Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Lucius
Trianon
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LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: La famille royale et les contemporains de Marie-Antoinette :: Autres contemporains : les femmes du XVIIIe siècle
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Delphine de Sabran, marquise de Custine
.
Je découvre un article du marquis de Ségur qui a trait à ma Delphine ! :n,,;::::!!!:
Voulez-vous un petit compte-rendu ?!!
Il est, dans notre histoire, une génération de femmes intéressantes et curieuses entre toutes. Ce sont celles qui, venues au monde dans les dernières années du règne de Louis XV, ont connu les délices légères et les futilités aimables du temps que Talleyrand proclamait le plus charmant et le plus doux à vivre, pour traverser ensuite, presque sans transition, les tragiques épouvantes de la Révolution. Celles-là ont eu l’emploi, à la plus haute puissance, des qualités les plus gracieuses et des vertus les plus généreuses de leur sexe, tour à tour – et parfois simultanément – avec la même aisance, coquettes et intrépides, frivoles et héroïques. Et le plus surprenant, c’est qu’au sortir de la tourmente, celles qui ont survécu se sont retrouvées, la plupart, toutes pareilles à ce qu’elles étaient la veille du cataclysme. Il semblerait que l’ouragan eût passé sur leurs têtes sans troubler le fond de leurs âmes. La secousse avait éveillé les vieilles vertus héréditaires de dévouement et de vaillance ; le calme revenu a laissé refleurir l’humeur facile et la molle insouciance.
De cette espèce de femmes, Delphine de Sabran, marquise de Custine, est un spécimen accompli.
( marquis de Ségur )
Ma Delphine vint au monde le 18 mars 1770. J'avais vingt et un ans, son père en avait soixante-dix. àè-è\':
Quatre ans plus tard, j'eus son petit frère, Elzéar. Monsieur mon mari mourut, me laissant veuve à vingt-cinq ans . Je fis, comme chacun sait, les délices de mon siècle. ( : ) Ce n'est pas moi qui le dis, c'est M. de Ségur !
Mes lettres au chevalier de Boufflers – l’ami qui occupa pendant vingt ans mon cœur avant de me donner son nom – peignent l’enfance de Delphine sous des traits qui laissent peu prévoir ce que devait être sa vie.
C’était alors, au physique, une grosse fille dodue et joufflue, la tournure gauche, la taille épaisse. Je m'en affligeais sans beaucoup de nuances : « Enfin, tout cela est horrible ! » Au moral, même disgrâce : « Son esprit se développe lentement, ainsi que ses idées.... Elle en a peu, mais elles sont fort justes ». Pour hâter l’éclosion, je la pourvus, en même temps qu’Elzéar, d’un précepteur, nommé Bernard, que me recommanda d’Alembert et qui fut pris, les yeux fermés, sur cette seule recommandation.
Il garda cet emploi huit ans ; au bout de quoi, un hasard révéla que ce Bernard, d’accord avec la femme de chambre, dont il était l’amant, ne songeait à rien moins qu’à empoisonner ses élèves, mes enfants !!!!! pour jouir plus tôt de la pension promise à la fin de l’éducation.
Le précepteur fut jeté en prison .
Alors, jugeant Delphine suffisamment préparée à la vie, je ne pensais plus qu’à l’établir par un mariage avantageux...
( Marquis de Ségur, tripatouillé à la première personne, par mes soins : : : )
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Je découvre un article du marquis de Ségur qui a trait à ma Delphine ! :n,,;::::!!!:
Voulez-vous un petit compte-rendu ?!!
Il est, dans notre histoire, une génération de femmes intéressantes et curieuses entre toutes. Ce sont celles qui, venues au monde dans les dernières années du règne de Louis XV, ont connu les délices légères et les futilités aimables du temps que Talleyrand proclamait le plus charmant et le plus doux à vivre, pour traverser ensuite, presque sans transition, les tragiques épouvantes de la Révolution. Celles-là ont eu l’emploi, à la plus haute puissance, des qualités les plus gracieuses et des vertus les plus généreuses de leur sexe, tour à tour – et parfois simultanément – avec la même aisance, coquettes et intrépides, frivoles et héroïques. Et le plus surprenant, c’est qu’au sortir de la tourmente, celles qui ont survécu se sont retrouvées, la plupart, toutes pareilles à ce qu’elles étaient la veille du cataclysme. Il semblerait que l’ouragan eût passé sur leurs têtes sans troubler le fond de leurs âmes. La secousse avait éveillé les vieilles vertus héréditaires de dévouement et de vaillance ; le calme revenu a laissé refleurir l’humeur facile et la molle insouciance.
De cette espèce de femmes, Delphine de Sabran, marquise de Custine, est un spécimen accompli.
( marquis de Ségur )
Ma Delphine vint au monde le 18 mars 1770. J'avais vingt et un ans, son père en avait soixante-dix. àè-è\':
Quatre ans plus tard, j'eus son petit frère, Elzéar. Monsieur mon mari mourut, me laissant veuve à vingt-cinq ans . Je fis, comme chacun sait, les délices de mon siècle. ( : ) Ce n'est pas moi qui le dis, c'est M. de Ségur !
Mes lettres au chevalier de Boufflers – l’ami qui occupa pendant vingt ans mon cœur avant de me donner son nom – peignent l’enfance de Delphine sous des traits qui laissent peu prévoir ce que devait être sa vie.
C’était alors, au physique, une grosse fille dodue et joufflue, la tournure gauche, la taille épaisse. Je m'en affligeais sans beaucoup de nuances : « Enfin, tout cela est horrible ! » Au moral, même disgrâce : « Son esprit se développe lentement, ainsi que ses idées.... Elle en a peu, mais elles sont fort justes ». Pour hâter l’éclosion, je la pourvus, en même temps qu’Elzéar, d’un précepteur, nommé Bernard, que me recommanda d’Alembert et qui fut pris, les yeux fermés, sur cette seule recommandation.
Il garda cet emploi huit ans ; au bout de quoi, un hasard révéla que ce Bernard, d’accord avec la femme de chambre, dont il était l’amant, ne songeait à rien moins qu’à empoisonner ses élèves, mes enfants !!!!! pour jouir plus tôt de la pension promise à la fin de l’éducation.
Le précepteur fut jeté en prison .
Alors, jugeant Delphine suffisamment préparée à la vie, je ne pensais plus qu’à l’établir par un mariage avantageux...
( Marquis de Ségur, tripatouillé à la première personne, par mes soins : : : )
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Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
Merci Eléonore... je dois encore lire vos lettres et la biographie vous consacrée :
boudoi30
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« elle dominait de la tête toutes les dames de sa cour, comme un grand chêne, dans une forêt, s'élève au-dessus des arbres qui l'environnent. »
Comte d'Hézècques- Messages : 4390
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Je continue ...
Armand de Custine, fils du général de ce nom, riche et de bonne naissance, s’offrit à ce moment et fut aussitôt agréé. La noce eut lieu à la fin de juillet 1787. Les époux n’avaient pas trente-six ans à eux deux et ce couple d’adolescents semblait assez bien assorti, Armand aimable, instruit et bien de sa personne, Delphine fort séduisante, vous diront tous ceux qui l’ont connue. La petite mignonne s'était bien arrangée, le cap difficile de l'adolescence passé .
