Le voyage de Louis XVI en Normandie

Merci, cher Vicq', pour cette petite promenade...

Merci cher LNLN...

Le voyage du Roi en Normandie a été l’occasion de réjouissances dans les villes et villages traversés : illuminations, remises de clés, créations d’odes et poèmes divers...
Je retranscris celui de Cherbourg, créé pour la circonstance :

« Sous les yeux d’un peuple innombrable,
Poursuis tes immenses projets.
Qui mieux que toi sera capable
D’immortaliser tes sujets ?
Dieux ! Je vois l’Angleterre en larmes,
Cédant à tes nobles exploits ,
Contre l’ascendant de tes armes ,
Lutter pour la dernière fois ... »

Un autre texte:



De son côté, le Roi tient son fameux journal :

Merci, cher Févicq, pour tous ces détails !



Le 22 juin au soir, vers 11 heures, les édiles de Cherbourg accueillent Louis XVI dans la liesse générale    , aux portes de la ville.  
Un arc de triomphe est dressé en son honneur sur la place du Calvaire (aujourd'hui place de la République).

La place du Calvaire, côté Est:




Le roi loge dans l'ancienne abbaye du Vœu, résidence du gouverneur de Normandie, le duc d'Harcourt.
Il ne reste pas grand chose de l'ancienne abbaye du Vœu, aujourd'hui :




...   mais la voici à l'époque !  




Le duc d'Harcourt, gouverneur de Normandie et commandant de Cherbourg, s'était installé en août 1783 avec son frère, le duc de Beuvron, commandant en chef des travaux de la rade de Cherbourg, dans le bâtiment occidental, ancienne infirmerie qu'il fait rénover à grands frais (200 000 francs selon Alexis de Tocqueville dans son article sur Cherbourg).
Un salon octogonal est dressé au-dessus de la salle capitulaire, un bâtiment à trois étages remplace les cellules monastiques au dessus des cuisines, du chauffoir et de la salle capitulaire en 1786.
Le duc d'Harcourt y organise de somptueuses fêtes et accueille le Louis XVI en juin 1786. La route Cherbourg-Beaumont ouverte en 1293 est déviée car traversant la cour d'honneur de l'hôtel d'Harcourt, au profit de ce qui devient la rue de l'Abbaye. D'autres fonctionnaires et militaires voués aux travaux maritimes y logent, parmi lesquels Louis de La Couldre de La Bretonnière et Dumouriez.


https://www.wikimanche.fr/Abbaye_Notre-Dame-du-V%C5%93u_(Cherbourg)
https://www.wikimanche.fr/Louis_XVI_et_la_Manche

Vicq d Azir a écrit:
De son côté, le Roi tient son fameux journal :

Merci pour cet extrait.
Pour une fois qu'il note autre chose que ses inventaires de chasse ou la météo...

Mme de Sabran a écrit:
Le duc d'Harcourt, gouverneur de Normandie et commandant de Cherbourg, s'était installé en août 1783 avec son frère, le duc de Beuvron, commandant en chef des travaux de la rade de Cherbourg

Tiens !
Je découvre, en surfouillant à droite et à gauche, que la grand-mère d'Harcourt et Beuvron était une Brulart de Genlis !

D’autres documents sur ce voyage :
L’escadre de Cherbourg, le bateaux accompagnateurs ( Louis XVI sera reçu sur le Patriote...), une facture :

Voici la Place du Calvaire devenue Place de la République, fin XIXème.
Ce tableau est d'Isidore-Laurent Deroy.

Après Cherbourg, le cortège passe par Caen, Lisieux, Honfleur :




Au Havre ( Le Havre de Grâce, à l’époque ), le crieur public annoncera ses directives. Le Roi recevra, comme il se doit, les clés de la ville des autorités constituées, et lancera un navire, le... Louis XVI...

