Marie-Gabriel-Florent-Auguste de Choiseul-Gouffier

Cousin du célèbre duc de Choiseul, Marie-Gabriel-Florent-Auguste naît en 1752 à Paris et va connaître une vie assez romanesque.
Tout jeune, il se passionne pour l'Antiquité et l'histoire. Il est ensuite marqué par de fréquentes rencontres avec Jean-Jacques Barthélemy, l'auteur du Voyage d'Anarcharsis, qu'il rencontre chez son cousin. Dans le même temps, il se lie d'une forte amitié avec Talleyrand.

En 1776, il part pour la Grèce à bord de la frégate Atalante, commandée par le marquis de Chabert, féru d'astronomie. Il est accompagné notamment du peintre Jean-Baptiste Hilaire, de l'ingénieur Jacques Foucherot et de son secrétaire François Kauffer (qui est aussi ingénieur). Choiseul-Gouffier visite alors le sud du Péloponnèse, les Cyclades et d'autres îles de la mer Egée puis l'Asie mineure. À son retour, il publie le premier volume, comportant illustrations et relevés architectoniques, de son Voyage pittoresque de la Grèce qui remporte un grand succès. L'ouvrage a un but politique : expliquer les enjeux en mer Egée entre l'Empire ottoman et l'Empire russe. Notre Choiseul devient un habitué des salons, brillant par sa culture, virtuose du brillant sans forcer, d'une conversation passionnante.
Il enchaîne les succès puisque le voici en 1783 élu à l'Académie Française où il remplace d'Alembert. Notre homme continue en étant nommé ambassadeur à Constantinople où il va rester de 1784 à 1791. Bien vu à la cour des sultans, il en profite pour reprendre ses voyages en Grèce avec la collaboration de l'archéologue et dessinateur Louis François Sébastien Fauvel.

Survient la révolution. Rappelé par la Convention, il refuse de rentrer, sachant très bien quel sort l'attend. Ses biens sont saisis, un autre ambassadeur est nommé mais Marie-Gabriel refuse de céder et, officieusement soutenu par de hauts dignitaires de la Porte qui l'ont pris en amitié, il se retranche dans son ambassade pendant un an. En 1792, obligé de céder, notre ambassadeur fait donc ses valises mais pour la Russie où sa réputation l'a précédé. Scandale : il fait partir devant lui la superbe collection d'antiquités grecques qu'il a constituée et qui était destinée au Louvre (ce dernier les récupèrera en 1816). Accueilli à bras ouverts, il est nommé directeur de l'Académie des Arts et des Bibliothèques impériales. Catherine II et Paul Ier l'apprécient énormément et lui offrent même un domaine, à Plateliai, dans l'actuelle Lituanie (quand on peut faire plaisir…). Sa première femme restera en France avec leurs filles et elles échapperont toutes à la guillotine. Il se remariera par la suite.
Son fils aîné qui l'avait accompagné à Constantinople devient chambellan du Tzar et épouse une demoiselle d'honneur de l'impératrice, ce qui permettra à la famille de conserver le domaine de Platelai jusqu'en 1940.

Il lui faut attendre 1802 pour rentrer en France, sans doute grâce à l'amitié de Talleyrand. Mais notre diplomate-voyageur refuse de servir l'Empire et reste fidèle au futur Louis XVIII. Il publie le second tome de son Voyage pittoresque de la Grèce en 1809 et se fait construire une maison imitant l'Érechthéion. Talleyrand n'en veut pas à son vieil ami d'avoir refusé de servir l'empereur et pense à lui lors du traité de Vienne : le diable boiteux y fait insérer certaines clauses bénéfiques au patrimoine de son ami.
A la Restauration, il est nommé ministre d'État, pair de France et meurt en 1817.

Calonne a écrit: À son retour, il publie le premier volume, comportant illustrations et relevés architectoniques, de son Voyage pittoresque de la Grèce qui remporte un grand succès. L'ouvrage a un but politique : expliquer les enjeux en mer Egée entre l'Empire ottoman et l'Empire russe.

Ce doit être tout à fait passionnant !

