Rendons hommage à Charles Labussière
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Rendons hommage à Charles Labussière
Voilà un comédien jouant les niais, comme notre Bourvil, qui sauva de la mort les comédiens du Français. Et d'autres personnes. Un caillou dans la machine à broyer sous la Terreur. Bouffon, clown, il sera admirable. Il sauva Louise Comtat, la grande comédienne. Y a-t-il un livre, un film, sur cet homme extraordinaire.
Prenez le temps de lire.
Labussière naît à Paris d'un officier noble et pauvre avec qui il ne s'entendra jamais. À seize ans, ce dernier l'envoie comme cadet dans le régiment de Savoie-Carignan, qui est en garnison à Dunkerque. Mais il se détourne rapidement de la carrière des armes. De retour à Paris, il se fait acteur et interprète avec quelque succès les rôles de niais dans un théâtre des faubourgs. C'est à cette époque qu'il simplifie son nom en Labussière, plus facile à prononcer et à retenir.
En 1789, devant l'assemblée réunie dans l'église Saint-Jacques-de-l'Hôpital, présidée par le vieux Charier ancien procureur au Châtelet, M. de Labussière a soutenu une motion extravagante, selon laquelle il fallait envoyer une députation à Versailles auprès du roi pour qu'il fît « entrer dans Paris 12 000 hommes de troupe afin d'y rétablir l'ordre ». Cette proposition eut le résultat qu'on pouvait attendre : Charles-Hippolyte Labussière fut immédiatement pendu à la lanterne par les assistants furieux. Délivré par des gardes français, il fut remis par eux « plus mort que vif entre les mains d'Étienne François Gallet de Santerre, banquier à Paris, qui était une de ses connaissances. Conduit à la prison de l'Abbaye, il en sortit quelques semaines après. » M. Gallet de Santerre crut qu'il était prudent d'envoyer M. de La Bussière pour quelques mois à la campagne, afin de laisser le temps au peuple d'oublier cette affaire, dont tout Paris retentit.
Charles-Hippolyte Labussière fut ensuite employé au Comité de salut public et au Comité de sûreté générale, où il rendit les plus grands services aux personnes incarcérées, sans toutefois sauver son protecteur, Gallet de Santerre, de la guillotine, le 5 thermidor (23 juillet 1794).
Il aime critiquer ou ridiculiser les hommes de la Révolution, ce qui aurait pu lui attirer de graves ennuis, mais il parvient à se faire employer dans les bureaux du Comité de salut public, c'est-à-dire au quartier général de la Terreur, où quelques-uns de ses amis ont trouvé asile.
Au printemps 1794, Saint-Just vient en effet de créer son propre bureau de police, au second étage des Tuileries. C'est là que Charles-Hippolyte Labussière est employé, selon certains, sur le simple fait qu’il a une bonne orthographe et qu'il présente bien.
Horrifié par les exécutions en masse dont les dossiers passent entre ses mains, Labussière aurait pris l'habitude de se rendre la nuit aux Bains Vigier, installés sur la Seine, avec des pièces d’accusation qu’il aurait emportées à sa sortie du bureau et il les aurait détruites. Son chef de bureau, Fabien Pillet, ne se serait jamais étonné de ces disparitions.
Ainsi, il aurait commencé par sauver la directrice de théâtre, Mlle Montansier et son amant, le comédien Honoré Bourdon dit « de Neuville ». Il aurait prétendu plus tard avoir retiré plus de cinquante pièces de ses cartons rien que les 7, 8 et 9 messidor de l'An I, dont celles des comédiens du Théâtre-Français, de même qu'il aurait jeté à la Seine 924 procès, du 22 floréal (11 mai 1794) à la chute de Robespierre. Une fois les dossiers d'instruction perdus, les détenus sont oubliés dans leurs prisons, leurs noms ne paraissent plus sous les yeux de l'accusation, on aurait même eu du mal à les trouver parmi les milliers de gens incarcérés. Il aurait ainsi sauvé, entre autres, la marquise de Villette, Mme de Buffon, nièce du naturaliste ; le comte de Talleyrand-Périgord, oncle du diplomate ; Volney, précurseur de l'anthropologie ; Delessert, banquier suisse ; Mme de Vassy, qui écrivit ses mémoires de prison ; Florian, écrivain emblématique de son époque ; le vicomte de Ségur, auteur dramatique qui lui avait marqué de l'attention ; Mme de La Fayette, épouse du général ; le prince de Monaco ; Delphine de Sabran, veuve du général de Custine († 1793), soit en tout 1 153 personnes.
