Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
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LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: La famille royale et les contemporains de Marie-Antoinette :: La famille Polignac - Axel de Fersen - La princesse de Lamballe :: Axel de Fersen
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Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Propos recueillis par votre servante, pour notre Forum.
Voilà, j'ai placé mon téléphone portable sur la table, entre nous deux, pour retranscrire ensuite notre conversation.
C'est parti !
Mme de Sabran :
- Bonjour Monsieur Lindqvist. Tout d'abord je vous remercie de m'accorder cet entretien sur Axel de Fersen, spécialement pour le Forum de Marie-Antoinette. Vous avez écrit une biographie passionnante. Au-delà de l'image de séducteur que nous avons de ce Suédois qui tint une place si importante dans la vie de Marie-Antoinette, quel homme était Fersen ?
Herman Lindqvist :
- Fersen était en même temps un homme du monde accompli et un aventurier. Héritier de la famille la plus considérable en Suède à cette époque, il était conservateur, politiquement bien-sûr mais aussi dans sa vie privée, avec le sentiment dominant de l'honneur, de la famille, de la patrie, un gentilhomme avec un idéal chevaleresque.
Mme de S. :
- Vous dites aussi un "aventurier " ?!
H. Lindqvist :
- Oui, c'est ça. ll trouvait excitant de planifier des choses très compliquées, dangereuses. C'était un stimulant important pour lui, dont il avait besoin pour se sentir vivre pleinement.
Mme de S. :
- .. la Révolution , Varennes ... mais avant cela, il évolue dans les sphères brillantes d'une société légère et privilégiée.
H. Lindqvist :
- Oui. Son père, le maréchal Fersen, était l'homme le plus puissant et le plus riche de Suède. Il était comme un premier ministre vraiment, à la tête du parti des chapeaux francophile et chef de la noblesse, mais aussi un businessman averti, propriétaire de mines et de forêts, en Suède, en Finlande. Il brassait des affaires même en Angleterre. C'est pourquoi il voulait envoyer son fils à Londres. Personne ne faisait jamais de voyage en Angleterre et, comme vous le savez, Fersen avait horreur de l'Angleterre et des Anglais. Ses relations avec ce père autoritaire étaient tendues. Ils n'étaient pas proches. Il y avait certainement beaucoup de respect mais peu d'affection . Mais Fersen ne pouvait pas se fâcher avec son père, n'est-ce pas... il avait besoin d'argent pour vivre.
Mme de S. :
- Comment Fersen est-il perçu en Suède, aujourd'hui ? Y a-t-il une actualité Fersen?
H. Lindqvist :
- Aucune.
Mme de S. :
- Comment ça ? aucune ?!! Fersen serait-il oublié ?
H. Lindqvist :
- Oublié, oui c'est ça, il est complètement oublié. C'est que la Suède est entièrement tournée vers la modernité et le futur, comprenez-vous. Le passé ne l'intéresse absolument pas. Fersen appartient au passé, donc il n'intéresse pas. En Suède, vous pouvez porter le nom d'une très ancienne famille noble et ignorer qui est votre père, votre grand-père, toute votre généalogie : ça vous est égal. C'est comme ça en Suède : sans importance.
Mme de S. :
- La Suède est pourtant une monarchie. La noblesse n'y tient donc pas une première place ?
H. Lindqvist :
- Pas du tout. C'est comme ça. Il y a seulement quelques personnes, un petit nombre de gens très enthousiastes qui se passionnent vraiment pour l'Histoire et le XVIIIème siècle.
Mme de S. :
- Il y a pourtant eu la " Fersen Week " au début du mois de septembre dernier, avec des conférences de Mmes Evelyn Farr et Anna-Lena Berg au château de Ljung ...
H. Lindqvist :
- Oui, c'était pour ce petit groupe de personnes passionnées qui connaissent tout, tout, qui ont tout lu, car ils veulent tout savoir, comme les familles de klinckowström et de Fersen dont les membres habitent encore les châteaux, possèdent beaucoup d'objets personnels et vouent un culte au souvenir de Fersen. 150 000 exemplaires de mon livre ont été vendus et j'en ai publié un autre également sur Fersen rempli de photos ( H. Lindqvist R. Turander ) , mais si vous arrêtez un homme dans rue et que vous lui demandez qui était Fersen, il ne le sait pas.
Mme de S. :
- Il accomplit son premier voyage, le Grand Tour, avec son précepteur et un valet, autour de l'Europe. Par chance pour nous, Fersen tenait son journal.
H. Lindqvist :
- Le Grand Tour fait partie de l'éducation des jeunes gens. Fersen parfait ses connaissances en langues, le français, l'allemand, l'italien, l'anglais . Il est reçu dans toutes les Cours, dont il apprend les usages. Il étudie beaucoup. Elégant moralement et physiquement, il est très soucieux des bonnes manières et des convenances. Il note sa réprobation quand il observe des attitudes négligées. Quantité de femmes tournent autour de lui et veulent toutes le séduire. ll consigne dans son dagbok l'apparence des choses plutôt que leur sens véritable et l'allure vestimentaire des gens plutôt que les conversations qu'il a avec eux.
Mme de S. :
- Serait-il futile, superficiel ?
H. Lindqvist :
- Peut-être un peu . Par exemple, pendant son Grand Tour il s'arrête à Ferney , c'était avant son séjour à Paris, . Il rencontre Voltaire et probablement discute avec lui, mais de quoi ? Nous n'en savons absolument rien. Il ne note dans son journal que la tenue débraillée de Voltaire. Il se moque de sa perruque antique . ( Il rit ) Mais sur leur conversation, rien.
Mme de S. :
- Pourtant il connaît Voltaire, il sait à qui il a affaire.
H. Lindqvist :
- Oui, il respecte Voltaire que l'Europe entière admire. Mais dans son journal il ne parle pas des choses graves, profondes ou importantes et ça, c'est absolument typique de Fersen. Il consigne beaucoup de liaisons avec beaucoup de femmes.
Mme de S. :
- Elles se jettent à sa tête.
