Le château de Saint-Cloud

Quel bleu céleste d'une luminosité intense !!!

hardouin a écrit:
Après une coupure estivale (méritée :-), je poursuivrais avec l'appartement du roi parallèle à l'appartement de la reine, si cela intéresse nos membres.

Vous pensez !
  Nous vous retrouverons avec bonheur, cher Hardouin.  

Quelques vues du salon de Diane
Pour mémoire ce salon est situé dans le prolongement de la galerie d'Apollon et constitue sous Monsieur la chambre du roi. Mique le transforme en antichambre de la chapelle qu'il aménage le long de la galerie. Le salon tire son nom du décor du plafond peint par Mignard, conservé jusqu'à la fin du château, représentant au centre le triomphe de la déesse de la Nuit et dans les voussures des épisodes de sa légende
Il s'éclaire par trois fenêtres sur la cour d'honneur et par deux fenêtres sur le jardin dit "d'Apollon". Ces fenêtres encadrent la cheminée en marbre surmontée d'un tableau de Jérémie Delutel d'après Mignard représentant la famille du Grand Dauphin en 1692 (exemplaire à Versailles)


Le décor Louis XIV semble conservé jusque sous Louis-Philippe. Il comprend un bas-lambris, deux dessus de porte et des panneaux boisés ornés de trophées relatifs à Diane : arcs, flèches, armes de chasse, croissants de lune. Cinq panneaux d'étoffe garnissent les murs : un adossé à la galerie, deux entre les fenêtres et deux encadrant la porte donnant sur la chapelle. L'étoffe est décrite dans l'inventaire comme un "meuble de taffetas chiné à personnages et à colonnes de fleurs", ici évoqué par le taffetas du salon des jeux de la reine à Compiègne en attendant mieux.
Le mobilier est très simple, en bois peint en gris à motifs de perles, mais très important : un canapé, deux tête à tête (ou marquise), deux bergères, douze fauteuils à carreaux, six cabriolets, six chaises à carreaux, dix chaises, deux voyeuses, un tabouret de pied et un tabouret à éperon garnis "de même étoffe que le meuble", également utilisé pour les rideaux.






Quelques sièges de cet ensemble sont identifiés :
deux chaises au musée du Louvre, par Sené
https://collections.louvre.fr/ark:/53355/cl010112508

une des voyeuses :
https://www.gazette-drouot.com/article/pour-le-service-de-la-reine/4924
Je les ai utilisés pour évoquer l'ensemble du mobilier.
Cet ensemble était complété par un paravent à six feuilles en acajou et deux table en consoles en bois peint à l'imitation du marbre avec filets dorés.
L'absence d'éclairage laisse entendre que ce salon n'était utilisé que le jour.

Tout a fait superbe.

Cher Hardouin, sauriez vous où était localisé le Boudoir de la Reine ?

Merci, qu'entendez-vous par boudoir de la reine?

Par l'ordre 314 de juillet 1785 du garde meubles de la Couronne il est mentionné un Boudoir.
Je joins un photo d'une partie de cet ordre qui était relativement important.

C'est un peu compliqué, car l'ameublement porte sur l'année 1785, à un moment où le château est encore dans sa configuration précédant les travaux de Mique qui commencent en 1786 et qui bouleversent complètement la distribution du château. Daniel Meyer, dans son article sur les appartements de Louis XVI et Marie-Antoinette à Saint-Cloud, précise que cette distribution de 1785 à difficile à restituer.
Florence Austin indique cependant les choses suivantes :
"La Reine décida d'occuper de petites pièces au rez-de-chaussée de l'aile méridionale, dite du Fer à cheval, à l'ouest du grand escalier de Mansart. Son appartement se composait, outre d'une antichambre meublée de banquettes de Savonnerie, décor attendu de ce genre de salle, d'un salon des Nobles (...) qui donnait sur le Fer à Cheval. Un petit boudoir suivait, puis une longue chambre à alcôve avec trois fenêtres et une porte fenêtre en retour sur la terrasse. Enfin venait le Grand Cabinet. Le Roi était vraisemblablement logé dans l'appartement symétrique de celui de la Reine, de l'autre côté du grand escalier".

