Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
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Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Suite à plusieurs discussions, il semblerait que certains d'entre vous sont curieux de comprendre les structures et le fonctionnement de l'Eglise catholique française aux XVIIe et XVIIIe siècle. Je ne me pencherai pas sur les protestants, que je connais trop mal.
Il ne s'agit pas de faire un exposé général, car cela ressemblerait plus à un cycle de conférence ou à un roman fleuve, étant donné l'ampleur du sujet.
Je m'appuie surtout sur les ouvrages de recherche historique récents, dont une partie est disponible sur le site Persée.
Citons surtout :
Emile Mâle, L'Art religieux après le Concile de Trente, étude sur l'iconographie de la fin du XVIe, du XVIIe et du XVIIIe siècles en Italie, en France, en Espagne et en Flandre, Colin, Paris, 1932.
Catherine Marie, De la cause de Dieu à la cause de la Nation, le Jansénisme au XVIIIe siècle, Gallimard, Paris, 1998.
Ségolène de Dainville-barbiche, Devenir curé à Paris, Institutions et carrières ecclésiastiques (1695-1789), PUF, Paris, 2005.
Philippe Martin, Histoire de la Messe, le théâtre du divin, CNRS édition, Paris, 2010.
ainsi que divers ouvrages monographiques et ma fréquentation des sources archivistiques.
Je souhaite surtout vous proposer un sujet où vous puissiez poser vos questions, ou bien trouver facilement les réponses, qui sont jusqu'à présent dispersées par le forum.
Il ne s'agit pas de faire un exposé général, car cela ressemblerait plus à un cycle de conférence ou à un roman fleuve, étant donné l'ampleur du sujet.
Je m'appuie surtout sur les ouvrages de recherche historique récents, dont une partie est disponible sur le site Persée.
Citons surtout :
Emile Mâle, L'Art religieux après le Concile de Trente, étude sur l'iconographie de la fin du XVIe, du XVIIe et du XVIIIe siècles en Italie, en France, en Espagne et en Flandre, Colin, Paris, 1932.
Catherine Marie, De la cause de Dieu à la cause de la Nation, le Jansénisme au XVIIIe siècle, Gallimard, Paris, 1998.
Ségolène de Dainville-barbiche, Devenir curé à Paris, Institutions et carrières ecclésiastiques (1695-1789), PUF, Paris, 2005.
Philippe Martin, Histoire de la Messe, le théâtre du divin, CNRS édition, Paris, 2010.
ainsi que divers ouvrages monographiques et ma fréquentation des sources archivistiques.
Je souhaite surtout vous proposer un sujet où vous puissiez poser vos questions, ou bien trouver facilement les réponses, qui sont jusqu'à présent dispersées par le forum.
Dernière édition par Lucius le Mar 12 Sep 2017, 22:34, édité 1 fois
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Merci, mon cher petit Lulu, j'ai beaucoup ( si ce n'est tout ) à apprendre !
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55300
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Parmi les questions récurrentes, celles du nom des édifices de culte.
Un lieu de culte ne se définit par aucun élément matériel visible en son sein. Son usage, et par conséquent son nom dépend de ceux qui l'occupent.
Depuis l'époque carolingienne, l'Europe occidentale est couverte par un réseau de paroisses. Elles constituent la communauté des fidèles sur une base géographique. Cette communauté se réunit dans une église paroissiale.
Ces communautés sont organisées, supervisées (sens étymologique) par un évêque, dont l'autorité s'étend sur un diocèse. L'église dans laquelle se trouve son siège est une cathédrale. Elle n'est pas paroissiale elle même (jusqu'au concile de Vatican II en tout cas).
Certains sièges épiscopaux ont une autorité particulières. Les diocèses sont réunis entre eux dans une province, et l'un d'entre eux est le supérieur des autre, le métropolitain, ce qu'on appelle aussi un archevêque. Noté qu'il est lui même évêque d'un territoire donné, c'est donc un primus inter pares, et pas un échelon supérieur. Au sein d'un pays se trouve un siège exerçant une autorité plus grande encore sur les autre évêques, le primat (en France, c'est le siège de Lyon). Son église peut donc être qualifiée de primatiale. Enfin, au sein de tous ces évêques de la communion catholique, l'évêque de Rome, comme successeur de Pierre, dispose de l'autorité suprême.
(Ce dernier point sera cependant beaucoup discuté en France et en Hollande au XVIIIe siècle.)
Certains hauts lieux de pèlerinage et de dévotion spécifique peuvent aussi être qualifiés de basilique soit par un usage très ancien (Saint Denis) ou par distinction pontificale. On en trouve très peu en France avant le XIXe siècle.
A ce maillage assez simple se superpose le monde monastique, dit régulier.
Les cloîtrés se réunissent en monastère, généralement à la campagne (mais parfois rattrapées par l'urbanisation). Ils peuvent avoir deux statuts. Le premier est celui d'abbaye, qui exercent une certaine autorité, dont l'église est une abbatiale. Le second est celui de prieuré, qui est affiliée à une abbaye, et dont l'église est une prieurale.
Les moines mendiants sont réunis en couvents, le plus souvent en ville. Leur église est conventuelle.
Les ordres de chanoines réguliers se réunissent en collège de chanoines, ils célèbrent dans une collégiale. (à ne pas confondre avec les chanoines qui entourent les évêques, qui ne sont pas réguliers, et qui se réunissent en chapitre !! )
D'autre part, par dispense spéciale de Rome, un particulier peut obtenir le droit de disposer d'un lieu de culte privé. On parle généralement de chapelle castrale lorsqu'elle est liée à un château.
Le terme de chapelle est ambiguë car il s'applique aussi à des recoins d'église où se trouve un autel, ou encore à des lieux de cultes pour des communautés spéciales, soit des paroissiens trop loin de leur paroissiale, soit des compagnies de clercs (séminaires, congrégations ...).
