Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
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Comte d'Hézècques
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
eleonore a écrit:Oui . Adélaïde, elle, s'était toquée d'un quidam, un garde du corps ou je ne sais plus ...
tu confonds pas avec Stephanie de Mona...bip
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Ouais, mais Adélaïde nous a fait la grâce de ne pas chanter !
Invité- Invité
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
pour ma part j'aimais bien l'ouragan
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Un verre d'eau pour la Reine.
Mr de Talaru- Messages : 3193
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Mme Campan entre au service de Mesdames en octobre 1768, en tant que lectrice. Elle avait seize ans. La reine vient de mourir.
Elle évoque le deuil et son entrée en service auprès de Mesdames dans ses Mémoires :
« Ces grands appartements tapissés de noir, ces fauteuils de parade élevés sur plusieurs marches et surmontés d’un dais ornée de panaches ; ces chevaux caparaçonnés ; ce cortège immense en grand deuil ; ces énormes nœuds d’épaules brodés en paillettes d’or et d’argent qui décoraient les habits des pages, et même ceux des valets de pied ; tout cet appareil enfin produisit un tel effet sur mes sens que je pouvais à peine me soutenir lorsqu’on m’introduisit chez les princesses. Le premier jour où je fis la lecture dans le cabinet intérieur de Madame Victoire, il me fut impossible de prononcer plus de deux phrases : mon cœur palpitait, ma voix était tremblante et ma vue troublée […].
Louis XV voyait très peu sa famille ; il descendait tous les matins par un escalier dérobé dans l‘appartement de madame Adélaïde. Souvent, il y apportait et y prenait du café qu’il avait fait lui-même. Madame Adélaïde tirait un cordon de sonnette qui avertissait Madame Victoire de la visite du roi ; Madame Victoire, en se levant pour aller chez sa sœur, sonnait Madame Sophie qui, à son tour, sonnait Madame Louise. Les appartements des princesses étaient très vastes. Madame Louise logeait dans l’appartement le plus reculé. Cette dernière fille du roi était contrefaite et fort petite ; pour se rendre à la réunion quotidienne la pauvre princesse traversait, en courant à toutes jambes, un grand nombre de chambres et, malgré son empressement, elle n’avait souvent que le temps d’embrasser son père qui partait de là pour la chasse […].
Tous les soirs à six heures, Mesdames interrompaient la lecture que je leur faisais pour se rendre avec les princes chez Louis XV : cette visite s’appelait le débotter du roi et était accompagnée d’une sorte d’étiquette. Les princesses passaient un énorme panier qui soutenait une jupe chamarrée d’or ou de broderie ; elles attachaient autour de leur taille une longue queue et cachaient le négligé du reste de leur habillement par un grand mantelet de taffetas noir qui les enveloppait jusque sous le menton. Les chevaliers d’honneur, les dames, les pages, les écuyers, les huissiers portant de gros flambeaux, les accompagnaient chez le roi. En un instant, tout le palais, habituellement solitaire, se trouvait en mouvement ; le roi baisait chaque princesse au front, et la visite était si courte, que la lecture, interrompue par cette visite, recommençait souvent au bout d’un quart d’heure ; Mesdames rentraient chez elles, dénouaient les cordons de leur jupe et de leur queue, reprenaient leur tapisserie, et moi mon livre. » […].