Pourtant, M. de Ségur me casse la petite : le visage est bouffi, dit-il, les yeux trop écartés, le menton trop charnu et la bouche trop petite ; bref, un ensemble un peu lourd et mièvre à la fois... pas peur de me vexer ! et puis il se rattrape in extremis : mais une merveilleuse chevelure blonde, un teint éblouissant, des dents de perle, un sourire enchanteur, faisaient, dit-on, oublier ces imperfections.
Jean-Stanislas l’appelait « la reine des roses ».
Je continue ...
Armand de Custine, fils du général de ce nom, riche et de bonne naissance, s’offrit à ce moment et fut aussitôt agréé. La noce eut lieu à la fin de juillet 1787. Les époux n’avaient pas trente-six ans à eux deux et ce couple d’adolescents semblait assez bien assorti, Armand aimable, instruit et bien de sa personne, Delphine fort séduisante, vous diront tous ceux qui l’ont connue. La petite mignonne s'était bien arrangée, le cap difficile de l'adolescence passé .
Pourtant, M. de Ségur me casse la petite : le visage est bouffi, dit-il, les yeux trop écartés, le menton trop charnu et la bouche trop petite ; bref, un ensemble un peu lourd et mièvre à la fois... pas peur de me vexer ! et puis il se rattrape in extremis : mais une merveilleuse chevelure blonde, un teint éblouissant, des dents de perle, un sourire enchanteur, faisaient, dit-on, oublier ces imperfections.
Jean-Stanislas l’appelait « la reine des roses ».
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Comte d'Hézècques- Messages : 4390
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
Comte d'Hézècques a écrit:
Ah ! Delphine, cette belle femme radieuse, c'est la mère d'Astolphe Louis Léonor, marquis de Custine ?
boudoi30
Mais oui, lui-même !!! :n,,;::::!!!:
Tu connais mon petit-fils ?
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Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
Mme de Sabran a écrit:
Mais oui, lui-même !!! :n,,;::::!!!:
Tu connais mon petit-fils ?
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Ben oui, intimément même, car j'ai lu son très beau journal
Je me rends compte que je connais la famille de Sabran mieux que quiconque
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« elle dominait de la tête toutes les dames de sa cour, comme un grand chêne, dans une forêt, s'élève au-dessus des arbres qui l'environnent. »
Comte d'Hézècques- Messages : 4390
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Et puis, avec ça d’une coquetterie savante, une âme de conquête ; plaire était son premier souci et sa constante étude, la coquinette. Peu d’hommes savent résister à des avances aussi flatteuses . Aucun, Marquis, aucun ! Delphine eut souvent l’occasion de s’en apercevoir. Hou ! la tombeuse ! :
Cette coquetterie, peut-être d’abord innocente, fut la pierre d’achoppement au bonheur du nouveau ménage. Aïe ! Cela sent le roussi... Custine s’en offusqua, se plaignit, n’obtint rien et battit en retraite. Un grand froid s’établit entre eux, et la naissance de deux enfants n’amena nul rapprochement des cœurs.
Voilà, ce bon Astolphe Louis Léonor est naît, cher Félix !
Dès lors, s’inaugure pour Delphine l’existence affolée, l’existence d’aventures, qui occupera toute sa jeunesse, et même une bonne partie de sa maturité. Elle apporte, d’ailleurs, à ses multiples expériences une âme sensible, aimante, une relative ingénuité, des sincérités successives.
Merci, cher Ségur, pour autant d'indulgence et de compréhension !
Delphine s’imagine chaque fois qu’elle a trouvé le vrai bonheur et, dès qu’une illusion s’envole, il surgit à sa place une illusion nouvelle. Par les lettres de l’héroïne à son frère Elzéar nous connaissons, dans le plus grand détail, l’histoire de toutes ses espérances, de toutes ses déceptions et de tous ses recommencements.
Elzéar, en effet, – et le trait est bien de l’époque – est le confident de sa sœur, son conseiller intime, au besoin son commissionnaire pour les affaires sentimentales. C'est du propre !!!
Elle ne lui cache rien, et de rien il ne s’effarouche. Ah ! jeunesse !
Elle copie pour lui les billets de ses adorateurs, et il la guide pour les réponses à faire. De ce rôle délicat il s’acquitte avec gravité, avec autorité, avec une émotion candide, si bien que la morale, prête à se révolter, est presque désarmée par cette stupéfiante inconscience.
Tiens, je ne sais pas si vous êtes comme moi ( ? ), mais cette complicité fraternelle me rappelle tout à fait celle du duo Fersen / Sophie ...
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Et puis, avec ça d’une coquetterie savante, une âme de conquête ; plaire était son premier souci et sa constante étude, la coquinette. Peu d’hommes savent résister à des avances aussi flatteuses . Aucun, Marquis, aucun ! Delphine eut souvent l’occasion de s’en apercevoir. Hou ! la tombeuse ! :
Cette coquetterie, peut-être d’abord innocente, fut la pierre d’achoppement au bonheur du nouveau ménage. Aïe ! Cela sent le roussi... Custine s’en offusqua, se plaignit, n’obtint rien et battit en retraite. Un grand froid s’établit entre eux, et la naissance de deux enfants n’amena nul rapprochement des cœurs.
Voilà, ce bon Astolphe Louis Léonor est naît, cher Félix !
Dès lors, s’inaugure pour Delphine l’existence affolée, l’existence d’aventures, qui occupera toute sa jeunesse, et même une bonne partie de sa maturité. Elle apporte, d’ailleurs, à ses multiples expériences une âme sensible, aimante, une relative ingénuité, des sincérités successives.
Merci, cher Ségur, pour autant d'indulgence et de compréhension !
Delphine s’imagine chaque fois qu’elle a trouvé le vrai bonheur et, dès qu’une illusion s’envole, il surgit à sa place une illusion nouvelle. Par les lettres de l’héroïne à son frère Elzéar nous connaissons, dans le plus grand détail, l’histoire de toutes ses espérances, de toutes ses déceptions et de tous ses recommencements.
Elzéar, en effet, – et le trait est bien de l’époque – est le confident de sa sœur, son conseiller intime, au besoin son commissionnaire pour les affaires sentimentales. C'est du propre !!!
Elle ne lui cache rien, et de rien il ne s’effarouche. Ah ! jeunesse !
Elle copie pour lui les billets de ses adorateurs, et il la guide pour les réponses à faire. De ce rôle délicat il s’acquitte avec gravité, avec autorité, avec une émotion candide, si bien que la morale, prête à se révolter, est presque désarmée par cette stupéfiante inconscience.
Tiens, je ne sais pas si vous êtes comme moi ( ? ), mais cette complicité fraternelle me rappelle tout à fait celle du duo Fersen / Sophie ...
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Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
Comte d'Hézècques a écrit:Mme de Sabran a écrit:
Mais oui, lui-même !!! :n,,;::::!!!:
Tu connais mon petit-fils ?
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Ben oui, intimement même, car j'ai lu son très beau journal
Chic ! Tu nous racontes !!! :n,,;::::!!!:
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Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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C’est au sortir de la Terreur que ce rôle d’Elzéar apparaît dans tout son éclat. La tourmente révolutionnaire avait été rude aux Custine. Ils en avaient pourtant salué l’aurore avec un fougueux enthousiasme.
Le général avait rapporté d’Amérique des idées avancées, et il avait à tous les siens inculqué ses principes, la haine du pouvoir absolu, l’amour de la démocratie. Armand, son fils, s’était, dès 1789, jeté, comme son père, tête baissée, dans le courant du jour.