Naturellement, il s'agit là d'un exposé idéal. Mais la réalité historique peut superposer à un édifice plusieurs affectations successives !
Un lieu de culte ne se définit par aucun élément matériel visible en son sein. Son usage, et par conséquent son nom dépend de ceux qui l'occupent.
Depuis l'époque carolingienne, l'Europe occidentale est couverte par un réseau de paroisses. Elles constituent la communauté des fidèles sur une base géographique. Cette communauté se réunit dans une église paroissiale.
Ces communautés sont organisées, supervisées (sens étymologique) par un évêque, dont l'autorité s'étend sur un diocèse. L'église dans laquelle se trouve son siège est une cathédrale. Elle n'est pas paroissiale elle même (jusqu'au concile de Vatican II en tout cas).
Certains sièges épiscopaux ont une autorité particulières. Les diocèses sont réunis entre eux dans une province, et l'un d'entre eux est le supérieur des autre, le métropolitain, ce qu'on appelle aussi un archevêque. Noté qu'il est lui même évêque d'un territoire donné, c'est donc un primus inter pares, et pas un échelon supérieur. Au sein d'un pays se trouve un siège exerçant une autorité plus grande encore sur les autre évêques, le primat (en France, c'est le siège de Lyon). Son église peut donc être qualifiée de primatiale. Enfin, au sein de tous ces évêques de la communion catholique, l'évêque de Rome, comme successeur de Pierre, dispose de l'autorité suprême.
(Ce dernier point sera cependant beaucoup discuté en France et en Hollande au XVIIIe siècle.)
Certains hauts lieux de pèlerinage et de dévotion spécifique peuvent aussi être qualifiés de basilique soit par un usage très ancien (Saint Denis) ou par distinction pontificale. On en trouve très peu en France avant le XIXe siècle.
A ce maillage assez simple se superpose le monde monastique, dit régulier.
Les cloîtrés se réunissent en monastère, généralement à la campagne (mais parfois rattrapées par l'urbanisation). Ils peuvent avoir deux statuts. Le premier est celui d'abbaye, qui exercent une certaine autorité, dont l'église est une abbatiale. Le second est celui de prieuré, qui est affiliée à une abbaye, et dont l'église est une prieurale.
Les moines mendiants sont réunis en couvents, le plus souvent en ville. Leur église est conventuelle.
Les ordres de chanoines réguliers se réunissent en collège de chanoines, ils célèbrent dans une collégiale. (à ne pas confondre avec les chanoines qui entourent les évêques, qui ne sont pas réguliers, et qui se réunissent en chapitre !! )
D'autre part, par dispense spéciale de Rome, un particulier peut obtenir le droit de disposer d'un lieu de culte privé. On parle généralement de chapelle castrale lorsqu'elle est liée à un château.
Le terme de chapelle est ambiguë car il s'applique aussi à des recoins d'église où se trouve un autel, ou encore à des lieux de cultes pour des communautés spéciales, soit des paroissiens trop loin de leur paroissiale, soit des compagnies de clercs (séminaires, congrégations ...).
Naturellement, il s'agit là d'un exposé idéal. Mais la réalité historique peut superposer à un édifice plusieurs affectations successives !
Dernière édition par Lucius le Mer 13 Déc 2017, 17:56, édité 2 fois
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Voici un exposé parfaitement clair et très instructif .
Mon ignorance t'étonnera sans doute, mon petit Lulu, mais toutes ces explications ne sont pas du tout superflues pour moi. Je m'emmêlerai moins les pinceaux entre évêques et archevêques désormais . Quant au primat ... je découvre son existence !
Je te remercie . La puissance du Clergé sous l'Ancien Régime était éminemment politique . Nous sommes donc dans le vif du sujet.
Mon ignorance t'étonnera sans doute, mon petit Lulu, mais toutes ces explications ne sont pas du tout superflues pour moi. Je m'emmêlerai moins les pinceaux entre évêques et archevêques désormais . Quant au primat ... je découvre son existence !
Je te remercie . La puissance du Clergé sous l'Ancien Régime était éminemment politique . Nous sommes donc dans le vif du sujet.
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Mme de Sabran- Messages : 55300
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
La période qui nous occupe est profondément imprégnée par ce que l'on appelle la contre-réforme, la réforme-catholique ou tridentine.
Face aux crises, l'église occidentale s'est réformée à plusieurs reprises, localement ou globalement. Réforme carolingienne, réforme grégorienne et ensuite réforme tridentine se succèdent.
Un premier concile de réforme se réunit au tout début du XVIe siècle, le cinquième concile de Latran, qui échoue. C'est de cet échec que naît la remise en cause dont la figure éminente mais pas unique sera Luther.
Cette volonté de réforme est donc présente au sein du clergé lui même. Aussi les critiques de Luther sont prises au sérieux et plusieurs seront intégrées dans les décisions du laborieux Concile de Trente. Ces points sont surtout disciplinaires. Au contraire, d'autres points plutôt dogmatiques seront réaffirmés comme faisant parti de la foi héritée des apôtres et des pères de l'Eglise.
Ce concile fut l'occasion de discussions autour de nombreux points, et les options prises à cette occasion seront fondamentales pour comprendre le cheminement que suivra l'église romaine par la suite.
(le prêtre doit il être d'abord un pasteur ou un célébrant ? certains sacrement peuvent-ils être dispensés par des clercs non prêtres ? quelle place aux langues vulgaires dans la liturgie et l'enseignement ?)
Mais le contexte de crise dans lequel le concile se réunit et aboutit ( une certaine méfiance de la part de Charles Quint et de François Ier, dont il faut l'accord pour que les évêques de leur pays participent !) oblige celui-ci à revitaliser l'inquisition afin de s'assurer que ses décisions seront bien mises en place, et ne seront pas mises au placard.
