Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
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LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: L'histoire de Marie-Antoinette :: L'archiduchesse d'Autriche et la dauphine de France
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Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
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On avait appris ou cru savoir que c'était Mlle de Lorraine, fille de Mme de Brionne et sœur de MM. de Lambesc et de Vaudémont, c'est-à-dire princesse du même sang que l'archiduchesse-dauphine, qui devait danser le menuet immédiatement après les princesses de la famille et du sang royal.
C'était une distinction qui n'aurait eu rien d'intolérable ; et, par ma foi ! les princes et princesses de Lorraine en possédaient bien d'autres, auxquelles on avait eu le temps de s'accoutumer ! On ajoutait que le roi n'avait accordé ceci qu'à la sollicitation du comte de Mercy, l'ambassadeur impérial, lequel en aurait fait la demande formelle au nom de l'impératrice-reine, ce qui n'avait pas plus de vraisemblance que de vérité. Voilà MM. les ducs et pairs en fermentation de résistance, en projet de révolte, pour ainsi dire, et les voilà qui s'adjoignent une quarantaine de gentilshommes opposants, parmi lesquels on voit figurer M. de la Vaubalière et M. de Villette, afin de représenter l'ancienne noblesse, apparemment.
Le premier pair, archevêque et duc de Reims, ne voulut pas entrer dans un pareil tripotage ; mais on s'assembla chez M. de Broglie, évêque de Noyon, et comte et pair de France en cette qualité ; enfin M. de Clermont d'Amboise y rédigea la pièce suivante (il y paraît à la beauté du style) ; et M. de Noyon s'empressa d'aller présenter ce factum à Sa Majesté. C'était une dissertation sur un menuet : voyez donc l'heureux à-propos et la belle convenance de la faire présenter par un évêque ! Enfin voici le chef-d'œuvre en question, que votre père ne voulut pas signer.
Je ne me serais jamais consolée de voir son nom sur une telle pancarte, avec un pareil entourage.
Sire
Les grands et la noblesse du royaume, honorés, dans tous les temps, de la protection particulière de Votre Majesté et des rois ses prédécesseurs, déposent avec confiance au pied du trône les justes alarmes qu'ils ont conçues. Le bruit s'est répandu que Votre Majesté était sollicitée d'accorder un rang à la maison de Lorraine immédiatement après les princes de votre sang royal, et qu'il avait été réglé qu'au bal paré, qui doit avoir lieu pour le mariage de Monsieur le dauphin, Mademoiselle de Lorraine danserait avant toutes les dames de la cour : honneur si distingué que, dans votre auguste maison, il n'est pas même accordé aux branches aînées sur les branches cadettes, et qu'il ne l'a jamais été qu'aux filles du sang royal sur les femmes de qualité.
Ils croient, Sire, qu'ils manqueraient à ce qu'ils doivent à leur naissance, s'ils ne vous témoignaient combien une distinction aussi humiliante pour eux qu'elle est nouvelle ajouterait à la douleur de perdre l'avantage qu'ils ont toujours eu de n'être séparés de Votre Majesté et de sa famille royale par aucun rang intermédiaire, et s'ils ne vous représentaient, avec le plus profond respect les raisons qui s'opposent à des prétentions qui ne blesse pas moins la dignité de la nation et votre couronne que les prérogatives de la noblesse française. Ils se flattent qu'elles toucheront Votre Majesté, et que sa bonté ne lui permettra pas de souscrire à une demande dont l'effet ne pourrait que mortifier un corps qui a toujours été le plus ferme soutien de la monarchie, et qui n'a cessé de prodiguer son sang et sa fortune pour en augmenter la gloire et la splendeur.
Il n'y a point d'honneur, Sire, dont la noblesse française soit plus jalouse que d'approcher de ses rois, et elle croit défendre le plus précieux de ses avantages en défendant le rang qu'elle tient auprès de Votre Majesté. Attachée au trône dès le commencement de la monarchie, elle n'en a jamais été séparée par qui que ce soit : c'est un ordre que les Rois vos prédécesseurs ont toujours maintenu ; et lorsque François Ier, pour faire honneur au duc d'Albanie, frère du roi d'Ecosse, qui était en France, le fit placer entre un prince du sang et un pair du royaume, il crut devoir déclarer que c'était pour cette fois seulement, en ses cours et conseils, les premiers et les plus prochains de sa personne. (Il recommanda d'en faire registre.)
