Le comte Charles-Philippe d'Artois, futur Charles X

Futur Charles X, le Comte d'Artois (1757-1836) est le benjamin des frères de Louis XVI. Il est élégant , drôle et dépensier, c'est un jeune homme joyeux et déluré aux yeux noirs pétillants.C'est, selon Joseph II, "un petit maître dans toutes les formes" et il est le compagnon de divertissements de la Dauphine et Reine _ il fait construire Bagatelle en 1777 à la suite d'un pari avec sa royale belle-soeur.
En 1773, il prend pour femme -ou plutôt on la lui donne Wink-Marie-Thérèse de Savoie , soeur de la Comtesse de Provence. Ils perdent leur fille, Mademoiselle d'Artois, âgée de sept ans , le 5 décembre 1783.Leur fils aîné, Louis-Antoine, Duc d'Angoulême, futur bref Louis XIX (1775-1844), épousera en 1799, Madame Royale ; le second, Charles-Ferdinand, Duc de Berry (1778-1820) aura une postérité qui paraît offrir un avenir à la dynastie.
A la révolution, Artois prend fait et cause pour les réactionnaires d'entre les nobles. Il est parmi les premiers émigrés car sa conduite légère, ses dépenses exagérées et son insistance à faire respecter les privilèges l'ont rendu impopulaire.
Il séjourne à Turin auprès de son beau-père, qui lui fait bon accueil, puis à Coblence. Il déménage à plusieurs reprises avant de rentrer en France lors de la Restauration . Il prend alors la tête des ultras.
En 1824, il succède à son frère Louis XVIII et tente de recréer certains des usages de l'Ancien Régime. Il se fait sacrer à Reims. Même s'il encourage l'industrie, il est vu surtout comme un conservateur défendant l'autorité.
Lors de la révolution de 1830, il abdique d'abord en faveur de son fils ,Louis XIX, puis de son petit-fils ,le Comte de Chambord. C'est la fin du règne des Bourbons en France. Le fils de Philippe-Egalité (et gendre de Marie-Caroline de Naples !), monte sur le trône, sous le nom de Louis-Philippe Ier.
Charles X, déchu, meurt en exil à Goritz, en 1836, d'une épidémie de Choléra.
Stendhal a écrit : "Il faudra peut-être des siècles à la plupart des peuples de l'Europe pour atteindre le degré de bonheur dont la France jouit sous le règne de Charles X".

Bien à vous.

Voici un portrait de Louise Lussan d'Esparbès, femme du vicomte de Polastron (frère de la duchesse de Polignac) et maîtresse du comte d'Artois. Portrait par Mme Vigée-Lebrun (1804).

Portrait du comte d'Artois, par Antoine-François Callet (1787).



Ce portrait, fait d'après nature en 1787, ne fut pas exposé au Salon. Il fut néanmoins exposé à l'Exposition de 1817 sous le titre de "Portrait de S.A.R. Monsieur frère du roi".

Cosmo a écrit: vicomte de Polastron (frère de la duchesse de Polignac) .

... demi-frère .

Mme de Polignac avait pour mère Jeanne-Charlotte Hérault ( d'où le cousinage avec Hérault de Séchelles ) qu'elle perdit à l'âge de quatre ans .
Son père convola en secondes noces avec Anne-Elisabeth de Noé dont il eut trois autres enfants dont le vicomte.

.

C'est d'un compliqué tout ça.   

Un autre portrait ( bien meilleur    ) de Louise de Polastron, Bichette ou Luzy pour les intimes :

Et bien sûr le fameux Chiffre d'Amour, de Fragonard !   
Louise de Polastron grave des initiales sur l'écorce d'un arbre ...
( Nous ne nous demandons pas de kiki !   )

Ces deux derniers tableaux sont tout de même plus beaux, non ?  :n,,;::::!!!: 

Oui, superbe ! Très bien peint.    Sait-on qui est le peintre du premier portrait?
Sur le premier portrait, elle semble avoir été flashée au saut du lit ceci dit.  