Après Thermidor, il s'engage auprès de Louis Legendre et s'occupe de faire libérer les innocents dont les prisons de Paris sont pleines. Il fait un court séjour en prison lors de la tentative de coup d'État du 13 vendémiaire. Puis on l'oublie.
Sous le Consulat, malade et sans emploi, il tombe dans la misère. Avertis de son malheur, les Comédiens-Français organisent une soirée à son bénéfice. Les acteurs qu'il a sauvés choisissent une pièce aux nombreux personnages, afin que chacun d'eux puisse y tenir un rôle. La représentation a lieu le 5 avril 1803 au théâtre de la Porte-Saint-Martin, à l'initiative du comédien Dazincourt. On donne le Hamlet de Ducis et Augustin et Théodore, ou les Deux pages de Dezède. Les principaux acteurs sont Talma, Dazincourt, Fleury, Mlles Raucourt et Contat. Le Premier Consul y assiste, ainsi que Joséphine de Beauharnais, que Charles-Hippolyte Labussière aurait sauvée.
Incapable d'économie, Labussière dilapide rapidement le produit de cette soirée. Victime d’une violente attaque de paralysie, il est bientôt si diminué qu'on l'enferme dans une maison de fous, où il meurt peu après, entièrement oublié.
Prenez le temps de lire.
Labussière naît à Paris d'un officier noble et pauvre avec qui il ne s'entendra jamais. À seize ans, ce dernier l'envoie comme cadet dans le régiment de Savoie-Carignan, qui est en garnison à Dunkerque. Mais il se détourne rapidement de la carrière des armes. De retour à Paris, il se fait acteur et interprète avec quelque succès les rôles de niais dans un théâtre des faubourgs. C'est à cette époque qu'il simplifie son nom en Labussière, plus facile à prononcer et à retenir.
En 1789, devant l'assemblée réunie dans l'église Saint-Jacques-de-l'Hôpital, présidée par le vieux Charier ancien procureur au Châtelet, M. de Labussière a soutenu une motion extravagante, selon laquelle il fallait envoyer une députation à Versailles auprès du roi pour qu'il fît « entrer dans Paris 12 000 hommes de troupe afin d'y rétablir l'ordre ». Cette proposition eut le résultat qu'on pouvait attendre : Charles-Hippolyte Labussière fut immédiatement pendu à la lanterne par les assistants furieux. Délivré par des gardes français, il fut remis par eux « plus mort que vif entre les mains d'Étienne François Gallet de Santerre, banquier à Paris, qui était une de ses connaissances. Conduit à la prison de l'Abbaye, il en sortit quelques semaines après. » M. Gallet de Santerre crut qu'il était prudent d'envoyer M. de La Bussière pour quelques mois à la campagne, afin de laisser le temps au peuple d'oublier cette affaire, dont tout Paris retentit.
Charles-Hippolyte Labussière fut ensuite employé au Comité de salut public et au Comité de sûreté générale, où il rendit les plus grands services aux personnes incarcérées, sans toutefois sauver son protecteur, Gallet de Santerre, de la guillotine, le 5 thermidor (23 juillet 1794).
Il aime critiquer ou ridiculiser les hommes de la Révolution, ce qui aurait pu lui attirer de graves ennuis, mais il parvient à se faire employer dans les bureaux du Comité de salut public, c'est-à-dire au quartier général de la Terreur, où quelques-uns de ses amis ont trouvé asile.
Au printemps 1794, Saint-Just vient en effet de créer son propre bureau de police, au second étage des Tuileries. C'est là que Charles-Hippolyte Labussière est employé, selon certains, sur le simple fait qu’il a une bonne orthographe et qu'il présente bien.
Horrifié par les exécutions en masse dont les dossiers passent entre ses mains, Labussière aurait pris l'habitude de se rendre la nuit aux Bains Vigier, installés sur la Seine, avec des pièces d’accusation qu’il aurait emportées à sa sortie du bureau et il les aurait détruites. Son chef de bureau, Fabien Pillet, ne se serait jamais étonné de ces disparitions.