La France refusera ce rôle de l'Inquisition, mais les décisions du Concile, finalement promulguées avec des restrictions, seront appliquées sous l'égide du pouvoir royal et des cours souveraines (Parlements). Ce fut aussi le cas en Allemagne, deux pays de concordats.
Le concile sera appliqué dans la lettre avec de nombreuses résistances de la part des états, et dans l'esprit avec moins de difficulté (c'est la floraison des saints et des grands réformateurs du XVIIe siècle).
Ainsi la liturgie de la messe (qui n'est qu'un point parmi d'autres) ne sera jamais véritablement appliquée partout en France, malgré une romanisation progressive au XIXe siècle des rites de Lyon et de Paris.
Le XXe siècle achèvera le travail à Paris, mais va rendre un peu de ses particularismes à Lyon !
La réforme tridentine est donc beaucoup plus une affaire d'état d'esprit que de mise en pratique liturgique ou canonique. La structure hiérarchique ne change pas, les diocèses refusent souvent d'appliquer toutes les décisions, souhaitant conserver leur particularisme locaux, même si des changements majeurs s'introduisent progressivement.
Face aux crises, l'église occidentale s'est réformée à plusieurs reprises, localement ou globalement. Réforme carolingienne, réforme grégorienne et ensuite réforme tridentine se succèdent.
Un premier concile de réforme se réunit au tout début du XVIe siècle, le cinquième concile de Latran, qui échoue. C'est de cet échec que naît la remise en cause dont la figure éminente mais pas unique sera Luther.
Cette volonté de réforme est donc présente au sein du clergé lui même. Aussi les critiques de Luther sont prises au sérieux et plusieurs seront intégrées dans les décisions du laborieux Concile de Trente. Ces points sont surtout disciplinaires. Au contraire, d'autres points plutôt dogmatiques seront réaffirmés comme faisant parti de la foi héritée des apôtres et des pères de l'Eglise.
Ce concile fut l'occasion de discussions autour de nombreux points, et les options prises à cette occasion seront fondamentales pour comprendre le cheminement que suivra l'église romaine par la suite.
(le prêtre doit il être d'abord un pasteur ou un célébrant ? certains sacrement peuvent-ils être dispensés par des clercs non prêtres ? quelle place aux langues vulgaires dans la liturgie et l'enseignement ?)
Mais le contexte de crise dans lequel le concile se réunit et aboutit ( une certaine méfiance de la part de Charles Quint et de François Ier, dont il faut l'accord pour que les évêques de leur pays participent !) oblige celui-ci à revitaliser l'inquisition afin de s'assurer que ses décisions seront bien mises en place, et ne seront pas mises au placard.
La France refusera ce rôle de l'Inquisition, mais les décisions du Concile, finalement promulguées avec des restrictions, seront appliquées sous l'égide du pouvoir royal et des cours souveraines (Parlements). Ce fut aussi le cas en Allemagne, deux pays de concordats.
Le concile sera appliqué dans la lettre avec de nombreuses résistances de la part des états, et dans l'esprit avec moins de difficulté (c'est la floraison des saints et des grands réformateurs du XVIIe siècle).
Ainsi la liturgie de la messe (qui n'est qu'un point parmi d'autres) ne sera jamais véritablement appliquée partout en France, malgré une romanisation progressive au XIXe siècle des rites de Lyon et de Paris.
Le XXe siècle achèvera le travail à Paris, mais va rendre un peu de ses particularismes à Lyon !
La réforme tridentine est donc beaucoup plus une affaire d'état d'esprit que de mise en pratique liturgique ou canonique. La structure hiérarchique ne change pas, les diocèses refusent souvent d'appliquer toutes les décisions, souhaitant conserver leur particularisme locaux, même si des changements majeurs s'introduisent progressivement.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Mme de Sabran a écrit: La puissance du Clergé sous l'Ancien Régime était éminemment politique . Nous sommes donc dans le vif du sujet.
Précisent, pour comprendre la place du clergé en France, il faut se tourner vers les relations entre l'Etat et l'Eglise.
Suite aux nombreuses querelles sur la puissance temporelle et spirituelle qui traversèrent le Moyen-Age, de nombreux état vont négocier un contrat avec Rome pour régler leurs relations, une Pragmatique Sanction pour le Saint Empire, un concordat en France.
Celui-ci fut signé à Bologne en 1516, et sera en vigueur jusqu'en 1790.
Il a pour but de faire cesser les premières contestations gallicanes, et de régler le point crucial au point de vue des états, qui est la nominations du haut clergé. Il s'agit certes de disposer du prodigieux patrimoine ecclésiastique, mais aussi de contrôler les nominations de personnalités dotées d'une grande influence.
Il est aussi question de la procédure pour l'application des décisions romaines en France, qui passent par l'approbation royale ou judiciaire.
Les prélats ; évêques, abbés, étaient auparavant plutôt élus. En ce qui concerne les cures, c'était beaucoup moins le cas.
A présent, il sont nommés par le Roi, et le souverain pontife vérifie la validité de la candidature avant de lui conférer l'investiture (l'autorité sur son diocèse) et de procéder au sacre, qui sont seuls valident pour être évêques.
Les états conquis par la suite (Provence, Artois, Flandre, Roussillon, France-Comté, Lorraine, Alsace) auront toujours des statuts ambivalents, progressivement rattachés à ces pratiques, mais avec beaucoup de réticences, et parfois même des indécisions juridiques.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Eh ben dis donc ! Vive la séparation de l'Eglise et de l'Etat ...
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55300
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Une fois nommé, le curé, l'abbé, l'évêque, sont immuables, ce qui leur confère une certaine indépendance (sur laquelle la constitution civile du clergé puis le concordat de Bonaparte chercheront à revenir).