Les puînés de Clèves, dont la maison précédait en Allemagne celle de Lorraine ; ceux de Luxembourg, qui comptaient quatre empereurs et six rois de Bohême parmi leurs ancêtres ; ceux de Savoie, issus d'une maison qui régnait souverainement depuis cinq cents ans, se sont conformés à l'ordre ancien du royaume ; ils n'y ont pris d'autres titres que ceux qui sont communs à toute la noblesse, et se sont honorés de marcher au rang des comtés, duchés et pairies qu'ils y ont obtenus.
La maison de Lorraine elle-même a tellement reconnu cet ordre qu'elle a voulu se prévaloir de dignités de l'état pour précéder les princes du sang.
C'est cet ordre ancien que Charles IX voulut être suivi à la cérémonie de son mariage, après la discussion la plus scrupuleuse qu'il en fit faire dans un conseil tenu à Soissons en 1570. Il y régla les rangs par l'ancienneté des duchés, comme avaient fait tous les Rois dans les temps passés, et répondit au duc de Nevers, de la maison de Mantoue, qui s'en plaignait, qu'il voulait suivre ce qu'il avait trouvé, et qu'il ne pouvait faillir en le faisant.
Quel titre, Sire, pourraient vous présenter Messieurs de Lorraine qui pût changer un ordre si respectable, qui pût donner le droit de se placer entre Votre Majesté et les grands du royaume, et d'abaisser au-dessous d'eux les premières dignités de la nation, les dignités dont ils se sont eux-mêmes servis afin de pouvoir décorer, élever de plus en plus et finir par exalter leur maison ; dignités par lesquelles ils ont cru devoir précéder les princes de votre sang, qu'ils ne pouvaient incontestablement précéder par leur naissance ? S'ils ont joui de quelques préférences momentanées sur les grands du royaume, c'est dans les temps où la faveur et les circonstances leur assuraient le succès de toutes leurs prétentions : doivent-ils les faire revivre dans des temps où la sagesse et la justice de Votre Majesté font le bonheur de ses sujets et la gloire de son règne ?
La grandeur des premières dignités dans tout état marque celle des nations, et la grandeur des nations fait celle de leurs rois. De là vient, Sire, qu'aucun de nos voisins ne souffre que des étrangers, même souverains, aient chez eux la préséance sur les grands de l'État. Aucune duchesse, en Angleterre, ne voulut céder le pas, en 1670, à la duchesse de Modène, qui y menait sa fille (depuis reine d'Angleterre) pour épouser le duc d'York ; les grands d'Espagne n'ont jamais fait aux ducs de Lorraine d'autre honneur que celui de les laisser asseoir à l'extrémité du même banc qu'eux ; MM. de Lorraine n'ont pu obtenir à la cour de Vienne même, où règne le chef de leur maison, d'autres honneurs que ceux qui sont communs à tous les princes de l'Empire.
Les grands de votre royaume, Sire, en sont point inférieurs à ceux de tant d'états, qui regarderaient comme une offense pour eux et pour leur nation la prétention de les précéder chez eux. Ce serait douter de la prééminence de la France en Europe que de douter de la prééminence de ceux qui, aux termes de vos ancêtres, font partie de son honneur et du propre honneur de ses rois.
La noblesse française ne le cède et ne doit céder, Sire, à aucune noblesse du monde, à raison de son ancienneté, par l'éclat de ses actions, et par les grands hommes qu'elle a produits. Elle compte parmi ses ancêtres des rois, des empereurs et d'autres souverains ; elle y compte des maisons à qui leurs alliances ont ouvert des droits sur plusieurs trônes de l'Europe ; elle ne connaît en un mot au-dessus d'elle le sang de ses rois, parce qu'elle ne voit que dans ce sang auguste ceux qui, par les lois de la monarchie, peuvent devenir ses souverains.
Ce sentiment qui fait le caractère propre de la nation, et qui, dans la nation, distingue surtout votre noblesse ; cet amour inaltérable pour nos rois, que les vertus de Votre Majesté ont encore augmenté, ne nous rend que plus sensibles aux moindres atteintes que l'on peut donner au rang que nous avons toujours tenu près du trône ; mais, Sire, votre bonté et votre justice nous rassurent.
