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L'invention du portrait au profil dit physionotrace

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L'invention du portrait au profil dit physionotrace Empty L'invention du portrait au profil dit physionotrace

Message par Mme de Sabran Lun 13 Mar 2023, 23:18

Le physionotrace est une invention de Gilles-Louis Chrétien (1754-1811), graveur et portraitiste.

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Portra22
Portrait de Monsieur Chrétien (G L),
musicien du Roy, inventeur du physionotrace et graveur.jpg



Chrétien était, de son état, violoncelliste dans les concerts de la Cour, à Versailles   ( Alfred Begis, L’Intermédiaire des chercheurs et curieux ) . En 1785 ou 1787  ( les sources ne se mettent pas d'accord ) , il inventa le physionotrace et l’employa, dès 1788, à l’exécution des portraits à Paris.

À l'origine se trouve le portrait dit « immobile », portrait de profil, réalisé aux pastels, caractérisé par une facture assez naïve, réalisé par des artistes qui cheminaient de bourg en bourg et proposaient leurs services aux notables locaux. Pour les réaliser, on tendait derrière le sujet qui prenait la pose une toile noire afin que le profil se détache mieux. Leur taille est relativement petite, car les artistes transportaient les feuilles de papier dans des boîtes à dos. Certains étaient réalisés sur papier bleu.

Principe :

« Telle est, par exemple, la dispute sur la propriété du physionotrace, invention possédée par Mr. Bouchardy, vendue par Mme veuve Chrétien, et réclamée par Mr. Quenedy   Shocked  ; invention au moyen de laquelle pour la modique somme de 25 fr. on vous fait votre portrait comme une carte de visite, en vous donnant 100 exemplaires de la planche. Nous avons cru devoir signaler cette utile découverte, principalement à l’usage de tant d’auteurs modestes que le public est impatient de connaître, et de ces dames qui se ruineraient bientôt, toutes riches qu’elles sont, si elles faisaient exécuter par Isabey tous les portraits qu’elles donnent ».
( « Événemens, anecdotes », Mercure de France, vol. 48,‎ 6 juillet 1811 )

L'invention de Chrétien mécanisa le dessin du portrait par l'usage d'un pantographe équipé d'un œilleton de visée.

Un pantographe est un instrument de dessin, formé de tiges articulées, qui permet de reproduire un motif à l'échelle exacte, agrandie ou réduite, en utilisant les propriétés de l'homothétie pour conserver les proportions entre le dessin original et la copie.

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Pantog10

Comme ceci :    Very Happy

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Pantog10

 Le mathématicien et jésuite Christoph Scheiner,  L'invention du portrait au profil dit physionotrace Tzolz776
avait énoncé le principe du pantographe de manière scientifique en 1603.  Il publia dans un traité en latin intitulé Pantographice seu ars delineandi (1631), des gravures reproduisant l'instrument de son invention : construit en bois, il est utile pour dupliquer des diagrammes selon des rapports d'échelles variables. Un premier bras est fixe par rapport au support, le bras central est prolongé par un petit pointeur, et le dernier est muni d'un crayon. En déplaçant le pointeur sur le diagramme, une copie du diagramme est réalisée par le crayon sur une autre feuille de papier. La dimension de l'image produite peut être changée en modifiant la dimension du parallélogramme.

Au XVIIIe siècle, en France.
Un article consacré au pantographe apparaît dans le volume XI (p. 827) de l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert :

« PANTOGRAPHE, s.m. (Art du dessein.) le pantographe ou singe, est un instrument qui sert à copier le trait de toutes sortes de dessins & de tableaux, & à les réduire, si l'on veut, en grand ou en petit ; il est composé de quatre regles mobiles ajustées ensemble sur quatre pivots, & qui forment entre elles un parallélogramme. A l'extrémité d'une de ces regles prolongées est une pointe qui parcourt tous les traits du tableau, tandis qu'un crayon fixé à l'extrémité d'une autre branche semblable, trace légèrement ces traits de même grandeur, en petit ou en grand, sur le papier ou plan quelconque, sur lequel on veut les rapporter… »

L'invention du portrait au profil dit physionotrace 1024px10
Pantographe, planche III du supplément illustré de l'Encyclopédie, gravure en taille douce de Robert Bénard (1763).
Diderot et d'Alembert — Bibliothèque nationale de France

Il y est précisé plus loin qu'un certain Claude Langlois (1703-1760), ingénieur du roi, présenta en 1743 devant l'Académie des sciences (Paris) un principe amélioré du pantographe. Le pantographe est décrit encore plus précisément dans la deuxième livraison du Recueil de planches sur les sciences, les arts libéraux et les arts méchaniques (1763) qui complète l'édition de l'Encyclopédie. La IIIe planche, qui accompagne cette description, est intitulée [sic] Description et usage du Pantographe, nommé communément "Singe", considérablement changé & perfectionné par Canivet, ingénieur du Roi & de MM. de l'Académie royale des Sciences pour les instruments de Mathématiques. Le Canivet en question est sans doute Jacques Canivet (1721-1774), constructeur d'instruments astronomiques et optiques, élève de Langlois.