La nomination des curés et les chose la plus complexe qui soit juridiquement.
Rappelons que la cure est une paroisse, le curé y exerce l'autorité sur ses vicaires, de nombreux autres prêtre, chapelains, clercs et laïques. Cette place peut devenir elle même assez prestigieuse dans les grandes villes.
Suite au concordat, la nomination à une cure dépend du collateur du bénéfice. Cette collation revient ordinairement à l'évêque. Mais les exemptions sont souvent aussi nombreuses !
Les autres collateurs peuvent être les fondateurs : patrons laïques (seigneurs) ou ecclésiastiques (chapitre, Université).
Mais afin de valoriser le niveau intellectuel des prêtres, François Ier instaura le système du mois de grade. Si un curé meurt en janvier, avril, juillet et octobre, sa place peut être remplie par le premier clerc gradué (diplômé) d'une "bonne université" qui présente les documents nécessaires, de son propre chef ou avec l'accord de l'ordinaire selon les mois !
Imaginez le bazar absolu que donnèrent les nombreuses contestations entre gradués pour obtenir ces cures, qui restaient ainsi sans curé officiel parfois un an ! Pendant ce temps elle était gérée par un vicaire.
La nomination des curés et les chose la plus complexe qui soit juridiquement.
Rappelons que la cure est une paroisse, le curé y exerce l'autorité sur ses vicaires, de nombreux autres prêtre, chapelains, clercs et laïques. Cette place peut devenir elle même assez prestigieuse dans les grandes villes.
Suite au concordat, la nomination à une cure dépend du collateur du bénéfice. Cette collation revient ordinairement à l'évêque. Mais les exemptions sont souvent aussi nombreuses !
Les autres collateurs peuvent être les fondateurs : patrons laïques (seigneurs) ou ecclésiastiques (chapitre, Université).
Mais afin de valoriser le niveau intellectuel des prêtres, François Ier instaura le système du mois de grade. Si un curé meurt en janvier, avril, juillet et octobre, sa place peut être remplie par le premier clerc gradué (diplômé) d'une "bonne université" qui présente les documents nécessaires, de son propre chef ou avec l'accord de l'ordinaire selon les mois !
Imaginez le bazar absolu que donnèrent les nombreuses contestations entre gradués pour obtenir ces cures, qui restaient ainsi sans curé officiel parfois un an ! Pendant ce temps elle était gérée par un vicaire.
Dernière édition par Lucius le Mar 12 Sep 2017, 18:22, édité 1 fois
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Mme de Sabran a écrit:Eh ben dis donc ! Vive la séparation de l'Eglise et de l'Etat ...
Lorsqu'un concordat est la mise sous tutelle du clergé par l'Etat, l'histoire peut montrer de nombreux athées anti-cléricaux très favorables ! Mais l'Eglise se laisse rarement faire.
La séparation est en effet beaucoup plus saine pour tout le monde, y compris pour l'Eglise.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
C'est génial, cela remet mes connaissances au clair.
J'ignorais ainsi cette passation de la cure assez originale. Ce devait être un beau b..., pardon, bazar.
J'ignorais ainsi cette passation de la cure assez originale. Ce devait être un beau b..., pardon, bazar.
Invité- Invité
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
La vie d'une paroisse est centrée sur trois points fondamentaux ;
La célébration de la liturgie (qui ne se réduit pas qu'à la messe) et des sacrements (baptêmes, communion, confirmation, mariage, confession, onction des malades pour ce qui concerne les laïcs), et l'organisation matérielle de la vie spirituelle des fidèles. La réforme tridentine va beaucoup travailler à la dignité du culte et à l'association des fidèles à la liturgie ainsi que favoriser leur piété (héritage de la devotio moderna médiévale).
L'enseignement, soit scolaire soit pastoral. Le concile de Trente va lancer un grand effort pour l'amélioration du niveau intellectuel du clergé qui prêche.
Les paroisses sont souvent en charge de l'éducation des enfants, ou la délègue à des congrégations spécialisées.
La charité, envers les pauvres et les malades. La encore, la paroisse peut s'en charger ou faire venir des congrégations et les assister.
A cela, le clergé ajoute parmi ses objectifs l'évangélisation, qui passe par les trois points précédents. Il s'agit certes de faire revenir les membres égarés de la Religion Prétendue Réformée, mais aussi de s'adresser à une parti des paroissiens, déchristianisés, oubliés, tant en campagne que dans les grandes villes.
La célébration de la liturgie (qui ne se réduit pas qu'à la messe) et des sacrements (baptêmes, communion, confirmation, mariage, confession, onction des malades pour ce qui concerne les laïcs), et l'organisation matérielle de la vie spirituelle des fidèles. La réforme tridentine va beaucoup travailler à la dignité du culte et à l'association des fidèles à la liturgie ainsi que favoriser leur piété (héritage de la devotio moderna médiévale).
L'enseignement, soit scolaire soit pastoral. Le concile de Trente va lancer un grand effort pour l'amélioration du niveau intellectuel du clergé qui prêche.
Les paroisses sont souvent en charge de l'éducation des enfants, ou la délègue à des congrégations spécialisées.
La charité, envers les pauvres et les malades. La encore, la paroisse peut s'en charger ou faire venir des congrégations et les assister.
A cela, le clergé ajoute parmi ses objectifs l'évangélisation, qui passe par les trois points précédents. Il s'agit certes de faire revenir les membres égarés de la Religion Prétendue Réformée, mais aussi de s'adresser à une parti des paroissiens, déchristianisés, oubliés, tant en campagne que dans les grandes villes.
Dernière édition par Lucius le Jeu 14 Sep 2017, 13:16, édité 4 fois
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Reinette a écrit:C'est génial, cela remet mes connaissances au clair.
J'ignorais ainsi cette passation de la cure assez originale. Ce devait être un beau b..., pardon, bazar.