Pendant l’été, le roi venait quelquefois chez les princesses avant l’heure de son débotter ; un jour il me trouva seule dans le cabinet de Madame Victoire, et me demanda où était Coche ; et comme j’ouvrais de grands yeux, il renouvela sa question, mais sans que je la comprisse davantage. Quand le roi fut sorti, je demandai à Madame de qui il avait voulu parler. Elle me dit que c’était d’elle, et m’expliqua d’un grand sang-froid qu’étant la plus grasse de ses filles, le roi lui avait donné le nom d’amitié de Coche ; qu’il appelait Madame Adélaïde Loque, madame Sophie Graille, madame Louise Chiffe. »
Elle évoque le deuil et son entrée en service auprès de Mesdames dans ses Mémoires :
« Ces grands appartements tapissés de noir, ces fauteuils de parade élevés sur plusieurs marches et surmontés d’un dais ornée de panaches ; ces chevaux caparaçonnés ; ce cortège immense en grand deuil ; ces énormes nœuds d’épaules brodés en paillettes d’or et d’argent qui décoraient les habits des pages, et même ceux des valets de pied ; tout cet appareil enfin produisit un tel effet sur mes sens que je pouvais à peine me soutenir lorsqu’on m’introduisit chez les princesses. Le premier jour où je fis la lecture dans le cabinet intérieur de Madame Victoire, il me fut impossible de prononcer plus de deux phrases : mon cœur palpitait, ma voix était tremblante et ma vue troublée […].
Louis XV voyait très peu sa famille ; il descendait tous les matins par un escalier dérobé dans l‘appartement de madame Adélaïde. Souvent, il y apportait et y prenait du café qu’il avait fait lui-même. Madame Adélaïde tirait un cordon de sonnette qui avertissait Madame Victoire de la visite du roi ; Madame Victoire, en se levant pour aller chez sa sœur, sonnait Madame Sophie qui, à son tour, sonnait Madame Louise. Les appartements des princesses étaient très vastes. Madame Louise logeait dans l’appartement le plus reculé. Cette dernière fille du roi était contrefaite et fort petite ; pour se rendre à la réunion quotidienne la pauvre princesse traversait, en courant à toutes jambes, un grand nombre de chambres et, malgré son empressement, elle n’avait souvent que le temps d’embrasser son père qui partait de là pour la chasse […].
Tous les soirs à six heures, Mesdames interrompaient la lecture que je leur faisais pour se rendre avec les princes chez Louis XV : cette visite s’appelait le débotter du roi et était accompagnée d’une sorte d’étiquette. Les princesses passaient un énorme panier qui soutenait une jupe chamarrée d’or ou de broderie ; elles attachaient autour de leur taille une longue queue et cachaient le négligé du reste de leur habillement par un grand mantelet de taffetas noir qui les enveloppait jusque sous le menton. Les chevaliers d’honneur, les dames, les pages, les écuyers, les huissiers portant de gros flambeaux, les accompagnaient chez le roi. En un instant, tout le palais, habituellement solitaire, se trouvait en mouvement ; le roi baisait chaque princesse au front, et la visite était si courte, que la lecture, interrompue par cette visite, recommençait souvent au bout d’un quart d’heure ; Mesdames rentraient chez elles, dénouaient les cordons de leur jupe et de leur queue, reprenaient leur tapisserie, et moi mon livre. » […].
Pendant l’été, le roi venait quelquefois chez les princesses avant l’heure de son débotter ; un jour il me trouva seule dans le cabinet de Madame Victoire, et me demanda où était Coche ; et comme j’ouvrais de grands yeux, il renouvela sa question, mais sans que je la comprisse davantage. Quand le roi fut sorti, je demandai à Madame de qui il avait voulu parler. Elle me dit que c’était d’elle, et m’expliqua d’un grand sang-froid qu’étant la plus grasse de ses filles, le roi lui avait donné le nom d’amitié de Coche ; qu’il appelait Madame Adélaïde Loque, madame Sophie Graille, madame Louise Chiffe. »
Dernière édition par Comte d'Hézècques le Mer 04 Juin 2014, 11:49, édité 1 fois
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« elle dominait de la tête toutes les dames de sa cour, comme un grand chêne, dans une forêt, s'élève au-dessus des arbres qui l'environnent. »
Comte d'Hézècques- Messages : 4390
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Avec une vie pareille, on peut comprendre qu'elles étaient aigries !!!
