La collection de la baronne Liliane de Rothschild (1916-2003)

J'ouvre ce sujet sur la baronne Liliane de Rothschild (1916-2003), grande admiratrice de Marie-Antoinette, dont une partie de la collection fut dispersée aux enchères chez Christie's en 2015.



Fille du banquier Eugène Fould (1876-1929) et de Marie-Cécile von Springer (1886-1978), Liliane grandit entre le palais abbatial de Royaumont et la résidence familiale parisienne, au 54, avenue d’Iéna. En 1942, elle épouse, par procuration, son ami d’enfance le baron Élie de Rothschild, alors prisonnier en Allemagne. Le mariage religieux sera célébré à la fin de la guerre, en 1945, à la synagogue de la rue de la Victoire à Paris. Après le conflit, Liliane et Élie habitent le 23, avenue de Marigny (construit par le baron Gustave) avec le frère d’Élie, Alain, et sa femme. À partir de 1955, le couple s’installe dans l’hôtel particulier de la rue Masseran dans le 7e arrondissement de Paris qui avait appartenu au comte Étienne de Beaumont, puis en 1975 dans l’ancienne résidence parisienne du baron Guy et de Marie-Hélène, au 10, rue de Courcelles à Paris.

La baronne Élie aimait vivre entourée d’œuvres d’art associées à plusieurs femmes illustres. Elle fut « la plus grande détentrice d’objets ayant appartenu à l’infortunée reine de France [Marie-Antoinette] ». (Séret, 2016, III, p. 396).

À partir de 1961, elle fait périodiquement don d’œuvres d’art lui ayant appartenu, notamment au musée Carnavalet, au château de Versailles, au Musée national des arts et traditions populaires, au musée de la Mode de la Ville de Paris et au Musée national de la céramique de Sèvres ainsi qu’à des musées techniques ou historiques comme le musée Nicéphore Niépce de Chalon-sur-Saône, le musée Oberkampf à Jouy-en-Josas et le Musée national de la coopération franco-américaine au château de Blérancourt. Au nombre de ces dons, sont à signaler un magnifique vase grec à médaillons en porcelaine de Sèvres à fond bleu, cédé au musée du Louvre en 1982, et une tabatière de Robert Garrard qui avait été offerte par la reine Victoria au ministre Achille Marcus Fould (1800-1867) et qui enrichit, depuis 2001, le département des objets d’Art du musée du Louvre. Ce dernier don est associé à la mémoire du petit-fils de Liliane, Raphaël de Rothschild (1976-2000).

Source : Laura de Fuccia, Chef de projet, Institut national d'histoire de l'art (https://collections.rothschild.inha.fr/fr/mecenes/biographies-des-donateurs/jusqu-a-nos-jours/liliane-de-rothschild.html ).



J'espère que celles et ceux qui, ici, l'ont côtoyée pourront nous fournir d'autres informations sur ce personnage intéressant... et sa collection.

Je parierais bien sur notre Momo !

Merci, Notre Grâce, pour l'ouverture de ce sujet .
La baronne était femme de goût et très généreuse donatrice .

De bons souvenirs me reviennent à l’évocation de la baronne Elie, avec laquelle j’ai fait le voyage de Varennes en autocar, en 1991. Notre Marie-Antoinette s’en souviendra aussi...
Le car partait de la rue de l’Echelle, et la compagnie à laquelle il appartenait s’appelait Korf... Ça ne s’invente pas...
A l’arrivée à Varennes: petit attroupement ; les gens voulaient voir « la princesse » qu’on leur avait annoncée... En fait, il voulait parler de la baronne Elie...
Sa collection fut dispersée récemment, dont le Vestier (attribution de l’époque), le panier d’osier de la Conciergerie, auquel elle tenait tant, mais pas le VL à la Rose, qui passait pour être la première épreuve du célèbre tableau...
Rappelons enfin qu’elle fut Secrétaire Générale de l’exposition de 55 à Versailles.
Cette dame était charmante, très discrète, et toujours prête à rendre accessibles ses collections à ceux qui portaient un intérêt à la Reine...

Vicq d Azir a écrit:
A l’arrivée à Varennes: petit attroupement ; les gens voulaient voir « la princesse » qu’on leur avait annoncée... En fait, il voulait parler de la baronne Elie...

Vicq d Azir a écrit:

Sa collection fut dispersée récemment, dont le Vestier (attribution de l’époque), le panier d’osier de la Conciergerie, auquel elle tenait tant, mais pas le VL à la Rose, qui passait pour être la première épreuve du célèbre tableau...

Voici le fameux portrait de Marie-Antoinette à la rose, qui appartenait à la baronne de Rothschild, et fait aujourd'hui partie de la collection Resnick à Los Angeles.
Les amis du Louvre ont pu l'admirer in situ l'été dernier lors d'un voyage organisé.

La couleur de la robe est différente de celle exposée à Versailles (couleur "suie de Londres" sur l'exemplaire de la collection Resnick, ancienne collection Rothschild).






