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Gazette d'un Parisien sous la Révolution... 1783-1796

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Message par Leos Sam 08 Jan 2022, 00:51

Chers amis,

J'ai découvert une intéressante journal et série de lettres d'un écrivain et  bibliothécaire Nicolas Ruault,  Ils  ont été publiés en 1975-1976 par A. Vassal sous le titre "Gazette d'un Parisien sous la Révolution... 1783-1796
.
Ce ouvrage est malheureusement pas entièrement disponible sur le site des archive

https://archive.org/details/gazettedunparisi0000ruau

Nous y lirons une description immédiate des événements révolutionnaire / par exemplet descriptions d'atrocités après le 10 août 1792 sont terribles/ ou une vue intéressante pour moi d'un autre côté / de ce partisan de la révolution /
Surtout comment il voyait la monarchie et la reine  Comment il a parlé d'elle avec les autres.

Voici quelques-unes des mentions les plus intéressantes de la reine que j'ai trouvées:



Paris.  le 19 decembre 1789
Il faut que je vous fasse part du récit que Mr Gombault nous faisait hier à souper, de l’aventure du garde de corps, laissé pour mort à la porte de l’appartement de la reine, le 6 octobre au matin, et maintenant guéri de ses blessures. Ce garde a été présenté à la reine mardi dernier par Mr de Latour Dupin. Elle l’a comblé d'amitiés, elle a voulu savoir de sa bouche ce qui s’était passé à sa porte en ce terrible moment. Il lui en fait le récit que voici d'après Mr Gombault qui le tient de Mr de Latour Dupin. Vers les 5 heures le garde du corps qui était posté là fut massacré par la populace, des hommes et des femmes qu'on avait su introduire dans le château. Celui dont il est question prit aussitôt de lui- même et sans ordre la place de son camarade tué ; il n’eut que le temps d’entrouvrir la porte et de crier à une femme : Sauvez la Reine. A peine eut-il refermé la porte qu’il reçut un coup d’épée dans le côté ; ensuite un garde national de Versailles lui porta un coup de crosse de fusil sur la tête ; le chien de la crosse lui déchira les cheveux et lui perça le crâne. Il tombe, la multitude l'accable de coups et le laisse en criant : le bougre est mort. Elle entre aussitôt dans l’appartement, mais la Reine n’y était plus ; elle s’était sauvée en chemise chez le roi. Cette populace déchargea sa colère sur le lit ; les draps furent déchirés de coups d'épées ; quelques-uns pissèrent dedans, d’autres firent pis encore. La Reine a voulu savoir de ce fidèle serviteur les propos que cette populace tenait à sa porte avant de l’enfoncer et de pénétrer chez elle, tandis que son camarade et lui en défendaient l’entrée au péril de leur vie. Le garde s’est d’abord refusé à les répéter : « Ils sont trop affreux. Madame !... » La reine lui a non seulement commandé mais elle l’a prié de les lui dire en propres termes, tels en un mot qu'il les avait  entendus. « Eh bien, Madame, ils disaient, ces monstres : Si nous l'attrapons, la bougresse, nous la mettrons en pièces, nous mangerons son cœur sur le gril et nous porterons sa tête et ses boyaux à Paris. » Ce récit est de toute vérité. Ce malheureux et fidèle garde du roi a été comblé de caresses aux Tuileries. Le Roi, Monsieur, Madame, le jeune Dauphin ont versé des larmes en le voyant, en l’entendant raconter ce qu’il avait vu et ce qu'il avait fait dans cette affreuse matinée. Le roi lui a dit : « Je n’ai pas en ce moment le moyen ni la facilité de vous récompenser, mais, de quelque manière que ce soit, nous vous témoignerons un jour notre reconnaissance. » Je n’ai pu retenir le nom de ce brave garde du corps, prononcé une fois en nombreuse compagnie. Je prierai Monsieur Gombault de me le répéter et je vous le dirai...