Si Votre Majesté a bien voulu donner des preuves de sa complaisance dans une occasion qui fait le bonheur et l'espérance de toute la France, elle ne voudra pas qu'un si beau jour soit une époque de douleur pour la noblesse française, et daignera dissiper ses craintes en déclarant que son intention est de conserver l'ordre établi dans le royaume depuis le commencement de la monarchie, maintenu par tous ses prédécesseurs, et dont elle a voulu elle-même, en 1748, garantir la durée, en consacrant par ses propres édits les anciennes constitutions de cet état, qui ont donné aux premiers officiers de la couronne, auprès des rois, le rang immédiat après les princes du sang.
Elle comblera de reconnaissance les plus fidèles et les plus soumis de ses sujets, ainsi qu'une noblesse qui n'est pas moins prête que ses ancêtres à sacrifier sa vie et ses biens pour la défense de sa patrie et la gloire de votre couronne.
A Paris, le 7 mai 1770, etc.
Le Roi répondit à peu près en ces termes à M. l'Évêque de Noyon :
La danse, aux bals de ma cour, est une chose qui ne saurait tirer à conséquence, attendu que le choix des danseurs et des danseuses n'y dépend que de ma volonté. Je ne veux rien changer à ce qui s'y pratique habituellement ; mais, si je voulais marquer quelque distinction sans conséquence à Mademoiselle de Lorraine à l'occasion du mariage de mon petit-fils avec une autre princesse de Lorraine, archiduchesse d'Autriche, il me semble que personne ne saurait en être blessé ni surpris. Je compte sur la soumission de la noblesse de mon royaume, et surtout dans une circonstance où je désire, où je compte fêter une alliance qui fera, j'espère, et n'en doutons pas, le bonheur de ma famille et la félicité de vos enfants.
Cette réponse du Roi ne satisfit aucunement la majorité des réclamants, qui complotèrent de ne pas aller au bal de la cour. La plupart d'entre eux n'étaient pas étoffe à s'y trouver invités ; mais ils ne s'en donnèrent pas moins la belle apparence du refus. La princesse Charlotte dansa son menuet immédiatement après LL. AA. SS., et le marquis de Villette en fut profondément courroucé. Voilà tout ce qui résulta de la susceptibilité de ces gentilshommes et de leur insurrection contre la croix de Lorraine.
Je me rappelle que M. de Lafayette était dans les plus irrités, et qu'il vint m'entreprendre et m'attaquer un jour, à l'hôtel de Tessé, sur la tiédeur que je paraissais mettre à cette grande affaire.
— Me prenez-vous pour une grue ? lui dis-je. Apprenez que si j'avais des réclamations à faire signer à mon fils contre les princes lorrains, ce ne serait pas à l'occasion d'un bal, mais à propos des promotions et des processions de l'ordre du Saint-Esprit, où nous les voyons précéder nos maris, nos frères et nos enfants, sans en rien dire.
On leur donne à 25 ans le cordon bleu que les seigneurs français ne peuvent obtenir avant 35 ans, aux termes des statuts ; nous les voyons mettre leur chapeau lorsque le roi se couvre ; et nous ne pensons pas à réclamer contre ces prérogatives. Vous nous dites curieusement que MM. de Lorraine les ont obtenues dans un temps où leurs prétentions ont été favorisées par les circonstances, mais on pourrait faire ainsi l'histoire de toutes les prérogatives ; et, du reste, j'aimerais mieux faire cause commune avec cette maison-là qu'avec des bourgeois parvenus, comme il y en a dans vos signataires. Laissez-moi donc tranquille avec la Princesse Charlotte et son menuet.
( Marquise de Créquy )
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On avait appris ou cru savoir que c'était Mlle de Lorraine, fille de Mme de Brionne et sœur de MM. de Lambesc et de Vaudémont, c'est-à-dire princesse du même sang que l'archiduchesse-dauphine, qui devait danser le menuet immédiatement après les princesses de la famille et du sang royal.