Sur la base Regards du CMN figure un plan de Mariette de la première moitié du XVIIIe qui représente le RDC du château. Peu de travaux semblent avoir été faits au XVIIIe car le château est peu habité par les Orléans, il est possible donc qu'il soit encore valable en 1785 :
https://regards.monuments-nationaux.fr/fr/recherche



L'appartement de la Reine correspond donc à cette partie du château (mais les limites en sont théoriques!), la cour d'honneur étant à droite et le Fer-à-Cheval à gauche.


Tel que je comprends le plan, s'il n'a pas changé entre Mariette et 1785, l'antichambre correspondrait au péristyle (n bas à droite), la chambre en suite, côté Fer-à-Cheval au salon des Nobles, la chambre à alcôve dans l'angle, avec le cabinet correspondant peut-être au boudoir qui s'éclaire sur le Fer-à-Cheval, et l'antichambre en haut à droite serait  le grand cabinet.

Merci pour ces informations intéressantes. Donc, à l'issue des travaux de Mique le boudoir a été fusionné avec la longue chambre d'alcôve.

Savez vous si ces pièces du RDC allouées à la Reine en 1785 étaient encore allouées à la Reine en 1787 et pour quelles utilisations ou ont elles étaient affectées à autre personne?

La comparaison entre les plans de 1785 et 1788 permet de saisir l'ampleur des changements. Effectivement la chambre a été fusionnée avec le boudoir et la garde robe pour former ce qui semble être une chambre.



La distribution a été complètement modifiée : ce qui constituait une grande partie de l'appartement de la reine en 1785 est devenu l'appartement du Dauphin et de son gouverneur, puis après sa mort en 1789, celui de Mme Elizabeth. C'est la partie en vert sur le plan.
La partie en marron correspond au petit appartement de la reine, situé donc sous les dernières pièces des appartements intérieur de la reine et du roi. C'est notamment dans la chambre de ce petit appartement que se trouvait la commode en laque de Choisy arrivée à Versailles il y a quelques années.

Cher hardouin.

Cette visite des chambres à Saint Cloud au temps de la reine est tellement fascinante..

Merci

J'attends toujours avec impatience la prochaine chambre

Est-il possible de visualiser le petit appartement de la reine au rez-de-chaussée ?

Leos

Cher Leos
Merci pour votre retour et votre intérêt.
Je n'ai pas encore restitué le petit appartement de la reine dans son état Marie-Antoinette, car il faut que j'aille avant aux archives nationales pour étudier le décor. Mais dès que c'est fait, je posterai les vues!
En attendant, retour de l'autre côté de la cour d'honneur,avec la galerie d'Apollon qui mène au salon de Diane.
La galerie d'Apollon fait partie des espaces qui ont été épargnés par les transformations de Richard Mique, et de manière assez curieuse, tels que l'inventaire de 1794 et un état des lieux de Poncet de la Grave datant de 1789 et  reproduit par Vatout permet de le comprendre, c'est un mobilier "historiciste" avant l'heure qui semble placé.
On trouve ainsi dans la galerie :
-16 torchères en bois sculpté et doré avec leurs girandoles provenant de la galerie de Versailles (retirées en 1770 pour laisser la place aux torchères actuelles)
-52 tabourets en bois doré recouverts de velours cramoisi, restitués ici en style Louis XIV
-4 tables en bois peint à l'imitation du marbre avec rehauts dorés. J'ai utilisé les modèles des bosquets des jardins de Versailles (notamment le bosquet du Marais) et d'exemplaires sur le marché de l'art pour évoquer ces tables.
-des bustes posés sur gaines, d'empereurs, d'impératrices de l'Antiquité et de rois et de reines capétiens, en marbre ou en bronze, qui sont indiqués placés devant les trumeaux entre les fenêtres. Ils sont ici évoqués par des bustes de Versailles
-une statue en pied d'Henri IV au fond de la galerie entre les deux fenêtres donnant sur Paris et quatre bustes de rois de France (François 1er, Henri II, Charles IX, Henri III) placés sur les consoles.