Paris, le 30 mars 1790
J'ai passé trente heures de service au château des Tuileries. J'y ai vu Marie-Antoinette de très près, j’ai assisté même à son dîner. Elle se porte bien et j'ai été émerveillé de sa bonne contenance. Le roi se promène, le matin, à grands pas dans le jardin ; il fatigue aisément les plus lestes et les fait suer de tout leur corps, car il fait très chaud. Le petit dauphin est beau comme un ange ; il a une figure très gracieuse, franche et ouverte ; il saute et gambade le long des terrasses et joue avec tous les enfants qu’il rencontre.

Paris, 1792
Le roi se promène souvent à cheval dans les divers quartiers de Paris ; ces promenades ont un but politique, de savoir quel accueil le peuple lui fera. En général cet accueil est froid ; on le voit passer sans intérêt et sans lui rien dire. Il a été insulté grossièrement et d’assez haut, près de St-Joseph, par des marchandes d'herbes et de marée, rue Montmartre. Il a dû entendre leurs injures ; elles ont crié : le gros sot, le gros sot... Cette grossièreté serait punie dans un autre temps. On n’a pas manqué de dire que les Jacobins avaient payé ces femmes, ces mégères, pour insulter le pouvoir exécutif.

Paris le 9, decembre 1792
Je vois quelquefois un officier municipal de la Commune du 10 août. C’est un commis de librairie nommé Mercier, qui a été chargé de garder le roi et sa famille dans la tour du Temple ; il me disait ces jours derniers que la reine est tellement changée depuis quatre mois qu’elle est là qu’elle serait méconnaissable aux yeux mêmes de ceux qui la voyaient tous les jours ; tous ses cheveux sont blancs, elle paraît avoir plus de 60 ans. Elle passe le jour à apprendre à lire et à écrire à son fils. Le roi aussi est très changé, il est surtout beaucoup amaigri. Ils sont traités, par ordre de la Commune, avec une très grande dureté et même avec brutalité ; comme des prisonniers de conciergerie. Ce même municipal me racontait que lors du renouvellement de la municipalité, il y a 10 jours, les prisonniers furent remis par lui-même aux nouveaux commissaires municipaux à la garde du Temple et qu’il fut obligé d’agir ainsi avec eux pour se décharger de la garde qui lui était confiée ; il leur dit le soir à souper : « Ce n’est pas la peine de vous coucher à votre heure ordinaire, parce qu’à dix heures et demie mes nouveaux confrères viendront vous faire une visite et vous seriez obligés de vous relever ». Mercier resta avec la famille royale jusqu'à cette heure qu’arrivèrent les nouveaux commissaires. Entrés dans la chambre, Mercier fit mettre toute la famille sur une ligne et dit aux nouveaux gardes : « Voici Louis Capet, voici Antoinette sa femme, Elisabeth, sœur de Louis Capet, et les deux enfants, mâle et femelle, de Louis et d’Antoinette. Je vous les remets tous sains et saufs, tels que vous les voyez. »