Merci, je vous balance tout ça de tête, donc ce n'est pas très organisé.
Oui, cette collation par mois de grade est assez oubliée, je ne l'ai découverte que récemment. J'ai été aussi effaré que vous.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
J'ai rajouté quelques illustrations.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Oh ! Mais voilà qui est très intéressant. Merci beaucoup !
Je fais aussi partie des mécréants (je n'y connais pas grand chose), même si les sujets philosophiques, sociaux ou politiques liés aux religions m'intéressent (XXe et XXIe siècles seulement).
Les lieux de culte catholiques, dont il est question plus loin, ne sont-ils pas (aussi) "sacrés" ou consacrés ? Je ne sais pas si ce sont les bons mots...
Je ne savais pas...
Je n'ai pas trop compris la différence entre l'abbaye et le couvent...
Sont-ce des différences liées à leur implantation géographique, leur "autorité", et/ou cette notion de mendicité (les moines mendiants) ?
Je fais aussi partie des mécréants (je n'y connais pas grand chose), même si les sujets philosophiques, sociaux ou politiques liés aux religions m'intéressent (XXe et XXIe siècles seulement).
Je comprends, mais j'assimilais cette définition aux lieux de cultes protestants ou musulmans.Lucius a écrit:
Un lieu de culte ne se définit par aucun élément matériel visible en son sein. Son usage, et par conséquent son nom dépend de ceux qui l'occupent.
Les lieux de culte catholiques, dont il est question plus loin, ne sont-ils pas (aussi) "sacrés" ou consacrés ? Je ne sais pas si ce sont les bons mots...
Ah ? Basilique = pèlerinage.Lucius a écrit:Certains hauts lieux de pèlerinage peuvent aussi être qualifiés de basilique soit par un usage très ancien (Saint Denis) ou par distinction du Pape. On en trouve très peu en France avant le XIXe siècle.
Je ne savais pas...
Lucius a écrit:Les cloîtrés se réunissent en monastère, généralement à la campagne (mais parfois rattrapées par l'urbanisation). Ils peuvent avoir deux statuts. Le premier est celui d'abbaye, qui exercent une certaine autorité, dont l'église est une abbatiale. Le second est celui de prieuré, qui est affiliée à une abbaye, et dont l'église est une prieurale.
Les moines mendiants sont réunis en couvents, le plus souvent en ville. Leur église est conventuelle.
Je n'ai pas trop compris la différence entre l'abbaye et le couvent...
Sont-ce des différences liées à leur implantation géographique, leur "autorité", et/ou cette notion de mendicité (les moines mendiants) ?
La nuit, la neige- Messages : 18057
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Lucius a écrit:J'ai rajouté quelques illustrations.
Oui. Comme tu nous as bien illustré ton propos !
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Mme de Sabran- Messages : 55300
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
La nuit, la neige a écrit:Je comprends, mais j'assimilais cette définition aux lieux de cultes protestants ou musulmans.Lucius a écrit:
Un lieu de culte ne se définit par aucun élément matériel visible en son sein. Son usage, et par conséquent son nom dépend de ceux qui l'occupent.
Les lieux de culte catholiques, dont il est question plus loin, ne sont-ils pas (aussi) "sacrés" ou consacrés ? Je ne sais pas si ce sont les bons mots...
J'aurai du préciser en début de sujet que je ne m'intéresse qu'aux structures catholiques, puisque toutes les autres confessions sont absentes de la France métropolitaine à cette période, sauf les protestants, dont je ne connais que peu de chose quant à l'organisation. Donc il s'agit des lieux de cultes catholiques.
Ils sont tous aussi sacrés que les autres d'un point de vue canonique, même si certains jouissent d'un attachement et d'un prestige plus grand (ce qui peu formé d'un point de vue anthropologique de la sacralité supplémentaire) par leur ancienneté ou les objets qu'ils contiennent.
Lucius a écrit:
Je n'ai pas trop compris la différence entre l'abbaye et le couvent...
Sont-ce des différences liées à leur implantation géographique, leur "autorité", et/ou cette notion de mendicité (les moines mendiants) ?
La différence se fait dans le type d'occupants. Les ordres cloîtrés et mendiants ne sont pas identiques, le vocabulaire change. La formation de ces différences est intéressante, mais elle remonte au Moyen-Âge, ce qui n'est pas mon propose. Les mendiants apparaissent hors du monde bénédictins, et ont beaucoup de différence, au delà de la notion de règle.
Dernière édition par Lucius le Jeu 14 Sep 2017, 13:17, édité 1 fois
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Je voudrais revenir sur cette notion :
En effet, il tombe sous le sens que des usages différents vont conduire à des aménagements différents de l'espace et du mobilier liturgique, et par conséquent, on peut différencier matériellement certains types d'églises d'autres.
Ainsi, une cathédrale contient la cathèdre, le siège de l'évêque. Mais rien ne la différencie d'un siège d'abbé ou de primat par exemple.
D'autre part, une église où se rassemblent des réguliers aura besoin de stalles. Mais des paroissiales peuvent aussi en avoir pour divers raisons, et les cathédrales en ont toujours pour leur chapitre.
Donc, non seulement ces éléments ne permettent pas à un observateur non averti de savoir à qui un édifice est destiné avec assurance, mais surtout, il s'agit d'une conséquence et non d'une cause.
Lucius a écrit:Un lieu de culte ne se définit par aucun élément matériel visible en son sein.
En effet, il tombe sous le sens que des usages différents vont conduire à des aménagements différents de l'espace et du mobilier liturgique, et par conséquent, on peut différencier matériellement certains types d'églises d'autres.
Ainsi, une cathédrale contient la cathèdre, le siège de l'évêque. Mais rien ne la différencie d'un siège d'abbé ou de primat par exemple.