C’était l’un des rares points où une espèce d’accord régnât entre sa femme et lui. Il n’est jusqu’à leur fils, qui dès l’âge de trois ans, ne se montrât bon citoyen. « C’est un enragé démocrate ! » écrit Delphine avec orgueil.
Tout cela ne put empêcher que le général, le premier, puis Armand, quelques mois après, ne marchassent à la guillotine. Delphine elle-même, arrêtée comme suspecte, fut enfermée tout d’abord à Sainte-Pélagie, ensuite à la prison des Carmes, d’où elle ne sortira qu’au lendemain du 9 thermidor.
Sainte-Pélagie :
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C’est au sortir de la Terreur que ce rôle d’Elzéar apparaît dans tout son éclat. La tourmente révolutionnaire avait été rude aux Custine. Ils en avaient pourtant salué l’aurore avec un fougueux enthousiasme.
Le général avait rapporté d’Amérique des idées avancées, et il avait à tous les siens inculqué ses principes, la haine du pouvoir absolu, l’amour de la démocratie. Armand, son fils, s’était, dès 1789, jeté, comme son père, tête baissée, dans le courant du jour.
C’était l’un des rares points où une espèce d’accord régnât entre sa femme et lui. Il n’est jusqu’à leur fils, qui dès l’âge de trois ans, ne se montrât bon citoyen. « C’est un enragé démocrate ! » écrit Delphine avec orgueil.
Tout cela ne put empêcher que le général, le premier, puis Armand, quelques mois après, ne marchassent à la guillotine. Delphine elle-même, arrêtée comme suspecte, fut enfermée tout d’abord à Sainte-Pélagie, ensuite à la prison des Carmes, d’où elle ne sortira qu’au lendemain du 9 thermidor.
Sainte-Pélagie :
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Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Derrière les murs de cette prison se déroulera la première idylle de sa vie. Aux faciles amourettes et aux galanteries de passage succède – à défaut d’une forte passion, à laquelle sa nature s’oppose – un sentiment aussi profond que le permet son âme de papillon. Parmi ses codétenus était le général de Beauharnais, premier mari de celle qui, dix années plus tard, sera l’Impératrice. À peine eut-il connu Delphine qu’il tomba sous son charme ; elle se laissa toucher ( où çà ? où çà ?!! :n,,;::::!!!: ) ... ( boudoi26 ) ... , et leur amour eut la douceur amère de ces tendresses fragiles qu’un grand péril menace et sur lesquelles plane l’ombre de la mort.
Ces joies occupaient toutes les heures qu’ils pouvaient dérober à la surveillance des gardiens.
Le reste de leur temps était employé à s’écrire.
L’arrivée dans la même prison de Joséphine de Beauharnais ne troubla pas ces effusions ; le roman continua sous les yeux indulgents de l’épouse légitime. Delphine et Joséphine contractèrent même une amitié qui survécut à leur libération. Elles étaient bien de la même race et faites pour se comprendre.
Cet édifiant accord se poursuivit jusqu’à l’instant fatal. Le jour où Alexandre de Beauharnais reçut l’ordre d’appel devant le sanglant tribunal, il écrivit à Joséphine pour l’assurer, dans un billet ému, de son « attachement fraternel »
( J'ouvre une petite parenthèse très nécessaire pour la bonne compréhension de la situation que nous expose le marquis : l'attachement fraternel conjugal est une spécialité toute XVIIIème siècle ! )
Ensuite il fut trouver Delphine, lui prodigua les consolations les plus tendres et lui remit « une bague arabe », qu’elle lui jura de porter toute sa vie.
Le lendemain, la prison des Carmes comptait deux veuves de plus, deux veuves également désolées.
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Derrière les murs de cette prison se déroulera la première idylle de sa vie. Aux faciles amourettes et aux galanteries de passage succède – à défaut d’une forte passion, à laquelle sa nature s’oppose – un sentiment aussi profond que le permet son âme de papillon. Parmi ses codétenus était le général de Beauharnais, premier mari de celle qui, dix années plus tard, sera l’Impératrice. À peine eut-il connu Delphine qu’il tomba sous son charme ; elle se laissa toucher ( où çà ? où çà ?!! :n,,;::::!!!: ) ... ( boudoi26 ) ... , et leur amour eut la douceur amère de ces tendresses fragiles qu’un grand péril menace et sur lesquelles plane l’ombre de la mort.
Ces joies occupaient toutes les heures qu’ils pouvaient dérober à la surveillance des gardiens.
Le reste de leur temps était employé à s’écrire.
L’arrivée dans la même prison de Joséphine de Beauharnais ne troubla pas ces effusions ; le roman continua sous les yeux indulgents de l’épouse légitime. Delphine et Joséphine contractèrent même une amitié qui survécut à leur libération. Elles étaient bien de la même race et faites pour se comprendre.
Cet édifiant accord se poursuivit jusqu’à l’instant fatal. Le jour où Alexandre de Beauharnais reçut l’ordre d’appel devant le sanglant tribunal, il écrivit à Joséphine pour l’assurer, dans un billet ému, de son « attachement fraternel »
( J'ouvre une petite parenthèse très nécessaire pour la bonne compréhension de la situation que nous expose le marquis : l'attachement fraternel conjugal est une spécialité toute XVIIIème siècle ! )
Ensuite il fut trouver Delphine, lui prodigua les consolations les plus tendres et lui remit « une bague arabe », qu’elle lui jura de porter toute sa vie.
Le lendemain, la prison des Carmes comptait deux veuves de plus, deux veuves également désolées.
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Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Grandiose ! :
Ils sont bath mes enfants :
Elzéar, alors émigré, était, bien entendu, tenu par sa sœur au courant de ces péripéties. D’ailleurs, au cours de leur idylle, Delphine et Alexandre mêlaient sans cesse à leurs plus doux propos le nom de « cet admirable jeune homme », et les billets de l’amoureux sont remplis d’effusions sur « cet être surnaturel », qu’il n’avait jamais vu. « Ah ! ma chère Delphine, écrit-il, si, comme toutes les probabilités l’indiquent, tu me survis, et si un jour heureux te rapproche jamais d’Elzéar, dis-lui qu’il était dans mon cœur avec toi, à mes derniers instants, et qu’il aida à augmenter le charme de notre liaison. Appelle son intérêt sur ma mémoire, en lui disant combien j’étais tendre ! » Elzéar, fortement ému, ne veut pas se montrer ingrat : « Ma sœur, dit-il, je suis touché jusqu’au fond de l’âme en lisant les expressions dont se servit ton amant pour te parler de moi. À présent que tu m’as prouvé que c’était l’être selon ton cœur, je lui rends toute la justice que son amour mérite... »
Aussi exhorte-t-il sa sœur à lui rester toujours fidèle : « Quel amant assez présomptueux oserait être le rival de l’amant qui n’est plus ! La voix de ton frère retentira dans l’avenir pour te rappeler ton Alexandre... » Et, dans une apostrophe dramatique, il s’adresse à l’ombre du mort, lui promet d’entretenir son culte : « Oui, Alexandre, je te le jure à la face du Ciel et sur l’autel de mon cœur, je ferai tous mes efforts pour l’empêcher de t’oublier... Tu pourrais t’anéantir dans le cœur de Delphine ! Elle pourrait donner un vainqueur à ton souvenir ! Non, elle ne serait plus ma sœur... Elle n’eût pas été digne de t’aimer !... »
On m’excusera d’avoir voulu citer ce dialogue surprenant. No problemo ! Vous êtes tout excusé, Marquis !