Mme de Sabran a écrit:

Louise de Polastron grave des initiales sur l'écorce d'un arbre ...
( Nous ne nous demandons pas de kiki !   )

Bizarrement, elle semble être en train de graver un "S"... ! C'est pas le comte d'Artois, ça?!   

Le "S" est peut-être le début du "P" de Charles-Philippe?

Bien à vous.

Cosmo a écrit:Oui, superbe ! Très bien peint.    Sait-on qui est le peintre du premier portrait?
:

Je l'ignore ...   

Voici un dessin, cette fois, toujours de Louise :

Notre Comte d'Artois, futur Charles X. Rien que ça ! Et en plus compagnon d'agrément de la Dauphine puis de la Reine.
Le connaissant très mal, j'ai décidé de m'arrêter un peu plus sur chacun des contemporains royaux de Marie-Antoinette. Non mais .....  : : 

Je vous recommande de lire Le comte d'Artois, Charles X, le Prince, l'Emigré, le Roi de Lucas-Dubreton. Un livre très intéressant.

Je connaissais un peu les frasques d'Artois à la Cour. Je connaissais en revanche assez mal sa vie de prince en émigration. Ce n'est pas reluisant. Ce type était non seulement idiot et égoïste . C'était aussi un lâche.
Quelques illustrations de son comportement :

1 / Ses jeunes années

C'est un mélange de désinvolture, de lâcheté et d'égoïsme. Saviez-vous que son train de vie à la Cour était supérieur à celui de la reine?    Quand on pense qu'on nous rebat sans cesse les oreilles sur le train de vie de Marie-Antoinette...
Son duel avec le prince de Bourbon est une farce. D'après Lucas-Dubreton, le résultat de ce duel était arrangé à l'avance. Artois et le prince de Bourbon s'entendaient très bien : il était convenu de ne pas pousser les choses trop loin.

Le duc de Bourbon était ami avec Artois. C'était même son "compagnon de plaisir" (ils faisaient des parties fines avec des courtisanes- cf l'affaire dite des "Chevaliers de Cinq-Louis"  ). Mais l'honneur commandait au duc de Bourbon de provoquer son ami en duel. Son père, le prince de Condé, l'y poussait. Artois ayant peur de se battre en duel, il évitait soigneusement de croiser le chemin du duc de Bourbon, qui se promenait ostensiblement sur le chemin de Bagatelle. "Finalement, Vaudreuil et Besenval, s'étant concertés, estimèrent qu'un duel était nécessaire; mais Crussol, auquel le roi avait confié la garde de son frère, objecta que, s'il arrivait quelque chose à Monseigneur, il y allait de sa tête; sur quoi il fut décidé que le duel n'aurait lieu que pour la forme." (J. Lucas-Dubreton). Traduction : outre que le duc de Bourbon aimait Artois, il n'avait aucunement l'intention de prendre le risque d'être condamné à mort, dans l'hypothèse où Artois serait tué.

Lors du duel, le prince de Bourbon saisit ainsi l'occasion d'un coup d'épée effleurant sa chemise (passé sous le bras) pour se déclarer satisfait, "rempli de ses droits" et mettre au fin au duel.

A noter que le public ne se laissa pas berner par cette parade et qu'il se déclara pour la duchesse de Bourbon. "Lorsque après le duel Artois se montra à la comédie en compagnie de la reine, ils furent tous deux accueillis avec une froideur marquée, la duchesse de Bourbon et son mari acclamés avec enthousiasme." Ainsi, la mauvaise réputation d'Artois déteint sur Marie-Antoinette, malheureusement...

2/ Le prince en émigration

Ses relations avec Louis XVIII se tendent assez vite. Parti en émigration bien avant Provence en 1789, Artois règne de facto sur la petite cour d'émigrés français, lorsque Provence débarque en 1791. Dans ce contexte, Provence arrive un peu comme un chien dans un jeu de quilles en 1791... et peine à s'imposer (malgré son gros postérieur   ).
Les relations entre les deux frères ne sont pas toujours faciles. Un jour, Artois envoie un courrier injurieux à Louis XVIII, celui-ci le lui renvoie alors avec la mention manuscrite : "En la relisant, je suis certain que vous regretterez de me l'avoir envoyée".

