Madame Royale fut-elle " brutalisée " dans sa prison du Temple ?

Une note stupéfiante de la biographie de Madame Elisabeth par Anne Bernet me ramène vers Madame Royale.
Voyez plutôt .  




Le prince Frédérick de Saxe-Altenbourg a émis dans un livre " Le Secret de Madame Royale "  l'hypothèse que la fille de Louis XVI aurait renoncé à toute vie publique après les épreuves au Temple  qui constitueraient aussi l'explication de l'échange avec Ernestine Lambriquet.
  Ghislain de Diesbach trouve cette hypothèse de l'échange avec Ernestine " hasardeuse " :
  ...   en effet, écrit-il, on voit mal Louis XVIII et Charles X se prêter à cette supercherie "  

Il ajoute, en revanche,  que le prince Frédérick de Saxe-Altenbourg la défend avec des arguments qui ne sont pas tous à rejeter ...



...  elle avait été violée pendant sa captivité au Temple et n'aurait voulu pour rien au monde que cela se sût.    

L'idée seule révulse.  

Elle nous ramène à la révélation de ce chantage que la comtesse de Soucy, née Mackau,   exerce de 1833 à sa mort, soit presque durant vingt années sur Madame Royale    littéralement empoisonnée par ce que Charlet appelait  " l'affaire du médecin ".    
Ce médecin était un certain Lavergne qui, au début de 1833, révéla son existence à la duchesse d'Angoulême, en la menaçant de publier  " une lettre otographe ( sic ) de Madame la marquise de Soucy, née de Mackau, à une personne de ses amis, relative aux révélations que lui aurait faites Madame la duchesse d'Angoulême à l'époque de sa sortie du Temple sur les événements extraordinaires qui lui arrivèrent durant sa longue captivité . "  (...)

(   André Castelot,  Le secret de Madame Royale )

Mme de Soucy soutira à la princesse des sommes pharaoniques dont Castelot donne le détail.

Mais à aucun moment André Castelot n'évoque un viol de la petite Madame Royale . Pour lui, Madame Royale savait  ( ou croyait savoir ) son frère vivant et aurait pourtant toujours refusé de recevoir et reconnaître l'un des nombreux vrais-faux dauphins par souci de pureté dynastique ( l'enfant étant peut-être celui de Fersen ).
C'est l'hypothèse de Castelot.

Elle est expliquée dans notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t3027-le-secret-de-madame-royale-de-andre-castelot?highlight=castelot

 André Castelot axe tout son raisonnement sur la survivance du frère de Marie-Thérèse. Mais il n'y avait pas là matière à un quelconque chantage puisque, de toute façon, aucun des postulants n'a jamais été reconnu pour être Louis XVII.
Alors ?       Le mystère reste entier .

De l'hypothèse, à laquelle semblent adhérer des historiens sérieux,  selon laquelle la princesse aurait été déshonorée dans sa prison, la rumeur a couru, certes.    Mais il fallait à Mme de Soucy des preuves à exhiber .  Sans la menace de preuves concrètes, pas de chantage possible.  
Or il y eut bien chantage...

Tout cela est bien perturbant .  
Quand ces brutalités auraient-elles pu se produire ?  
...   entre le 10 mai 1794  où Madame Elisabeth est exécutée et le 20 juin 1795  où Mme de Chantereine prend son service auprès de la princesse  ( qui dure jusqu'au  18 décembre 1795 )   ?

Qu'en pensez-vous, les amis ?

Que pensez-vous, aussi, de ce " refus " ( c'est le propre terme employé par Ghislain de Diesbach ) de l'archiduc Charles d'épouser Marie-Thérèse, mariage auquel semblait tant tenir François II ?

Selon WIKI, en 1796, il fut question de marier le jeune archiduc à sa cousine Marie-Thérèse de France, fille des défunts Louis XVI et Marie-Antoinette. Récemment libérée de la prison du Temple à Paris (échangée contre des soldats français détenus par l'Autriche) après trois ans de captivité, ayant vu périr sa famille, la jeune princesse déclara avec noblesse qu'elle ne pouvait épouser un homme « ennemi de son pays ».
C'est tout à fait ainsi que André Castelot présente ces fiançailles boiteuses.