C’est un document capital pour la psychologie de l’époque révolutionnaire. Mais certainement ! comme vous dites !
Rien ne nous fait mieux pénétrer au plus intime d’un temps où tout était renversé et détruit, jusqu’aux pudeurs élémentaires et aux hypocrisies mondaines.
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Grandiose ! :
Ils sont bath mes enfants :
Elzéar, alors émigré, était, bien entendu, tenu par sa sœur au courant de ces péripéties. D’ailleurs, au cours de leur idylle, Delphine et Alexandre mêlaient sans cesse à leurs plus doux propos le nom de « cet admirable jeune homme », et les billets de l’amoureux sont remplis d’effusions sur « cet être surnaturel », qu’il n’avait jamais vu. « Ah ! ma chère Delphine, écrit-il, si, comme toutes les probabilités l’indiquent, tu me survis, et si un jour heureux te rapproche jamais d’Elzéar, dis-lui qu’il était dans mon cœur avec toi, à mes derniers instants, et qu’il aida à augmenter le charme de notre liaison. Appelle son intérêt sur ma mémoire, en lui disant combien j’étais tendre ! » Elzéar, fortement ému, ne veut pas se montrer ingrat : « Ma sœur, dit-il, je suis touché jusqu’au fond de l’âme en lisant les expressions dont se servit ton amant pour te parler de moi. À présent que tu m’as prouvé que c’était l’être selon ton cœur, je lui rends toute la justice que son amour mérite... »
Aussi exhorte-t-il sa sœur à lui rester toujours fidèle : « Quel amant assez présomptueux oserait être le rival de l’amant qui n’est plus ! La voix de ton frère retentira dans l’avenir pour te rappeler ton Alexandre... » Et, dans une apostrophe dramatique, il s’adresse à l’ombre du mort, lui promet d’entretenir son culte : « Oui, Alexandre, je te le jure à la face du Ciel et sur l’autel de mon cœur, je ferai tous mes efforts pour l’empêcher de t’oublier... Tu pourrais t’anéantir dans le cœur de Delphine ! Elle pourrait donner un vainqueur à ton souvenir ! Non, elle ne serait plus ma sœur... Elle n’eût pas été digne de t’aimer !... »
On m’excusera d’avoir voulu citer ce dialogue surprenant. No problemo ! Vous êtes tout excusé, Marquis !
C’est un document capital pour la psychologie de l’époque révolutionnaire. Mais certainement ! comme vous dites !
Rien ne nous fait mieux pénétrer au plus intime d’un temps où tout était renversé et détruit, jusqu’aux pudeurs élémentaires et aux hypocrisies mondaines.
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Mme de Sabran- Messages : 55504
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
;
Même « amoralité » dans le commerce épistolaire que Delphine entretient avec moi. C’est d’un ton attendri qu’elle me parle toujours du « cher beau-père », comme elle appelle le chevalier de Boufflers, c’est-à-dire de celui que j'ai choisi de longue date pour embellir mon existence et pour consoler mon veuvage.
« Je suis digne d’être sa fille, car je l’aime tendrement », m'écrit Delphine. Lorsque vingt années d’attachement aboutissent finalement à notre mariage en due forme, Delphine s’en réjouit de grand cœur : « Marie-toi bien vite ! Que je serais heureuse d’être à ce mariage ! Pourquoi cela n’a-t-il pas été plus tôt ? »
Même, l’idée lui paraît si bonne, qu’elle songe à suivre cet exemple : « Que deviendrai-je, ma mère, quand mes belles années seront passées ? Adieu les adorateurs, adieu les obligeants ! Je ne serai bonne à rien, nécessaire à personne. Belle fin !... Je n’aurai pas comme toi, dans mes années sérieuses, un tendre et unique ami. »
La conclusion s’impose : « Je voudrais me marier. Mais où est le mari ? Voilà le hic ! » Elle n’est pourtant guère difficile : « Un homme riche et d’environ cinquante ans, même plus vieux, me serait égal. Où le trouver ? Cherche de ton côté, me demande-t-elle sans aucune gêne. Oui, cherche-moi un mari riche et vieux. »
Tel est, entre ma fille et moi, le ton de la correspondance.
C'est toujours M. de Ségur qui le dit : je n'ai pas lu la correspondance entre Delphine et moi ...
Mais, Marquis, je vous fais confiance .
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Même « amoralité » dans le commerce épistolaire que Delphine entretient avec moi. C’est d’un ton attendri qu’elle me parle toujours du « cher beau-père », comme elle appelle le chevalier de Boufflers, c’est-à-dire de celui que j'ai choisi de longue date pour embellir mon existence et pour consoler mon veuvage.
« Je suis digne d’être sa fille, car je l’aime tendrement », m'écrit Delphine. Lorsque vingt années d’attachement aboutissent finalement à notre mariage en due forme, Delphine s’en réjouit de grand cœur : « Marie-toi bien vite ! Que je serais heureuse d’être à ce mariage ! Pourquoi cela n’a-t-il pas été plus tôt ? »
Même, l’idée lui paraît si bonne, qu’elle songe à suivre cet exemple : « Que deviendrai-je, ma mère, quand mes belles années seront passées ? Adieu les adorateurs, adieu les obligeants ! Je ne serai bonne à rien, nécessaire à personne. Belle fin !... Je n’aurai pas comme toi, dans mes années sérieuses, un tendre et unique ami. »
La conclusion s’impose : « Je voudrais me marier. Mais où est le mari ? Voilà le hic ! » Elle n’est pourtant guère difficile : « Un homme riche et d’environ cinquante ans, même plus vieux, me serait égal. Où le trouver ? Cherche de ton côté, me demande-t-elle sans aucune gêne. Oui, cherche-moi un mari riche et vieux. »
Tel est, entre ma fille et moi, le ton de la correspondance.
C'est toujours M. de Ségur qui le dit : je n'ai pas lu la correspondance entre Delphine et moi ...
Mais, Marquis, je vous fais confiance .
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Le mari rêvé ne vint pas, mais, peu d’années après, la destinée mit sur sa route l’homme qui devait venger tant de prédécesseurs oubliés ou trahis, François-René de Chateaubriand.
Je sens que Delphine va faire des jalouses ! : N'est-ce pas Louisquinzounette !
Treize ou seize ans plus tôt, vers 1787, Delphine et lui s’étaient rencontrés dans le monde, lui petit officier obscur, elle jeune mariée, presque une enfant. Nul battement de leurs cœurs ne leur avait fait alors pressentir ce que l’avenir leur réservait.
Ils se retrouvèrent en 1803, René illustre et adulé, Delphine dans l’éclat rayonnant de la trente-quatrième année. Et tout de suite le roman s’engagea. Le premier billet de René dénote déjà un ardent enthousiasme : « Je ne vis plus que dans l’espérance de vous revoir. De grâce, un mot, un seul mot, pour m’aider à passer la journée. » Il languit dans l’attente d’une « sainte apparition » qui vienne « visiter sa demeure ».
La sainte apparition ne tarde pas beaucoup ( : ) et, pendant quelque temps, c’est une félicité sans nuage, qu’interrompt, trop tôt à leur gré, le départ de Chateaubriand pour Rome, où il va consoler les derniers jours de madame de Beaumont.
Car le grand homme n’a jamais craint les situations compliquées.