Envoyé en Vendée avec un corps expéditionnaire composé de soldats français et anglais pour venir à la rescousse des chouans (Charette, général vendéen), Artois a les miquettes et renonce, à la dernière minute, à débarquer sur les côtes françaises. A l'époque, cela fait scandale dans toute l'Europe. C'est ce même Artois qui accusait son frère Louis XVI de faiblesse   et mettait la vie du roi et de la reine en danger depuis l'étranger en jetant de l'huile sur le feu.  boudoi29 

Lucas-Dubreton raconte comment Artois est, à la longue, devenu apathique pendant l'émigration, notamment après la mort de Louise de Polastron. Il se refusait à prendre la moindre initiative. Il s'en remettait à la "Providence" (ou plutôt, aux Russes et aux Autrichiens   ) pour remonter sur le trône. Il est resté complètement passif au moment de la Restauration, attendant qu'on lui dise d'entrer à Paris pour le faire.

Alors que Napoléon débarque à Nice (épisode des 100 jours), Artois va faire un petit tour à Grenoble et revient très vite se remettre au chaud à Paris. La duchesse d'Angoulême lui écrit alors : "Je ne puis pas vous cacher ni cesser de vous répéter avec quelle peine mon coeur vous voit à Paris. Pourquoi n'êtes vous pas avec Oudinot ou Ney?... Vous êtes accablé de fatigues, de petites affaires ; et cependant les importantes n'avancent pas, votre gloire en souffre... Au nom de Dieu, quittez Paris, le roi n'a pas besoin de vous... Votre devoir est à une armée, non au Conseil où l'on ne fait que des sottises."
Artois prouvera définitivement sa lâcheté en détalant comme un lapin au premier coup de feu de la révolution de 1830. Il est le seul Roi de France à avoir abdiqué...  

3 / La mort de Louise de Polastron

Lucas-Dubreton explique que, lorsque Louise de Polastron commence son agonie, loin d'Artois (le confesseur de Louise de Polastron l'avait persuadée de se séparer d'Artois), Artois adresse à Mme de Laage restée auprès de la malade, des billets qui "déconcertent par un singulier mélange de douleur et d'égoïsme". "Dites-lui, écrivait-il, que je pars, me portant bien et que, si mon coeur est souffrant, il éprouve aussi des consolations qu'il m'est doux de lui devoir... J'ai monté à cheval pendant une heure et demie, j'ai sué, j'ai fait ma toilette et pris de bon appétit un bon petit dîner  (encore heureux qu'il ne nous parle pas de son popo après dîner    ) ... Je tâche de bien me pénétrer de tout ce qui fortifie notre amie et j'y réussis quelquefois, mais hélas ! mon coeur est dans un cruel étau !".

Un être très étrange, que ce comte d'Artois... un excité du chapeau sur le plan politique, mais qui à l'inverse de sa sœur Elizabeth n'était pas prêt à risquer sa vie pour ses opinions !
Pour l'anecdote, les fils d'Artois ont bataillé contre leur père pour qu'il se coupe les cheveux et abandonne la poudre, qui n'était plus du tout à la mode sous la Restauration. Charles X n'était décidément pas un homme de son temps !

Cosmo a écrit:Envoyé en Vendée avec un corps expéditionnaire composé de soldats français et anglais pour venir à la rescousse des chouans (Charette, général vendéen), Artois a les miquettes et renonce, à la dernière minute, à débarquer sur les côtes françaises. A l'époque, cela fait scandale dans toute l'Europe. C'est ce même Artois qui accusait son frère Louis XVI de faiblesse et mettait la vie du roi et de la reine en danger depuis l'étranger en jetant de l'huile sur le feu.

Et les Vendéens qui attendaient un Prince... Il est certain qu'Artois ne s'est pas illustré dans cette sinistre guerre civile... mais il aurait dû être à leur tête...

