Le mystère Anastasia

Oui... Tous les princes ne sont pas des ingrats...
Philip y a peut-être été pour quelque chose : il est, après tout, le petit -neveu de la dernière tsarine ...
Voici la grande duchesse Olga Alexandrovna, fille et sœur de tsar, dans sa jeunesse, et à la fin de sa vie... Elle a vécu simplement, à eu deux garçons avec l’officier russe qu’elle a épousé en secondes noces, été fermière au Canada... elle était aussi une bonne aquarelliste.

On raconte cependant que la famille royale sut faire payer le „loyer“ du cottage à Xenia en rachetant ses bijoux à vil prix. Rumeur souvent démentie mais fréquemment rapportée.

Je n’ai jamais su personnellement quoi croire...

C’est, je crois, la Reine Mary, qui aurait su obtenir à des conditions intéressantes certains bijoux des Romanov. Il a été question, sur ce forum, d’un certain diadème, que portait encore récemment la Reine Elizabeth. Mais il provenait d’une branche latérale. Je ne sais pas si l’impératrice et son entourage proche ont pu emporter grand chose de Crimée. La fuite s’est faite à l’arraché, au nez et à la barbe des bolcheviques , qui avaient réoccupé la région après l’occupation allemande qui avait suivi le traité de paix de Lénine. Les conditions rocambolesques de cette fuite sont rapportées dans les mémoires du prince Youssoupof, qui était présent ( «avant et après l’exil »)
Mais on s’éloigne d’Anastasia, même si la nièce et la tante étaient très proches, et que seule Olga s’est déplacée pour rencontrer Anna ...

Le „certain diadème“ est effectivement celui de la grande duchesse Maria Pavlovna, épouse d’un des fils d‘Alexandre II si je ne m’abuse, le grand-duc Wladimir. Ce fut la dernière à fuir la Russie bolchevique... en 1920 !

On en parle ici :

https://marie-antoinette.forumactif.org/t950p150-la-reine-elizabeth-ii

Des complicités, notamment diplomatiques, lui permirent de faire sortir du pays pratiquement tout son écrin. Un reliquat fut même retrouvé dans le coffre d‘une ambassade il y a quelques années !

Mère du prétendant Kyrille, et donc arrière-grand-mère de l’actuelle prétendante Maria, il est curieux de voir à quel point cette dernière semble dépourvue de bijoux aux différentes réunions du Gotha, malgré ce sauvetage...

Très intéressant.
A propos de l’impératrice douairière Maria Fedorovna, je ne sais plus si c’est Youssoupof ou le grand duc Alexandre, son gendre, qui rapportent, dans leurs mémoires, qu’elle fit preuve d’un grand courage quand sa villa de Crimée fut perquisitionnée par l’armée rouge. Elle était couchée, et refusa de se lever. Ses bijoux étaient dans un coffre bien visible au milieu de sa chambre et ne fut pas emporté. Elle en imposa si bien que les soldats dirent qu’ils reviendraient plus tard... L’ex consul britannique de Yalta lui imposa de fuir immédiatement, un navire britannique ayant réussi à accoster. Elle n’accepta qu’à la condition que tous ses proches qui l’accompagnaient, ainsi que ses domestiques, puissent être du voyage. Avait-elle pu emporter ce fameux coffret ?

Comme Louis XVI et sa famille au Temple, les Romanov inspiraient beaucoup de respect à leurs geôliers de par leur résilience.

De fait, comme le Comité de Salut Public au Temple, les bolcheviques ordonnaient en Crimée de changer ces derniers régulièrement pour éviter toute forme d‘empathie.

Quand l‘Histoire se répète...

Oui, tout ceci est bien étrange...
Je crois aussi qu’il y avait des factions rivales chez les Rouges autour de Yalta, et qu’elles n’étaient pas d’accord sur la conduite à tenir avec les princes et aristocrates qui avaient trouvé refuge sur cette côte où ils possédaient des résidences d’été. Le Tsar lui-même avait souhaité se retirer dans sa résidence de Livadia, après son abdication, mais cela lui fut refusé par le gouvernement provisoire.

Rappelons aussi que l’impératrice douairière, „libérée“ par les allemands en Crimée (et leur devant sans doute sa vie...) refusa de rencontrer les officiers du Reich qui étaient pour elle toujours l’ennemi de sa patrie d’adoption.

Ces princes savaient ou placer le sens de l’honneur.

A la même époque, la grande-duchesse du Luxembourg, Marie-Louise, accueillait l’état major allemand du haut de l’escalier de son palais. Cela lui coûta son trône au profit de sa sœur en 1918.

„Je n’avais pas retiré mes gants“ dira-t-elle pour sa défense, avant d’abdiquer et de finir au couvent sous la pression de Clémenceau...