C'est Pauline, la pauvre Pauline de Montmorin ( la fille du malheureux ministre de Louis XVIC éparpillé façon puzzle par les sans-culottes ), qui s'étiole ainsi à Rome...
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Le mari rêvé ne vint pas, mais, peu d’années après, la destinée mit sur sa route l’homme qui devait venger tant de prédécesseurs oubliés ou trahis, François-René de Chateaubriand.
Je sens que Delphine va faire des jalouses ! : N'est-ce pas Louisquinzounette !
Treize ou seize ans plus tôt, vers 1787, Delphine et lui s’étaient rencontrés dans le monde, lui petit officier obscur, elle jeune mariée, presque une enfant. Nul battement de leurs cœurs ne leur avait fait alors pressentir ce que l’avenir leur réservait.
Ils se retrouvèrent en 1803, René illustre et adulé, Delphine dans l’éclat rayonnant de la trente-quatrième année. Et tout de suite le roman s’engagea. Le premier billet de René dénote déjà un ardent enthousiasme : « Je ne vis plus que dans l’espérance de vous revoir. De grâce, un mot, un seul mot, pour m’aider à passer la journée. » Il languit dans l’attente d’une « sainte apparition » qui vienne « visiter sa demeure ».
La sainte apparition ne tarde pas beaucoup ( : ) et, pendant quelque temps, c’est une félicité sans nuage, qu’interrompt, trop tôt à leur gré, le départ de Chateaubriand pour Rome, où il va consoler les derniers jours de madame de Beaumont.
Car le grand homme n’a jamais craint les situations compliquées.
C'est Pauline, la pauvre Pauline de Montmorin ( la fille du malheureux ministre de Louis XVIC éparpillé façon puzzle par les sans-culottes ), qui s'étiole ainsi à Rome...
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Le retour de René, après la mort de madame de Beaumont, amène une ère de calme et de douceur entre les deux nouveaux amis. On se voit tous les jours librement, sans mystère. Delphine me présente son « parfait ami », je lui fais grand accueil, et c’est dès lors une vraie vie de famille, qui a toute la sérénité et toute la paix de l’innocence et qui, dans la saison d’été, se poursuit à Fervacques, la belle demeure normande achetée par fifille.
Delphine est si heureuse, elle se sent la conscience si pure, que, pour la première fois depuis sa tendre enfance, il semble, à certaines heures, qu’elle retrouve une âme religieuse. La première communion de son fils l’attendrit jusqu’aux larmes ; elle en trace un tableau touchant, qui m'édifie absolument, moi sa mère, mais qui lui attire par ailleurs une grave et sévère mercuriale : « Je parierais, écrit l’auteur du Génie du Christianisme, que votre fils ne sais pas un mot des principes de la religion... Tout cela n’est bon que lorsque les enfants ont été longuement et sagement instruits. Vous faites communier votre fils, qui n’observe pas seulement la simple loi du vendredi et qui ne va peut-être pas à la messe du dimanche... Voilà ce que vous avez gagné à raconter cela à un Père de l’Église, très indigne sans doute, mais toujours de bonne foi, faisant d’énormes fautes, mais sachant qu’il fait mal et se repentant éternellement. »
Ce surprenant mélange de religiosité, de galanterie, d’orthodoxie, de badinage, n’est-il pas représentatif de cette société singulière, placée aux confins de deux siècles ? Le XVIIIe est encore proche et la vague révolutionnaire n’en a pas effacé l’empreinte. L’esprit nouveau qui souffle sur le monde a bien pu modifier les cerveaux, non les âmes, s'étonne M. de Ségur .
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Le retour de René, après la mort de madame de Beaumont, amène une ère de calme et de douceur entre les deux nouveaux amis. On se voit tous les jours librement, sans mystère. Delphine me présente son « parfait ami », je lui fais grand accueil, et c’est dès lors une vraie vie de famille, qui a toute la sérénité et toute la paix de l’innocence et qui, dans la saison d’été, se poursuit à Fervacques, la belle demeure normande achetée par fifille.
Delphine est si heureuse, elle se sent la conscience si pure, que, pour la première fois depuis sa tendre enfance, il semble, à certaines heures, qu’elle retrouve une âme religieuse. La première communion de son fils l’attendrit jusqu’aux larmes ; elle en trace un tableau touchant, qui m'édifie absolument, moi sa mère, mais qui lui attire par ailleurs une grave et sévère mercuriale : « Je parierais, écrit l’auteur du Génie du Christianisme, que votre fils ne sais pas un mot des principes de la religion... Tout cela n’est bon que lorsque les enfants ont été longuement et sagement instruits. Vous faites communier votre fils, qui n’observe pas seulement la simple loi du vendredi et qui ne va peut-être pas à la messe du dimanche... Voilà ce que vous avez gagné à raconter cela à un Père de l’Église, très indigne sans doute, mais toujours de bonne foi, faisant d’énormes fautes, mais sachant qu’il fait mal et se repentant éternellement. »
Ce surprenant mélange de religiosité, de galanterie, d’orthodoxie, de badinage, n’est-il pas représentatif de cette société singulière, placée aux confins de deux siècles ? Le XVIIIe est encore proche et la vague révolutionnaire n’en a pas effacé l’empreinte. L’esprit nouveau qui souffle sur le monde a bien pu modifier les cerveaux, non les âmes, s'étonne M. de Ségur .
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Le château de Fervaques est acheté par Delphine de Custine le 27 octobre 1803 pour la coquette somme de 478 684 livres.
Elle a 34 ans et Astolphe 14.
Le château abritera quelques moments intenses de l'idylle entre Delphine et Chateaubriand "Le Génie" comme elle le surnommait.
Chateaubriand écrivit à ses amis qu'il avait couché dans le lit du Béarnais (Henri IV avait séjourné au château).
Delphine y crée un cercle littéraire autour de Chateaubriand.
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Le château de Fervaques est acheté par Delphine de Custine le 27 octobre 1803 pour la coquette somme de 478 684 livres.
Elle a 34 ans et Astolphe 14.
Le château abritera quelques moments intenses de l'idylle entre Delphine et Chateaubriand "Le Génie" comme elle le surnommait.
Chateaubriand écrivit à ses amis qu'il avait couché dans le lit du Béarnais (Henri IV avait séjourné au château).
Delphine y crée un cercle littéraire autour de Chateaubriand.
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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Bientôt c'est le début des désillusions et des peines. Les premières ardeurs de René sont déjà refroidies, laissant place à un attachement sincère, mais tiède, languissant et distrait. Il vient en visite à Fervacques, mais il mène avec soi un ami, le fidèle Chênedollé, car il redoute l’épreuve du tête-à-tête et la monotonie des champs.
Lorsqu’il s’en va, sa dernière phrase est pour recommander à madame de Custine de ne pas lui écrire longuement. Et voici de quel ton il remercie la maîtresse du château : « Je regrette Fervacques, les carpes, vous, Chênedollé et même madame Auguste... Tâchez donc de faire niveler le billard, d’arracher l’herbe pour qu’on voie les brochets, d’engraisser les veaux, de faire pondre aux poules des œufs moins gris et plus frais. Quand tout cela sera fait, vous m’avertirez, et je verrai s’il est possible de me rendre à Fervacques. »
À ces sèches plaisanteries s’étonnera-t-on qu’elle réponde mélancoliquement : « Il y a des endroits dans votre lettre qui m’ont fait bien du mal. »
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Bientôt c'est le début des désillusions et des peines. Les premières ardeurs de René sont déjà refroidies, laissant place à un attachement sincère, mais tiède, languissant et distrait. Il vient en visite à Fervacques, mais il mène avec soi un ami, le fidèle Chênedollé, car il redoute l’épreuve du tête-à-tête et la monotonie des champs.