H. Lindqvist :
- Oui, c'est certain. Il en éprouvait beaucoup de plaisir, ça flattait son orgueil, mais la conquête était pour lui un amusement sans lendemain qu'il préférait à la possession. Il avait beaucoup de maîtresses mais un seul amour.
Mme de S. :
- Marie-Antoinette.
H. Lindqvist :
- Marie-Antoinette, bien-sûr. Musique, opéra, bal, comédie, tous leurs goûts les rapprochaient. Tous deux aimaient la parure, les jardins, les animaux. Fersen offrit un chien à Marie-Antoinette. Sa soeur Sophie était la confidente de cet amour. Le rêve de Fersen aurait été de les présenter l'une à l'autre, de vivre entre elles deux. Il transmet à Sophie de petits cadeaux de la part de Marie-Antoinette comme des cheveux pour se faire une bague. C'était une relation extrêmement profonde dont Sophie partageait le secret.
Mme de S. :
- Savez-vous, Monsieur Lindqvist, qu'en France la polémique fait rage : Fersen et Marie-Antoinette étaient-ils amants ? On a longtemps dit qu'ils étaient amis, amis c'est tout . Et puis ensuite, on a admis qu'ils s'aimaient, grâce aux récents décryptages des lettres caviardées... ils s'aimaient, soit, mais amants, impossible, jamais ! Fersen vénérait la Reine de France comme une idole inapprochable.
H. Lindqvist :
- Ah ! les Français... quelle rêverie ! C'est ce que voudraient croire les conservateurs royalistes certainement, mais ce n'est pas du tout réaliste. Je suis sûr qu'ils étaient amants parce que ce fut une relation très longue, plus de quinze ans, avec des sentiments très très forts qui les aimantaient l'un vers l'autre. Avant la Révolution, ils se sont aimés à Trianon surtout. Puis, son journal et leurs lettres l'attestent, tout ce que Fersen a fait, chaque jour, c'était pour elle. Il ne vivait que pour elle. C'était un très grand amour. Bien-sûr, en Marie-Antoinette il respectait la reine, mais pour lui elle était d'abord humaine. Elle avait d'ailleurs reçu une éducation assez libre, peut-être trop. La Cour de Vienne presque bourgeoise n'avait rien à voir avec celle de Versailles où elle étouffait.
Mme de S. :
- Les partisans de la thèse de l'amour chaste opposent qu'elle n'était jamais seule. Mais c'est faux. Il lui arrivait de s'enfermer avec des interlocuteurs pour ne pas être dérangée, comme Vermond, Joseph... et d'autres ... dont Besenval et Simolin qui en témoignent.
H. Lindqvist :
- Vous savez sans doute que l'ambassadeur de Russie, Simolin, était un intime de Fersen, Crawfurd et Eléonore Sullivan. C'est bien-sûr de Fersen que Marie-Antoinette voulait avoir des nouvelles en recevant Simolin en particulier. Il était un intermédiaire entre eux, et dévoué à la cause royaliste . C'est lui qui procure le faux passeport de la baronne de Korff.
Mme de S. :
- Les amours entre la famille Fersen et la famille royale de Suède étaient monnaie courante. Doit-on en déduire qu' aimer une reine semblait chose naturelle à Fersen ?
H. Lindqvist :
- Oui. Cela se passe à presque toutes les générations entre les deux familles. Gustave III avait courtisé la mère de Fersen, son frère Ostrogothie aimait Sophie, la soeur de Fersen, la future reine de Suède Charlotte de Sudermanie était consolée de l'indifférence d'Axel par son frère Fabian ... etc ... etc ... Fersen respectait la reine, mais le rang n'était pas une barrière impressionnante impossible à franchir pour lui, pas du tout .
Mme de S. :
- Marie-Antoinette va jusqu'à faire installer deux pièces pour lui dans ses propres appartements privés. Il pose ses exigences, en seigneur et maître, comme ce fameux poêle suédois. Et Marie-Antoinette obtempère aussitôt, docile, et ordonne les travaux. C'est un appartement clandestin. Elle cache donc, chez elle, un homme qu'elle aime. ( Marguerite Jallut ) Que faut-il en penser ?
H. Lindqvist :
- C'est comme un grand puzzle, voyez-vous, terriblement excitant !!! Toutes les pièces se mettent en place peu à peu et la situation s'éclaircit, tout s'explique. On comprend que, pour Fersen et Marie-Antoinette, il n'y a pas d'interdits. L'amour est plus fort que les préjugés ou la prudence.
Mme de S. :
- Il note que ses pourboires au Suisse de l'Oeil de Boeuf lui coûtent plus cher que son valet.
H. Lindqvist :
- Vous savez ça aussi ! ( Il rit ) Fersen circule dans le château comme il veut. Il a la permission de la reine et aussi des complicités partout dans le service de la reine, des gens dont on achète le silence, des gens dévoués corps et âme à Marie-Antoinette. C'est un silence tacite. Tout le monde sait, mais personne ne parle.
Mme de S. :
- C'est comme aujourd'hui. ( cette fois, c'est moi qui ris. ) Mais alors, si Fersen brûle d'un tel amour pour Marie-Antoinette, pourquoi toutes ces femmes autour de lui ?
H. Lindqvist :
- C'est un amusement, rien de plus. Toutes ces femmes sans importance ne comptent pas. Et puis, il est vaniteux: ça flatte son ego de plaire, mais c'est tout . Sa réputation de séducteur le précède dans tous les endroits, alors c'est comme un jeu. Son père voudrait le voir se marier, il est le fils aîné, mais il n'obéit pas.
Mme de S. :
- Pourtant Creutz, l'ambassadeur de Suède en France, écrit à Gustave III que Fersen a du goût pour Mme de Matignon et l'a demandée en mariage. Qu'en pensez-vous ?
H. Lindqvist :
- Non, je ne crois pas. C'est sans doute seulement une rumeur.
Mme de S. :
- Elle est la fille de Breteuil, qui est un grand ami du maréchal de Fersen. Quitte à se marier, Fersen ferait plaisir à son terrible père, non ?
