que l'Etat français en fasse l'acquisition.

L'Etat ?

Juste après l'élection présidentielle et la mise en lumière de l'ardoise laissée par le précédent gouvernement (la dette étant passée à près de 90% du PIB), je ne crois pas que l'effet d'annonce aurait été opportun...

La nuit, la neige a écrit:

Duc d'Ostrogothie a écrit:
Bien vu ! Je pense également qu'il doit s'agir du Grand Mazarin.

Si l'on admet l'hypothèse que le dessin de ce diamant ne soit pas une simple fantaisie "décorative" du peintre...en ce cas, pardon, mais cette pierre me semble avoir une forme bien plus arrondie.

En ce cas, fais-ton choix parmi les Mazarins, camarade :

Gouverneur Morris a écrit:
En ce cas, fais-ton choix parmi les Mazarins, camarade :

Je ne sais pas, disons le plus arrondi : en haut à droite.
Peut-être donc le 6ème Mazarin, évoqué tantôt.

S'il s'agit bien de son p'tit nom.

Voir ici : https://www.xn--bijouxetpierresprcieuses-rfc.com/2017/

Je crois discerner un peu de rose dans le diamant peint par Wertmüller.

Ici :



J'ai donc plutôt tendance à y voir le Grand Mazarin.  

La nuit, la neige a écrit:

Duc d'Ostrogothie a écrit:Ce qui rend encore plus triste sa vente aux enchères en 2012, sans que l'Etat français en fasse l'acquisition.

L'Etat ?
Juste après l'élection présidentielle et la mise en lumière de l'ardoise laissée par le précédent gouvernement (la dette étant passée à près de 90% du PIB), je ne crois pas que l'effet d'annonce aurait été opportun...

En ce qui me concerne, je considère le rachat des joyaux de la couronne de France comme une dépense de première nécessité.

Le Grand Mazarin a été vendu 12,5 millions de francs suisses (soit à peine 11 millions d'euros) : c'est une goutte d'eau dans le budget de l'Etat français qui s'élève à 329 milliards d'euros (le Grand Mazarin représente à peine 0,003% du budget de l'Etat ! ...).

Duc d'Ostrogothie a écrit:
En ce qui me concerne, je considère le rachat des joyaux de la couronne de France comme une dépense de première nécessité.  

Eh bien, il faut envoyer une lettre à ton député, le priant de défendre ce projet, de première nécessité, lors du prochain vote du prochain et de Loi des finances.

"L'Etat" sur-endetté (sur le dos de plusieurs générations à venir), confronté à des enjeux autrement plus importants, voire graves, sera peut-être sensible à ses arguments, qui sait ?  
En ce qui me concerne donc, je considère qu'il ne devrait pas l'être.

Duc d'Ostrogothie a écrit:Le Grand Mazarin a été vendu 12,5 millions de francs suisses (soit à peine 11 millions d'euros) : c'est une goutte d'eau dans le budget de l'Etat français qui s'élève à 329 milliards d'euros (le Grand Mazarin représente à peine 0,003% du budget de l'Etat ! ...).

12,3 millions d'euros, frais compris.

Pour le reste, je ne développe pas car j'ai déjà scindé quelques-uns de nos messages.

Ce sujet est ici :

Musées nationaux : Conservation et acquisitions, les subventions de l'Etat sont-elles suffisantes ?

Gouverneur Morris a écrit:

La nuit, la neige a écrit:

Duc d'Ostrogothie a écrit:
Bien vu ! Je pense également qu'il doit s'agir du Grand Mazarin.

Si l'on admet l'hypothèse que le dessin de ce diamant ne soit pas une simple fantaisie "décorative" du peintre...en ce cas, pardon, mais cette pierre me semble avoir une forme bien plus arrondie.

En ce cas, fais-ton choix parmi les Mazarins, camarade :

Messieurs faites votre choix !

Voici la liste des diamants de la couronne isolés et non montés tout spécialement sertis en chatons pour l'habillement de la reine :

Le SANCY ou 1er Mazarin - Le DE GUISE, blanc, rectangulaire aux coins arrondis - Le MIROIR DU PORTUGAL ou 3ème Mazarin, long rectangle aux coins légèrement arrondis - Le POUCE, très étroit et long d'un pouce - La BELLE MARQUISE ou Navette, blanche et très pure - 1 brillant étendu, c'est à dire peu épais en carré arrondi acquis par Louis XV pour une bague de Marie Lezcinska et démontée - 2 demi brillants très étendus d'un vif éclat feuille morte - 1 brillant carré arrondi blanc et très pur - 1 brillant carré un peu allongé très vif - 3 beaux brillants taillés en rose - 1 losange - 2 ovales - 1 brillant à sept pans - 3 autres chatons aux détails non précisés.

Pour finir : 2 boutons de diamants assortis pour des pendeloques carrées de boucles d'oreilles - 2 boutons de diamants pour des girandoles à pendeloques en double rose cristallines.

Que dire ? Ce sujet est époustouflant, grâce à vous tous !
Merci, chère Marie-Jeanne, pour la foultitude de détails que vous nous apportez !!!

Il me reste à répertorier les perles !  

 



 ...  

Marie-Jeanne a écrit:

Voici la liste des diamants de la couronne isolés et non montés tout spécialement sertis en chatons pour l'habillement de la reine :

Le SANCY ou 1er Mazarin - Le DE GUISE, blanc, rectangulaire aux coins arrondis - Le MIROIR DU PORTUGAL ou 3ème Mazarin, long rectangle aux coins légèrement arrondis - Le POUCE, très étroit et long d'un pouce - La BELLE MARQUISE ou Navette, blanche et très pure - 1 brillant étendu, c'est à dire peu épais en carré arrondi acquis par Louis XV pour une bague de Marie Lezcinska et démontée - 2 demi brillants très étendus d'un vif éclat feuille morte - 1 brillant carré arrondi blanc et très pur - 1 brillant carré un peu allongé très vif - 3 beaux brillants taillés en rose - 1 losange - 2 ovales - 1 brillant à sept pans - 3 autres chatons aux détails non précisés.

Pour finir : 2 boutons de diamants assortis pour des pendeloques carrées de boucles d'oreilles - 2 boutons de diamants pour des girandoles à pendeloques en double rose cristallines.

Merci pour ces informations chère Marie-Jeanne. Quelle est votre source ?