Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
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Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
Au-delà de la caricature des plaisirs d’une reine voulant « jouer à la fermière », comment comprendre cette mode des hameaux qui occupa un grand nombre de princes français dans les années 1780 ?
Il faut, pour cela, faire un retour en arrière. Juste avant la construction du hameau de la reine !
L’absence d’intérêt pour la situation populaire dans les arts du Grand Siècle
et l’évolution des Lumières
Tout d’abord, ainsi que le rappelle Gustave Desjardin
dans son histoire du Petit Trianon, les artistes et les écrivains ne s’étaient que très peu préoccupés de la situation populaire au cours du règne de Louis XIV. En effet, dans les œuvres classiques, on allait rechercher des traits de caractères dans les personnages de l’antiquité, ainsi que parmi les nobles. Jamais auprès des bourgeois et encore moins des paysans.
Aussi, Rousseau fut un des premiers à s’aventurer sur ce terrain-là. Diderot vit parmi les villageois des héros tragiques qu’il mit en scène.
Des peintres les suivirent. Greuze, par exemple, s’intéressa aux bergers. Il habillait ses personnages avec les tenues de l’époque. Là, il montre des gens avec leurs sentiments, leurs émotions. En outre, ces représentations furent vendues à des hauts personnages du pays alors.
La fête des bonnes gens
Avec la baisse de la représentation à la Cour de Versailles au début du règne de Louis XVI, de nombreux seigneurs vécurent davantage dans leurs maisons. Là, ils se mirent à imiter Elie de Beaumont qui avait institué en 1777 la fête des bonnes gens.
Véritable portrait de la société d’Ancien Régime, cette scène représente une cérémonie de remise de prix de vertu et de bonne morale à des paysans méritants, les « bonnes gens », par le seigneur de Canon en Normandie, Jean-Baptiste Élie de Beaumont (1732-1786) et son épouse Anne-Louise.
Je vous avais emmenés au château de Canon, à Mézidon ( Normandie ).
Notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t4056-au-chateau-de-canon-chez-elie-de-beaumont?highlight=canon
Au centre, la « bonne jeune fille » est couronnée de roses et le « bon vieillard » va être gratifié d’une couronne de feuilles de chêne et d’épis de blé. Des cadeaux vont leur être offerts : bourses contenant de l’argent, médailles, vêtements, ruban bleu porté par le comte d’Artois, en signe de protection. Cette cérémonie et la fête qui l’a suivie eurent réellement lieu, en 1775 à Canon. Elles montrent la volonté de certains aristocrates éclairés d’établir une nouvelle relation avec le Tiers état, sous les auspices du clergé. Mais cette manifestation de bienfaisance est aussi une affirmation de la place prépondérante de l’aristocratie et d’un nécessaire respect de la hiérarchie sociale.
Cette œuvre, présentée en 1777 au Salon de l’Académie royale de peinture et de sculpture, est caractéristique du goût de cette époque pour la peinture « édifiante », contenant un message moral et rompant avec la gratuité de certains sujets proposés auparavant. Pierre-Alexandre Wille fut l’élève du grand peintre Jean-Baptiste Greuze (1725-1805). Il développe comme lui des thèmes vertueux (aumône, devoir filial, place du père de famille, concorde villageoise, bonne morale…). Si Denis Diderot n’a pas vu cette peinture en particulier, il en connaissait les organisateurs et validait leur démarche. Il appréciait en outre ce type de sujets, rendant à ses yeux l’art utile à l’élévation des esprits.
Le comte d’Artois, second frère de Louis XVI et futur Charles X, devint même par la suite le parrain de la fête des bonnes gens.
La transition vers la vie rustique
La suite logique de cette nouvelle tendance concerne l’ambiance de la vie de ces bonnes gens. Ainsi, les artistes mettent en avant les fermes, les laiteries, les basses-cours… bref le cadre de la vie rustique fait son entrée dans les maisons du luxe.
La littérature poursuit sa mutation, en cherchant dans des anciens textes médiévaux des illustrations de cette vie simple.
Le jardinier Duchesne
évoque lui aussi cette représentation dans les jardins.
Les princes sont alors à la recherche de la magie et du rêve, comme les contes de fées mais aussi les Mille et une nuits peuvent soulevées. Et cette magie se retrouve dans les jardins d’inspiration anglaise et qui font fureur alors en France.
L’exemple du prince de Condé
Le premier à se construire un hameau est le prince de Condé. Dans son domaine de Chantilly, il fait établir à l’extrémité du jardin, sur les bords du canal, sept bâtiments laissant entre eux une place irrégulière.
Ces maisons représentent une étable, une laiterie, un moulin, un cabaret de village et une grange. Chacune d’entre eux sont totalement équipées et sont habitées. Ainsi le prince pouvait aller voir sa meunière entrain de préparer sa farine.
A proximité, le prince dispose d’un cabinet de lecture et des bibliothèques.