H. Lindqvist :
- Non, non, vraiment je ne crois pas.
Mme de S. :
- Pourtant Fersen avait fait une demande en règle à Mlle Leyell, très heureux qu'elle la refuse, et Germaine Necker lui a préféré le baron de Staël, à son grand soulagement. Mais si l'une ou l'autre avait accepté, il était coincé !
H. Lindqvist :
- Il était jeune. Les années passant, il devient plus sûr de lui. Jamais son père ne pourrait lui imposer le mariage auquel il se refusait obstinément, j'en suis sûr.
Mme de S. :
- Les années passent et la Révolution arrive... 14 juillet prise de la Bastille, le 17, Louis XVI se rend à Paris. C'est dans votre livre, Monsieur Lindqvist, que j'ai découvert ce fait ahurissant : quand son monde s'écroule et qu'elle est prise de panique, le premier réflexe de Marie-Antoinette, le 17 juillet 1789, est de confier son fils, le petit duc de Normandie, à Fersen dont le Royal Suédois est caserné à Valenciennes. Mercy l'en dissuade. Il le relate dans une longue lettre à Kaunitz, le 23 juillet.
Comment faut-il comprendre cela ?
H. Lindqvist :
- Il faut comprendre que Fersen est solide. Elle n'a confiance qu'en lui. Elle sait qu'il fera tout pour l'enfant.
Mme de S. :
- C'est tout ?
Vous suggérez dans votre livre que Fersen est le père du petit Normandie.
H. Lindqvist :
- J'en suis sûr. Neuf mois très exactement avant sa naissance, il y a eu cette réception magnifique à Trianon en l'honneur de Gustave III, le 21 juin. Fersen est là, Marie-Antoinette aussi; elle ne quitte pas les Suédois, elle reste là avec eux , tout le temps. Gustave le remarque et note qu'il " y a quelque chose " avec Fersen. Et non seulement Gustave, mais tous les Suédois le remarquent aussi.
Mme de S. :
- Ce peut n'être qu'une coïncidence de dates, après tout ?
H. Lindqvist :
- Non, c'est une évidence. La ressemblance physique entre le duc de Normandie et Fersen est vraiment très frappante. Ils se ressemblent à 100%. Placez un portrait de Fersen enfant à côté de celui du fils de Marie-Antoinette : on croirait deux frères, je vous assure . C'est le même.
Mme de S. :
- C'est un peu aléatoire, les portraits d'enfants sont idéalisés et se ressemblent tous.
Mais Craufurd écrit à Pitt que Fersen est le père du Dauphin.
H. Lindqvist :
- Il l'est. Une analyse d'A.D.N. serait probante. Pourquoi est-ce que personne ne la fait ? Est-ce parce que cela coûterait beaucoup trop cher ? Ce serait facile et intéressant. On sait où trouver l'A.D.N. de Fersen et on a celui de l'enfant, je crois.
Mme de S. :
- Ce n'est sans doute pas si simple de se le procurer. A supposer que le coeur Pelletan soit une relique fiable ... Et beaucoup trop de gens craindraient que le résultat d'une telle analyse ne vous donne raison.
Castelot écrit dans son livre " Le Secret de Mme Royale " que la duchesse d'Angoulême n'a jamais voulu recevoir Naundorff pour ne pas , éventuellement, reconnaître pour son frère, et donc pour roi, le fils de Fersen.
H. Lindqvist :
- Castelot est un historien sérieux. Nous pouvons le croire. C'est un raisonnement très intéressant.
Mme de S. :
- Dans la nuit où Versailles est envahi par la populace en octobre 89, où est Fersen, selon vous ?
H. Lindqvist :
- Il est dans le château, peut-être auprès d'elle, sans doute auprès d'elle, car on vient pour assassiner la femme qu'il aime. Où voulez-vous qu'il soit ? Il écrit à son père, le lendemain, qu'il a suivi le cortège jusqu'à Paris. Il ne pouvait pas être ailleurs qu'auprès d'elle.
Mme de S. :
- A partir d'octobre, la Révolution se déchaîne.
H. Lindqvist :
- Fersen ne vit plus que pour sauver Marie-Antoinette. Il est toujours là. Il est prêt à affronter tous les périls, non pas par conviction politique ou par devoir mais pour des motivations très très personnelles, l'amour . Je crois que je comprends Fersen. J'ai été correspondant de guerre autrefois, pour la radio nationale suédoise. J'ai couvert vingt-six conflits et vu des morts, des exécutions, les bombes qui pleuvent là, là, et là, partout autour de moi; j'ai vu mourir des amis ... C'est un sentiment unique et inexprimable que celui du danger avec cette sensation d'être encore vivant au milieu de l'horreur. C'est comme une décharge d'adrénaline. Fersen devait ressentir cela quand il risquait sa peau pour Marie-Antoinette . Le puzzle devient un thriller.
Mme de S. :
- A partir de Varennes tout bascule. On persuade le peuple que Louis XVI partait à l'étranger, qu'il a trahi. Il est complètement discrédité : on ne veut plus de ce roi. La prise de conscience est dure pour lui aussi : il croyait la Révolution essentiellement parisienne, mais c'est ce bon peuple de province, dont il se croyait aimé, qui l'arrête et le reconduit prisonnier dans la capitale .
H. Lindqvist :
- C'est terrible ! Il y avait un roi à Varennes ! Il pouvait forcer le passage. Il aurait pu si Fersen ne les avait pas quittés à Bondy, mais il en avait reçu l'ordre de Louis XVI, il fallait obéir. Il avait conduit la voiture jusqu'à l'extérieur de Paris . Le plus dur était fait. C'est exaspérant ! J'ai beaucoup écrit là-dessus. Si Fersen avait été là tout aurait été différent. Ils seraient passés. Après cela, pendant toute sa vie, la date du 21 juin revenait avec ce souvenir atroce et ravivait sa souffrance.