D'après Tatie Wikie :

Choiseul-Gouffier y présente, en plus de monuments peu connus, une Grèce idéalisée, écrasée par la domination ottomane et désirant retrouver sa liberté pour ressusciter. Cette vision romantique de la Grèce moderne sera partagée par de nombreux voyageurs du début du XIXème siècle. Sa portée politique est importante, elle contribue au Philhellénisme, amour de la Grèce, idée qui aboutira à l'indépendance du pays, en 1830, après une révolte des autochtones contre l'occupation ottomane.
Comme les autres voyageurs en Grèce, Choiseul-Gouffier se propose d'aller voir sur place le texte à la main, pour mieux comprendre les auteurs antiques "pour sentir plus vivement les beautés différentes des tableaux tracés par Homère en voyant les images qu'il avait eues sous les yeux ". Le récit de Choiseul-Gouffier permet de faire connaître des régions jusque-là encore inconnues de la Grèce, comme les Cyclades. Il avait demandé au peintre qu'il protégeait, Turpin de Crissé, d'illustrer le deuxième volume par la gravure de ses dessins. Il recruta aussi dans ce but Louis-François-Sébastien Fauvel et l'envoya en Grèce pour des dessins complémentaires.
On trouve parmi ses Mémoires une Dissertation sur Homère, un mémoire sur l'hippodrome d'Olympie, et des Recherches sur l'origine du Bosphore de Thrace.

Calonne a écrit:D'après Tatie Wikie :

Je ris, mais WIKIPEDIA est une fabuleuse encyclopédie en ligne .
Que deviendrions-nous sans Tatie ?

Merci pour cet intéressant portrait ; une vie romanesque comme on les aime...

La nuit, la neige a écrit:
Merci pour cet intéressant portrait ; une vie romanesque comme on les aime...

... et que nous raconte Frédéric Barbier !

" Publié à partir de 1778, le Voyage pittoresque de la Grèce fait du comte de Choiseul, un des premiers Occidentaux à avoir visité ce pays, l'inventeur d'un genre nouveau, le récit de voyage, qui connaîtra un grand succès au siècle suivant. Un portrait de cet aristocrate des Lumières, retraçant son parcours et soulignant l'actualité de sa vision de la situation politique de l'Europe. "

Calonne a écrit: Sa portée politique est importante, elle contribue au Philhellénisme, amour de la Grèce, idée qui aboutira à l'indépendance du pays, en 1830, après une révolte des autochtones contre l'occupation ottomane.

Heureusement, le Philhellénisme avait plus anciennement été illustré, notamment par les dessins de la frise du Parthénon dont Jacques Carrey serait l'auteur en 1674 , donc une dizaine d'années avant le bombardement vénitien de 1687, puis tremblements de terre, passage ravageur de lord Elgin et autres vicissitudes !
Ouf ! Ces dessins sont déterminants pour la magnifique reconstitution des bas-reliefs que l'on peut admirer à Athènes, au nouveau Musée de l'Acropole.

Quelle chance nous avons que ces infatigables voyageurs des siècles passés aient eu le talent de dessiner les merveilles qu'ils découvraient. Les dessins de J. Carrey sont ici : https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Jacques_Carrey

Mme de Sabran a écrit:Quelle chance nous avons que ces infatigables voyageurs des siècles passés aient eu le talent de dessiner les merveilles qu'ils découvraient. Les dessins de J. Carrey sont ici : https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Jacques_Carrey

Oh oui, en effet. Le Comte de Choiseul, tels aussi les Commandant Cousteau ou Christophe Colomb, dans leurs domaines respectifs, ces voyageurs passionnés nous ont rapporté tant d'images ignorées pour la plupart. Je les admire car parfois ce n'était pas sans risques.

Voici prochainement présenté en vente aux enchères le portrait original qui a inspiré de nombreuses gravures dont celle publiée en introduction de ce sujet, ou bien encore ici, en frontispice d'une édition de 1822 de son célèbre livre Voyage pittoresque de la Grèce.  


Image : Sotheby's

Voici donc le portrait original...

Portrait de Marie-Gabriel-Florent-Auguste, comte de Choiseul-Gouffier
Louis-Léopold BOILLY (La Bassée 1761 - Paris, 1845)
Huile sur toile (Toile d'origine)
Annotée 'De Choiseul-Gouffier / ambassadeur à Constantinople' au verso
21,50 x 16 cm (8 1/4 x 6 1/4in.)


Note au catalogue :

Nous remercions Messieurs Etienne Bréton et Pascal Zuber de nous avoir aimablement confirmé l'authenticité de ce tableau par un examen de visu.


* Source et infos complémentaires : Artcurial, Paris - Vente du château du Marais (21 septembre 2022)


Eh bien, ils ne se sont pas foulés pour le commentaire de l'oeuvre !     C'est dommage, la vie de cet homme était tout à fait " romanesque ".
Lire nos messages ci-dessus.  


Tant que j'y suis, je poste également dans ce sujet l'adorable portrait du comte et de son frère, le chevalier de Choiseul, représentés en jeunes savoyards.

The Comte and Chevalier de Choiseul as Savoyards
François-Hubert Drouais
Oil on canvas, 1758
Image : The Frick Collection / Commons wikimedia