Couvertes de chaumes, elles sont totalement rustiques. Mais ne nous y trompons pas, l’intérieur était luxueux.
C’est cet ensemble qui inspire Marie Antoinette et qui demande à Richard Mique de confectionner son propre hameau.
Chantilly, le modèle du Hameau de Trianon ...
Grand dieux ! ... les ruines de Baalbek, rien que ça !
Baalbek, l'ancienne Héliopolis des Romains.
Sources bibliographiques :
Desjardins, Gustave. Le Petit-Trianon, histoire et description. 1885.
Il faut, pour cela, faire un retour en arrière. Juste avant la construction du hameau de la reine !
L’absence d’intérêt pour la situation populaire dans les arts du Grand Siècle
et l’évolution des Lumières
Tout d’abord, ainsi que le rappelle Gustave Desjardin
dans son histoire du Petit Trianon, les artistes et les écrivains ne s’étaient que très peu préoccupés de la situation populaire au cours du règne de Louis XIV. En effet, dans les œuvres classiques, on allait rechercher des traits de caractères dans les personnages de l’antiquité, ainsi que parmi les nobles. Jamais auprès des bourgeois et encore moins des paysans.
Aussi, Rousseau fut un des premiers à s’aventurer sur ce terrain-là. Diderot vit parmi les villageois des héros tragiques qu’il mit en scène.
Des peintres les suivirent. Greuze, par exemple, s’intéressa aux bergers. Il habillait ses personnages avec les tenues de l’époque. Là, il montre des gens avec leurs sentiments, leurs émotions. En outre, ces représentations furent vendues à des hauts personnages du pays alors.
La fête des bonnes gens
Avec la baisse de la représentation à la Cour de Versailles au début du règne de Louis XVI, de nombreux seigneurs vécurent davantage dans leurs maisons. Là, ils se mirent à imiter Elie de Beaumont qui avait institué en 1777 la fête des bonnes gens.
Véritable portrait de la société d’Ancien Régime, cette scène représente une cérémonie de remise de prix de vertu et de bonne morale à des paysans méritants, les « bonnes gens », par le seigneur de Canon en Normandie, Jean-Baptiste Élie de Beaumont (1732-1786) et son épouse Anne-Louise.
Je vous avais emmenés au château de Canon, à Mézidon ( Normandie ).
Notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t4056-au-chateau-de-canon-chez-elie-de-beaumont?highlight=canon
Au centre, la « bonne jeune fille » est couronnée de roses et le « bon vieillard » va être gratifié d’une couronne de feuilles de chêne et d’épis de blé. Des cadeaux vont leur être offerts : bourses contenant de l’argent, médailles, vêtements, ruban bleu porté par le comte d’Artois, en signe de protection. Cette cérémonie et la fête qui l’a suivie eurent réellement lieu, en 1775 à Canon. Elles montrent la volonté de certains aristocrates éclairés d’établir une nouvelle relation avec le Tiers état, sous les auspices du clergé. Mais cette manifestation de bienfaisance est aussi une affirmation de la place prépondérante de l’aristocratie et d’un nécessaire respect de la hiérarchie sociale.
Cette œuvre, présentée en 1777 au Salon de l’Académie royale de peinture et de sculpture, est caractéristique du goût de cette époque pour la peinture « édifiante », contenant un message moral et rompant avec la gratuité de certains sujets proposés auparavant. Pierre-Alexandre Wille fut l’élève du grand peintre Jean-Baptiste Greuze (1725-1805). Il développe comme lui des thèmes vertueux (aumône, devoir filial, place du père de famille, concorde villageoise, bonne morale…). Si Denis Diderot n’a pas vu cette peinture en particulier, il en connaissait les organisateurs et validait leur démarche. Il appréciait en outre ce type de sujets, rendant à ses yeux l’art utile à l’élévation des esprits.
Le comte d’Artois, second frère de Louis XVI et futur Charles X, devint même par la suite le parrain de la fête des bonnes gens.
La transition vers la vie rustique
La suite logique de cette nouvelle tendance concerne l’ambiance de la vie de ces bonnes gens. Ainsi, les artistes mettent en avant les fermes, les laiteries, les basses-cours… bref le cadre de la vie rustique fait son entrée dans les maisons du luxe.
La littérature poursuit sa mutation, en cherchant dans des anciens textes médiévaux des illustrations de cette vie simple.
Le jardinier Duchesne
évoque lui aussi cette représentation dans les jardins.
Les princes sont alors à la recherche de la magie et du rêve, comme les contes de fées mais aussi les Mille et une nuits peuvent soulevées. Et cette magie se retrouve dans les jardins d’inspiration anglaise et qui font fureur alors en France.
L’exemple du prince de Condé
Le premier à se construire un hameau est le prince de Condé. Dans son domaine de Chantilly, il fait établir à l’extrémité du jardin, sur les bords du canal, sept bâtiments laissant entre eux une place irrégulière.