Voici le portrait de Marie-Antoinette, aujourd'hui attribué à Gautier-Dagoty (acquis par le château de Versailles à la vente de la collection de la baronne en 2015) :




On en parle ici : https://marie-antoinette.forumactif.org/t269-portrait-de-marie-antoinette-attribue-a-vestier-ou-jean-baptiste-gautier-dagoty?highlight=vestier


Voici également le dessin par Duplessis-Bertaux, qui faisait partie de sa collection (dispersé lors de la vente de 2015) :  






https://marie-antoinette.forumactif.org/t4111-portrait-de-marie-antoinette-aux-tuileries-par-duplessis-bertaux-collection-baronne-de-rothschild#130462

Oui, mille merci, Duc...
Je n’ai vu qu’une fois le portrait à la Rose de la baronne Elie. La couleur de la robe, et même l’ensemble, m’ont parus plus ocre que la version qui est à Trianon.
Oui, elle possédait des merveilles...

J'aime beaucoup ce portrait presque fantomatique ...

Vicq d Azir a écrit:Oui, mille merci, Duc...
Je n’ai vu qu’une fois le portrait à la Rose de la baronne Elie. La couleur de la robe, et même l’ensemble, m’ont parus plus ocre que la version qui est à Trianon.

Couleur "suie de Londres".

Mme de Sabran a écrit:J'aime beaucoup ce portrait presque fantomatique ...  

Celui de Duplessis-Bertaux ? Oui moi aussi je l'adore.

Elle avait acquis le petit panier d’une descendante de Rosalie, et disait qu’elle tenait à cet objet plus que tout.
Le problème, c’est, je crois, que la fille de Rosalie n’a pas eu de descendance...L’authenticité de la relique est aujourd’hui contestée... ( il faudrait interroger l’excellent Ludovic Miserole ).

Vicq d Azir a écrit:
Le problème, c’est, je crois, que Rosalie n’a pas eu de descendance...

Ah zut, c'est bête.
Cette petite corbeille avait fait un bon prix lors de la vente en 2015 : 10 625 euros hors frais.

L'ensemble de la collection de la baronne dispersée en 2015 est visible ici : https://www.christies.com/collection-marie-antoinette-25946.aspx?saletitle=&intsaleid=25946&pg=all&action=paging&sid=ed40ea0c-f44f-4ff0-99dd-839c2695f5a2

Duc d'Ostrogothie a écrit:

Couleur "suie de Londres".

Je dirais même plus    ...    suie des cheminées de Londres !  

Notre sujet : https://marie-antoinette.forumactif.org/t1561-marie-antoinette-ou-l-eloge-de-la-couleur?highlight=couleur

grande dame, toujours vêtue avec discrétion, très modeste - c'était amusant de la faire voyager dans un autocar en 1991 - son chauffeur est venu la reprendre à CLERMONT pour son retour vers PARIS en compagnie de Monsieur LEMOINE qui venait de prendre sa retraite de patron de versailles, elle devait être à ROYAUMONT le lendemain.

le tableau a été acheté en direct, secrètement avec le FAMILLE princière allemande, le tableau avait été offert par la Reine et n'avait jamais quitté le chateau familial.

j'ai eu l'honneur d'aller rue de courcelles pour prendre deux fixés sous verre du Roi et de la Reine - ils avaient les yeux en amande - pour l'exposition à la mairie du V° arrondissement.
j'avoue que mes sortaient de leurs orbites et j'avais la langue pendante jusque sur le plancher......

MARIE ANTOINETTE

Soyons précis...
Quand j’évoquais le ton ocre du tableau VL à la Rose de la baronne Elie, je ne parlais pas que de la robe, que la peintre a choisi de traiter en effet couleur « suie des cheminées de Londres ». Je parlais du tableau tout entier (peut être un vernis vieilli qui aurait eu besoin d’un petit nettoyage ?).
En tout cas, la baronne était convaincue qu’il s’agissait de la première version (après, bien sûr, ceux en gaulle).

Les Resnick sont également persuadés que leur tableau est l'original. Le catalogue de leur collection explique que l'exemplaire de Versailles est de beaucoup moins bonne qualité.

Of course...
Moi, j’aime bien les deux...

Moi aussi. Je préfère le cadre du château de Versailles.

Le seul intérêt qu’on pourrait tirer de savoir quel est l’original est le suivant: pour ceux qui s’intéressent au rendu de la ressemblance, on peut supposer que l’original était le plus proche du modèle, mais enfin...

Vicq d Azir a écrit:Elle avait acquis le petit panier d’une descendante de Rosalie, et disait qu’elle tenait à cet objet plus que tout.
Le problème, c’est, je crois, que la fille de Rosalie n’a pas eu de descendance...L’authenticité de la relique est aujourd’hui contestée... ( il faudrait interroger l’excellent Ludovic Miserole ).