Invité- Invité
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Comte d'Hézècques a écrit: Elle me dit que c’était d’elle, et m’expliqua d’un grand sang-froid qu’étant la plus grasse de ses filles, le roi lui avait donné le nom d’amitié de Coche ; qu’il appelait Madame Adélaïde Loque, madame Sophie Graille, madame Louise Chiffe.[/i] »
L'on a vraiment peine à croire que ces sobriquets dont Louis XV affublait ses filles étaient affectueux ...
Loque, Graille et Chiffe, je comprends, mais en quoi Coche signifie-t-il grasse ?
Mme de Sabran- Messages : 55509
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
La pauvre !!!
wiki a écrit:Une coche était une ancienne désignation de la femelle du cochon. Le mot désigne maintenant, en charcuterie, une truie reproductrice qui arrive en fin de carrière de reproduction, destinée à être abattue, et dont la chair est plus savoureuse que celle du cochon de boucherie.
Invité- Invité
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Quel mufle, ce Louis XV !
Mme de Sabran- Messages : 55509
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Oui, et c'était sa fille, je n'imagine pas les surnoms qu'il trouvait pour les autres !!!
Invité- Invité
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
De toute évidence, il ne manquait pas d'imagination ! :
Mme de Sabran- Messages : 55509
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Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Oui, c'est sûr !!! boudoi32 boudoi32 boudoi32
Invité- Invité
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Österreich a écrit:La pauvre !!!wiki a écrit:Une coche était une ancienne désignation de la femelle du cochon. Le mot désigne maintenant, en charcuterie, une truie reproductrice qui arrive en fin de carrière de reproduction, destinée à être abattue, et dont la chair est plus savoureuse que celle du cochon de boucherie.
Un petit nom vraiment affectif ! àè-è\':
Invité- Invité
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Bazin traitait sa mère de "folle coche" dans Vipère au poing.
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Mr de Talaru- Messages : 3193
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Cher COSMO, j'ai compris où vous passiez vos congés ... dans les salles de la B.N. / Y avez-vous trouvé "le bed et le breafast" ?
merci pour vos trouvailles - juste un clic pour les piquer et les ranger dans les dossiers adéquats.
Attention au soleil des machines à lire les micro-films.
MARIE ANTOINETTE àè-è\':
merci pour vos trouvailles - juste un clic pour les piquer et les ranger dans les dossiers adéquats.
Attention au soleil des machines à lire les micro-films.
MARIE ANTOINETTE àè-è\':
MARIE ANTOINETTE- Messages : 3729
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
;
Mesdames menaient la vie la plus triste et la plus uniforme possible. Tous les jours en habit de cour, pour aller chez le Roi et
raccompagner à la messe, elles venaient chez elles attendre un dîner où elles représentaient en public; elles se déshabillaient ensuite pour reprendre la même robe de cour, et se trouver au débotté du Roi, et ensuite au jeu de la Reine.
Quelques dames de leur suite étaient admises dans l'intérieur pendant leur semaine, comme madame la marquise de Narbonne (1), qui plaisait à Madame Adélaïde (2). Celle-ci joignait à une physionomie animée et intéressante tous les moyens de rendre un homme heureux; elle avait des talents, et les cultivait, mais, comme ses sœurs, elle n'avait que le changement de résidence pour dissipation. M. le Dauphin, qui étouffait son tempérament par des mœurs austères, était un surveillant pour elles toutes. Quant au Roi, il aurait pu dire à ses
enfants comme les prédicateurs : « Faites ce que je dis, et non pas ce que je fais. » Ces dames avaient encore de temps à autre le séjour de leur sœur. Madame Infante (3), qui venait tous les deux ans.
Madame Adélaïde peignit bien sa situation à une dame de semaine qui se plaignait d'être habillée et déshabillée quatre fois par jour, et de n'avoir pas un quart d'heure à sa volonté : « Madame, lui répondit Madame Adélaïde, vous en êtes qutte pour vous reposer une semaine; mais moi qui fais ce service toute l'année, permettez que je garde toute ma pitié pour moi-même. »
( Dufort de Cheverny )
(1) Françoise de Charlus, mariée en 1749 à Jean-François, comte de
Narbonne-Lara. Elle fut dame du palais de Madame Infante, et ensuite
dame dateurs de Madame Adélaïde.