Mme de S. :
- Ensuite Fersen se démène et remue ciel et terre à travers toute l'Europe avec l'énergie du désespoir pour rallier les monarchies étrangères à la cause de Louis XVI et Marie-Antoinette. En vain. Votre roi, Gustave III, son meilleur soutien a été assassiné.
H. Lindqvist :
- Il est seul. Même l'Autriche ne bouge pas. C'est une situation désespérante, oui, très très dure pour lui. Il se fatigue à voyager partout, y perd beaucoup d'argent, mais rien ne peut le faire renoncer, il continue de brasser des plans d'évasion. C'est dans son caractère de combattre les difficultés. Je vous le disais : c'est son adrénaline. Rien ne l'arrête. Il est le principal conseiller de Marie-Antoinette, donc du couple royal, car Louis XVI encaisse les événements sans réagir. Il est très jaloux de l'influence de Barnave sur Marie-Antoinette...
Mme de S. :
- ... non seulement sur le plan politique, mais sur le plan personnel, n'est-ce pas ? Au péril de sa vie, il revient en février 1792 à Paris et s'introduit aux Tuileries. Il voit Marie-Antoinette d'abord et le roi le lendemain. Ici encore il y a eu houleuse polémique, en France, autour du presque illisible " Resté là ", dans le journal de Fersen, qui signifie qu'il a passé la nuit aux Tuileries. ( Alma Söderhjelm ) Or le décryptage des lettres caviardées, par le Projet Rex des Archives nationales, a donné raison à Mme Söderhjelm car Fersen, annonçant sa venue, écrivait à Marie-Antoinette : " J'irai chez vous, j'y resterai jusqu'au lendemain "
H. Lindqvist :
- Oui et c'est très dangereux pour tous les deux. Mais l'amour est plus fort que la peur. Fersen soumet un nouveau plan d'évasion qui est refusé par Louis XVI toujours soumis au destin, à la fatalité.
Mme de S. :
- Fersen avait dit à Marie-Antoinette descendre vers l'Espagne, or il passe en fait la semaine chez Crawfurd, caché par Eléonore Sullivan. Depuis combien de temps Eléonore Sullivan est-elle sa maîtresse ?
H. Lindqvist :
- Ah ça je ne saurais dire ... Eléonore Sullivan était sa maîtresse, c'est vrai, mais elle était aussi et surtout une alliée dévouée indispensable à Fersen. Crawfurd avait fourni la berline arrêtée à Varennes; Eléonore Sullivan avait financé l'opération.
Mme de S. :
- Mais tout de même, il passe une semaine chez elle !
H. Lindqvist :
- Peut-être il attend un signe de Marie-Antoinette ? Il hésite à partir, il fait très froid et il commence à neiger . Ce n'est pas clair.
Mme de S. :
- Ce qui est sûr, c'est que Fersen est très fâché. A partir de cette dernière entrevue, il n'écrit plus de lettres tendres à Joséphine mais seulement des dépêches officielles à la reine de France. Dans son journal intime, Joséphine devient " Rosina " , ce personnage du théâtre de Beaumarchais que Marie-Antoinette avait joué sur son petit théâtre de Trianon qui renonce à son amant Chérubin pour retourner vers son mari . ( Evelyn Farr )
H. Lindqvist :
- Vous savez ça aussi. C'est très intéressant ! Mais il ne renonce pas , il reprend ses manoeuvres diplomatiques et obsessionnelles, voyageant à travers toute l'Europe et se heurtant toujours à l'apathie des Cours étrangères. Il presse Mercy. Rien ne bouge. L'indifférence générale le rend fou furieux et le désespère . Il écrit alors quelque chose de très cocasse : que tant de dégoût finirait par le rendre démocrate !
Mme de S. :
- Il tentera tout, même de contacter Danton pour monnayer la libération de Marie-Antoinette incarcérée à la Conciergerie.
Lors de cette Fersen Week début septembre, Anna-Lena Berg parlait du " dernier amour " de Fersen, Emilie De Geer . Est-ce à dire que Fersen ne fut pas l'amant inconsolable de la mort de Marie-Antoinette que nous nous plaisons à croire, en France ? Vous évoquez d'ailleurs Emilie De Geer à la fin de votre livre .
H. Lindqvist :
- Emilie De Geer, oui. Nous prononçons " De Yere" parce que c'est un nom flamand, une famille qui venait d'Amsterdam. Fersen fut inconsolable pendant des mois et sans doute pendant toute sa vie, mais il fallait accepter cette situation et continuer à vivre. Quand la page fut tournée avec le trio Eléonore / Crawfurd / Simolin, il retourna en Suède où tout lui parut petit, mesquin, laid. Il était un peu snob. Stockholm lui semblait provincial, étriqué, les gens frustes et vulgaires, les femmes sans attraits . Il avait pourtant encore des aventures. Les femmes le poursuivaient toujours et la vie était comme une scène de théâtre sur laquelle il essayait de s'amuser pour s'étourdir ... mais " Elle " était toujours là. ( Il porte sa main à son coeur. )
Mme de S. :
- Avec Emilie de Geer pourtant cela semble plus sérieux que les précédentes passades. Il aurait même envisagé le mariage ?
H. Lindqvist :
- Peut-être oui, je crois qu' il écrit quelque chose comme ça.
Mme de S. :
- Il avait oublié Marie-Antoinette ?
H. Lindqvist :
- Non, ça jamais ! " Elle" était toujours là ( Il montre à nouveau son coeur ) jusqu'à la fin.
Vous savez, il ne faut pas avoir une voiture plus grosse, une maison plus grande que celles de son voisin. Il n'est pas bon d'être riche, célèbre, adoré de toutes les femmes, auréolé encore de la gloire de Versailles et du prestige d'avoir été aimé par la Reine de France. Fersen l'éprouve déjà au Congrès de Rastatt où Napoléon le traite par le mépris, mais en Suède c'est pire, on veut se débarrasser de lui. On invente un prétexte, l'empoisonnement du Dauphin Charles-Auguste, pour le livrer à la haine de la foule . Le nouveau roi, le duc de Sudermanie, était dans l'ombre des assassins ... Six mois plus tard les autorités établissaient l'innocence de Fersen. Sa soeur sophie fit ériger un petit monument funéraire, à sa mémoire, dans son jardin de Lofstad .