D'autre part, une église où se rassemblent des réguliers aura besoin de stalles. Mais des paroissiales peuvent aussi en avoir pour divers raisons, et les cathédrales en ont toujours pour leur chapitre.
Donc, non seulement ces éléments ne permettent pas à un observateur non averti de savoir à qui un édifice est destiné avec assurance, mais surtout, il s'agit d'une conséquence et non d'une cause.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Lucius a écrit:
La différence se fait dans le type d'occupants. Les ordres cloîtrés et mendiants ne sont pas identiques, le vocabulaire change. La formation de ces différences est intéressante, mais elle remonte au Moyen-Âge, ce qui n'est pas mon propose. Les mendiants apparaissent hors du monde bénédictins, et ont beaucoup de différence, au delà de la notion de règle.
Merci, mais j'ai toujours un peu de mal à faire la différence...
Aussi, j'ai trouvé ces informations complémentaires sur le net :
Les monastères, les couvents et les abbayes sont des bâtiments où les religieux vivent en communauté selon les règles de leur ordre (exemple d’ordres religieux : Bénédictins, Cisterciens, Chartreux, Trappistes).
Dans un couvent, les religieux peuvent sortir, à la différence des monastères où les moines doivent vivre à l’écart du monde. (D'où la différence d'implantation géographique, je suppose ?)
Une abbaye est un grand monastère placé sous la direction d’un abbé ou d’une abbesse. Elle est en principe dotée d’une autonomie juridique.
Et aussi :
Un monastère est une communauté de moines (hommes) ou de moniales (femmes, on dit aussi religieuses) voués à la prière et au travail, dans la chasteté et l'humilité.
Le mot vient du grec monakhos (solitaire) parce que les premiers chrétiens qui vouèrent leur vie à la prière étaient des ermites isolés dans le désert d'Égypte comme saint Antoine le Grand.
Il est synonyme de couvent, qui vient du latin convenire, se rassembler.
Parmi les monastères ou couvents de l'Église catholique, on distingue généralement les simples prieurés, avec un prieur à leur tête, et les abbayes, dirigées par un abbé (du mot araméen abba, qui signifie père et d'où vient aussi le mot pape).
Les monastères bénédictins, fidèles à la règle de Saint Benoît de Nursie, sont fondés à l'écart des villes, généralement dans des fonds de vallée que les moines ont soin de défricher et mettre en valeur avec le concours de frères convers (du latin conversus, converti), en charge des tâches domestiques, ainsi que de serfs ou de paysans libres.
Les enfants confiés aux monastères en vue de devenir moines sont appelés oblats (du latin oblatus, offert).
Les moines eux-mêmes se consacrent à la prière et au travail (essentiellement la copie de manuscrits).
(...)
Le développement des villes marchandes, au XIIIe siècle, suscite enfin la création d'ordres mendiants, voués à la prédication et non plus à la prière en communauté, tels les franciscains et les dominicains.
* Source : https://www.herodote.net/monastere_abbaye_couvent-mot-5.php
La nuit, la neige- Messages : 18057
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Voila un exposé fort interessant. merci Lucius de nous consacrer autant de temps à cela. C'est vrai que le monde spirituel est à des années lumière de nous.
j'ai pas trop saisi la nuance entre chanoines réguliers ou non.
Puisque tu nous proposes de poser des questions et d'éclairer nos lanternes peux tu nous en faire la différence. Merci Lucius
j'ai pas trop saisi la nuance entre chanoines réguliers ou non.
Puisque tu nous proposes de poser des questions et d'éclairer nos lanternes peux tu nous en faire la différence. Merci Lucius
_________________
Un verre d'eau pour la Reine.
Mr de Talaru- Messages : 3186
Date d'inscription : 02/01/2014
Age : 65
Localisation : près des Cordeliers...
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
La nuit, la neige a écrit: dirigées par un abbé[/b] (du mot araméen abba, qui signifie père et d'où vient aussi le mot pape).
... comme sans doute aussi le vocable italien " babbo " !
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55300
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
La nuit, la neige a écrit:Lucius a écrit:
La différence se fait dans le type d'occupants. Les ordres cloîtrés et mendiants ne sont pas identiques, le vocabulaire change. La formation de ces différences est intéressante, mais elle remonte au Moyen-Âge, ce qui n'est pas mon propose. Les mendiants apparaissent hors du monde bénédictins, et ont beaucoup de différence, au delà de la notion de règle.
Merci, mais j'ai toujours un peu de mal à faire la différence...
Aussi, j'ai trouvé ces informations complémentaires sur le net :
Ce qui est dit n'est pas faux (même si les ordres mendiants célèbres aussi la liturgie des heures, faut pas exagérer non plus).
En fait, le monachisme arrive en occident après la prise de Jerusalem par les perses. Plusieurs règles sont suivies. Il s'agit d'une vie d'ermite en communauté, prière, travail, silence etc ....
Puis Charlemagne décide de les unifier sous une règle principale, celle de Benoit de Nurcie, formant l'immense corps des bénédictins. Ils connaîtront différentes réformes dans la seconde moitié du Moyen-Âge, réformes clunisienne, cistercienne etc ...
Puis, avec Saint François d'Assise, naît un nouvel apostolat, celui des ordres mendiants. Il s'agit de vivre en communauté, de se consacrer à la prière (en cela ils sont proches des réguliers), mais aussi à vivre au plus près des pauvres, allant jusqu'à mendier son pain. Son ordre recevra une règle, car il prend du vivant même de François un ampleur inimaginable.
Dès le XVe des réformes apparaissent.
Un peu dans les mêmes moments apparaît un autre ordre, celui des dominicains, qui sont moins tournés vers la vie avec les pauvres que vers l'enseignement et le prêche, même si ils sont aussi un ordre mendiant.