Pourquoi Ghislain de Diesbach parle-t-il de refus ?!!


https://books.google.fr/books?id=N06kCwAAQBAJ&pg=PT149&lpg=PT149&dq=ghislain+de+diesbach+les+secrets+du+gotha+madame+royale&source=bl&ots=WNhbnBIy9e&sig=ACfU3U0WHNotmqqkxS5tfVYJE_RvgruV4w&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiw1qub-OvlAhVMExoKHXe7CTcQ6AEwD3oECAYQAQ#v=onepage&q=ghislain%20de%20diesbach%20les%20secrets%20du%20gotha%20madame%20royale&f=false

J'ai connu des membres d'une famille pseudo-aristocratique qui prétendaient descendre du "produit" des violences sexuelles qui aurait été infligées à Mme Royale au Temple

Ceci dit, l'Histoire prouve que de telles violences, dans des circonstances similaires, ne sont malheureusement pas à écarter : il n'y a qu'à songer au cas de la malheureuse Nathalie Paley    

Par contre, je ne sais pas non plus où l'excellent G. de Diesbach va chercher un refus de Charles quand celui-ci vint de Louis XVIII, qui craignait comme on le sait des réclamations territoriales consécutives.

Gouverneur Morris a écrit:

Ceci dit, l'Histoire prouve que de telles violences, dans des circonstances similaires, ne sont malheureusement pas à écarter : il n'y a qu'à songer au cas de la malheureuse Nathalie Paley    

Tu me fais découvrir cette princesse au destin tellement tragique .
WIKI m'a dit tout le reste :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nathalie_Paley

Je suppose que la personne ou les personnes qui auraient brutalisé la princesse savaient à quoi s'attendre si cela s'était su.

Gouverneur Morris a écrit:

Par contre, je ne sais pas non plus où l'excellent G. de Diesbach va chercher un refus de Charles quand celui-ci vint de Louis XVIII, qui craignait comme on le sait des réclamations territoriales consécutives.

Mais oui, n'est-ce pas, il est tellement affirmatif !

Le seul élément tangible c'est ce chantage que la marquise de Soucy (qui porte bien son nom ) exerçait sur Madame Royale, la menaçant de divulguer son lourd secret... à partir de là, toutes les hypothèses sont envisageables.

Je crois que si Madame Royale ne s'est pas mariée avec l'archiduc Charles, c'est au premier chef en raison de la résistance de Louis XVIII. Même séparée, par les Autrichiens, de sa famille française, elle savait que son oncle était opposé à cette alliance. Le temps pour les Autrichiens d'essayer de la faire plier et voilà que Napoléon était déjà aux portes de Vienne ... ils l'ont alors renvoyée à son oncle, prié de quitter l'Autriche, le tout pour ne pas provoquer Napoléon Ier, qui n'aurait certainement pas goûté la "plaisanterie" d'un mariage de Madame Royale avec l'archiduc.

Ne parlons-nous pas aussi de tout ceci, ici...

La comtesse de Soucy, née Renée-Suzanne de Mackau

Madame Royale et la comtesse des Ténèbres

Certes mais, dans ces autres sujets, à aucun moment nous ne supposions le viol de Madame Royale, allégation d'historiens sérieux, et qui glace le sang.

Si, si...
Du moins est-ce très clairement dit dans le sujet consacré à la comtesse des Ténèbres, car ce serait l'une des hypothèses qui expliquerait sa " substitution" .

La nuit, la neige a écrit:Si, si...
Du moins est-ce très clairement dit dans le sujet consacré à la comtesse des Ténèbres, car ce serait l'une des hypothèses qui expliquerait sa " substitution" .

J'ai dû zapper cette information alors ( j'avoue lire un peu en diagonale les hypothèses sur la comtesse des Ténèbres ) car j'ai presque sursauté de saisissement en lisant la petite note que je cite en amont.

Voici quelques idées -  n'oubliez pas que Madame DE SOUCI a accompagné la "princesse" jusqu'à
VIENNE,  était-ce Madame ROYALE ou l'autre ERNESTINE LAMBRIQUET !!!! vous comprendrez qu'il lui était facile de faire chanter la DUCHESSE D'ANGOULEME ce qu'elle ne s'est pas gênée !!!!

La REINE MARIE CAROLINE a écrit   " quant à la fille je la prendrai dans l'état où elle se trouve !!!!" plutôt curieux comme réaction de la tante de Madame ROYALE.

MARIE ANTOINETTE

Je ne sais si l’on a déjà posté cet écrit de Marie-Thérèse qu’elle rédigea au Temple, sans doute durant la période entre l’exécution de Mme. Elisabeth et l’arrivée de Mme. Chanterenne.
La princesse y décrit une intrusion nocturne de municipaux dans sa chambre. Avec humour et vivacité, elle relate les faits … en vers, manière sans doute d’exorciser l’angoisse…

Voici le texte en clair, autant que j’aie pu le déchiffrer, puis le cliché du document :