Paris le 28 janvier 1793
..que l'on n’appelle plus que la veuve Capet, et sur le reste de sa famille. On s'est promptement débarrassé du chef, on laissera peut-être tranquilles les membres qui restent ou on les enverra en Allemagne à l’empereur. C’est ce que désirent les âmes douces, ceux qui ont horreur des traitements cruels. Je vous raconterai aujourd’hui quel¬ ques autres circonstances qui ont précédé la mort du dernier roi. Je le tiens toujours de ce municipal dont je vous ai déjà parlé et qui est un des commis de la librairie de Mr Panckoucke. Il a vu tout ce que je vais vous dire. La reine le souffrait mieux qu’un autre auprès d'elle, ainsi que le roi parce qu’il avait plus de complaisance et que jamais il ne leur parlait grossièrement. Il fournissait même à Antoinette les morceaux de musique qu’elle lui demandait dans les premiers jours de l’emprisonnment. Il est de ceux à qui Louis a fait des remerciements à la fin de son testament. Il m’en a conté bien long, mais je réduirai ceci à peu de lignes. Lorsque les commissaires envoyés pour lui signifier le décret de mort arrivèrent dans son appartement, son valet de chambre Cléri les annonça. Louis les fit attendre quelques minutes dans son antichambre. On ouvrit ensuite la porte à deux battants, les commissaires le virent debout devant sa cheminée. Il paraissait attendre qu’ils vinssent à lui. Mais le ministre de la justice Garat lui fit signe de la main de venir dans la pièce où étaient les commissaires. Il y vint avec une colère concen¬ trée qui dénaturait tous les traits de son visage. Le secré¬ taire Gronvelle lui lut le décret. Au premier article qui le déclare coupable de haute trahison, Louis fit un geste d'indignation en portant sa main sur son front. Au second article qui le condamne à la peine de mort, il roula les yeux avec fureur, puis il les fixa sur les commissaires, sans proférer un seul mot. La lecture finie, il remit au ministre de la justice un papier dans lequel il demandait un sursis de 3 jours, pour se préparer à paraître devant Dieu et pour voir sa famille sans témoins.

(ici une autre preuve qu'il y avait de la musique dans le triste Temple.)

Leos

source: rechercher dans data.bnf.fr
Nicolas Ruault (1742-1828)
Libraire et homme de lettres. - Natif d'Évreux. À Paris, il aurait travaillé 10 ans en qualité de commis du libraire Claude Fosse puis de sa veuve, et comme colporteur sous le manteau à partir de 1764. Entré en apprentissage en déc. 1771 après avoir demandé en vain une place de libraire (1767). Reçu maître le 17 juin 1772 moyennant versement de 1 000 l. pour dérogation de temps. Entre 1773 et 1785, il coédite de nombreux périodiques. Auteur en 1788 d'un "Éloge" de Voltaire publié sous le pseudonyme de "M. Écrlinf." ("Écrasons l'infâme") et sous la fausse adresse de l'"Abbaye de Scellières". Homme de lettres et ami des philosophes. Proche de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais, dont il partage le domicile à partir de 1780 et avec qui il est associé dans l'entreprise du Voltaire de Kehl. Se retire de la librairie pendant la Révolution, après avoir publié d'avril à août 1794 "Le Conservateur (décadaire) des principes républicains...", rédigé par Lachapelle. Auteur en 1806 d'une traduction de l'"Énéide" de Virgile et en 1809 d'un "Éloge de Nicolas Poussin". Dit âgé de 86 ans lors de son décès (janv. 1828). Sa correspondance et son journal ont été publiés en 1975-1976 par A. Vassal sous le titre "Gazette d'un Parisien sous la Révolution... 1783-1796
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Message par Mme de Sabran Sam 08 Jan 2022, 09:36


Merci, mon cher Leos, pour ces extraits de la correspondance de Ruault.  Very Happy

Lettres à son frère, 1783-1796.   Gazette d'un Parisien sous la Révolution... 1783-1796 Shoppi10
  Paris, Librairie académique Perrin, 1976, 495 p. Les lettres que Nicolas Ruault a adressées de 1783 à 1796 à son frère Brice, curé de Normandie, apportent sur des événements bien connus le témoignage d'un Parisien qui a scruté avec attention la vie politique de son temps.


Que faut-il en penser ?

Ruault a écrit:
Cette populace déchargea sa colère sur le lit ; les draps furent déchirés de coups d'épées ; quelques-uns pissèrent dedans, d’autres firent pis encore.
Hum... scratch
Il est officiellement admis aujourd'hui que ce saccage du lit de la reine eut lieu non pas à Versailles en octobre 89 mais aux Tuileries, le 10 août .
Ces lettres seraient-elles apocryphes ?

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