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Très intéressant...
Merci beaucoup pour la transcription de cet entretien exclusif !
Merci beaucoup pour la transcription de cet entretien exclusif !
La nuit, la neige- Messages : 18132
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Merci !!!
quel travail...
quel travail...
madame de théus- Messages : 368
Date d'inscription : 22/12/2013
Age : 46
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Belle réussite! !
charenton- Messages : 1147
Date d'inscription : 23/02/2022
Age : 75
Localisation : 75012 PARIS
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Chere Eli,
Merci beaucoup pour cette interview intéressante.. je l'ai lue avec beaucoup d'intérêt..
Leos
Leos- Messages : 794
Date d'inscription : 29/12/2013
Age : 54
Localisation : Zlin, Tcheque
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Merci, les amis !
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
C'est cash, pas sûr que ça plaise à tout le monde.
Monsieur de la Pérouse- Messages : 504
Date d'inscription : 31/01/2019
Localisation : Enfin à bon port !
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Merci Eléo !!!
Tu étais de la Fersen week également ?
Tu étais de la Fersen week également ?
Gouverneur Morris- Messages : 11795
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Bravo ELEONORE n'avoir pu joindre par téléphone l'auteur, il habite lorsqu'il est à PARIS, l'ILE SAINT LOUIS, j'ai tenté,sans succès, de le joindre -
j'ai rencontré Monsieur LINDQVIST à STOCKHOLM dans le musée qui est sous le palais royal il y a quelques années et le contact avait été charmant, c'est lui qui m'avait donné son téléphone parisien.....
Encore BRAVO !!!!!
MARIE ANTOINETTE
j'ai rencontré Monsieur LINDQVIST à STOCKHOLM dans le musée qui est sous le palais royal il y a quelques années et le contact avait été charmant, c'est lui qui m'avait donné son téléphone parisien.....
Encore BRAVO !!!!!
MARIE ANTOINETTE
MARIE ANTOINETTE- Messages : 3729
Date d'inscription : 22/12/2013
Age : 78
Localisation : P A R I S
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Lorsque Fersen rencontra Voltaire à Ferney, pendant 2 heures, il n'avait que 18 ans, ne l'oublions pas. Rencontrer à cet âge un personnage de cette envergure, a dû plutôt l'impressionner.
Mais merci Mme de Sabran pour la transcription de cet échange.
Mais merci Mme de Sabran pour la transcription de cet échange.
Lady Jhane- Messages : 1318
Date d'inscription : 04/11/2021
Localisation : Gévaudan
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
... exclusif de chez exclusif, grave !La nuit, la neige a écrit:
la transcription de cet entretien exclusif !
Non non, ma Paulinette, ne crois pas ça : bien plus que du travail ce fut un réel plaisir ! Ce monsieur est tellement passionné et admiratif de Fersen, son énergie, sa détermination, son courage. Il en parle avec feu et émotion. Aussi par moments, à l'écouter, je croyais m'entendre penser. C'est fou, non ?madame de théus a écrit:
quel travail...
Comme vous dites, cher la Pérouse, comme vous dites . Nous sommes loin de la frilosité prudente, de mise en France, pour aborder le sujet Fersen ... Herman Lindqvist n'y va pas par quatre chemins .Monsieur de la Pérouse a écrit:
C'est cash, pas sûr que ça plaise à tout le monde.
Ben non, mais j'y avais deux amies...Gouverneur Morris a écrit:
Tu étais de la Fersen week également ?
Vous nous aviez raconté cette entrevue dans une vie précédente, chère Marie-Antoinette ...MARIE ANTOINETTE a écrit:
j'ai rencontré Monsieur LINDQVIST à STOCKHOLM dans le musée qui est sous le palais royal il y a quelques années et le contact avait été charmant, c'est lui qui m'avait donné son téléphone parisien.....
:
Oui, un monsieur très agréable et sympathique.
Voilà ! c'était presque encore un galopin .Lady Jhane a écrit:Lorsque Fersen rencontra Voltaire à Ferney, pendant 2 heures, il n'avait que 18 ans, ne l'oublions pas.
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
C'est un niveau plus réussi et heureux comparé à Louis XVI magouillant avec Aurore Chery .....
charenton- Messages : 1147
Date d'inscription : 23/02/2022
Age : 75
Localisation : 75012 PARIS
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Je ne vous le fais pas dire ...
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Suite à notre petit entretien fersenien, voici que je reçois aujourd'hui à la maison, de la part d'Herman Lindqvist, un beau livre dédicacé, qu'il a publié avec Mats Bäcker et Bengt Wanselius, en suédois, anglais, allemand et français, sur le Théâtre du Palais Royal de Drottningholm . Il est fasciné par ce théâtre, que j'espère bien voir un jour !
Cette gentille attention me touche énormément et me procure le plaisir de retrouver ce cher Gustave III .
Sur la couverture, Fersen !
Cette gentille attention me touche énormément et me procure le plaisir de retrouver ce cher Gustave III .
Sur la couverture, Fersen !
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Le Slutstheater... Je croyais que c'était celui de la Pompadour et de la du Barry
Gouverneur Morris- Messages : 11795
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Le photomontage des deux portraits est très réussi.
Monsieur de la Pérouse- Messages : 504
Date d'inscription : 31/01/2019
Localisation : Enfin à bon port !
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Bravo chère Eleonore pour cet entretien, j'en suis très émue, il y a des réponses à toutes les questions et doutes que j'avais sur le couple Fersen&Marie A.
M. Lindquist semble connaître le personnage comme s'il l'avait fait, dans tous les cas il me semble un très grand psychologue . Il faut dire que tu lui poses les questions pertinentes sur ses inclinations féminines que moi je ne comprenais pas.....si l'on aime quelqu'un très fort...comment peut-on aller ailleurs si souvent chercher son plaisir ?....