« une nuit célèbre entre mille
 je dormais dans mon lit tranquille
 je fus éveillée tout d’un coup
 du bruit enragé des verroux
 on frappa bientôt à ma porte
 je répondis d’une voix forte
 eh bien qui est là que me veut-on
 sans discourir, ouvrez dit-on
 je me lève et mon cœur balance
 entre la crainte et l’espérance
 je croyois que j’allais partir
 de la tour j’espérois sortir
 de mes vêtements je me couvre
 j’accours vite à ma porte et j’ouvre
 on entre. au lieu de me parler
 de me dire il faut s’en aller
 d’un air sot chacun m’envisage
 puis ils s’en vont avec tapage
 fiers sans doute d’un tel exploit
 contents d’avoir fait leur emploi
 enragée alors je m’enferme
 de mon espoir voyant le terme
 trouvant que pour me venir voir
 ils abusoient de leur pouvoir
 en choisissant une heure indue
 pour se présenter à ma vue
 bientôt au lit je me remets
 sans avoir fait beaucoup d’apprêts
 la saison était avancée
 de froid je me sentois glacée
 une heure après minuit sonnoit
 mais tandis que je me plaignois
 la réflexion me fit taire
 j’avois eu peu de chose à faire
 en cet instant, de mon gardien,
 le sort fut pire que le mien

 pour ne connoître personne
 il avoit fallu qu’on le sonne
 il fut contraint d’aller là -bas
 je n’avais fait que deux pas
 je laissai ces tristes figures
 enfin je finis mes injures
 bientôt j’entens fermer la tour
 par mon gardien à son retour
 ce bruit calmant ma peine
 me fit dire alors en moi-même
 je puis en sûreté dormir
 je ne les verrai plus venir
 ayant enfin passer mes craintes
 je terminoi mes tristes plaintes
 après une heure de réveil
 je livrai mes sens au sommeil »

Mon Dieu ...

Cette hypothèse d'un viol ne me surprend pas du tout. Ce qui m'étonne c'est l'idée qu'un régime qui se montre capable de tous les horreurs et qui a voué la mort à la monarchie aurait patienté aussi longtemps pour dégrader les princesses captives au Temple, y compris la reine. Il me semble même remarquable qu'elles auraient échappée à de telles violences lors de leur arrestation à Varennes. Et j'ai des théories là dessus...

Je ne connais pas beaucoup de Madame Royale, mais il serait une marque du caractère qu'elle a hérité de sa mère de surmonter avec la tête haute un tel évènement traumatisant (mon Dieu, la pauvre, combien de traumatismes n'a-t-elle pas subi dans sa vie ?), mais pour Mme de Soucy... Il faut songer aux conséquences. A-t-elle gardé le secret d'un enfant né d'un viol ?

Vicq d Azir a écrit:Je ne sais si l’on a déjà posté cet écrit de Marie-Thérèse qu’elle rédigea au Temple, sans doute durant la période entre l’exécution de Mme. Elisabeth et l’arrivée de Mme. Chanterenne.
La princesse y décrit une intrusion nocturne de municipaux dans sa chambre. Avec humour et vivacité, elle relate les faits … en vers, manière sans doute d’exorciser l’angoisse…

Voici le texte en clair, autant que j’aie pu le déchiffrer, puis le cliché du document :

« une nuit célèbre entre mille
 je dormais dans mon lit tranquille
 je fus éveillée tout d’un coup
 du bruit enragé des verroux
 on frappa bientôt à ma porte
 je répondis d’une voix forte
 eh bien qui est là que me veut-on
 sans discourir, ouvrez dit-on
 je me lève et mon cœur balance
 entre la crainte et l’espérance
 je croyois que j’allais partir
 de la tour j’espérois sortir
 de mes vêtements je me couvre
 j’accours vite à ma porte et j’ouvre
 on entre. au lieu de me parler
 de me dire il faut s’en aller
 d’un air sot chacun m’envisage
 puis ils s’en vont avec tapage
 fiers sans doute d’un tel exploit
 contents d’avoir fait leur emploi
 enragée alors je m’enferme
 de mon espoir voyant le terme
 trouvant que pour me venir voir
 ils abusoient de leur pouvoir
 en choisissant une heure indue
 pour se présenter à ma vue
 bientôt au lit je me remets
 sans avoir fait beaucoup d’apprêts
 la saison était avancée
 de froid je me sentois glacée
 une heure après minuit sonnoit
 mais tandis que je me plaignois
 la réflexion me fit taire
 j’avois eu peu de chose à faire
 en cet instant, de mon gardien,
 le sort fut pire que le mien

 pour ne connoître personne
 il avoit fallu qu’on le sonne
 il fut contraint d’aller là -bas
 je n’avais fait que deux pas
 je laissai ces tristes figures
 enfin je finis mes injures
 bientôt j’entens fermer la tour
 par mon gardien à son retour
 ce bruit calmant ma peine
 me fit dire alors en moi-même
 je puis en sûreté dormir
 je ne les verrai plus venir
 ayant enfin passer mes craintes
 je terminoi mes tristes plaintes
 après une heure de réveil
 je livrai mes sens au sommeil »

Ce document se trouve où, cher Vicq ?

