Maître en Chirurgie de Paris, François-Guillaume Le Vacher

Pour approfondir notre dernière énigme, une brève biographie du docteur Le Vacher ( ou Levacher ) que j'ai trouvé dans :
- " Parme et la France de 1748 à 1789 " de Henri Bedarida :

"... Le nouvel arrivé, né à Breteuil en 1732, descendait d"une vieille famille de la bourgeoisie normande dont une branche exerça l'industrie du fer et dont une autre s'illustra plus spécialement dans la médecine.
Élevé par un frère aîné, principal du collège d'Harcourt, il avait choisi la profession chirurgicale. Ayant choisi les leçons de l'Hotel Dieu et de l'Ecole pratique de Chirurgie, il soutint à vingt ans une thèse qui donna les plus belles espérances à ses professeurs.
Maître de la Faculté de chirurgie en 1754, il entra comme major à l'armée du duc de Richelieu, prit part à l'expédition de Port-Mahon, et enraya une épidémie de dysenterie qui faisait des ravages parmi les troupes. Après quatre autres campagnes en Prusse et dans le Hanovre, il revint à Paris avant la fin de la Guerre de Sept Ans. Ses travaux publiés dans les Mémoires de l'Académie Royale de Chirurgie lui valurent bientôt le titre de Conseiller du Comité perpétuel de cette même Académie.

Au termes de son engagement, Levacher devait être chargé de " l'administration de la chirurgie en qualité de chef dans tous les hôpitaux des États de Son Altesse Royale " , y faire toutes les opérations d'importance et avoir la haute main sur celle de l'hôpital de Parme. Dutillot fit plus : apprenant que le premier chirurgien de l'infant avait enseigné avec honneur à Paris, il le fit nommer dès l'automne de 1769, professeur de chirurgie théorique et pratique à Parme.
Bientôt, Levacher reçut aussi le titre de chirurgien accoucheur de l'archiduchesse Infante qu'il assista en effet à la naissance de tous ses enfants.
En 1779, l'accoucheur de la reine de Naples, le docteur Payerne, eut une attaque d'apoplexie. La renommée du chirurgien de la cour de Parme s'etait étendue jusqu'à Vienne et Marie-Thérèse désigna à Marie-Caroline le maître qui prêtait ses services à Marie-Amélie. C'est ainsi, que Levacher présida à la naissance du sixième enfant de Ferdinand IV et qu'il fut appelé dix autres fois au chevet de la prolifique souveraine. "

Ayant déjà subi des fausses couches et perdu des enfants en bas âge, Marie-Caroline veut s'assurer les soins de l'élite des médecins. A la fin de l'année 1781, enceinte de presque six mois, elle fait venir à Naples Le Vacher. Elle écrit directement au praticien et contacte en même temps sa soeur, Marie-Amélie, car Le Vacher est médecin de la Cour de Parme dont il ne peut s'éloigner que de l'agrément des souverains.
Ainsi exprime-t-elle sa reconnaissance :

Samedi 8 décembre 1781
Parme à l'Infant
Permettez que je vous fasse bien des remerciements pour votre obligeante lettre par laquelle vous m'assurez de l'envoi de Vacher. Je suis au désespoir de vous causer cette incommodité et si vous connaissez ma façon de penser, vous pourrez juger combien cet homme m'est nécessaire et quelle confiance j'ai en lui qui m'a forcée de vous importuner, chose que je déteste plus de tout, n'aimant point demander et il fallut la forte considération de ma santé et vie de laquelle je me repose en ses mains qui m'a forcée de vous faire cette recherche ...



Après l'heureuse délivrance et la naissance de notre future reine Marie-Amélie le 27 avril 1782, Marie-Caroline ne manque pas de remercier encore et encore, tout en tressant des louanges à François-Guillaume Le Vacher :

Ce sera Vacher qui vous présentera cette lettre de ma part . Recevez de nouveau mes remerciements pour l'envoi de ce digne homme. Si vous pouviez connaître combien j'ai en lui confiance, combien je l'estime pour ses qualités, son caractère honnête, franc et sincère, et pour son habileté, vous verriez combien mes remerciements sont sincères et étendus, sa présence me causant une parfaite tranquillité sur ma santé, ainsi je vous en fais mes bien sincères remerciements . Mon cher mari unit les siens aux miens, estimant beaucoup ce digne sujet, mes chers enfants, qui tous vous présentent leurs respects, ont aussi participé pour leur bien être à l'envoi que vous avez daigné m'en faire .  Il a guéri mon second fils d'une maladie affreuse que lui avait communiquée la nourrice et dont il était infecté depuis une année et toujours maladif et actuellement il en est guéri . Mon petit garçon lui doit aussi la vie qu'il était en train de perdre si on n'avait suivi ses conseils, et vous jugez combien cela redouble mes obligations et multiplie ma reconnaissance envers vous qui m'avez, par son envoi, procuré tous ses avantages. Recevez-en donc tous mes remerciements et l'assurance de la plus parfaite estime, considération et amitié.


Le Journal d’une reine: Marie-Caroline de Naples dans l'Italie des Lumières
De Mélanie TRAVERSIER

Marie-Caroline fera à nouveau venir Le Vacher de Parme à Naples . Durant l'été 1783, il ne peut empêcher une fausse-couche qui laisse la reine très affaiblie. Il reste à son chevet du 10 juin jusqu'au 9 août . Dix mois plus tard, Marie-Caroline encore enceinte l'appelle auprès d'elle . Elle donne naissance à une petite Antoinette. Le Vacher prodigue ses soins à ses enfants également et ne quitte Naples qu'au mois de janvier 1785.

La présence à Naples de Le Vacher au chevet et à la demande de la reine, au début de l'année 1782 puis durant l'été 1784, s'inscrit dans le cadre des circulations transnationales des pratiques de médecine de cour, telles qu'elles sont relayées par le réseau curial, et animées, dans le cas singulier de la santé féminine, par des correspondances entre princesses mais aussi par des correspondances mixtes. De la même façon, lorsque Le Vacher ne s'avérait pas disponible, la reine avait activé avec succès ses réseaux princiers et fraternels pour s'assurer à la fin de 1782 la venue à Naples du célèbre médecin lausannois Samuel Auguste Tissot.

Le Journal d’une reine: Marie-Caroline de Naples dans l'Italie des Lumières
De Mélanie Traversier