J'ai compris, il aimait faire du théâtre continuellement, pareil que son adorée. M.A. . Il faut dire qu'elle était quand-même la reine de France....
L'autre sujet important qu'il nous éclaircit est la paternité du duc de Normandie.....la date de conception, les portraits des enfants.
Eleonore, tu ne manques pas de répartie en soulevant le point que beaucoup d'enfants se ressemblent.....
Mais M. Lindquist semble catégorique sur ce point.
Je crois que nous nous passerons bien de ADN,
Ce n'est pas la peine......
En ce qui me concerne, vous m'avez convaincue.
M. Lindquist semble connaître le personnage comme s'il l'avait fait, dans tous les cas il me semble un très grand psychologue . Il faut dire que tu lui poses les questions pertinentes sur ses inclinations féminines que moi je ne comprenais pas.....si l'on aime quelqu'un très fort...comment peut-on aller ailleurs si souvent chercher son plaisir ?....
J'ai compris, il aimait faire du théâtre continuellement, pareil que son adorée. M.A. . Il faut dire qu'elle était quand-même la reine de France....
L'autre sujet important qu'il nous éclaircit est la paternité du duc de Normandie.....la date de conception, les portraits des enfants.
Eleonore, tu ne manques pas de répartie en soulevant le point que beaucoup d'enfants se ressemblent.....
Mais M. Lindquist semble catégorique sur ce point.
Je crois que nous nous passerons bien de ADN,
Ce n'est pas la peine......
En ce qui me concerne, vous m'avez convaincue.
Teresa-Cabarrus- Messages : 364
Date d'inscription : 18/02/2014
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Bon, je l'avoue, ça m'a beaucoup amusée de mettre les pieds dans le plat... ( peut-être mon plat de prédilection )
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Mille merci Mme de Sabran pour cette interview passionnante.
Je partage en tous points l'analyse de Herman Lindqvist. J'ai appris des choses que je ne savais pas grâce à ton interview, notamment que Gustave III avait remarqué la proximité entre Fersen et la reine lors de la fête de juin 1784 à Trianon. J'aimerais connaître la source de cette information.
En ce qui concerne les "conquêtes" de Fersen, on ne lui en connaît aucune d'avérée entre 1783 et fin 1791 / début 1792, c'est à dire pendant la période où il est l'amant de Marie-Antoinette.
Ce n'est qu'après Varennes et le rapprochement de Marie-Antoinette avec Barnave (qu'il soupçonne de "coucher" avec, comme il l'écrit dans son journal), qu'il se tourne vers Eléonore Crawfurd (cf. la lettre de sa soeur qui en atteste : "de toutes les peines, évitez-lui la plus mortelle" le supplie-t-elle au mois de septembre / octobre 1791 en apprenant que Fersen s'affiche au bras d'Eléonore Crawfurd à Bruxelles). Mais il le regrettera ensuite : après la mort de Marie-Antoinette, il avouera à demi-mot, dans son journal, avoir quelques reproches à se faire... et il déclarera dans le même journal qu'Eléonore ne remplacera jamais Marie-Antoinette dans son coeur.
Bien que Fersen ait en quelque sorte "craqué" après Varennes et le rapprochement entre Marie-Antoinette et Barnave (qu'il a ressenti comme une trahison de la reine), il s'est ensuite démené pour tenter de la faire libérer, comme H. Lindqvist le rappelle très justement dans ton interview.
Je partage en tous points l'analyse de Herman Lindqvist. J'ai appris des choses que je ne savais pas grâce à ton interview, notamment que Gustave III avait remarqué la proximité entre Fersen et la reine lors de la fête de juin 1784 à Trianon. J'aimerais connaître la source de cette information.
En ce qui concerne les "conquêtes" de Fersen, on ne lui en connaît aucune d'avérée entre 1783 et fin 1791 / début 1792, c'est à dire pendant la période où il est l'amant de Marie-Antoinette.
Ce n'est qu'après Varennes et le rapprochement de Marie-Antoinette avec Barnave (qu'il soupçonne de "coucher" avec, comme il l'écrit dans son journal), qu'il se tourne vers Eléonore Crawfurd (cf. la lettre de sa soeur qui en atteste : "de toutes les peines, évitez-lui la plus mortelle" le supplie-t-elle au mois de septembre / octobre 1791 en apprenant que Fersen s'affiche au bras d'Eléonore Crawfurd à Bruxelles). Mais il le regrettera ensuite : après la mort de Marie-Antoinette, il avouera à demi-mot, dans son journal, avoir quelques reproches à se faire... et il déclarera dans le même journal qu'Eléonore ne remplacera jamais Marie-Antoinette dans son coeur.
Bien que Fersen ait en quelque sorte "craqué" après Varennes et le rapprochement entre Marie-Antoinette et Barnave (qu'il a ressenti comme une trahison de la reine), il s'est ensuite démené pour tenter de la faire libérer, comme H. Lindqvist le rappelle très justement dans ton interview.
Duc d'Ostrogothie- Messages : 3227
Date d'inscription : 04/11/2017
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Une chose qui nous reste bien claire après réflexion, c'est que l'amour Fersen - Marie Antoinette, est vrai, unique voire pur, exemplaire....digne de faire partie des amours éternellement inoubliables......
Teresa-Cabarrus- Messages : 364
Date d'inscription : 18/02/2014
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Chère Madame de Sabran,
Félicitations pour cette interview si bien menée !
Et merci pour cette brillante analyse de ce sujet qui nous passionne tant ! On s’y retrouve, tant on partage ses points de vue depuis si longtemps !
Personnellement, deux choses m’ont interpellée : je n’avais pas conscience des rapports si conflictuels de Fersen avec son père. J’imaginais bien que leur relation était difficile, comme tout jeune homme qui se confronte à l’autorité paternelle, mais pas à ce point de désaffection durable…
Et surtout, surprise totale pour moi, que les suédois, pardonnez-moi l’expression, s’en contrefichent à ce point et ne le connaissent pas ! Je croyais que c’était LE personnage maltraité de la Suède, dont la fin horriblement injuste avait été mise sous le tapis jusqu’ici par la nation honteuse, mais aujourd’hui en voie de réhabilitation pour devenir le héros national ! ! Apparemment on en est très loin !!!