Voici donc quelques vues de cette restitution de l' état Louis XVI :
Vue d'ensemble depuis l'entrée ; le salon de Diane est dans le fond à gauche


Vue vers le salon de Mars, l'un des salons des jeux de la reine.


Les porte-fenêtres donnant sur la chapelle. La porte de glaces est ouverte sur un petit escalier (dont on voit la rampe en fer vert) qui permettait aux courtisans de descendre dans la nef


L'extrémite Est de la galerie avec la statue d'Henri IV (ici une évocation)


Le lien vers la description de Poncet de la Grave, p 384 pour la galerie :
https://www.google.fr/books/edition/Le_Palais_de_Saint_Cloud_souvenirs_histo/ebxAAAAAYAAJ?hl=fr&gbpv=1&dq=galerie+apollon+saint-cloud+Charles+IX&pg=PA384&printsec=frontcover

L'effet général est toujours aussi époustouflant. Ce ne sera pas long avant que votre modélisation soit adaptée pour une déambulation 3D qui nous fera découvrir Saint-Cloud ce monument perdu non seulement dans son volume, mais aussi au fils de ses évolutions...

Quelle splendeur, en effet ! Et je trouve cet état "Marie-Antoinette" tellement plus beau que l'état "Napoléon", notamment en 1810, lors de son mariage civil avec Marie-Louise, qui avait choisi de surcharger les murs d'une multitude de tableaux de petit format pillés au Louvre (entre autres), accrochés un peu n'importe comment. Ici, les élégantes proportions du goût de Monsieur, frère de Louis XIV, au XVIIe siècle, ont été parfaitement respectées par les derniers souverains de l'Ancien Régime. Merci, Hardouin, pour ces magnifiques évocations. Il faudrait que vous rassembliez, en un seul endroit, tout ce que vous avez déjà fait sur les Tuileries, et tout Saint-Cloud à un autre. Ces deux (superbes) monuments disparus sont des jalons essentiels de l'histoire de France... Merci encore à vous !

Reine Hortense a écrit: Merci, Hardouin, pour ces magnifiques évocations. Il faudrait que vous rassembliez, en un seul endroit, tout ce que vous avez déjà fait sur les Tuileries, et tout Saint-Cloud à un autre. Ces deux (superbes) monuments disparus sont des jalons essentiels de l'histoire de France...

Mille fois d'accord avec Reine Hortense ! Peut-être une adaptation de votre modélisation pour une déambulation 3D comme le suggère notre ami Lucius juste en amont ? Ce serait formidable !!! Votre travail est prodigieux, cher Hardouin, il enrichit ce sujet au-delà de toute expression !

Chers amis comment ne pas vous suivre et partager le même vœu?

Les pages consacrées à Saint-Cloud sont parmi les plus intéressantes et les plus belles de ce Forum qui pourtant n'en manque pas!
Merci Hardouin, rien ne presse mais nous comptons sur vous !  

Merci Hardouin pour votre retour sur les appartements du RDC.

Les vues de la galerie sont superbes.

Par curiosité, combien de temps cela vous prend il pour développer numériquement les vues d'une pièce? Je me doute que le travail en amont de collecte des données en vue de la modélisation est aussi très conséquent.

C'est très beau en effet, merci pour ce remarquable travail !

quel enthousiasme, je ne peux que céder à ces demandes!
Cependant cela va demander du travail, même si je vois comment combiner visite en 360 et passage d'une pièce à l'autre.

Et pour vous répondre, cher Capin, le temps de réalisation est assez variable, mais il faut compter une petite semaine pour réaliser l'ensemble du mobiilier d'une pièce, à raison d'une dizaine d'heures de travail par jour.