C'était une distinction qui n'aurait eu rien d'intolérable ; et, par ma foi ! les princes et princesses de Lorraine en possédaient bien d'autres, auxquelles on avait eu le temps de s'accoutumer ! On ajoutait que le roi n'avait accordé ceci qu'à la sollicitation du comte de Mercy, l'ambassadeur impérial, lequel en aurait fait la demande formelle au nom de l'impératrice-reine, ce qui n'avait pas plus de vraisemblance que de vérité. Voilà MM. les ducs et pairs en fermentation de résistance, en projet de révolte, pour ainsi dire, et les voilà qui s'adjoignent une quarantaine de gentilshommes opposants, parmi lesquels on voit figurer M. de la Vaubalière et M. de Villette, afin de représenter l'ancienne noblesse, apparemment.
Le premier pair, archevêque et duc de Reims, ne voulut pas entrer dans un pareil tripotage ; mais on s'assembla chez M. de Broglie, évêque de Noyon, et comte et pair de France en cette qualité ; enfin M. de Clermont d'Amboise y rédigea la pièce suivante (il y paraît à la beauté du style) ; et M. de Noyon s'empressa d'aller présenter ce factum à Sa Majesté. C'était une dissertation sur un menuet : voyez donc l'heureux à-propos et la belle convenance de la faire présenter par un évêque ! Enfin voici le chef-d'œuvre en question, que votre père ne voulut pas signer.
Je ne me serais jamais consolée de voir son nom sur une telle pancarte, avec un pareil entourage.
Sire
Les grands et la noblesse du royaume, honorés, dans tous les temps, de la protection particulière de Votre Majesté et des rois ses prédécesseurs, déposent avec confiance au pied du trône les justes alarmes qu'ils ont conçues. Le bruit s'est répandu que Votre Majesté était sollicitée d'accorder un rang à la maison de Lorraine immédiatement après les princes de votre sang royal, et qu'il avait été réglé qu'au bal paré, qui doit avoir lieu pour le mariage de Monsieur le dauphin, Mademoiselle de Lorraine danserait avant toutes les dames de la cour : honneur si distingué que, dans votre auguste maison, il n'est pas même accordé aux branches aînées sur les branches cadettes, et qu'il ne l'a jamais été qu'aux filles du sang royal sur les femmes de qualité.
Ils croient, Sire, qu'ils manqueraient à ce qu'ils doivent à leur naissance, s'ils ne vous témoignaient combien une distinction aussi humiliante pour eux qu'elle est nouvelle ajouterait à la douleur de perdre l'avantage qu'ils ont toujours eu de n'être séparés de Votre Majesté et de sa famille royale par aucun rang intermédiaire, et s'ils ne vous représentaient, avec le plus profond respect les raisons qui s'opposent à des prétentions qui ne blesse pas moins la dignité de la nation et votre couronne que les prérogatives de la noblesse française. Ils se flattent qu'elles toucheront Votre Majesté, et que sa bonté ne lui permettra pas de souscrire à une demande dont l'effet ne pourrait que mortifier un corps qui a toujours été le plus ferme soutien de la monarchie, et qui n'a cessé de prodiguer son sang et sa fortune pour en augmenter la gloire et la splendeur.
Il n'y a point d'honneur, Sire, dont la noblesse française soit plus jalouse que d'approcher de ses rois, et elle croit défendre le plus précieux de ses avantages en défendant le rang qu'elle tient auprès de Votre Majesté. Attachée au trône dès le commencement de la monarchie, elle n'en a jamais été séparée par qui que ce soit : c'est un ordre que les Rois vos prédécesseurs ont toujours maintenu ; et lorsque François Ier, pour faire honneur au duc d'Albanie, frère du roi d'Ecosse, qui était en France, le fit placer entre un prince du sang et un pair du royaume, il crut devoir déclarer que c'était pour cette fois seulement, en ses cours et conseils, les premiers et les plus prochains de sa personne. (Il recommanda d'en faire registre.)
Les puînés de Clèves, dont la maison précédait en Allemagne celle de Lorraine ; ceux de Luxembourg, qui comptaient quatre empereurs et six rois de Bohême parmi leurs ancêtres ; ceux de Savoie, issus d'une maison qui régnait souverainement depuis cinq cents ans, se sont conformés à l'ordre ancien du royaume ; ils n'y ont pris d'autres titres que ceux qui sont communs à toute la noblesse, et se sont honorés de marcher au rang des comtés, duchés et pairies qu'ils y ont obtenus.
La maison de Lorraine elle-même a tellement reconnu cet ordre qu'elle a voulu se prévaloir de dignités de l'état pour précéder les princes du sang.