Félicitations pour cette interview si bien menée !
Et merci pour cette brillante analyse de ce sujet qui nous passionne tant ! On s’y retrouve, tant on partage ses points de vue depuis si longtemps !
Personnellement, deux choses m’ont interpellée : je n’avais pas conscience des rapports si conflictuels de Fersen avec son père. J’imaginais bien que leur relation était difficile, comme tout jeune homme qui se confronte à l’autorité paternelle, mais pas à ce point de désaffection durable…
Et surtout, surprise totale pour moi, que les suédois, pardonnez-moi l’expression, s’en contrefichent à ce point et ne le connaissent pas ! Je croyais que c’était LE personnage maltraité de la Suède, dont la fin horriblement injuste avait été mise sous le tapis jusqu’ici par la nation honteuse, mais aujourd’hui en voie de réhabilitation pour devenir le héros national ! ! Apparemment on en est très loin !!!
Eva Sophie von Fersen- Messages : 98
Date d'inscription : 07/01/2020
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Merci mille fois, ma chère Éléonore, pour ce reportage de ton interview avec M. Lindqvist.
Je suis tout à fait d'accord avec lui sur la suprématie de Marie-Antoinette dans le cœur de Fersen. C'est pourquoi ses amours après la mort de la reine sont toutes ratées. Il n'a jamais aimé une autre femme comme il aimait Marie-Antoinette.
Pourtant l'idée que Fersen avait des maîtresses partout en même temps qu'il était follement amoureux de Marie-Antoinette est fausse. Malheureusement c'est ce que laisse croire Alma Söderhjelm dans son bouquin (que j'admire beaucoup pourtant), qui prête à Fersen pour maîtresse toute femme qui croisa son chemin. C'est un peu l'idée française d'un grand séducteur, un Don Juan irrésistible, ce qu'il n'est pas.
Quant à Louis-Charles, Evelyn Farr explique dans La Correspondance Secrète de Fersen et Marie-Antoinette que la paternité de Fersen est bien possible par sa chronologie des déplacements de Fersen en France.
C'est vrai que la relation de Fersen avec son père est compliquée. Le père est un homme fort qui cherche un beau mariage pour son fils et une carrière en Suède. Fersen aime la reine de France, il ne veut pas se marier (parce qu'il a vu trop de couples malheureux, même au sein de sa propre famille). Il désire qu'une femme l'aime uniquement pour soi, sans y être obligée par la loi. Le père est pratique (mariage pour faire des enfants, maîtresse pour le plaisir), le fils est romantique. Le père est un politique avant tout. Le fils est un homme qui devient contre son gré un homme d'état. Et en même temps ils sont au fond un peu trop similaires pour vivre paisiblement sous le même toit (ou dans le même pays !) car chacun voulait être maître.
J'aimerais bien rencontrer M. Lindqvist ou à Stockholm ou à Paris pour parler de notre cher Fersen.
Et, ma chère Sophie, M. Lindqvist a bien raison de dire que sauf quelques passionnés, les Suédois ignorent tout à fait Fersen et leur passé. Ils sautent de l'époque des Vikings directement jusqu'au vingtième siècle. C'est tellement triste dans un pays avec un patrimoine si riche.
Je suis tout à fait d'accord avec lui sur la suprématie de Marie-Antoinette dans le cœur de Fersen. C'est pourquoi ses amours après la mort de la reine sont toutes ratées. Il n'a jamais aimé une autre femme comme il aimait Marie-Antoinette.
Pourtant l'idée que Fersen avait des maîtresses partout en même temps qu'il était follement amoureux de Marie-Antoinette est fausse. Malheureusement c'est ce que laisse croire Alma Söderhjelm dans son bouquin (que j'admire beaucoup pourtant), qui prête à Fersen pour maîtresse toute femme qui croisa son chemin. C'est un peu l'idée française d'un grand séducteur, un Don Juan irrésistible, ce qu'il n'est pas.
Quant à Louis-Charles, Evelyn Farr explique dans La Correspondance Secrète de Fersen et Marie-Antoinette que la paternité de Fersen est bien possible par sa chronologie des déplacements de Fersen en France.
C'est vrai que la relation de Fersen avec son père est compliquée. Le père est un homme fort qui cherche un beau mariage pour son fils et une carrière en Suède. Fersen aime la reine de France, il ne veut pas se marier (parce qu'il a vu trop de couples malheureux, même au sein de sa propre famille). Il désire qu'une femme l'aime uniquement pour soi, sans y être obligée par la loi. Le père est pratique (mariage pour faire des enfants, maîtresse pour le plaisir), le fils est romantique. Le père est un politique avant tout. Le fils est un homme qui devient contre son gré un homme d'état. Et en même temps ils sont au fond un peu trop similaires pour vivre paisiblement sous le même toit (ou dans le même pays !) car chacun voulait être maître.
J'aimerais bien rencontrer M. Lindqvist ou à Stockholm ou à Paris pour parler de notre cher Fersen.
Et, ma chère Sophie, M. Lindqvist a bien raison de dire que sauf quelques passionnés, les Suédois ignorent tout à fait Fersen et leur passé. Ils sautent de l'époque des Vikings directement jusqu'au vingtième siècle. C'est tellement triste dans un pays avec un patrimoine si riche.
Lady Bess- Messages : 101
Date d'inscription : 14/01/2018
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Gustave III utilisera en politique cette " proximité ", comme tu dis, et palliera ainsi son divorce politique avec le baron de Staël, ambassadeur officiel de Suède en France presque jacobin. Fersen sera le véritable agent de Gustave en France.Duc d'Ostrogothie a écrit:
Je partage en tous points l'analyse de Herman Lindqvist. J'ai appris des choses que je ne savais pas grâce à ton interview, notamment que Gustave III avait remarqué la proximité entre Fersen et la reine lors de la fête de juin 1784 à Trianon. J'aimerais connaître la source de cette information.