(2) Marie-Adélaïde de France, troisième fdle du Roi, née en 1732.
(3) Louise-Elisabeth de France, première fille du Roi, née en 1727,
mariée en 1739 à don Philippe, infant d'Espagne.
.
Mesdames menaient la vie la plus triste et la plus uniforme possible. Tous les jours en habit de cour, pour aller chez le Roi et
raccompagner à la messe, elles venaient chez elles attendre un dîner où elles représentaient en public; elles se déshabillaient ensuite pour reprendre la même robe de cour, et se trouver au débotté du Roi, et ensuite au jeu de la Reine.
Quelques dames de leur suite étaient admises dans l'intérieur pendant leur semaine, comme madame la marquise de Narbonne (1), qui plaisait à Madame Adélaïde (2). Celle-ci joignait à une physionomie animée et intéressante tous les moyens de rendre un homme heureux; elle avait des talents, et les cultivait, mais, comme ses sœurs, elle n'avait que le changement de résidence pour dissipation. M. le Dauphin, qui étouffait son tempérament par des mœurs austères, était un surveillant pour elles toutes. Quant au Roi, il aurait pu dire à ses
enfants comme les prédicateurs : « Faites ce que je dis, et non pas ce que je fais. » Ces dames avaient encore de temps à autre le séjour de leur sœur. Madame Infante (3), qui venait tous les deux ans.
Madame Adélaïde peignit bien sa situation à une dame de semaine qui se plaignait d'être habillée et déshabillée quatre fois par jour, et de n'avoir pas un quart d'heure à sa volonté : « Madame, lui répondit Madame Adélaïde, vous en êtes qutte pour vous reposer une semaine; mais moi qui fais ce service toute l'année, permettez que je garde toute ma pitié pour moi-même. »
( Dufort de Cheverny )
(1) Françoise de Charlus, mariée en 1749 à Jean-François, comte de
Narbonne-Lara. Elle fut dame du palais de Madame Infante, et ensuite
dame dateurs de Madame Adélaïde.
(2) Marie-Adélaïde de France, troisième fdle du Roi, née en 1732.
(3) Louise-Elisabeth de France, première fille du Roi, née en 1727,
mariée en 1739 à don Philippe, infant d'Espagne.
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Mme de Sabran- Messages : 55509
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Mesdames tantes,
selon la comtesse de Boigne
... et la vie à la Cour de Bellevue .
La petite Cour de Mesdames en formait une à part: on l'appelait la vieille Cour. Les habitudes y étaient fort régulières. Les princesses passaient tout l'été à Bellevue où leurs neveux et nièces venaient sans cesse leur demander à dîner familièrement et sans être attendus. Le coureur qui les précédait de quelques minutes les annonçait. Lorsque c'était le coureur de Monsieur, depuis Louis XVIII, on avertissait à la bouche, et le dîner était plus soigné et plus copieux. Pour les autres, on ne disait rien, pas même pour le Roi qui avait un gros appétit mais n'était pas à beaucoup près aussi gourmand que son frère. La famille royale, à Bellevue, dînait avec tout ce qui s'y trouvait, les personnes attachées à Mesdames, leurs familles, quelques commensaux; en général cela formait de vingt à trente personnes.
Madame Adélaïde, sans comparaison, la plus spirituelle des filles de Louis XV, était commode et facile à vivre dans l'intérieur, quoique d'une extrême hauteur. Lorsqu'il arrivait à un étranger de l'appeler Altesse Royale, elle se courrouçait, faisait tancer l'introducteur des ambassadeurs, même le ministre des affaires étrangères, et s'entretenait longtemps de l'incroyable négligence de ces messieurs. Elle voulait être Madame, et n'admettait pas que les Fils de France prissent l'Altesse Royale.