Pour la toute petite histoire, quand nous cherchions à acheter une maison avec JTL dans notre contrée,
systématiquement ce tableau était dans ces maisons ! Modernes ou classiques ! Incroyable mais vrai !
Nous en restions sans voix.

Gouverneur Morris a écrit:

Cosmo a écrit:Envoyé en Vendée avec un corps expéditionnaire composé de soldats français et anglais pour venir à la rescousse des chouans (Charette, général vendéen), Artois a les miquettes et renonce, à la dernière minute, à débarquer sur les côtes françaises. A l'époque, cela fait scandale dans toute l'Europe. C'est ce même Artois qui accusait son frère Louis XVI de faiblesse et mettait la vie du roi et de la reine en danger depuis l'étranger en jetant de l'huile sur le feu.

Et les Vendéens qui attendaient un Prince... Il est certain qu'Artois ne s'est pas illustré dans cette sinistre guerre civile... mais il aurait dû être à leur tête...

Ni Provence ni Artois n'ont jugé opportun de risquer leurs petites vies. En revanche, ils n'étaient absolument pas opposés à ce que d'autres personnes risquent leurs vies pour le trône. :

Je vous trouve durs avec notre pauvre petit Comte d'Artois, reconnaissons lui au moins, le fait d'être économe ! Ne s'était-il pas fait faire un simple habit de perles et de diamants, pour le prix dérisoire de plusieurs châteaux ! 

Cette information est tirée de la Correspondance secrète de Lescure qui relaye allègrement les rumeurs les plus fofollles .

En effet, même brodé, rebrodé, sur-brodé de perles et de diamants, pour que le prix d'un habit d'Artois rivalise avec la somme de ceux de plusieurs châteaux, il faut le faire ! Chapeau !!!   

Cela me rappelle la croyance populaire que les murs de Trianon étaient incrustés de pierres précieuses . Tout cela à cause d'un décor de théâtre, parait-il, agrémenté de force verroteries .

Majesté a écrit:Le "S" est peut-être le début du "P" de Charles-Philippe?

Bien à vous.

Non, c'est plus probablement la première lettre de SAR le comte d'Artois   

Mme de Sabran a écrit:

Cette information est tirée de la Correspondance secrète de Lescure qui relaye allègrement les rumeurs les plus fofollles .

En effet, même brodé, rebrodé, sur-brodé de perles et de diamants, pour que le prix d'un habit d'Artois rivalise avec la somme de ceux de plusieurs châteaux, il faut le faire !   Chapeau !!!    

Qu'il ait porté sur lui la valeur de plusieurs châteaux en pierreries, c'est possible. Mais n'oublions pas qu'au XVIIIème les pierres sont montées pour quelques temps, les modes changent si vite. Aussi, si le prince porte une broche de diamant, des boucles, un habit brodé de brillants, ce qu'il porte est très précieux, certes, mais ce sont toujours les mêmes !
Donc son habit lui a sûrement coûté le prix de la façon (plutôt négligeable), quelques pierres pour ajuster, le tissus .... pas beaucoup plus que les débauches de soieries habituelles.

Lettre du comte d'Artois à Marie-Adélaïde d'Orléans, en date du 10 août 1812 (musée des lettres et manuscrits, Paris).

"Je conserve toujours l'espoir de voir terminer les maux qui accable notre famille, notre patrie et l'Europe entière. (...) nous pourrions avoir avant de mourir la consolation de nous voir tous réunis dans les places où le ciel nous avait fait naître."  boudoi29 





Il écrit comme un pied en plus !   

Dessin représentant le comte d'Artois, par Louis-Auguste Brun :

Oh!   Il n'a même pas la bouche ouverte...

Bien à vous.

Décidément, Brun ne me semble pas doué pour attraper la ressemblance ...

Nous ne sommes pas les seuls à le penser : selon Marguerite Jallut ("Marie-Antoinette et ses peintres"), Louis-Auguste Brun "exécuta un portrait assez maladroit de toute la famille royale. Sans doute ne fut-on pas satisfait de son oeuvre car il modifia l'image de la reine dans les deux tableaux où il la représenta, soit montant en cavalier, soit montant en amazone".