Lorsqu’il s’en va, sa dernière phrase est pour recommander à madame de Custine de ne pas lui écrire longuement. Et voici de quel ton il remercie la maîtresse du château : « Je regrette Fervacques, les carpes, vous, Chênedollé et même madame Auguste... Tâchez donc de faire niveler le billard, d’arracher l’herbe pour qu’on voie les brochets, d’engraisser les veaux, de faire pondre aux poules des œufs moins gris et plus frais. Quand tout cela sera fait, vous m’avertirez, et je verrai s’il est possible de me rendre à Fervacques. »
À ces sèches plaisanteries s’étonnera-t-on qu’elle réponde mélancoliquement : « Il y a des endroits dans votre lettre qui m’ont fait bien du mal. »
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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De mois en mois, maintenant, le refroidissement s’accentue. Le Génie, comme l’appelle Delphine, devient quinteux, inégal, irascible. Moins il donne et plus il exige. Lorsqu’il se sent des torts, il s’empresse de faire des reproches : « Je parie que vous me ferez encore la mine... Je vous déclare que, si vous me recevez avec une mine renfrognée, vous ne me verrez qu’une fois... Allons, la paix. Arrivez, confessez vos péchés, je vous reçois en miséricorde. »
Il n’est pas que les femmes pour se défendre en attaquant.
Ben, Marquis ?!!
Delphine supporte tout avec une patience méritoire. Elle ne se plaint même pas, quand, chassée par d’autres caprices du cœur de l’inconstant, elle voit la vive tendresse d’antan faire place à la simple amitié, une amitié d’ailleurs singulièrement intermittente, qui, des années entières, reste engourdie et silencieuse, puis se réveille à l’improviste avec des protestations de ce genre : « Je reviens de partout, vous le savez, et on ne peut se soustraire à mon éternel attachement. »
... gonflé, le gars !!!
Une seule fois, une plainte lui échappe, quand, à la mort de sa belle-fille, qu’elle aimait tendrement, elle ne reçoit de lui aucun témoignage de souvenir, aucune marque de sympathie : « J’espérais, écrit-elle, que, depuis que nous étions si malheureux, M. de Chateaubriand penserait plus à nous... Mais rien n’a le pouvoir de le forcer à penser à ses amis ! »
Si jamais la douce petite âme, l’âme gentille de Delphine, fut, comme il est permis d’en douter, capable d’une réelle souffrance, c’est sans doute à Chateaubriand qu’elle dut cette initiation douloureuse...
boudoi30
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De mois en mois, maintenant, le refroidissement s’accentue. Le Génie, comme l’appelle Delphine, devient quinteux, inégal, irascible. Moins il donne et plus il exige. Lorsqu’il se sent des torts, il s’empresse de faire des reproches : « Je parie que vous me ferez encore la mine... Je vous déclare que, si vous me recevez avec une mine renfrognée, vous ne me verrez qu’une fois... Allons, la paix. Arrivez, confessez vos péchés, je vous reçois en miséricorde. »
Il n’est pas que les femmes pour se défendre en attaquant.
Ben, Marquis ?!!
Delphine supporte tout avec une patience méritoire. Elle ne se plaint même pas, quand, chassée par d’autres caprices du cœur de l’inconstant, elle voit la vive tendresse d’antan faire place à la simple amitié, une amitié d’ailleurs singulièrement intermittente, qui, des années entières, reste engourdie et silencieuse, puis se réveille à l’improviste avec des protestations de ce genre : « Je reviens de partout, vous le savez, et on ne peut se soustraire à mon éternel attachement. »
... gonflé, le gars !!!
Une seule fois, une plainte lui échappe, quand, à la mort de sa belle-fille, qu’elle aimait tendrement, elle ne reçoit de lui aucun témoignage de souvenir, aucune marque de sympathie : « J’espérais, écrit-elle, que, depuis que nous étions si malheureux, M. de Chateaubriand penserait plus à nous... Mais rien n’a le pouvoir de le forcer à penser à ses amis ! »
Si jamais la douce petite âme, l’âme gentille de Delphine, fut, comme il est permis d’en douter, capable d’une réelle souffrance, c’est sans doute à Chateaubriand qu’elle dut cette initiation douloureuse...
boudoi30
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
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En juillet 1826, Delphine, frappée par un mal implacable, prête à partir pour Bex, où elle allait mourir, revit une dernière fois l’homme dont l’amour avait été son tourment et sa gloire.
La phrase des Mémoires de René où il rappelle cette suprême entrevue respire une certaine émotion, qu’on voudrait ne pas croire uniquement littéraire :
« J’ai vu celle qui affronta l’échafaud d’un si grand courage, je l’ai vue, plus blanche qu’une Parque, vêtue de noir, la taille amincie par la mort, la tête ornée de sa seule chevelure de soie, je l’ai vue sourire de ses lèvres pâles et de ses belles dents, lorsqu’elle quittait Sécherons, près Genève, pour expirer à Bex, à l’entrée du Valais. »
Mais, peu d’années après, repassant par le même pays, voici tout ce que lui inspire l’évocation d’un si récent passé :
« À Bex, tandis qu’on attelait à ma voiture les mêmes chevaux qui avaient peut-être traîné le cercueil de madame de Custine, j’étais appuyé contre le mur de la maison où était morte mon hôtesse de Fervacques. Elle avait été célèbre au tribunal révolutionnaire par sa longue chevelure. J’ai vu à Rome de beaux cheveux blonds retirés d’une tombe. »
C’est tout. Comme sensibilité, on pourrait souhaiter mieux.
Gardons-nous cependant des indignations excessives. Un geste discret de souvenir et un hommage à sa beauté, Delphine, en son vivant, n’aurait peut-être pas demandé davantage.
Marquis de SÉGUR,
Vieux dossiers, petits papiers,
5e édition, Calmann-Lévy.
En juillet 1826, Delphine, frappée par un mal implacable, prête à partir pour Bex, où elle allait mourir, revit une dernière fois l’homme dont l’amour avait été son tourment et sa gloire.
La phrase des Mémoires de René où il rappelle cette suprême entrevue respire une certaine émotion, qu’on voudrait ne pas croire uniquement littéraire :
« J’ai vu celle qui affronta l’échafaud d’un si grand courage, je l’ai vue, plus blanche qu’une Parque, vêtue de noir, la taille amincie par la mort, la tête ornée de sa seule chevelure de soie, je l’ai vue sourire de ses lèvres pâles et de ses belles dents, lorsqu’elle quittait Sécherons, près Genève, pour expirer à Bex, à l’entrée du Valais. »
Mais, peu d’années après, repassant par le même pays, voici tout ce que lui inspire l’évocation d’un si récent passé :
« À Bex, tandis qu’on attelait à ma voiture les mêmes chevaux qui avaient peut-être traîné le cercueil de madame de Custine, j’étais appuyé contre le mur de la maison où était morte mon hôtesse de Fervacques. Elle avait été célèbre au tribunal révolutionnaire par sa longue chevelure. J’ai vu à Rome de beaux cheveux blonds retirés d’une tombe. »
C’est tout. Comme sensibilité, on pourrait souhaiter mieux.