Elle avait l'horreur du vin dont elle ne buvait jamais, et les personnes qui se trouvaient placées près d'elle à table se détournaient d'elle pour en boire. Ses neveux avaient toujours cet égard. Si on y avait manqué, elle n'aurait rien dit, mais on ne se serait plus trouvé dans son voisinage à table et la dame d'honneur vous aurait indiqué de vous éloigner de la princesse. En ménageant quelques-unes de ses susceptibilités, et surtout en ne crachant pas par terre ( ), ce qui la provoquait presque à des brutalités, rien n'était plus doux que son commerce.
Madame Adélaïde était l'aînée de cinq princesses. Elle n'avait pas voulu se marier, préférant son état de Fille de France. Elle avait tenu la Cour jusqu'à la mort du roi Louis XV. Elle avait été l'amie et le conseil du Dauphin, son frère, et sa mémoire lui a toujours été bien chère; elle en parlait sans cesse comme de la plus vive affection de son cœur. Une de ses sœurs, madame Infante, régnait assez tristement à Parme; une autre, madame Louise, était carmélite. Des cinq princesses, celle-là semblait, sans comparaison, la plus mondaine. Elle aimait passionnément tous les plaisirs, était fort gourmande, très occupée de sa toilette, avait un besoin extrême des recherches inventées par le luxe, l'imagination assez vive, et enfin une très grande disposition à la coquetterie. Aussi, lorsque le Roi entra dans la chambre de madame Adélaïde pour lui annoncer que madame Louise était partie dans la nuit, son premier cri fut: « Avec qui? ». : : :
Les trois sœurs restantes ne pardonnèrent jamais à madame Louise le secret qu'elle avait fait de ses intentions, et, quoiqu'elles allassent la voir quelquefois, c'était sans plaisir et sans intimité. Sa mort ne leur fut point un chagrin.
Il n'en fut pas ainsi de celle de madame Sophie. Mesdames Adélaïde et Victoire la regrettèrent vivement et l'intimité des deux sœurs en serait devenue encore plus tendre si les deux dames d'honneur, mesdames de Narbonne et de Civrac, n'avaient mis tous leurs soins à les séparer, sans pouvoir jamais les désunir.
Madame Victoire avait fort peu d'esprit et une extrême bonté. C'est elle qui disait, les larmes aux yeux, dans un temps de disette où on parlait des souffrances des malheureux manquant de pain: « Mais, mon Dieu, s'ils pouvaient se résigner à manger de la croûte de pâté! »
À Bellevue, on vivait tous ensemble, on se réunissait pour dîner à deux heures, à cinq chacun rentrait chez soi jusqu'à huit. On retournait au salon et, après le souper, la soirée se prolongeait selon qu'on s'amusait plus ou moins. Il venait du monde de Paris et de Versailles; on faisait un loto ainsi qu'après le dîner. On aura peine à croire qu'à ce loto les comptes étaient rarement exacts et que, dans une pareille réunion, plusieurs personnes étaient notées pour être la cause de ces mécomptes. Il y avait, entre autres, un saint évêque qui était le plus aumônier des hommes, une vieille maréchale, enfin assez de monde pour que ma mère m'ait dit qu'elle s'était décidée à jouer sur les mêmes numéros, sous prétexte de faire des nœuds, de sorte que tout le monde savait son jeu d'avance. Après le loto, les princesses et leurs dames travaillaient dans le salon, et la liberté y était assez grande.