Bonjour cher Vicq d'Azir,

J'avais envoyé un mail à l'époque de la vente où je faisais part de mes doutes quant à l'authenticité de cette "relique" dont je vous donne copie ci-dessous:

Bonjour Monsieur,

Je me permets de vous écrire concernant la prochaine vente des objets de la succession de la baronne de R....
Mon attention a été attirée par un objet en particulier: la corbeille de Rosalie Lamorlière. En effet, j'ai publié un ouvrage sur cette dame en 2010, et ce, après plus de neuf années de recherches dans les différents services d'archives et plusieurs centaines de kilomètres pour suivre les traces de cette humble domestique.
Aussi, je me permets de partager avec vous mes doutes quant à l'authenticité de cette relique. Je m'explique.
Il est dit quelque part dans votre catalogue que cette corbeille appartenait à la descendance de Rosalie. Hors Rosalie n'a eu qu'une fille (abandonnée à la naissance) qui elle, n'a jamais eu d'enfants.
Ces faits été totalement inconnus avant mes recherches. S'il s'agit de petits-neveux ou autres, je m'interroge sur la provenance de cet objet car de 1824 à 1848, date de son décès, Rosalie a vécu sans le sou à l'Hospice des Incurables rue de Sèvres et ne possédait aucun bien. Ses seuls "biens" étaient des bouts de baptiste donnés par la reine à la jeune servante en 1793 qui les a cousu sur un drap qui lui servira plus tard de linceul.
De plus, il me semble qu'il est précisé dans le catalogue que cet objet aurait été acquis par la baronne en 1954. Pratique quand on sait que la grande exposition consacrée à la reine avait lieu un an plus tard... Le timing était parfait pour sortir de nulle part cette corbeille.

De plus, Rosalie a été interrogée par deux fois (une première fois en 1823 par Lafont d'Aussonne, et la deuxième en 1830 par Mme Simon-Viennot) et elle ne fait jamais mention de cette corbeille.
Etrange quand on sait qu'elle mentionne un simple carton qu'elle a donné à la reine pour que celle-ci puisse y ranger ses affaires, et qu'elle parle également d'un miroir acheté sur les quais de la Seine pour la reine. Comment aurait-elle pu faire l'impasse sur une corbeille alors qu'elle parle d'un vulgaire carton?!

Voici donc exposés ici les principaux motifs de mon extrême réserve concernant cette corbeille.
Il m'apparaît opportun de vous les signaler afin d'éviter qu'un modeste collectionneur dépense ses économies pour un objet dont l'origine est plus qu'incertaine, voire discutable.

J'espère ne pas vous avoir dérangé et ne pas vous être apparu trop présomptueux en vous exposant ces faits.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, mes sentiments les meilleurs.

Ludovic Miserole

Je vous donne la réponse très scientifique du monsieur:

Cher Monsieur,

L’Histoire laisse toujours des surprises !

Bien à vous
...

Oui, cher D’éon, on ne saura donc jamais...
Merci en tout cas pour cette réponse très documentée, car c’est vous le spécialiste de Rosalie...
Voici deux photos de la baronne Elie: l’une prise en 1991 lors du voyage de Varennes, exactement dans les salons de l’ancienne Intendance de Chalons (assise au centre, en rouge), l’autre le 16 octobre 1993, lors de la cérémonie d’hommage à Marie Antoinette, place de la Concorde (assise, à gauche). Elle est accompagnée de Mr. Lemoine, ancien conservateur de Versailles:

merci de ces deux photos qui ont été placées immédiatement dans le dossier IMAGES, l'un VARENNES, l'autre 1991 souvenir impérissable, la baronne s'était abimé le pied c'est la raison de la chaise roulante.

MARIE ANTOINETTE

Oui, de bons souvenirs...
Ci-dessous, la première page du catalogue de l’exposition de 1955, où le nom de la baronne Elie apparaît en bonne place :

Je me demande si en 2055 sera organisé une autre grande exposition autour de Marie-Antoinette ...

Merci pour les photos cher Vicq.

Comte d'Hézècques a écrit:Je me demande si en 2055 sera organisé une autre grande exposition autour de Marie-Antoinette ...

Il n'est pas impossible qu'une autre exposition soit organisée bien avant, avec pour sujet, par exemple, les portraits de Marie-Antoinette . Il y aurait de quoi faire.

L'expo de 1955 avait ceci d'intéressant qu'un certain nombre d'objets alors en collections privées, et jamais vus par le public, avaient été prêtés. Aujourd'hui les expositions n'usent qu'avec beaucoup de parcimonie, des objets provenant de collectionneurs privés, ce qui est dommage (ceci dit on a vu les aiguières de Mme Pinault dans plusieurs expos : la chine à Versailles, Gouthière ... ).

Duc d'Ostrogothie a écrit: Aujourd'hui les expositions n'usent qu'avec beaucoup de parcimonie, des objets provenant de collectionneurs privés, ce qui est dommage

Savez-vous quel en serait la raison, mon beau duc ?