Gardons-nous cependant des indignations excessives. Un geste discret de souvenir et un hommage à sa beauté, Delphine, en son vivant, n’aurait peut-être pas demandé davantage.
Marquis de SÉGUR,
Vieux dossiers, petits papiers,
5e édition, Calmann-Lévy.
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Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
Merci infiniment chère Eléonore de nous avoir montré la vie de la charmante Delphine à travers le récit de M. de Ségur C'est passionnant !
Ah voilà qui explique l'âme tourmentée du pauvre petit Astolphe
Le 27 juillet 1818 il écrit depuis Fervacques :
« Je suis voué à une tristesse innée, qui vient sans doute des contradictions de ma nature. Je suis violent et inactif, j'ai l'âme passionnée et paresseuse ; avide de tout, je demeure indifférent à tout, inactif à regret et cependant ennemi de tout effort. La vie pour moi n'est qu'un songe, et mes jours ne sont marqués que par la perte des illusions. Je me tire de cet état par un calme, par un aplomb qui ne sont qu'apparents mais cette apparence même m'est utile, et mon âme s'aide de ce qu'on la croit (être) pour devenir ce qu'elle devrait être. (qu'a-t-il fumé ce petit Astolphe ? :3895: )
Je souffre plus que je ne puis dire de mon caractère incomplet. Rien n'est un, rien n'est achevé, ni dans mon cœur ni dans mon esprit ; partout des lacunes et des disparates ; mon âme ne connaît point sa force ; je n'ai vécu qu'avec une partie de moi-même, le reste attend, pour éclore, un soleil plus propice.
Mon plus grand mal, c'est de n'avoir jamais aimé comme j'étais capable de le faire, comme je sens que je le suis encore. Indifférent sans froideur je brûle d'un feu sans objet et qui me dévore faute d'aliment. Si j'avais pu me vouer uniquement au bonheur d'un autre, vivre tout entier dans un être adoré, m'oublier, me perdre dans une vie plus céleste, plus pure que la mienne, quelles qu'en eussent été les suites je serais moins malheureux.
Mais exister à si peu de frais quand on est si riche, et cependant se fatiguer, s'user, mourir comme si l'on avait dépensé sa vie, c'est une espèce d'avarice morale qui fait mon supplice. Tout sentiment, toute affection qui vient à mon secours dans ce dénuement me paraît un ange consolateur, une voix céleste qui m'exhorte à la patience, au courage, en me rappelant mes droits éternels au bonheur et à la vie.
J'ai renoncé depuis longtemps à rencontrer l'être idéal qui pourrait m'en faire jouir dans ce monde. D'ailleurs il ne m'est peut-être pas donné d'éprouver sur la terre toute la puissance de mon âme ; et mes mécomptes ne viennent que de ce que j'applique à une sphère bornée des facultés préparées pour l'infini. Si l'on n'avait qu'un but, qu'un besoin ! Mais l'unité, source de toute vie, se subdivise, se multiplie en tant de branches, se prend en tant de détours en ce monde, qu'on oublie, qu'on la méconnaît, qu'on finit par la nier. »
Mme de Sabran a écrit:
Cette coquetterie, peut-être d’abord innocente, fut la pierre d’achoppement au bonheur du nouveau ménage. Aïe ! Cela sent le roussi... Custine s’en offusqua, se plaignit, n’obtint rien et battit en retraite. Un grand froid s’établit entre eux, et la naissance de deux enfants n’amena nul rapprochement des cœurs.
Voilà, ce bon Astolphe Louis Léonor est naît, cher Félix !
Ah voilà qui explique l'âme tourmentée du pauvre petit Astolphe
Le 27 juillet 1818 il écrit depuis Fervacques :
« Je suis voué à une tristesse innée, qui vient sans doute des contradictions de ma nature. Je suis violent et inactif, j'ai l'âme passionnée et paresseuse ; avide de tout, je demeure indifférent à tout, inactif à regret et cependant ennemi de tout effort. La vie pour moi n'est qu'un songe, et mes jours ne sont marqués que par la perte des illusions. Je me tire de cet état par un calme, par un aplomb qui ne sont qu'apparents mais cette apparence même m'est utile, et mon âme s'aide de ce qu'on la croit (être) pour devenir ce qu'elle devrait être. (qu'a-t-il fumé ce petit Astolphe ? :3895: )
Je souffre plus que je ne puis dire de mon caractère incomplet. Rien n'est un, rien n'est achevé, ni dans mon cœur ni dans mon esprit ; partout des lacunes et des disparates ; mon âme ne connaît point sa force ; je n'ai vécu qu'avec une partie de moi-même, le reste attend, pour éclore, un soleil plus propice.
Mon plus grand mal, c'est de n'avoir jamais aimé comme j'étais capable de le faire, comme je sens que je le suis encore. Indifférent sans froideur je brûle d'un feu sans objet et qui me dévore faute d'aliment. Si j'avais pu me vouer uniquement au bonheur d'un autre, vivre tout entier dans un être adoré, m'oublier, me perdre dans une vie plus céleste, plus pure que la mienne, quelles qu'en eussent été les suites je serais moins malheureux.
Mais exister à si peu de frais quand on est si riche, et cependant se fatiguer, s'user, mourir comme si l'on avait dépensé sa vie, c'est une espèce d'avarice morale qui fait mon supplice. Tout sentiment, toute affection qui vient à mon secours dans ce dénuement me paraît un ange consolateur, une voix céleste qui m'exhorte à la patience, au courage, en me rappelant mes droits éternels au bonheur et à la vie.
J'ai renoncé depuis longtemps à rencontrer l'être idéal qui pourrait m'en faire jouir dans ce monde. D'ailleurs il ne m'est peut-être pas donné d'éprouver sur la terre toute la puissance de mon âme ; et mes mécomptes ne viennent que de ce que j'applique à une sphère bornée des facultés préparées pour l'infini. Si l'on n'avait qu'un but, qu'un besoin ! Mais l'unité, source de toute vie, se subdivise, se multiplie en tant de branches, se prend en tant de détours en ce monde, qu'on oublie, qu'on la méconnaît, qu'on finit par la nier. »
_________________
« elle dominait de la tête toutes les dames de sa cour, comme un grand chêne, dans une forêt, s'élève au-dessus des arbres qui l'environnent. »
Comte d'Hézècques- Messages : 4390
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Age : 44
Localisation : Pays-Bas autrichiens
Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
Comte d'Hézècques a écrit:
Ah voilà qui explique l'âme tourmentée du pauvre petit Astolphe
En tout cas, comme il écrit bien ! Quels accents déchirants ... Comme il a dû être malheureux et tourmenté !
Le pauvre Astolphe, jeune, s'interdit peut-être d'aimer ? L'homosexualité était considérée comme une perversion au XIXème siècle.
Quel âge a-t-il lorsqu'il écrit ces lignes ?
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Mme de Sabran- Messages : 55504
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Delphine de Sabran, marquise de Custine
A
Astolphe Louis Léonor, marquis de Custine, nous dit Wiki, né à Niderviller (Moselle) le 18 mars 1790 et mort à Saint-Gratien (Seine-et-Oise) le 25 septembre 1857 (à 67 ans), est un écrivain français, célèbre pour son ouvrage La Russie en 1839, parfois considéré comme le pendant pour la Russie de l'essai De la démocratie en Amérique de Tocqueville.