À Versailles, c'était une toute autre vie. Mesdames entendaient la messe chacune de leur côté: madame Adélaïde à la chapelle, madame Victoire, plus tard, dans son oratoire. Elles se réunissaient chez l'une ou chez l'autre pendant la matinée, mais tout à fait dans leur intérieur et dînaient tête-à-tête. À six heures, le jeu de Mesdames se tenait chez madame Adélaïde; c'est alors qu'on leur faisait sa cour. Souvent les princes et princesses assistaient à ce jeu; c'était toujours le loto. À neuf heures, toute la famille royale se réunissait pour souper chez Madame, femme de Monsieur. Ils y étaient exclusivement entre eux et ne manquaient que bien rarement à ce souper. Il fallait des raisons positives, autrement cela déplaisait au Roi. Monsieur le comte d'Artois lui-même, que cela ennuyait beaucoup, n'osait guère s'en affranchir. Là, on racontait les commérages de Cour, on discutait les intérêts de famille, on était fort à son aise et souvent fort gai, car, une fois séparés des entours qui les obsédaient, ces princes, il faut le dire, étaient les meilleures gens du monde. Après le souper, chacun se séparait.
selon la comtesse de Boigne
... et la vie à la Cour de Bellevue .
La petite Cour de Mesdames en formait une à part: on l'appelait la vieille Cour. Les habitudes y étaient fort régulières. Les princesses passaient tout l'été à Bellevue où leurs neveux et nièces venaient sans cesse leur demander à dîner familièrement et sans être attendus. Le coureur qui les précédait de quelques minutes les annonçait. Lorsque c'était le coureur de Monsieur, depuis Louis XVIII, on avertissait à la bouche, et le dîner était plus soigné et plus copieux. Pour les autres, on ne disait rien, pas même pour le Roi qui avait un gros appétit mais n'était pas à beaucoup près aussi gourmand que son frère. La famille royale, à Bellevue, dînait avec tout ce qui s'y trouvait, les personnes attachées à Mesdames, leurs familles, quelques commensaux; en général cela formait de vingt à trente personnes.
Madame Adélaïde, sans comparaison, la plus spirituelle des filles de Louis XV, était commode et facile à vivre dans l'intérieur, quoique d'une extrême hauteur. Lorsqu'il arrivait à un étranger de l'appeler Altesse Royale, elle se courrouçait, faisait tancer l'introducteur des ambassadeurs, même le ministre des affaires étrangères, et s'entretenait longtemps de l'incroyable négligence de ces messieurs. Elle voulait être Madame, et n'admettait pas que les Fils de France prissent l'Altesse Royale.
Elle avait l'horreur du vin dont elle ne buvait jamais, et les personnes qui se trouvaient placées près d'elle à table se détournaient d'elle pour en boire. Ses neveux avaient toujours cet égard. Si on y avait manqué, elle n'aurait rien dit, mais on ne se serait plus trouvé dans son voisinage à table et la dame d'honneur vous aurait indiqué de vous éloigner de la princesse. En ménageant quelques-unes de ses susceptibilités, et surtout en ne crachant pas par terre ( ), ce qui la provoquait presque à des brutalités, rien n'était plus doux que son commerce.
Madame Adélaïde était l'aînée de cinq princesses. Elle n'avait pas voulu se marier, préférant son état de Fille de France. Elle avait tenu la Cour jusqu'à la mort du roi Louis XV. Elle avait été l'amie et le conseil du Dauphin, son frère, et sa mémoire lui a toujours été bien chère; elle en parlait sans cesse comme de la plus vive affection de son cœur. Une de ses sœurs, madame Infante, régnait assez tristement à Parme; une autre, madame Louise, était carmélite. Des cinq princesses, celle-là semblait, sans comparaison, la plus mondaine. Elle aimait passionnément tous les plaisirs, était fort gourmande, très occupée de sa toilette, avait un besoin extrême des recherches inventées par le luxe, l'imagination assez vive, et enfin une très grande disposition à la coquetterie. Aussi, lorsque le Roi entra dans la chambre de madame Adélaïde pour lui annoncer que madame Louise était partie dans la nuit, son premier cri fut: « Avec qui? ». : : :
Les trois sœurs restantes ne pardonnèrent jamais à madame Louise le secret qu'elle avait fait de ses intentions, et, quoiqu'elles allassent la voir quelquefois, c'était sans plaisir et sans intimité. Sa mort ne leur fut point un chagrin.