L'ordre de brûler le portrait du second fils de Capet, trouvé parmi le mobilier à vendre du château de Saint-Cloud, est donné par le Comité de Salut public de la Convention thermidorienne : la destruction des représentations de la royauté et des effigies des membres de la dynastie demeure une nécessité profonde que ne tempère aucunement le renversement politique de la réaction thermidorienne.

... par cet arrêté du Comité de Salut public, le 7 frimaire An III soit le 27 novembre 1794 .
( Archives nationales. )

Merci pour cette archive. J'ai du mal à lire : le nom du peintre était-il précisé ?

Mais non, malheureusement aucune indication sur le nom du peintre .
Je m'arme d'une grosse loupe pour la transcription .  
C'est seulement le deuxième item qui concerne la destruction du portrait de Louis-Charles.



Capet     Bp ____________________              Du 7 frimaire             

Sur le rapport qui a été fait par un membre du Comité qu'un portrait du second fils de Capet avait été pris par Héron à Saint-Cloud et déposé au Comité, ..... par leur lettre du 26 brumaire des commissaires chargés de la vente du mobilier de Saint-Cloud en demandaient une décharge.
Arrête que ledit portrait sera sur le champ brûlé en présence du Comité. Ce qui a été exécuté à l'endroit même, arrête qu'une expédition sera adressée auxdits commissaires pour leur servir de décharge.
Signé par :  Bentabole,  Bourdon de l'Oise,  ....., Garnier ( de la Saube ? ), Réverchon, Levasseur, Clauzel, Barras .....


C'est tout.
Le reste ne concerne pas la destruction de ce tableau.

Merci d'avoir pris le temps de recopier cet extrait.

Ce Héron qui fait main basse sur le portrait de Louis-Charles ( pour finalement le brûler ) était vraiment le prototype du révolutionnaire que nous exécrons : ami intime de Marat ( dont il fera l'éloge funèbre ) , il est le 10 août à la tête du bataillon des Marseillais. Il participe ensuite aux massacres de Septembre, si l'on en croit Sénar. Devenu agent du Comité de sûreté générale, il est responsable de l'arrestation de l'ancien ministre Lebrun-Tondu et de Fabre d'Églantine. Il est envoyé par Robespierre pour aider Carrier à Nantes à qui l'Incorruptible écrit : « ... je sais que tes tâches sont multiples et ardues aussi je t’envoie le citoyen Héron, du Comité de sûreté générale qui veillera à cette résurrection citoyenne de la carrière de Misery. Salut fraternel et républicain »

J'ai réalisé et offert au domaine national une maquette de la chambre de l'empereur afin de comprendre l'aspect et l'environnement du lit présenté dans les collections. La présentation de la maquette est disponible sur le site du Domaine national

https://www.facebook.com/domainenationalsaintcloud/videos/334038099641867

Pour information, cette chambre est l'ancien salon de la gouvernante des Enfants de France.
bonne visite!

Cher Hardouin, j'apprécie beaucoup vos reconstitutions du château de Saint-Cloud, qu'elles se réfèrent à l'époque de Marie-Antoinette, comme à celle de l'Empereur. Mais j'ai un très gros faible pour le palais des Tuileries, peut-être encore plus méconnu que Saint-Cloud, s'il est possible, car situé en plein cœur de Paris, et donc insupportablement oublié. Comme vous le savez évidemment, beaucoup de vos merveilleuses restitutions des Tuileries sous le Premier Empire ne sont plus disponibles sur les pages qui les hébergeaient. Ne vous serait-il pas possible de les "rapatrier" ici, par exemple dans le sujet qui existe déjà, me semble-t-il, sur les aménagements du palais des Tuileries sous Napoléon Ier ? Certes, il s'agit d'aménagements postérieurs au règne de Marie-Antoinette, mais seuls quelques décors (muraux et tapissiers) et la distribution des pièces, du moins si j'ai bien compris le sens de votre travail, sont différents. Ce n'est, je crois, que sous Louis-Philippe, et plus tard surtout sous Napoléon III, que les changements architecturaux seront conséquents. Quoi qu'il en soit, soyez sûr que votre travail est reconnu et apprécié.