Bien sûr, lorsqu'une réforme se met en place, tous le monde ne la suit pas, en partie parce que tout le monde n'en a pas nécessairement besoin. Chaque règle (bénédictine, carme, franciscaine, augustinienne, chartreuse) va donc compter divers branches, dont nous connaissons les noms, parce qu'il ont influencé les noms des bâtiments, des rues ...
Ainsi au XVIIIe siècle, la famille bénédictine compte :
les vieux bénédictins (sans réformes)
les célestins
les clunisiens, eux même réformés pour une partie en mauristes
les cisterciens, aussi appelés les bernardins, eux mêmes réformés en feuillants et trappistes
limpide, n'est-ce pas ?
Donc, ceux qui se tournent vers, pour faire vite, la contemplation et le travail au cœur de la nature, forment des abbayes et des prieurés à la campagne.
Ceux qui se tournent vers les pauvres et les citadins forment des couvents en ville.
Mais, avec l'urbanisation galopante depuis le XVIIIe siècle, des abbayes anciennement en campagne se trouvent maintenant au cœur des villes, Saint Germain des Prés et Saint Martin des Champs par exemple à Paris.
Dernière édition par Lucius le Jeu 14 Sep 2017, 13:18, édité 1 fois
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Mr de Talaru a écrit:Voila un exposé fort interessant. merci Lucius de nous consacrer autant de temps à cela. C'est vrai que le monde spirituel est à des années lumière de nous.
j'ai pas trop saisi la nuance entre chanoines réguliers ou non.
Puisque tu nous proposes de poser des questions et d'éclairer nos lanternes peux tu nous en faire la différence. Merci Lucius
Les chanoines sont un groupe de prêtres célébrants la liturgie des heures.
Celle-ci consiste à prier à heures régulières (matines, laudes, vêpres ....). Il ne s'agit pas d'une célébration eucharistique (messe), simplement de chants et de lectures.
Tous les ordres monastiques le font. Mais certains s'y sont plus particulièrement dédiés. Ils suivent la règle de Saint-Augustin, ce sont donc des réguliers. Ils se réunissent au sein d'une collégiale, et bénéficient de logements autours. Avec le temps, des revenus se sont constitués, la place est devenue intéressante, et certains ont même payé des chapelains pour réciter l'office à leur place.
D'autre part, chaque cathédrale dispose d'une organisation identique pour célébrer les heures dans le chœur de l'édifice. Ils ne suivent pas de règle particulière, mais sont caractérisés par leur attachement à la cathédrale. Cette fois ci ces chanoines se réunissent en chapitre. Ils ont la gestion du lieux et certaines hautes fonctions du diocèse donnent une place dans ce chapitre.
Ils possédaient souvent un quartier à côté de la cathédrale où ils vivaient. A chaque siège correspondait des revenus et une habitation.
Avant le concordat, ce sont eux qui élisaient l'évêque. Ils avaient, et ont encore, la tâche de conseiller l'évêque.
J'espère avoir répondu à votre question.
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Puisque nous en sommes aux réguliers :
L’événement majeur qui va marquer le monde monastique au XVIIIe siècle, et qui est une mise en bouche avant la révolution française, est la Commission des Réguliers.
Au lendemain du renvoi des jésuites (la deuxième fois sur cinq) est réuni, à la demande de l'Assemblée du Clergé (j'en parlerai une autre fois) une commission destinée à restructurer le maillage monastique sur le territoire.
Cette commission est constituée de
5 prélats, La Roche-Aymon (qui sacrera Louis XVI) Jumilhac, Phélypeaux d'Herbault, Dillon (l'oncle de notre mémorialiste) et le plus célèbre Loménie de Brienne, dont plusieurs ne sont pas considérés comme les prélats les plus exemplaires du royaume
et 5 conseillers d'état
Cette commission a pour but, défini par le Roi, d'enquêter auprès des abbayes pour identifier les abus, réformer les règles et les statuts, et réorganiser les établissements ayant des difficultés financières.
C'est à dire qu'une commission, fondée sur une décision royale unilatérale, composée de prêtres séculiers et de laïques, va décider de l'organisation de la vie de moines réguliers qui ne sont pas représentés et dont un bon nombre sont supposés bénéficier du statut d'exemption de l'autorité diocésaine, c'est à dire ne dépendant que du pape, ou bien dépendant d'ordre multinationaux.
Voyez vous à quelle point cela a pu susciter l'incompréhension.
D'autant que Rome n'apprendra son existence que par rumeur assez tardivement.
Cette décision est exemplaire de trois courants profonds en France ; l'incompréhension envers le monde monastique, le gallicanisme épiscopal et le gallicanisme royal.
Le monde monastique dans son ensemble avait connu au XVIIe siècle un grand dynamisme. Malgré les ambitions séculières, les monastères et couvents étaient acceptés. Après le confit janséniste, qui tend à une sécularisation du monde spirituel et religieux, et l'affaire du quiétisme, le XVIIIe ne comprend plus le monde monastique masculin.
En effet les ordres féminins ne connaissent pas de remise en question, car leur utilité est assez évidente : enseignement des filles en pension ou dans de petites écoles, œuvres charitables et hospitalières .... au pire, c'est toujours un bon moyen des caser les filles surnuméraires.
Le gallicanisme épiscopal se caractérise par une volonté ancienne (XVe) du clergé français de réduire l'influence de Rome dans leurs affaires et d'affirmer l'influence des évêques dans ladite gestion des questions religieuses nationales.
Le gallicanisme royal veut lui aussi réduire l'influence de Rome, mais d'un point de vue plus légaliste. Le Roi veut être considéré comme le chef du temporel de l'église de France, c'est à dire contrôler les nominations, l'introduction en France des directives pontificales .... sans trop empiéter sur les questions spirituelles, même si dans les faits elles ont souvent un revers temporel qui les intéresse aussi.