C'est cet ordre ancien que Charles IX voulut être suivi à la cérémonie de son mariage, après la discussion la plus scrupuleuse qu'il en fit faire dans un conseil tenu à Soissons en 1570. Il y régla les rangs par l'ancienneté des duchés, comme avaient fait tous les Rois dans les temps passés, et répondit au duc de Nevers, de la maison de Mantoue, qui s'en plaignait, qu'il voulait suivre ce qu'il avait trouvé, et qu'il ne pouvait faillir en le faisant.
Quel titre, Sire, pourraient vous présenter Messieurs de Lorraine qui pût changer un ordre si respectable, qui pût donner le droit de se placer entre Votre Majesté et les grands du royaume, et d'abaisser au-dessous d'eux les premières dignités de la nation, les dignités dont ils se sont eux-mêmes servis afin de pouvoir décorer, élever de plus en plus et finir par exalter leur maison ; dignités par lesquelles ils ont cru devoir précéder les princes de votre sang, qu'ils ne pouvaient incontestablement précéder par leur naissance ? S'ils ont joui de quelques préférences momentanées sur les grands du royaume, c'est dans les temps où la faveur et les circonstances leur assuraient le succès de toutes leurs prétentions : doivent-ils les faire revivre dans des temps où la sagesse et la justice de Votre Majesté font le bonheur de ses sujets et la gloire de son règne ?
La grandeur des premières dignités dans tout état marque celle des nations, et la grandeur des nations fait celle de leurs rois. De là vient, Sire, qu'aucun de nos voisins ne souffre que des étrangers, même souverains, aient chez eux la préséance sur les grands de l'État. Aucune duchesse, en Angleterre, ne voulut céder le pas, en 1670, à la duchesse de Modène, qui y menait sa fille (depuis reine d'Angleterre) pour épouser le duc d'York ; les grands d'Espagne n'ont jamais fait aux ducs de Lorraine d'autre honneur que celui de les laisser asseoir à l'extrémité du même banc qu'eux ; MM. de Lorraine n'ont pu obtenir à la cour de Vienne même, où règne le chef de leur maison, d'autres honneurs que ceux qui sont communs à tous les princes de l'Empire.
Les grands de votre royaume, Sire, en sont point inférieurs à ceux de tant d'états, qui regarderaient comme une offense pour eux et pour leur nation la prétention de les précéder chez eux. Ce serait douter de la prééminence de la France en Europe que de douter de la prééminence de ceux qui, aux termes de vos ancêtres, font partie de son honneur et du propre honneur de ses rois.
La noblesse française ne le cède et ne doit céder, Sire, à aucune noblesse du monde, à raison de son ancienneté, par l'éclat de ses actions, et par les grands hommes qu'elle a produits. Elle compte parmi ses ancêtres des rois, des empereurs et d'autres souverains ; elle y compte des maisons à qui leurs alliances ont ouvert des droits sur plusieurs trônes de l'Europe ; elle ne connaît en un mot au-dessus d'elle le sang de ses rois, parce qu'elle ne voit que dans ce sang auguste ceux qui, par les lois de la monarchie, peuvent devenir ses souverains.
Ce sentiment qui fait le caractère propre de la nation, et qui, dans la nation, distingue surtout votre noblesse ; cet amour inaltérable pour nos rois, que les vertus de Votre Majesté ont encore augmenté, ne nous rend que plus sensibles aux moindres atteintes que l'on peut donner au rang que nous avons toujours tenu près du trône ; mais, Sire, votre bonté et votre justice nous rassurent.
Si Votre Majesté a bien voulu donner des preuves de sa complaisance dans une occasion qui fait le bonheur et l'espérance de toute la France, elle ne voudra pas qu'un si beau jour soit une époque de douleur pour la noblesse française, et daignera dissiper ses craintes en déclarant que son intention est de conserver l'ordre établi dans le royaume depuis le commencement de la monarchie, maintenu par tous ses prédécesseurs, et dont elle a voulu elle-même, en 1748, garantir la durée, en consacrant par ses propres édits les anciennes constitutions de cet état, qui ont donné aux premiers officiers de la couronne, auprès des rois, le rang immédiat après les princes du sang.
Elle comblera de reconnaissance les plus fidèles et les plus soumis de ses sujets, ainsi qu'une noblesse qui n'est pas moins prête que ses ancêtres à sacrifier sa vie et ses biens pour la défense de sa patrie et la gloire de votre couronne.