Dès la fin de 1789 ce n’était plus le baron de Staël, mais le comte de Fersen qui représentait réellement à Paris Gustave III. Fersen, en sa double qualité d’officier suédois et français, partageait son temps entre les deux pays ; quand il revenait de Suède, il présentait à Louis XVI des lettres de son souverain.
Vers la fin de 1788, Gustave le renvoya en France en le chargeant d’observer les événements et de l’instruire, tantôt de Paris, tantôt de Valenciennes, où le régiment Royal Suédois était en garnison.
Notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t3788-le-divorce-entre-le-baron-de-stael-et-gustave-iii?highlight=STAEL
... et, selon Herman Lindqvist, le meilleur des thrillers . L'amour de Roméo et Juliette fait, en comparaison, presque figure de bluette .Teresa-Cabarrus a écrit:... l'amour Fersen - Marie Antoinette, est vrai, unique voire pur, exemplaire....digne de faire partie des amours éternellement inoubliables......
Fersen voulait vivre sa vie et courir le monde, alors que son businessman de père voulait le voir lui succéder à la tête des grosses affaires qu'il brassait avec succès.Eva Sophie von Fersen a écrit:
Personnellement, deux choses m’ont interpellée : je n’avais pas conscience des rapports si conflictuels de Fersen avec son père. J’imaginais bien que leur relation était difficile, comme tout jeune homme qui se confronte à l’autorité paternelle, mais pas à ce point de désaffection durable…
Surprise totale pour moi aussi, ma chère Sophie !Eva Sophie von Fersen a écrit:
Et surtout, surprise totale pour moi, que les suédois, pardonnez-moi l’expression, s’en contrefichent à ce point et ne le connaissent pas ! Je croyais que c’était LE personnage maltraité de la Suède, dont la fin horriblement injuste avait été mise sous le tapis jusqu’ici par la nation honteuse, mais aujourd’hui en voie de réhabilitation pour devenir le héros national ! ! Apparemment on en est très loin !!!
Fersen aurait eu l'étoffe d'un héros national, mais ses exploits se déroulaient loin de Suède . Il fut célèbre en son temps mais il est oublié aujourd'hui. Non seulement Fersen mais tout le passé historique de la Suède apparemment ! C'est ahurissant !
H. Lindqvist le déplore d'autant plus que l'Histoire est sa passion. Il a d'ailleurs été, pendant trois ans, le professeur d'histoire particulier de la princesse Victoria, future reine de Suède à la mort du roi actuel Carl XVI Gustaf, son père, du fait de l'abrogation de la loi salique en 1980 qui la fait passer devant son frère cadet le prince Carl Philip.
Comme tu le dis joliment, ma chère Bess, aucune de ces autres femmes ne pouvait rivaliser avec une ombre.Lady Bess a écrit:
Je suis tout à fait d'accord avec lui sur la suprématie de Marie-Antoinette dans le cœur de Fersen. C'est pourquoi ses amours après la mort de la reine sont toutes ratées. Il n'a jamais aimé une autre femme comme il aimait Marie-Antoinette.
Il faudrait vraiment que soit enfin publiée l'intégralité ( restante ) du dagbok de Fersen, avec les fameux ( paraît-il innombrables ) " Resté là " qui piquent vraiment ma curiosité.Lady Bess a écrit:Pourtant l'idée que Fersen avait des maîtresses partout en même temps qu'il était follement amoureux de Marie-Antoinette est fausse. Malheureusement c'est ce que laisse croire Alma Söderhjelm dans son bouquin (que j'admire beaucoup pourtant), qui prête à Fersen pour maîtresse toute femme qui croisa son chemin. C'est un peu l'idée française d'un grand séducteur, un Don Juan irrésistible, ce qu'il n'est pas.
Herman Lindqvist a une interprétation toute masculine des écarts de Fersen : le différenciation de l'Amour et du sexe. C'est parfaitement sans importance pour Fersen. Les autres femmes ne comptent pas, elles peuvent être pour lui une passade agréable et fugace, c'est tout .
Cette idée de la possible paternité de Fersen, Castelot va jusqu'à penser qu'elle est instillée à Mme Royale par Louis XVIII lui-même. Une bonne manière de se débarrasser de tous les vrais-faux Louis XVII surgissant de partout.Lady Bess a écrit:Quant à Louis-Charles, Evelyn Farr explique dans La Correspondance Secrète de Fersen et Marie-Antoinette que la paternité de Fersen est bien possible par sa chronologie des déplacements de Fersen en France.
Notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t3027p25-le-secret-de-madame-royale-de-andre-castelot?highlight=secret
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
Ce beau Fersen est en effet un personnage historique attachant qui pourrait faire un beau héros pour une série ou un livre!
Cette interview est passionnante chère madame de Sabran, bravo .
Je suis aussi très étonné que les suédois ne soit pas plus intéressés que ça par l'histoire.
Ce Fersen me plait beaucoup et je suis très peiné de sa triste fin.
En fait il a rejoint son aimée dans la douleur... digne d'une histoire d'amour des plus beaux romans.
Cette interview est passionnante chère madame de Sabran, bravo .
Je suis aussi très étonné que les suédois ne soit pas plus intéressés que ça par l'histoire.
Ce Fersen me plait beaucoup et je suis très peiné de sa triste fin.
En fait il a rejoint son aimée dans la douleur... digne d'une histoire d'amour des plus beaux romans.
Comte Valentin Esterhazy- Messages : 153
Date d'inscription : 29/07/2018
Re: Entretien avec Herman Lindqvist, biographe de Fersen.
... une série ?!! Ah, taisez-vous, malheureux !Comte Valentin Esterhazy a écrit:
Ce beau Fersen est en effet un personnage historique attachant qui pourrait faire un beau héros pour une série ou un livre!
Nous allons atteindre une apothéose d'absurdité, je le sens, quand Fersen déboulera dans le navet Marie-Antoinette de Canal + avec Emilia Schüle.
Je m'attends au pire !
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
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