Il n'en fut pas ainsi de celle de madame Sophie. Mesdames Adélaïde et Victoire la regrettèrent vivement et l'intimité des deux sœurs en serait devenue encore plus tendre si les deux dames d'honneur, mesdames de Narbonne et de Civrac, n'avaient mis tous leurs soins à les séparer, sans pouvoir jamais les désunir.
Madame Victoire avait fort peu d'esprit et une extrême bonté. C'est elle qui disait, les larmes aux yeux, dans un temps de disette où on parlait des souffrances des malheureux manquant de pain: « Mais, mon Dieu, s'ils pouvaient se résigner à manger de la croûte de pâté! »
À Bellevue, on vivait tous ensemble, on se réunissait pour dîner à deux heures, à cinq chacun rentrait chez soi jusqu'à huit. On retournait au salon et, après le souper, la soirée se prolongeait selon qu'on s'amusait plus ou moins. Il venait du monde de Paris et de Versailles; on faisait un loto ainsi qu'après le dîner. On aura peine à croire qu'à ce loto les comptes étaient rarement exacts et que, dans une pareille réunion, plusieurs personnes étaient notées pour être la cause de ces mécomptes. Il y avait, entre autres, un saint évêque qui était le plus aumônier des hommes, une vieille maréchale, enfin assez de monde pour que ma mère m'ait dit qu'elle s'était décidée à jouer sur les mêmes numéros, sous prétexte de faire des nœuds, de sorte que tout le monde savait son jeu d'avance. Après le loto, les princesses et leurs dames travaillaient dans le salon, et la liberté y était assez grande.
À Versailles, c'était une toute autre vie. Mesdames entendaient la messe chacune de leur côté: madame Adélaïde à la chapelle, madame Victoire, plus tard, dans son oratoire. Elles se réunissaient chez l'une ou chez l'autre pendant la matinée, mais tout à fait dans leur intérieur et dînaient tête-à-tête. À six heures, le jeu de Mesdames se tenait chez madame Adélaïde; c'est alors qu'on leur faisait sa cour. Souvent les princes et princesses assistaient à ce jeu; c'était toujours le loto. À neuf heures, toute la famille royale se réunissait pour souper chez Madame, femme de Monsieur. Ils y étaient exclusivement entre eux et ne manquaient que bien rarement à ce souper. Il fallait des raisons positives, autrement cela déplaisait au Roi. Monsieur le comte d'Artois lui-même, que cela ennuyait beaucoup, n'osait guère s'en affranchir. Là, on racontait les commérages de Cour, on discutait les intérêts de famille, on était fort à son aise et souvent fort gai, car, une fois séparés des entours qui les obsédaient, ces princes, il faut le dire, étaient les meilleures gens du monde. Après le souper, chacun se séparait.
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Mme de Sabran- Messages : 55509
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
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Comtesse Diane- Messages : 7397
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Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Notre amie Plume d'Histoire a récemment écrit un article intéressant intitulé : Mesdames de France, musiciennes.
Et à lire donc sur son site, ici : http://plume-dhistoire.fr/mesdames-de-france-musiciennes/
Et à lire donc sur son site, ici : http://plume-dhistoire.fr/mesdames-de-france-musiciennes/
La nuit, la neige- Messages : 18137
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
Plume d'Histoire nous gâte à nouveau :n,,;::::!!!:
Bien à vous.
Bien à vous.
Invité- Invité
Re: Mesdames, filles de Louis XV, les mal-aimées ?
C'est très agréable à lire !
A la fin de l'article on voit la photo d'une très très jolie femme ... est-ce Plume ?
A la fin de l'article on voit la photo d'une très très jolie femme ... est-ce Plume ?
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Comtesse Diane- Messages : 7397
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