Ainsi, il aurait commencé par sauver la directrice de théâtre, Mlle Montansier et son amant, le comédien Honoré Bourdon dit « de Neuville ». Il aurait prétendu plus tard avoir retiré plus de cinquante pièces de ses cartons rien que les 7, 8 et 9 messidor de l'An I, dont celles des comédiens du Théâtre-Français, de même qu'il aurait jeté à la Seine 924 procès, du 22 floréal (11 mai 1794) à la chute de Robespierre. Une fois les dossiers d'instruction perdus, les détenus sont oubliés dans leurs prisons, leurs noms ne paraissent plus sous les yeux de l'accusation, on aurait même eu du mal à les trouver parmi les milliers de gens incarcérés. Il aurait ainsi sauvé, entre autres, la marquise de Villette, Mme de Buffon, nièce du naturaliste ; le comte de Talleyrand-Périgord, oncle du diplomate ; Volney, précurseur de l'anthropologie ; Delessert, banquier suisse ; Mme de Vassy, qui écrivit ses mémoires de prison ; Florian, écrivain emblématique de son époque ; le vicomte de Ségur, auteur dramatique qui lui avait marqué de l'attention ; Mme de La Fayette, épouse du général ; le prince de Monaco ; Delphine de Sabran, veuve du général de Custine († 1793), soit en tout 1 153 personnes.
Après Thermidor, il s'engage auprès de Louis Legendre et s'occupe de faire libérer les innocents dont les prisons de Paris sont pleines. Il fait un court séjour en prison lors de la tentative de coup d'État du 13 vendémiaire. Puis on l'oublie.
Sous le Consulat, malade et sans emploi, il tombe dans la misère. Avertis de son malheur, les Comédiens-Français organisent une soirée à son bénéfice. Les acteurs qu'il a sauvés choisissent une pièce aux nombreux personnages, afin que chacun d'eux puisse y tenir un rôle. La représentation a lieu le 5 avril 1803 au théâtre de la Porte-Saint-Martin, à l'initiative du comédien Dazincourt. On donne le Hamlet de Ducis et Augustin et Théodore, ou les Deux pages de Dezède. Les principaux acteurs sont Talma, Dazincourt, Fleury, Mlles Raucourt et Contat. Le Premier Consul y assiste, ainsi que Joséphine de Beauharnais, que Charles-Hippolyte Labussière aurait sauvée.
Incapable d'économie, Labussière dilapide rapidement le produit de cette soirée. Victime d’une violente attaque de paralysie, il est bientôt si diminué qu'on l'enferme dans une maison de fous, où il meurt peu après, entièrement oublié.
Mr ventier- Messages : 1134
Date d'inscription : 18/11/2020
Age : 58
Localisation : Rouen normandie
Re: Rendons hommage à Charles Labussière
Merci, cher M. Ventier, pour la présentation de ce héros peu connu de l'époque révolutionnaire. N'eût-il sauvé de la mort que la moitié de tous les gens dont vous nous citez les noms ( parmi lesquels celui de ma fille, Delphine ) , que cet homme-là serait encore admirable, n'est-ce pas !
Ciel ! mon mari ...
Charles-Hippolyte Delpeuch de Labussiere (1768-1808)
Edité par ohne Orts- und Jahresangabe (um ), 1850
Je trouve, d'Arthur Pougin, « La Comédie française et la Révolution - Labussière et son œuvre »
Et puis, vous pouvez lire en ligne les Mémoires de Labussière.
C'est ici :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k34130334.image
Ciel ! mon mari ...
Charles-Hippolyte Delpeuch de Labussiere (1768-1808)
Edité par ohne Orts- und Jahresangabe (um ), 1850
M. Ventier a écrit:Ya-t-il un livre, un film ?
Je trouve, d'Arthur Pougin, « La Comédie française et la Révolution - Labussière et son œuvre »
Et puis, vous pouvez lire en ligne les Mémoires de Labussière.
C'est ici :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k34130334.image
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Rendons hommage à Charles Labussière
Un grand merci cela fera office de ma prochaine lecture
Mr ventier- Messages : 1134
Date d'inscription : 18/11/2020
Age : 58
Localisation : Rouen normandie
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