Ces maisons représentent une étable, une laiterie, un moulin, un cabaret de village et une grange. Chacune d’entre eux sont totalement équipées et sont habitées. Ainsi le prince pouvait aller voir sa meunière entrain de préparer sa farine.
A proximité, le prince dispose d’un cabinet de lecture et des bibliothèques.
Couvertes de chaumes, elles sont totalement rustiques. Mais ne nous y trompons pas, l’intérieur était luxueux.
C’est cet ensemble qui inspire Marie Antoinette et qui demande à Richard Mique de confectionner son propre hameau.
Chantilly, le modèle du Hameau de Trianon ...
Grand dieux ! ... les ruines de Baalbek, rien que ça !
Baalbek, l'ancienne Héliopolis des Romains.
Sources bibliographiques :
Desjardins, Gustave. Le Petit-Trianon, histoire et description. 1885.
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55259
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
Merci Eléonore, d'ouvrir un sujet autour de ce livre fondamental et d'une grande érudition, bourré d'informations précises sur le Petit Trianon, son histoire et ses usages.
Un grand classique et une référence incontournable !
Pour celles et ceux qui n'auraient pas la chance d'avoir l'ouvrage dans leur bibliothèque, Gallica propose une version "très propre" en téléchargement, que je vous recommande :
Le Petit Trianon (Gustave Desjardins)
Un grand classique et une référence incontournable !
Pour celles et ceux qui n'auraient pas la chance d'avoir l'ouvrage dans leur bibliothèque, Gallica propose une version "très propre" en téléchargement, que je vous recommande :
Le Petit Trianon (Gustave Desjardins)
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" Ai-je vu dans sa société quelque chose qui ne fût pas marqué au coin de la grâce, de la bonté et du goût? "
(Prince de Ligne, au sujet de "la charmante reine")
Bonnefoy du Plan- Messages : 390
Date d'inscription : 06/08/2018
Localisation : Le Maine
Re: Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
Bonnefoy du Plan a écrit: ce livre fondamental et d'une grande érudition, bourré d'informations précises sur le Petit Trianon
Mais oui
... au point même de nous nommer tout le menu peuple qui s'affaire là et habite les maisonnettes . C'est un tableau très rousseauiste car bien-sûr les conditions de vie des employés de la reine, au Hameau, sont plus douces qu'ailleurs .
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55259
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
Bonnefoy du Plan a écrit:
Pour celles et ceux qui n'auraient pas la chance d'avoir l'ouvrage dans leur bibliothèque, Gallica propose une version "très propre" en téléchargement, que je vous recommande :
Le Petit Trianon (Gustave Desjardins)
Merci pour le lien cher Bonnefoy Car oui, impossible de trouver ce livre en vente sur les sites de livres de seconde main.
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« elle dominait de la tête toutes les dames de sa cour, comme un grand chêne, dans une forêt, s'élève au-dessus des arbres qui l'environnent. »
Comte d'Hézècques- Messages : 4390
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 44
Localisation : Pays-Bas autrichiens
Re: Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
Une question que mon humble personne se pose depuis longtemps :
La hameau au niveau agricole rapportait il financièrement ? Que faisait on des produits agricoles récsoltés ?
Si consommé sur place cela venait en déduction des frais de bouche du Petit Trianon ? Ou les produits étaient ils vendus avec label genre les carottes de la Reine lol
La hameau au niveau agricole rapportait il financièrement ? Que faisait on des produits agricoles récsoltés ?
Si consommé sur place cela venait en déduction des frais de bouche du Petit Trianon ? Ou les produits étaient ils vendus avec label genre les carottes de la Reine lol
Mr ventier- Messages : 1125
Date d'inscription : 18/11/2020
Age : 58
Localisation : Rouen normandie
Re: Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
Bien sûr, ce qui manquait à ce Hameau de la reine qui était censé reproduire un petit village normand, ben ! n'est-ce pas ... c'est une chapelle !
L'architecte Mique, nous dit le comte d'Hézècques, ne voulut point jouer à la chapelle; il n'en construisit point une imaginaire mais, au moyen du fossé de clôture, la ceinture de bocages fut entrouverte à dessein de profiler la vue de la petite église de Saint-Antoine, et les maisons construites alentour communiquèrent au hameau de fantaisie un air de vérité .
( Gustave Desjardins, Trianon, histoire et description )
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55259
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Gustave Desjardins, le Hameau de la Reine
C'est vrai que je me suis souvent demandé pourquoi il n'y avait pas un clocher quelque part, édifice incontournable d'un hameau ou petit village champêtre
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« elle dominait de la tête toutes les dames de sa cour, comme un grand chêne, dans une forêt, s'élève au-dessus des arbres qui l'environnent. »
Comte d'Hézècques- Messages : 4390
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 44
Localisation : Pays-Bas autrichiens
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