A Paris, le 7 mai 1770, etc.
Le Roi répondit à peu près en ces termes à M. l'Évêque de Noyon :
La danse, aux bals de ma cour, est une chose qui ne saurait tirer à conséquence, attendu que le choix des danseurs et des danseuses n'y dépend que de ma volonté. Je ne veux rien changer à ce qui s'y pratique habituellement ; mais, si je voulais marquer quelque distinction sans conséquence à Mademoiselle de Lorraine à l'occasion du mariage de mon petit-fils avec une autre princesse de Lorraine, archiduchesse d'Autriche, il me semble que personne ne saurait en être blessé ni surpris. Je compte sur la soumission de la noblesse de mon royaume, et surtout dans une circonstance où je désire, où je compte fêter une alliance qui fera, j'espère, et n'en doutons pas, le bonheur de ma famille et la félicité de vos enfants.
Cette réponse du Roi ne satisfit aucunement la majorité des réclamants, qui complotèrent de ne pas aller au bal de la cour. La plupart d'entre eux n'étaient pas étoffe à s'y trouver invités ; mais ils ne s'en donnèrent pas moins la belle apparence du refus. La princesse Charlotte dansa son menuet immédiatement après LL. AA. SS., et le marquis de Villette en fut profondément courroucé. Voilà tout ce qui résulta de la susceptibilité de ces gentilshommes et de leur insurrection contre la croix de Lorraine.
Je me rappelle que M. de Lafayette était dans les plus irrités, et qu'il vint m'entreprendre et m'attaquer un jour, à l'hôtel de Tessé, sur la tiédeur que je paraissais mettre à cette grande affaire.
— Me prenez-vous pour une grue ? lui dis-je. Apprenez que si j'avais des réclamations à faire signer à mon fils contre les princes lorrains, ce ne serait pas à l'occasion d'un bal, mais à propos des promotions et des processions de l'ordre du Saint-Esprit, où nous les voyons précéder nos maris, nos frères et nos enfants, sans en rien dire.
On leur donne à 25 ans le cordon bleu que les seigneurs français ne peuvent obtenir avant 35 ans, aux termes des statuts ; nous les voyons mettre leur chapeau lorsque le roi se couvre ; et nous ne pensons pas à réclamer contre ces prérogatives. Vous nous dites curieusement que MM. de Lorraine les ont obtenues dans un temps où leurs prétentions ont été favorisées par les circonstances, mais on pourrait faire ainsi l'histoire de toutes les prérogatives ; et, du reste, j'aimerais mieux faire cause commune avec cette maison-là qu'avec des bourgeois parvenus, comme il y en a dans vos signataires. Laissez-moi donc tranquille avec la Princesse Charlotte et son menuet.
( Marquise de Créquy )
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Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
La comtesse Raine Spencer, fille de Barbara Cartland, et marâtre de Lady Di, possédait dans ses collection un portrait de Mlle de Lorraine par Vigée-Lebrun :
http://www.christies.com/lotfinder/ZoomImage.aspx?image=http://www.christies.com/lotfinderimages/D60898/d6089874&intObjectID=6089874&lid=1
Ces collections passent en vente ce jeudi chez Christie's Londres :
http://www.christies.com/SaleLanding/index.aspx?intsaleid=26984&lid=1&saletitle=
http://www.christies.com/lotfinder/ZoomImage.aspx?image=http://www.christies.com/lotfinderimages/D60898/d6089874&intObjectID=6089874&lid=1
Ces collections passent en vente ce jeudi chez Christie's Londres :
http://www.christies.com/SaleLanding/index.aspx?intsaleid=26984&lid=1&saletitle=
Gouverneur Morris- Messages : 11796
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Le factum est plutôt bien écrit.
Je doute fortement de la véracité des commentaires de la pseudo-marquise ensuite, sur quelques prérogatives des Lorraine, telles qu'elle/il les décrit.
Je doute fortement de la véracité des commentaires de la pseudo-marquise ensuite, sur quelques prérogatives des Lorraine, telles qu'elle/il les décrit.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 33
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Tu ne pardonneras donc jamais à la marquise ses petites exagérations !