Or donc, les amis, et notre physionotrace ?!  L'invention du portrait au profil dit physionotrace 693620883

Eh bien, en déplaçant l'œilleton en suivant les contours du sujet, Chrétien faisait bouger à volonté un crayon qui dessinait le profil du sujet. Le pantographe formé d’un double parallélogramme articulé servait à tracer un dessin aux dimensions réelles. Le portrait grandeur nature, appelé « grand trait », était réalisé en quelques minutes et pouvait être colorié aux pastels par un dessinateur. Si le client le désirait, il était possible dans un second temps de réduire avec un autre pantographe le portrait et de le graver sur une plaque de cuivre à l'eau-forte et d'en tirer une douzaine, pour un prix extrêmement modique.
Les portraits gravés portaient le nom et l'adresse de l’opérateur, par exemple : « Dess. aux Physionotrace et gravé par Quenedey, Rue Neuve de Petits Champs n° 15 à Paris, 1808 ». Ils pouvaient également mentionner le nom du modèle, mais la plupart sont anonymes. Ces gravures pouvaient aussi être imprimées en couleurs ou coloriées à la main. De plus, ce procédé permettait de réaliser des portraits de trois-quarts et même de face. La publicité indique que des portraits en pied pouvaient être réalisés.

Par extension, on appelle physionotrace aussi bien l’appareil, le grand trait ou les portraits gravés ad vivum.

Fils d'Étienne Quenedey, simple vigneron et tonnelier, aîné d'une famille de huit enfants, Edme Quenedey est destiné à la prêtrise. Cependant il va suivre les cours de dessin de Dijon fondée par François Devosge, puis gagne sa vie comme précepteur et restaurateur de tableaux.

L'invention du portrait au profil dit physionotrace 800px132
Autoportrait d'Edme Quenedey, 1803, physionotrace et aquatinte, Honolulu Museum of Art,
gravé par Soliman Lieutaud.

Spoiler:

En 1785, Edme Quenedey s’installe à Paris peintre de portrait miniature. Ayant appris l’invention par Chrétien du physionotrace, il le rencontre à Versailles et s’associe avec lui en avril 1788. Le 26 juin 1788, Quenedey passe une publicité dans le Journal de Paris pour annoncer son activité au 45 rue des Bons-Enfants. Le portrait grandeur nature, appelé « grand trait » coûte six livres, pour 15 livres, on obtient douze épreuves du portrait réduit et gravé, enfin il en coûte trois livres pour chaque gravure coloriée.

L'invention du portrait au profil dit physionotrace 320px-13
Physionotrace de Quenedey
E. Quenedey (+1830) — Leder ist Brot, Beitr. z. norddt. Landes- und Archivgeschichte, Schwerin 2011, S.207


Quenedey reçoit les clients et manipule le physionotrace, exécutant les grands traits. Il réduit et parachève les dessins qu'il adresse à Chrétien qui grave les portraits. En novembre 1788, trois cents portraits avaient été produits, et mille un an plus tard.
Mais le 18 août 1789, une rupture intervient entre Quenedey et Chrétien qui vont exercer chacun de leur côté.

En 1790, le studio d’Edme Quenedey ne désemplit pas. En quelques minutes seulement, il propose de faire le profil le plus ressemblant qui soit, pour un prix accessible à toutes les bourses. Le profil est réalisé grâce à une machine : le physionotrace, réputé pour tracer la physionomie la plus ressemblante possible. Le succès est énorme : plusieurs milliers de clients se pressent, qu’ils soient parisiens, venus des colonies, des départements métropolitains ou même de l’étranger comme le futur président des États-Unis Jefferson. Les premiers hommes politiques comprennent vite l’importance d’être reconnus : Bailly, le premier maire de Paris, mais aussi La Fayette, commandant de la garde nationale, et bien d’autres, diffusent ces petits portraits de papier qui donnent d’eux une image sympathique et modeste.
https://parcoursrevolution.paris.fr/fr/points-interet/96-le-palais-royal-coeur-battant-de-la-revolution

Quenedey a réalisé le portrait d’un grand nombre de personnages célèbres de la Révolution, du Consulat, et de l’Empire comme La Fayette, Stendhal (1807), Germaine de Staël, mais aussi des musiciens (Berton, Cherubini, Méhul…), des parlementaires ou des militaires (le général de Lauberdière).  

Le nombre de personnes dont le portrait a été réalisé par ce procédé est estimé à entre quatre et six mille. René Hennequin, l’historien de Quenedey, a catalogué 850 portraits pour la première année (1788-1789). Au salon de 1796, six cents physionotraces ont été exposés.

