René MADEC, le gueux devenu nabab...
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René MADEC, le gueux devenu nabab...
Un personnage haut en couleurs et au destin prodigieux raconté par Irène Frain dans son superbe livre, Le Nabab.
En route pour l'Inde donc avec René Madec, un simple mousse breton né en 1736, très tôt attiré par la mer et l'aventure : il monte à bord d'un navire à 9 ans et à 11 seulement, il embarque pour le Sénégal et Saint-Domingue. Mais notre jeune garçon est ambitieux car il n'est rien, il n'est qu'un gueux. Direction donc ces Indes fabuleuses où il débarque à Pondichéry, "le comptoir des plaisirs", en 1750, après avoir échappé au scorbut et au typhus. C'est le coup de foudre, l'Inde ne le quittera plus.
Détailler ici sa vie par la suite serait fastidieux. Car quelle vie ! Parti de rien, combattant d'abord aux côtés des français, il va tout connaître : victoires et défaites, la prison, la faim, la fuite et la désertion, les amitiés et les trahisons... Et progressivement, il gravit les échelons du pouvoir, on parle de lui, les Rajhas et Nababs l'accueillent à leur cour, il a ses propres troupes, il devient un seigneur de la guerre, l'un de ces aventuriers riches d'audace et d'ambition qui vont et viennent, vendant leurs services au plus offrant. Il commerce et trafique autant qu'il fait la guerre et se taille une fortune colossale : à lui les femmes, les éléphants, les soies, mousselines et diamants, les épices et l'or... Le Grand Moghol de Delhi, même s'il n'est plus qu'un fantôme d'empereur, fait même de lui un seigneur, un nabab.
A Versailles comme à Londres, on s'interroge sur cet aventurier que rien ne semble arrêter, on lui envoie des émissaires, des propositions... Certains français voient en lui un homme qui, par son armée privée et ses moyens financiers conséquents, pourraient permettre de prendre une revanche sur les anglais. Ces derniers de leur côté, commencent à surveiller ce nabab inattendu qui s'agite un peu trop et pourrait se révéler gênant...
Mais si l'Inde a envoûté Madec, elle l'a également épuisé et blasé. Tout ne serait-il finalement que "maya", magie, illusion ? Epuisé autant mentalement que physiquement, marié et père d'une petite fille, Madec préfère quitter cette Inde fatale où comme l'on disait :"Si les conquêtes se font facilement, elles ne se conservent pas de même"... Notre aventurier regagne donc Quimper après avoir été reçu à Versailles par Louis XVI et annobli. C'est bien le moins car l'aventurier s'est épuisé à se battre pour la France (Il y a sacrifié la plus grande part de sa fortune au passage d'ailleurs) dans une indifférence des plus coupables. La légèreté française et les carences de Versailles ont vaincu Madec plus sûrement que les sabres indiens ou les canons anglais. Comme souvent, Versailles n'a pas suivi.
Blasé, l'aventurier acquiert des domaines et se retire dans un château qu'il s'est fait construire (Ce qui prouve que même ruiné, il en avait encore de côté...). Il meurt d'une chute de cheval en 1784.
Sa femme, épousée en Inde, sera un temps inquiétée par la Révolution, puis laissée tranquille, les révolutionnaires se montrant moins ingrats que la royauté en concluant que son mari avait dépensé une énergie et des sommes considérables en Inde dans l'intérêt supérieur de la nation. La Begum mourra en 1841.
Je conseille vivement le livre d'Irène Frain, Le Nabab, qui bien que puissamment romancé, restitue la vie incroyable de ce simple mousse breton devenu un seigneur de la guerre. C'est également un fabuleux voyage dans l'Inde du XVIIIème siècle, avec ses palais, ses bazars, ses Rajhas raffinés et cruels, la mousson, les castes et les intrigues, les dieux par milliers... Le tout sur fond de rivalité franco-anglaise avec une mêlée de personnages et d'aventuriers extraordinaires. Le moins extraordinaire n'est pas, à coup sûr, René Madec, celui que certaines vieilles chansons bretonnes appellent toujours "L'homme de loin"...
Calonne- Messages : 1123
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: René MADEC, le gueux devenu nabab...
Ouh ! Intéressant ! De la grande aventure... :\\\\\\\\:
Merci Calonne.
Du même auteur, j’avais lu « L’inimitable - Cléopâtre » : j’en garde un bon souvenir.
Merci Calonne.
Du même auteur, j’avais lu « L’inimitable - Cléopâtre » : j’en garde un bon souvenir.
La nuit, la neige- Messages : 18132
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: René MADEC, le gueux devenu nabab...
J'ai bien aimé aussi, étant un grand fan de la dernière reine d'Egypte.
Pour en revenir à Madec, outre sa vie incroyable et aventureuse, on reste saisi par cette formidable occasion manquée : travaillant d'abord pour son compte, Madec avait été approché par des français qui l'avaient persuadé de travailler pour la France, contre les anglais. Avec ses 6000 hommes bien équipés et entraînés, ses liens avec les seigneurs locaux et sa colossale fortune, notre aventurier aurait pu faire de grandes choses et il était prêt à le faire.
Malheureusement, Versailles n'a pas suivi et l'a découragé, blasé même. Son annoblissement et son intégration dans l'ordre de Saint Louis à son retour sont peu de choses comparées à l'énergie et aux efforts qu'il a déployés sur place. Ingratitude...
Pour en revenir à Madec, outre sa vie incroyable et aventureuse, on reste saisi par cette formidable occasion manquée : travaillant d'abord pour son compte, Madec avait été approché par des français qui l'avaient persuadé de travailler pour la France, contre les anglais. Avec ses 6000 hommes bien équipés et entraînés, ses liens avec les seigneurs locaux et sa colossale fortune, notre aventurier aurait pu faire de grandes choses et il était prêt à le faire.
Malheureusement, Versailles n'a pas suivi et l'a découragé, blasé même. Son annoblissement et son intégration dans l'ordre de Saint Louis à son retour sont peu de choses comparées à l'énergie et aux efforts qu'il a déployés sur place. Ingratitude...
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J'ai oublié hier, je ne sais pas ce que sera demain, mais aujourd'hui je t'aime
Calonne- Messages : 1123
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
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