Merci pour toutes ces informations .. images, descriptions détaillées des voyage. Je regrette seulement que ce voyage extraordinaire n'ait pas réveillé le désir de Louis pour d'autres expéditions similaires dans son royaume.
Son prochain voyage était seulement à Varennes.
Leos

Merci Leos. On peut dire en effet qu’à trois ans de la Révolution, cinq ans de Varennes, Louis XVI a pu mesurer l’immense popularité dont jouissait le Roi de France, au moins en province.
Il se promit, à son retour, de recommencer de tels déplacements, mais ne le fit pas...
Il avait pris un très grand plaisir personnel à ce voyage. Marin d’eau douce, si on peut dire, il apprécia le contact avec les vrais marins, la possibilité de monter sur des bâtiments, etc... Rappelons nous qu’il fut à l’origine de la réorganisation de la Marine, dont profitera Napoléon pour ses batailles. Il garda enfin un excellent souvenir de l’accueil des Normands, qu’il évoquera d’ailleurs lorsqu’il recevra leur délégation de Fédérés en juillet 90 à Paris .
Terminons avec le retour de ce voyage par Rouen. Sa rencontre avec les édiles de la ville a été représentée sur un tableau, aujourd’hui détruit, mais dont il reste le dessin préparatoire :

Voici une nouvelle illustration de l'immersion de ces cônes si étranges, cher Févicq .  
Hou la la ! je n'aurais jamais osé grimper là-dessus quant à moi !  

Tiens au fait ! une question comme ça en passant : Louis XVI savait-il nager ?

Je retrouve le pavillon qui ornait le canot de Louis XVI à Cherbourg. Il faisait partie des collections Bancel, et il est passé ensuite en vente publique.
Si ce n’est lui, c’est son frère, mais je pense bien le reconnaître :



Non Louis XVI ne savait sans doute pas nager, mais il n’avait en tout cas pas le vertige, pour monter sur ce cône, ou, tenez vous bien, lui a été servi un ambigu...
Et un ambigu sur un cône, c’est royal, sans décôner...

Vicq d Azir a écrit:Je retrouve le pavillon qui ornait le canot de Louis XVI à Cherbourg. Il faisait partie des collections Bancel, et il est passé ensuite en vente publique.
Si ce n’est lui, c’est son frère, mais je pense bien le reconnaître :

Nous évoquions ce pavillon et les hypothèses quant à son attribution et son histoire ici, cher Vicq' :

https://marie-antoinette.forumactif.org/t2920-le-mystere-de-la-cocarde#84672

Vicq d Azir a écrit:
Et un ambigu sur un cône, c’est royal, sans décôner...

Qu'est-ce que c'est qu'un ambigu, ça se mange ?

Vicq d Azir a écrit:
Et un ambigu sur un cône, c’est royal, sans décôner...

Définition de l’ambigu :
«  Repas généralement froid, où l’on présente en même temps tous les mets ».

Nous avions déjà parlé de l’ambigu il y a loooooooooongtemps avec le chevalier de Talaru dans un autre sujet, que je renonce à chercher   .Tout s’y trouve froid et présenté en même temps en effet, des entrées aux desserts dirait-on aujourd’hui.

Quant aux cônes, dont la vocation était de permettre la construction de digues et jetées, voici deux extraits du catalogue de l’expo « Science et curiosités à la Cour de Versailles » :




(Merci à ARR de CDV)

Détail amusant, la toile de Jouy évoquée plus haut fut posée sous Malraux dans l’une des chambres de suite de Chefs d’Etat de l’aile de Trianon-sous-bois :

Merci, cher Gouverneur, pour toutes ces précisions...
Je voulais compléter votre propos sur ces toiles de Jouy à thème, en rappelant qu’on peut bien sûr les voir dans ce très beau musée de Jouy en Josas. Mais aussi qu’on peut toujours les acheter dans la même ville, chez un marchand sis dans la rue principale. Celui-ci les réédite à partir des rouleaux d’origine. Il propose, entre autres, ce motif « aux cônes », conçu pour commémorer la visite de Louis XVI.

Vicq d Azir a écrit:Définition de l’ambigu :
«  Repas généralement froid, où l’on présente en même temps tous les mets ».

J'apprends ce mot !
C'est beaucoup plus joli que " apéritif dînatoire ", une formule de dînette que j'adore .

Je retrouve ces documents sur le voyage de Cherbourg, et ne résiste pas à l’envie de vous les faire partager :
- Le mémoire envoyé au Roi, avant son départ, sorte de mémo pour lui présenter sa province de Normandie. Rappelons à cette occasion que c’est Artois qui a fait auparavant le voyage, pour préparer la visite du Roi.
- La chanson des mariniers.
- Une circulaire concernant l’approvisionnement en pain :







- Circulaire sur les honneurs à rendre au Roi à Cherbourg.
- Une carte de la rade de Cherbourg montrant bien la position des cônes, donc de la future digue :





_ Enfin, un texte sur le retour :

J'adore la chanson !  ( et tout le reste aussi    )
Allez !!!
Tous à pleins poumons !  