Tout à fait, Gouverneur.. De même que son fils, Nicolas II, qui aurait peut-être été contacté, même en captivité, pour signer une paix séparée avec l’Allemagne ( la Russie était exsangue ), et qui aurait dit : « plutôt mourir... ». Ce qui n’empêcha pas Lénine de signer cette paix dès son avènement au pouvoir, en payant le prix fort :une grande partie du territoire russe cédé aux Allemands...
De gauche à droite: Olga, Anastasia, Tatiana, trois des quatre sœurs :

Vicq d Azir a écrit:Tout à fait, Gouverneur.. De même que son fils, Nicolas II, qui aurait peut-être été contacté, même en captivité, pour signer une paix séparée avec l’Allemagne ( la Russie était exsangue ), et qui aurait dit : « plutôt mourir... ». Ce qui n’empêcha pas Lénine de signer cette paix dès son avènement au pouvoir

Le traité de Brest-Litovsk était plutôt un pacte de non-agression, non ?

Cette mention de paix séparée permet de rebondir sur le mystère Anna Anderson : parmi ses révélations les plus troublantes, la jeune femme évoqua une visite en Russie, en 1916, "d'oncle Ernie", c'est à dire Ernest de Hesse, frère de la Tzarine. Il serait venu en grand secret tenter de négocier une paix séparée. Le concerné nia en bloc mais plus tard, les propos d'Anna furent confirmés…

Des propos qui ébranlèrent certains qui doutaient encore : comment une affabulatrice aurait pu être au courant d'une entrevue qui fût, on s'en doute, entourée du plus grand secret ? A moins que des âmes bien intentionnées (mode ironique activé) lui en aient fait part...

Je retrouve cette rare et étonnante photo de l’Imperatrice douairière embarquée sur le HMS Marlborough dans la baie de Yalta, prête à quitter définitivement la Russie (avril 1919). A gauche, debout: le grand duc Nicolas Nicolaievich, ancien généralissime des armées russes, destitué en 15 par le tsar, son neveu, farouche opposant à l’Imperatrice Alexandra et à Raspoutine, qu’il « voulait faire pendre »...
L’affrètement de ce navire anglais est à mettre à l’actif de George V, mais aussi de sa mère, la Reine Alexandra, sœur de la tsarine douairière.
Ceci se passe dans un moment d’accalmie, alors que les Rouges ont réinvesti la Crimée.
Le traité de Brest-Litovsk (mars 18) , qu’avait signé Lénine avec l’Allemagne, était une paix séparée, Lénine, lors de sa prise de pouvoir, ayant promis « la terre et la paix ». Ce traité avait privé les alliés du soutien russe, et avait eu pour conséquence de prolonger la guerre à l’ouest. A cette occasion aussi, la Russie avait perdu l’Ukraine et la Biélorussie.
Pour revenir à Anna Anderson, elle évoque en effet la visite à ses parents de son oncle Ernie, frère de sa mère, grand duc de Hesse Darmstadt, en 16. Lui est donc dans le camp allemand, et sa sœur, de par ses origines, est suspecte de collaboration avec l’ennemi ( ce n’est pas l’autrichienne, c’est l’allemande...). La visite doit donc rester secrète; rien n’indique d’ailleurs qu’ Ernie ait été commandité pour préparer une paix séparée, à laquelle le tsar, fidèle aux alliances, est farouchement opposé; peut-être est-il venu évoquer la sécurité de sa sœur et des enfants, mais ceci n’est qu’une supposition... En tout cas, la visite doit rester secrète... Il est donc troublant qu’Anna en parle en 1920...( son oncle est toujours vivant, vit en Allemagne, mais refuse de la rencontrer...)
A cette époque, Anna est hébergée chez des russes exilés, qui parlaient beaucoup ... Ils pouvaient être dans la confidence, ou quelqu’autre visiteur avait pu parler... et Anna ouvrait grand ses oreilles. Elle allait ainsi se constituer tout un passé, et une identité, auxquels elle était prête à croire elle-même...

Vicq d Azir a écrit:Lui ´est donc dans le camp allemand, et sa sœur, de par ses origines, est alors suspecte de collaboration avec l’ennemi ( ce n’est pas l’autrichienne, c’est l’allemande...).

C'est ainsi qu'un projet d'exfiltration en France du couple impérial échoua, Clémenceau refusant d'accueillir "le Tsar et sa Boche"

Lénine lui-même, après sa prise de pouvoir, maintiendra les négociations avec l’Allemagne en vue d’échanger « les princesses d’origine allemande », contre d’autres avantages. L’assassinat de l’ambassadeur d’Allemagne auprès des Soviets par un bolchevique partisan de la reprise de la guerre, mettra un terme à ces négociations. Puis l’Allemagne sera définitivement vaincue par les Alliés...
Rappelons aussi, que la famille impériale autrichienne, par le biais des beaux frères Bourbon Parme du tout nouvel empereur Charles, engageront des négociations secrètes avec la France, pour aboutir à la paix, tant la situation paraît bloquée en cette année 18 .