Lady Bess a écrit:Cette hypothèse d'un viol ne me surprend pas du tout. Ce qui m'étonne c'est l'idée qu'un régime qui se montre capable de tous les horreurs et qui a voué la mort à la monarchie aurait patienté aussi longtemps pour dégrader les princesses captives au Temple, y compris la reine.

... des brutes avinées, sans scrupules et une pauvre gosse sans défense ...

Axel de Fersen écrit ce qu'il craignait pour les enfants de Marie-Antoinette après sa mort dans une lettre à sa sœur Sophie du 24 novembre 1793:

"Cet enfant [Louis XVII] m’intéresse encore, son sort augmente encore ma peine, et cette infortunée fille, que deviendra-t-elle, quelles horreurs, quelles humiliations ne lui fera-t-on pas subir ? Le cœur se déchire en y pensant."

(De Marie-Antoinette et le comte de Fersen, la correspondance secrète, Evelyn Farr)

Lady Bess a écrit:

Vicq d Azir a écrit:Je ne sais si l’on a déjà posté cet écrit de Marie-Thérèse qu’elle rédigea au Temple, sans doute durant la période entre l’exécution de Mme. Elisabeth et l’arrivée de Mme. Chanterenne.
La princesse y décrit une intrusion nocturne de municipaux dans sa chambre.

Ce document se trouve où, cher Vicq ?

Il n'a jamais été publié nulle part .  Sujet tabou.

J’ai trouvé ce document sur la toile, mais je n’arrive pas à retrouver la source…
Je crois me souvenir qu’il provient du fonds J B Gomin et qu’il sans doute passé ensuite dans les collections de Beauchesne. Mais il n’a pas été mis en vente quand cette collection a été dispersée…
Je vais encore chercher.
Le contenu m’a semblé intéressant car il rend bien compte des intrusions que subissaient les prisonniers aux Temple. Aussi la manière touchante qu’ utilise la princesse pour lutter contre l’angoisse : faire face, se lever, puis se recoucher, enfin … écrire des vers. Notez aussi la confiance qu’elle a en son gardien ( Gomin ?) …

Qui savait ?  Qui fermait les yeux ?  Ces monstres avaient une femme à leur merci.
Quand on pense au sort du petit Louis-Charles, comment s'étonner ?

Vicq d Azir a écrit: J’ai trouvé ce document sur la toile, mais je n’arrive pas à retrouver la source…
Je crois me souvenir qu’il provient du fonds J B Gomin et qu’il sans doute passé ensuite dans les collections de Beauchesne. Mais il n’a pas été mis en vente quand cette collection a été dispersée…
Je vais encore chercher.
Le contenu m’a semblé intéressant car il rend bien compte des intrusions que subissaient les prisonniers aux Temple. Aussi la manière touchante qu’ utilise la princesse pour lutter contre l’angoisse : faire face, se lever, puis se recoucher, enfin … écrire des vers. Notez aussi la confiance qu’elle a en son gardien ( Gomin ?) …

Mon cher Vicq, j'ai trouvé ce document dans lot numéro 166 d'une vente des papiers de Beauchesne en 2015. Je crois qu'il s'agit du document :" un brouillon écrit au Temple par Madame Royale dans l'hiver de 1794, après une visite nocturne faite par les commissaires de la commune"...

https://www.coutaubegarie.com/en/lot/22854/4695131?

Il y a des lots hyper intéressants et des documents d'une grande valeur historique dans cette collection.

Merci, chère Lady Bess d’avoir retrouvé l’origine de ce document.
J’étais pourtant présent à l’exposition de cette vente, mais je ne me le rappelais plus…
L’étude Coutau-Begarie a toujours présenté dans ses ventes des lots très intéressants sur les familles royales, en particulier Marie-Antoinette, mais pas seulement…
Cet écrit d’une princesse de 15 ans , séquestrée dans une tour médiévale est très émouvant. Si elle a pu trouver, comme je le pense, des gardiens tels que Gomin pour la protéger des fureurs de son temps, ceux-ci doivent faire l’objet de notre gratitude et notre admiration jusqu’à la fin des temps : ne pensez-vous pas ?

... si !

Je viens de retrouver le fac-similé de l’original du texte écrit au Temple par Madame Royale, après le une visite nocturne des municipaux.
Je le poste ici, car il est plus lisible que la version précédente. Je vous renvoie au texte déchiffré plus haut…

Merci, cher Févicq. Que pensez-vous de cette intrusion ? Croyez-vous que ces hommes se contentent de dévisager la petite Madame Royale et puis s'en vont ?
Pourquoi une nuit célèbre entre mille ?