Le duc d'Aveiro et la tentative d'assassinat de Joseph 1er de Portugal - affaire Tavora

C'était le sujet de notre dernière énigme, brillament élucidée par Dodo.

Peu de sources francophones évoquent le sujet en détails, mais comme souvent pour ces personnages du XVIIIème siècle oubliés en France, la Biographie Universelle de Michaud (1843) vole à notre secours :

AVEIRO (duc d’), grand maître héréditaire de la maison du roi de Portugal, président de la cour du palais, et l’un des plus grands seigneurs du royaume.

Sa maison avait pour tige George, fils naturel de Jean II, dit le Parfait. Le duc d’Aveiro fut tout puissant pendant les dernières années du règne de Jean V ; mais il perdit sa faveur à l’avènement de Joseph Ier, en 1750, et devint bientôt l’ennemi personnel du marquis de Pombal, alors premier ministre.

Il se lia avec les seigneurs mécontents du nouveau ministère, et avec les jésuites, qui avaient perdu l’emploi de confesseurs de la cour. Une conjuration contre le roi et son premier ministre fut ourdie en secret, et elle éclata le 5 septembre 1758, a onze heures du soir. Le roi, revenant de son château de Bélem, dans la voiture de Texcira, son valet de chambre, pour se rendre incognito chez la jeune marquise de Tavora, sa maîtresse, sortait de la porte appelée la Guetta, lorsque deux conjurés à cheval, Joseph Polycarpe de Azévédo et Alvarez Fereiru son beau-frère, tirérent en même temps sur sa voiture deux coups de carabine, et le blessèrent grièvement à l’épaule et au bras ; mais ce prince, ayant eu la présence d’esprit d’ordonner au cocher de rebrousser chemin, évita ainsi le gros des conjurés qui l’attendaient sur son passage.

De sévères et promptes recherches, pour découvrir les coupables, suivirent immédiatement cet attentat. Le duc d’Aveiro se demasqua lui-même par des propos imprudents, et, quoique prévenu à temps, il négligea de se sauver. Après l'avoir ensuite essayé inutilement, il fit une assez longue défense dans sa maison de campagne de l’Azeitad, sur les bords du Tage, au-dessus de Lisbonne, mais enfin, arrêté et renfermé, ainsi que la plupart de ses complices, dans les loges destinée aux bètes féroces, à l'entrée du jardin du roi, à Belem, on le traita avec la dernière rigueur, pendant toute l’instruction du procès.

Ayant d’abord été degradé de son rang et de ses titres, il fut condamné par la junte criminelle à être mené la corde au cou, précédé du crieur public, à la place du Caês de Bélem, pour être rompu ensuite sur une roue, et brulé vif sur l’échafaud, et ses cendres jetées à la mer. D’Aveiro subit cette terrible sentence le 15 janvier 1759, à l’âge de 51 ans. Ses armoiries furent effacées, ses biens confisqués, ses châteaux et palais démolis, et défense fut faite, à qui que ce fut, de porter son nom.

Le marquis de Tavora fut condamné aux mêmes peines ; le marquis d’Autoguia, Braz Joseph Bomeiro, Jean Miguel Manoel d’Alvarez, et les deux fils du marquis de Tavora, furent étranglés, puis rompus et brùlés et leurs cendres jetées à la mer. Fereira et Azévedu furent condamnés à être brûlés vifs, mais le dernier avait pris la fuite. La vieille marquise Eléonora de Tavora, après avoir vu périr son mari et ses deux fils dans les supplices. fut décapitée. Sa belle-fille, la jeune marquise de Tavora, maîtresse du roi, ne fut point impliquée dans cet effroyable procès ; mais elle eut ordre de se retirer dans un couvent.

La cour de Lisbonne chassa les jésuites du Portugal, comme instigateurs des coupables.

Telles furent les suites de cette fameuse conjuration, qui excita l’attention de toute l’Europe, et dont la véritable cause est encore l’objet de quelques doutes. On a prétendu que les coups des  conspirateurs n’étaient pas dirigés contre la personne du roi, mais contre le ministre qui régnait sous son nom. La révision du procès sous le dernier règne a mis le crime hors de doute.



Pour l'anecdote, les amateurs d'objets d'art ont eu l'occasion de faire connaissance avec ce grand seigneur en 1992, lors de l'exposition Versailles et les tables royales en Europe : en effet, son surtout de table, confisqué comme le reste de son argenterie par Joseph 1er, y était exposé

C'est épouvantable ... 

Epouvantable... et signé de deux figures des "Lumières", Joseph 1er et Pombal...

Il semblerait que certains historiens remettent en doute certains points de ce qui a été dit du complot, comme ayant été employé par Pombal pour détruire l'opposition à son ministère.

L'écu des Aveiro :



La colonne commémorative de l'infâmie, érigée en 1759 à l'emplacement du palais rasé de la famille, sur le terrain que l'on avait salé :



Les 5 anneaux représenteraient les 5 conspirateurs.

"Here the houses of José Mascarenhas were razed and salted, exhausted from the honors of Duke of Aveiro and others sentenced by sentence handed down at the Supreme Juncta de Inconfidência on January 12, 1759. Justiced as one of the chiefs of the barbarian and executing contempt that night of September 3, 1758 it had been committed against the real and sacred person of D. José I. In this infamous terrain, it will not be possible to build in any time. "

Armes bûchées des Aveiro :



Pour plus d'illustrations :

https://www.geocaching.com/geocache/GC235FG_nova-braganca?guid=76674642-eb5e-4490-a217-6395bbfe8055

J'ignorais complètement ce sanglant épisode de la monarchie portugaise au XVIIIe siècle. Merci pour cette découverte, même si elle est macabre.

Il n'y a pas de synonyme pour nommer cette barbarie qui a clos cette tentative de regicide. C'est innomable.
Malheur aux regicides ! D'ou je pense, l'extrême châtiment infligé, source de disuation !

Lien WIKI, âmes sensibles s'abstenir ...
https://fr.wikipedia.org/wiki/Proc%C3%A8s_des_T%C3%A1vora

Spoiler:

Pas étonnant qu'avec un tel bûcher et de telles flammes, Joseph 1er passât pour un souverain éclairé

En même temps Voltaire l'avait dit, la tolérance c'est d'être ouvert aux opinions des autres, à l'exception de ses adversaires ....

Lucius a écrit: la tolérance c'est d'être ouvert aux opinions des autres, à l'exception de ses adversaires ....

Je me souviens d'une citation de Robespierre,  un peu de la même veine, selon laquelle "les Droits de l'Homme" ne s'étendraient pas à nos ennemis .