Astolphe est le deuxième fils d’Armand de Custine et de Delphine de Sabran. Sa famille est durement affectée par la Révolution : son grand-père, le général révolutionnaire Adam Philippe de Custine est guillotiné en août 1793 et son père en janvier 1794, sa mère est incarcérée à la prison parisienne de Sainte-Pélagie, puis aux Carmes jusqu'à la chute de Robespierre en juillet 1794.
En 1795, la famille de Custine retourne en Lorraine. Astolphe passe alors sous la responsabilité morale de son précepteur alsacien, nommé Bertoecher. Sa mère, Delphine de Custine, connue pour son intelligence et sa grande beauté, fréquente les salons littéraires, se lie d'amitié avec Madame de Staël qui lui dédie son roman Delphine et noue une relation amoureuse avec François-René de Chateaubriand en 1802.
La disgrâce d’un des amis les plus chers de Delphine de Custine, Joseph Fouché, ministre de la Police de Napoléon, provoque la rupture d’avec le régime impérial en 1810. Commence alors un périple européen qui mène Astolphe et sa mère en Allemagne et en Suisse en 1811, en Italie l’année suivante. En 1814, Delphine et son fils rejoignent à Bâle le roi Louis XVIII et le comte d’Artois qui préparent la Restauration.
C'est alors qu'Astolphe rentre dans l'armée et le corps diplomatique, assistant au congrès de Vienne aux côtés de Talleyrand.
Après plusieurs tentatives de fiançailles infructueuses arrangées par sa mère (dont avec Albertine de Staël, fille de Madame de Staël), il se marie, en 1821, à Léontine de Saint-Simon de Courtomer, malgré son penchant pour l'homosexualité. Un fils, Enguerrand, naît de cette union en juin 1822. L'été de cette même année, le marquis de Custine entreprend un voyage en Angleterre avec Édouard de Sainte-Barbe, un jeune homme de quatre ans son cadet rencontré quelques années auparavant.
Léontine meurt le 7 juillet 1823 de la tuberculose laissant Astolphe libre de vivre sa passion avec Édouard de Sainte-Barbe. Le 28 octobre 1824, alors qu'il se rendait à un rendez-vous galant avec un jeune soldat, il est attaqué par les compagnons d'armes de celui-ci, battu, dénudé et abandonné inconscient sur le pavé. Sa mésaventure, bientôt connue du Tout-Paris, entache sa réputation et associe pour longtemps le nom de Custine à des mœurs que la société de l’époque qualifie d’infâmes. Un conseil de famille décide de son éloignement de la capitale : Custine rejoint, accompagné de Sainte-Barbe, le domaine familial de Fervaques en Normandie (le château familial de Niderviller a été, entre temps, vendu).
Les années suivantes sont passées dans la mouvance romantique avec plus ou moins de succès. Heinrich Heine appelait Custine « un demi-homme des lettres ».
En 1832, Astolphe de Custine achète à Mme de Neuflize un petit château à Saint-Gratien, le Belvédère, construit en 1816, qu'il remanie et aménage. Il y reçoit de nombreux artistes : Honoré de Balzac, Victor Hugo, Frédéric Chopin, Eugène Delacroix, François-René de Chateaubriand qui fut intimement lié à sa mère pendant vingt ans, Alfred de Musset, Jules Barbey d'Aurevilly, George Sand et Alphonse de Lamartine (le château sera rasé en 1860 par ses héritiers, il en restera un bâtiment de dépendances, détruit depuis lors).
La princesse Mathilde, fille de Jérôme Bonaparte, passait ses étés tout d'abord au château Catinat en tant que locataire du marquis de Custine. Puis elle acheta en 1853 le château construit par le comte de Luçay (aujourd'hui appelé « château de la princesse Mathilde »). Elle y reçoit, elle aussi de nombreux écrivains et artistes du Second Empire : Prosper Mérimée, Théophile Gautier, Jules et Edmond de Goncourt, Gustave Flaubert ou Alexandre Dumas.
Astolphe gagne quelque reconnaissance grâce à ses récits de voyage en Espagne. La publication, en 1835, par Alexis de Tocqueville de De la démocratie en Amérique dont le dernier chapitre prophétise que le futur appartient aux États-Unis et à la Russie. En 1838, il réside quelques mois à Annecy-le-Vieux et à Duingt autour du lac d'Annecy et publie L'Espagne sous Ferdinand VII. En 1839, il entreprend un voyage en Russie, principalement à Saint-Pétersbourg mais aussi à Moscou et Iaroslavl.
Une autre explication de ce voyage en Russie réside dans l'arrivée à Paris, d'un jeune comte polonais de 23 ans, Ignacy Gurowski, qui emménage au domicile parisien de Custine et Sainte-Barbe. Custine aurait entrepris son voyage en Russie pour convaincre le tsar de mettre fin à la disgrâce du jeune homme. Après de nombreux scandales mondains, Ignacy Gurowski enleva à son couvent et épousa l’infante Isabelle d’Espagne en 1842. Custine regretta quelque peu la joie que la jeunesse de Gurowski mettait dans son foyer. Il voyagea en Italie où il composa son ouvrage, trois ans après son retour de voyage.
La Russie en 1839 (dont des extraits ont été publiés sous le nom Lettres de Russie), publié le 13 mai 1843, a un succès immédiat et prolongé : six rééditions verront le jour. Le livre est publié en Angleterre et en Allemagne, mais interdit en Russie. L'ouvrage est une collection de détails sur les mœurs de la Cour, de l'aristocratie et de la haute bourgeoisie, mais aussi sur l'état de l'administration, des sciences et des coutumes populaires. La description qu'il fait de l'empereur Nicolas Ier est peu flatteuse. Il écrit entre autres :
« Si le tsar n'a pas plus de pitié dans son cœur qu'il n'en exprime dans sa politique, je plains la Russie. En revanche si ses sentiments sont supérieurs à ses actes, je plains le tsar. »
Ses critiques déplairont fortement à Saint-Pétersbourg, mais son livre ne cessera jamais d'être imprimé clandestinement et de circuler sous le manteau en Russie. En Occident le livre tomba dans l'oubli pendant une centaine d'années, avant qu'au moment de la guerre froide, on remarque que les jugements de Custine sur la Russie impériale étaient parfaitement transposables à la Russie soviétique.
Astolphe de Custine meurt le 25 septembre 1857 et est enterré à Auquainville, près de Fervaques. Sa famille intente un procès en nullité contre le testament par lequel il lègue sa fortune à son ami Sainte-Barbe. Ce dernier meurt quelques mois après Custine, le 18 octobre 1858, mais obtint néanmoins gain de cause à titre posthume.
Œuvres
Aloys ou le Religieux du mont Saint-Bernard, 1829
Mémoires et voyages, ou lettres écrites à diverses époques, pendant des courses en Suisse, en Calabre, en Angleterre et en Écosse, Paris, 1830, rééd. Editions François Bourin, 1993, puis Mercure de France 2012.
Béatrix Cenci, théâtre, 1833
Le Monde comme il est, 1835
L’Espagne sous Ferdinand VII, 1838
Ethel, 1839
La Russie en 1839, 1843
Romuald ou la Vocation, 1848
Lettres au marquis de la Grange (date de parution inconnue), publiés en 1925 par M. de Luppé
Souvenirs et portraits (date de parution inconnue), publiés en 1956 par P. de Lacretelle1
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