A Madame la Seine
Mironton, mironton, mirontaine
A Madame la Seine et Monsieur l'Océan ...

Vicq d Azir a écrit: Rappelons à cette occasion que c’est Artois qui a fait auparavant le voyage, pour préparer la visite du Roi.

Nous avons un sujet sur ce voyage d'Artois en Normandie, cher Févicq !
C'est ici :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t3527-1777-voyage-en-normandie-du-comte-d-artois?highlight=NORMANDIE

Calonne, qui avait organisé le voyage, n'accompagna pas le roi . Mais il lui remit un mémoire de quatre-vingt-cinq pages explicatif de tous les endroits à traverser, assorti de cartes, de plans, véritable guide économique, touristique ( avant l'heure ) et financier qui signalait à Louis XVI à tous les moments de son itinéraire " les objets les plus dignes de son attention " , " sachant que tout ce qui touche l'humanité est le premier soin de Votre Majesté ".
Il recommandait habilement que, dans presque toutes les villes, le passage du roi fût signalé par un don d'une dizaine de milliers de livres à l'hôpital. Mais les problèmes touchant à l'industrie et aux travaux publics n'étaient pas négligés pour cela. Témoin, la mention à Louviers " d'une superbe mécanique propre à filer et carder le coton, semblable à celles qui existent en Angleterre ... " , ou à Dreux de la fabrication de " gros draps à l'usage du peuple et propre à habiller les troupes " : " Je m'occupe d'en étendre la fabrication dans les campagnes où elle peut être une ressource pour les cultivateurs dans la saison morte ... "

( Robert Lacour-Gayet, Calonne )

Les Havrais enthousiasmés, surtout après la visite royale de 1786, voulurent élever une statue en bronze à Louis XVI. Calonne leur en refusa l'autorisation, alléguant que l'état des finances interdisait pareille extravagance .

( Robert Lacour-Gayet, Calonne )

Les prodigalités de Calonne, on le voit, avaient leurs limites. Ainsi le contrôleur général osa-t-il également contrer l'avis très favorable du duc d'Harcourt ( hôte de Louis XVI ) pour la continuation du canal de Caen jusqu'à la mer, en raison des dépenses excessives que cela entraînerait, douze millions.

Joseph II   à Mercy ,  au sujet du voyage de Louis XVI à Cherbourg:

Vienne, ce 31 août 1786.
( ... )   J'ai été charmé du voyage que le Roi a fait et de la façon qu'il a réussi.  Je désirerais bien qu'une autre fois la Reine pût être de la partie, sans y mettre trop d'apprêt ni de gêne, pour l'éloigner un peu de la race Polignac .


Il n'avait pas été question pour Marie-Antoinette de suivre le roi à Cherbourg et dans son voyage à travers la Normandie, puisqu'elle était sur le point d'accoucher de sa petite Sophie .
Mercy, quant à lui, irait bien admirer les travaux dantesques opérés là-bas :

Mercy à Joseph II  :

Paris, le 27 septembre 1786.
( ... )  La question que me fait la Reine, si je vais à Cherbourg, provient de ce que, ne s'agissant que d'une course de quatre jours, je m'étais proposé d'aller voir les ouvrages remarquables du port en question et de saisir à cet effet le moment où Madame l'Archiduchesse s'y trouverait, mais une attaque violente de mon incommodité habituelle ne m'a pas permis de remplir ce projet .

L'incommodité habituelle dont souffre l'ambassadeur, ce sont les hémorroïdes .   Il s'en plaint amèrement dans une lettre précédente.   Quant à l'archiduchesse,  contre laquelle ( soit dit en passant )  Marie-Antoinette a quelques préventions, il s'agit de sa belle-soeur Marie Béatrice d'Este, l'épouse de Ferdinand .
Je trouve assez incroyable que Mercy pense réaliser un tel déplacement en quatre jours !  Non ?

Je poste ici de nouveau le dessin préparatoire du tableau disparu montrant l’hommage des échevins de Rouen lors du passage du Roi.
Voir à ce sujet le portrait retrouvé de Louis XVI, posté dans un autre chapitre.
L’intérêt de ce dessin est d’indiquer en légende l’identité des personnages représentés.