Ces trois courants combinés amène donc à ce que le Roi ordonne une réforme que des évêques vont mettre en place, selon une perspective nettement temporelle et légaliste de la vie monastique.
Ainsi, l'âge des vœux est relevé à 21 ans pour les garçons, 18 pour les filles.
L'évêque devient compétent pour examiner les candidats.
Les statuts sont revisités, les exemptions disparaissent, ainsi que les ordres transfrontaliers hérités des conquêtes récentes.
Des établissements voire des ordres complets sont supprimés et rattachés d'autres plus grands.
La notion d'utilité est le maître mot.
La commission est dissoute en 1780, mais l'ouvrage continue par la suite. Il faut relier cela au Joséphisme qui se montrera encore plus virulent à l'encontre des congrégations en Autriche.
Au final, cette "réforme" du monde monastique va entraîner en trente ans un recul général de 40% de la population régulière en France. Le recrutement est devenu plus difficile, l'incompréhension séculière bloque les vocations. Quand aux biens qui assurent la vie des communautés, un arrêt royal a confirmé leur maintien mais interdit désormais d'en recevoir de nouveaux (la célèbre peur française de la main-morte).
C'est une asphyxie programmée, dont l'oeuvre sera parachevée par la Révolution.
L’événement majeur qui va marquer le monde monastique au XVIIIe siècle, et qui est une mise en bouche avant la révolution française, est la Commission des Réguliers.
Au lendemain du renvoi des jésuites (la deuxième fois sur cinq) est réuni, à la demande de l'Assemblée du Clergé (j'en parlerai une autre fois) une commission destinée à restructurer le maillage monastique sur le territoire.
Cette commission est constituée de
5 prélats, La Roche-Aymon (qui sacrera Louis XVI) Jumilhac, Phélypeaux d'Herbault, Dillon (l'oncle de notre mémorialiste) et le plus célèbre Loménie de Brienne, dont plusieurs ne sont pas considérés comme les prélats les plus exemplaires du royaume
et 5 conseillers d'état
Cette commission a pour but, défini par le Roi, d'enquêter auprès des abbayes pour identifier les abus, réformer les règles et les statuts, et réorganiser les établissements ayant des difficultés financières.
C'est à dire qu'une commission, fondée sur une décision royale unilatérale, composée de prêtres séculiers et de laïques, va décider de l'organisation de la vie de moines réguliers qui ne sont pas représentés et dont un bon nombre sont supposés bénéficier du statut d'exemption de l'autorité diocésaine, c'est à dire ne dépendant que du pape, ou bien dépendant d'ordre multinationaux.
Voyez vous à quelle point cela a pu susciter l'incompréhension.
D'autant que Rome n'apprendra son existence que par rumeur assez tardivement.
Cette décision est exemplaire de trois courants profonds en France ; l'incompréhension envers le monde monastique, le gallicanisme épiscopal et le gallicanisme royal.
Le monde monastique dans son ensemble avait connu au XVIIe siècle un grand dynamisme. Malgré les ambitions séculières, les monastères et couvents étaient acceptés. Après le confit janséniste, qui tend à une sécularisation du monde spirituel et religieux, et l'affaire du quiétisme, le XVIIIe ne comprend plus le monde monastique masculin.
En effet les ordres féminins ne connaissent pas de remise en question, car leur utilité est assez évidente : enseignement des filles en pension ou dans de petites écoles, œuvres charitables et hospitalières .... au pire, c'est toujours un bon moyen des caser les filles surnuméraires.
Le gallicanisme épiscopal se caractérise par une volonté ancienne (XVe) du clergé français de réduire l'influence de Rome dans leurs affaires et d'affirmer l'influence des évêques dans ladite gestion des questions religieuses nationales.
Le gallicanisme royal veut lui aussi réduire l'influence de Rome, mais d'un point de vue plus légaliste. Le Roi veut être considéré comme le chef du temporel de l'église de France, c'est à dire contrôler les nominations, l'introduction en France des directives pontificales .... sans trop empiéter sur les questions spirituelles, même si dans les faits elles ont souvent un revers temporel qui les intéresse aussi.
Ces trois courants combinés amène donc à ce que le Roi ordonne une réforme que des évêques vont mettre en place, selon une perspective nettement temporelle et légaliste de la vie monastique.
Ainsi, l'âge des vœux est relevé à 21 ans pour les garçons, 18 pour les filles.
L'évêque devient compétent pour examiner les candidats.
Les statuts sont revisités, les exemptions disparaissent, ainsi que les ordres transfrontaliers hérités des conquêtes récentes.
Des établissements voire des ordres complets sont supprimés et rattachés d'autres plus grands.
La notion d'utilité est le maître mot.
La commission est dissoute en 1780, mais l'ouvrage continue par la suite. Il faut relier cela au Joséphisme qui se montrera encore plus virulent à l'encontre des congrégations en Autriche.
Au final, cette "réforme" du monde monastique va entraîner en trente ans un recul général de 40% de la population régulière en France. Le recrutement est devenu plus difficile, l'incompréhension séculière bloque les vocations. Quand aux biens qui assurent la vie des communautés, un arrêt royal a confirmé leur maintien mais interdit désormais d'en recevoir de nouveaux (la célèbre peur française de la main-morte).
C'est une asphyxie programmée, dont l'oeuvre sera parachevée par la Révolution.
Dernière édition par Lucius le Mer 13 Sep 2017, 17:09, édité 1 fois
Lucius- Messages : 11656
Date d'inscription : 21/12/2013
Age : 32
Re: Structures et vie de l'Eglise au XVIIIe siècle
Merci, mon petit Lulu, tout cela est très intéressant .
( ... mais assez compliqué pour moi ! )
( ... mais assez compliqué pour moi ! )
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55300
Date d'inscription : 21/12/2013
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