Pour certains, peu connaisseurs, ils sont d'une facture standard, inexpressifs et sans grande valeur artistique. D'autres estiment qu'ils représentent une source historique majeure car ils représentent les portraiturés d'après nature sans le filtre de l'artiste.

Les « physionotypes » sont considérés comme la photographie de l'époque.
Le cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale de France en conserve 2 800.

Ils constituent, outre le portrait de personnalités célèbres ou moins connues de la société française sous la Révolution, de la famille royale aux Conventionnels, une source inestimable de renseignements sur l'histoire du costume et de la coiffure à cette époque.

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Maximi10
Physionotrace de Maximilien Robespierre
par Gilles-Louis Chrétien et Jean-Baptiste Fouquet, 1792

En 1793, Charles Balthazar Julien Fevret de Saint-Memin,  L'invention du portrait au profil dit physionotrace Tzolz777
Français émigré aux États-Unis, emmène l'invention et en répand l'usage en exécutant les nombreux portraits de profil des fondateurs révolutionnaires de ce pays au physionotrace.  
Entré comme cadet le 1er avril 1784, il est nommé enseigne le 27 avril 1788 aux Gardes-Françaises. Il quitte la France à la Révolution et rejoint l'armée des Princes. Réfugié en Suisse avec ses parents, il y apprend la gravure. Avec ses parents il rejoint le Canada en 1793 puis Philadelphie où sa mère fonde une école de filles. Associé à New York avec l’artiste français Thomas Bluget de Valdenuit (1763-1846), il introduit le portrait au physionotrace aux États-Unis. Il rentre en France en 1814 après avoir laissé plusieurs centaines de portraits au physionotrace dont George Washington, Thomas Jefferson, le chef mandan Sheheke et sa femme Yellow Corn. Il est nommé conservateur du musée de Dijon.

En 1796, Edme Quenedey s'installe avec sa femme et leur deux filles à Bruxelles et à Anvers, avant d'émigrer à Hambourg. De retour à Paris en 1801, il reprend son activité 15, rue des Petits-Champs jusqu'à sa mort, en 1830. Quenedey avait enseigné la miniature et la gravure à ses filles et elles l’aidaient toutes deux à exécuter ses portraits. Sa fille Aglaé sera d’abord son assistante, avant de lui succéder.

En 1807, Chrétien devint musicien de Napoléon Ier. Il fit représenter un opéra et écrivit un livre, La Musique considérée comme science naturelle (Paris, chez l’auteur et Michaud, 1811), avec des planches, qu’il grava lui-même en 1811, année de sa mort.

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Tzolz778
La Musique considérée comme science naturelle

Après la mort de Chrétien, qui avait épousé en juin 1792 Agathe-Louise-Pelouse Clairefontaine, un peintre en miniature, Étienne Bouchardy, dont l’atelier était au Palais-Royal, no 82, se qualifia « successeur de Chrétien, inventeur du physionotrace » et ,plus tard, probablement par suite d’une convention avec les héritiers Quenedey, « de successeur de Quenedey et de Chrétien pour l’exploitation du procédé du physionotrace », mais le goût avait changé : la lithographie, qui était survenue, accapara bientôt la clientèle du portrait et des amateurs pour disparaitre à son tour, comme le physionotrace, devant le daguerréotype et la photographie.
Il réalise des miniatures sur ivoire, entre autres, le portrait en miniature du prince Louis-Joseph de Bourbon, prince de Condé (1736-1818)2.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Pantographe_(dessin)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Edme_Quenedey_des_Riceys
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gilles-Louis_Chr%C3%A9tien
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bouchardy
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Balthazar_Julien_F%C3%A9vret_de_Saint-Memin

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Message par Mme de Sabran Mar 14 Mar 2023, 19:19


Je poursuis sur ma lancée .  Very Happy

La simplicité du procédé :
le sujet était placé de profil  devant un papier transparent. Un éclairage projetait l'ombre sur ce papier.

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Physio11

Le portrait le plus saillant de la collection du comte Sforza, d'une insigne rareté, dans un parfait état de conservation, est le physionotrace de Louis XVII, qui connut un nombre limité de représentations de son vivant; ce portrait réalisé vers 1791, alors que l'enfant-roi au destin tragique n'était que prince royal, avant son emprisonnement au Temple ...

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Physio10

https://www.we-art-together.fr/texte.php?id=140

La famille royale :

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Tzolzo85

L'invention du portrait au profil dit physionotrace S-l50012

L'invention du portrait au profil dit physionotrace Meille10

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Message par Gouverneur Morris Mar 14 Mar 2023, 20:53

Ah, je comprends mieux. Pour faire simple, il s'agit ni plus ni moins que du procédé de la chambre noire (qui plut tant à Canaletto) appliqué au portrait, c'est à dire peindre en surlignant les traits de l'image projetée ?

https://fr.wikipedia.org/wiki/Chambre_noire
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