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 33
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Ordre des menuets à ce fameux bal :
Dauphin et dauphine ( puis 15 autres couples)
Provence et Gros madame
Artois et duchesse de Chartres
Chartres et duchesse de Bourbon
Condé et madame de Lamballe
Duc de Bourbon et mademoiselle de Lorraine
Duc de Coigny et princesse de Bouillon
Vicomte de Belzunce et comtesse Jules de Polignac
Lambesc et madame de Duras dansent une pantomine.
Contredanses à 8 avec le dauphin mais sans M-A qui ne connait pas les pas .
Elle danse une allemande avec le duc de Chartres qui ignore la contredanse en carré.
Dauphin et dauphine ( puis 15 autres couples)
Provence et Gros madame
Artois et duchesse de Chartres
Chartres et duchesse de Bourbon
Condé et madame de Lamballe
Duc de Bourbon et mademoiselle de Lorraine
Duc de Coigny et princesse de Bouillon
Vicomte de Belzunce et comtesse Jules de Polignac
Lambesc et madame de Duras dansent une pantomine.
Contredanses à 8 avec le dauphin mais sans M-A qui ne connait pas les pas .
Elle danse une allemande avec le duc de Chartres qui ignore la contredanse en carré.
Gouverneur Morris- Messages : 11796
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
" - Ah les menuets sont ma danse, et je veux que vous me les voyiez danser."
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
C'est de qui ?
Gouverneur Morris- Messages : 11796
Date d'inscription : 21/12/2013
Gouverneur Morris- Messages : 11796
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
.
Il paraît que, de colère, Louis XV jeta son chapeau par terre et que les larmes lui montèrent aux yeux .
Il paraît que, de colère, Louis XV jeta son chapeau par terre et que les larmes lui montèrent aux yeux .
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Cette mytho de Créqui a écrit:le marquis de Villette en fut profondément courroucé
S'agit-il de celui de Voltaire, effectivement noble de fraîche date ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_de_Villette
Gouverneur Morris- Messages : 11796
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Non, le texte indique que le marquis de Villette était de ceux qui représentaient l'ancienne noblesse.
Je ne pense pas non plus qu'il s'agisse du marquis de Villette, le petit-petit neveu de Mme de Maintenon. Je ne vois pas qui c'est.
Je ne pense pas non plus qu'il s'agisse du marquis de Villette, le petit-petit neveu de Mme de Maintenon. Je ne vois pas qui c'est.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 33
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
monsieur la marquise de Créquy a écrit:les voilà qui s'adjoignent une quarantaine de gentilshommes opposants, parmi lesquels on voit figurer M. de la Vaubalière et M. de Villette, afin de représenter l'ancienne noblesse, apparemment.
La Vaubalière n'existe pas, mais La Vaupalière oui, ce doit être une coquille. Les Maignart de La Vaupalière furent annoblis en 1470. Cette cabale du menuet ne devait guère avoir le choix pour prendre une pareille "ancienne noblesse".
De même pour les Le Valois de Villette, qui ne sont pas le meilleur exemple de noblesse chevaleresque, puisqu'issus de riches marchands de Caen du XVIe (quoique honorablement illustrés par la suite).
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 33
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Cher Lucius, le texte dit également :
On peut comprendre que Villette n’était pas d'étoffe à s'y trouver invité, non ?
La Créqui a écrit:La plupart d'entre eux n'étaient pas étoffe à s'y trouver invités ; mais ils ne s'en donnèrent pas moins la belle apparence du refus. La princesse Charlotte dansa son menuet immédiatement après LL. AA. SS., et le marquis de Villette en fut profondément courroucé.
On peut comprendre que Villette n’était pas d'étoffe à s'y trouver invité, non ?
Gouverneur Morris- Messages : 11796
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Il est clair que le marquis de Villette de voltaire n'était ni d'étoffe à s'y trouver, encore moins intégrable à l'ancienne noblesse.
Je me demande s'il n'y a pas confusion entre les (au moins) deux marquis de Villette que nous connaissons pour la période !
Je me demande s'il n'y a pas confusion entre les (au moins) deux marquis de Villette que nous connaissons pour la période !
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 33
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Je vois bien le marquis de Villette de Voltaire, mais à quel autre penses-tu ?
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le scandale du menuet de Mlle de Lorraine ...
Lucius a écrit:marquis de Villette, le petit-petit neveu de Mme de Maintenon.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 33
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