L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
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Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Majesté a écrit:Voici le testament de Louis XVI :
Au nom de la très Sainte Trinité, du Père, du fils et du Saint Esprit. Aujourd’hui vingt-cinquième de décembre mil sept cent quatre vingt douze. Moi, Louis, XVIème du nom, Roi de France, étant depuis plus de quatre mois enfermé avec ma famille dans la Tour du Temple à Paris, par ceux qui étaient mes sujets, et privé de toute communication quelconque, même depuis le onze du courant avec ma famille. De plus impliqué dans un Procès dont il est impossible de prévoir l’issue à cause des passions des hommes, et dont on ne trouve aucun prétexte ni moyen dans aucune loi existante, n’ayant que Dieu pour témoin de mes pensées, et auquel je puisse m’adresser. Je déclare ici en sa présence, mes dernières volontés et mes sentiments...
Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Le 20 Janvier, aussitôt qu’il se trouva seul avec M. Edgeworth de Firmont, le digne confesseur de son choix, il tira de sa poche ce même testament cacheté, dont il rompit le sceau, en lui disant :
" Voici un écrit que je suis bien aise de vous communiquer. "
"Tous ceux qui ont lu cette pièce intéressante et si digne d’un Roi chrétien, ajoute M. de Firmont, jugeront aisément de l’impression profonde qu'elle dut faire sur moi. Mais ce qui les étonnera sans doute, c’est que ce prince eut la force de la lire lui-même, et de la lire jusqu’à deux fois. Sa voix était ferme, et il ne paraissait d’altération sur son visage que lorsqu’il rencontrait des noms qui lui étaient chers. Alors toute sa tendresse se réveillait, il était obligé de s’arrêter un moment, et ses larmes coulaient malgré lui ; mais, lorsqu’il n’était question que de lui-même et de ses malheurs, il n'en paraissait pas plus ému que ne le sont communément les autres hommes lorsqu’ils entendent le récit des maux d’autrui. »
Le 21 Janvier, au moment de quitter le Temple pour la dernière fois, le Roi, s’adressant à ceux qui l’entouraient, leur dit :
" Y a-t-il parmi vous quelque membre de la Commune ? Je le charge d’y déposer cet écrit."
Sur leur réponse, il l’offrit d’abord à un municipal, qui le refusa avec dureté, et ensuite à un autre, nommé Gobeau, en lui ajoutant, dit Cléry :
"Remettez ce papier, je vous prie, à la Reine..., à ma femme : vous pourrez en prendre lecture ; il y a des dispositions que je désire que la Commune connaisse."
.
Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
C'est bouleversant; il y a aussi ( ou je suis mal renseignée ?) l'alliance qu'il remet à son confesseur en lui demandant de dire à sa femme qu'il l'a portée jusqu'à la fin.....?
Invité- Invité
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Louise-Adélaïde a écrit: Merci, Reinette ! je connais bien l'église Saint Jérôme, oui.......Là, ce matin, ce sera une petite prière dans mon église au creux d'une journée lourde et passablement compliquée; les euh, personnes-se-souvenant-de-façon-"figée" on va le dire comme ça, bof bof bof......
Ici, on y pense de façon différente.....
Et, moi qui suis croyante, je me dis avec joie que là haut, Louis XVI a été enfin compris et estimé...... :c^ùù!!:
Exactement ! boudoi30
Invité- Invité
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Quel document émouvant !
Merci, cher Févicq !!!
L'écriture est fine, appliquée, régulière . Les mots sont tracés d'une main ferme qui ne tremble pas .
Pauvre Loulou, tout de même ...
Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Ci-dessus, un fac-simile d'époque Restauration,que Louis XVIII faisait diffuser le 21 janvier...
Louis XVI quant à lui a écrit de sa main deux exemplaires (au vu de la phrase répétée et biffée, il s'agit ici du fs du 2e exemplaire). Il en a confié un à Malesherbes, qui l'avait sur lui quand il fut incarcéré à Port Royal. Un seul (celui des Archives Nationales) est parvenu jusqu'à nous.
Louis XVI quant à lui a écrit de sa main deux exemplaires (au vu de la phrase répétée et biffée, il s'agit ici du fs du 2e exemplaire). Il en a confié un à Malesherbes, qui l'avait sur lui quand il fut incarcéré à Port Royal. Un seul (celui des Archives Nationales) est parvenu jusqu'à nous.
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Ah, ce n'est donc pas le testament original !
Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
J' essaie de retrouver la photo de l'original, conservé aux Archives...
Mais ce FS. est assez fidèle, contrairement à son "pendant" de la dernière lettre de la Reine, qu'on a nettoyé, corrigé, pour le rendre plus lisible... Ce qui a permis à un "historien" tendancieux et pressé, dans les années cinquante, d' échafauder toute une théorie sur la nature apocryphe de cette sublime lettre: pensez donc, elle n'avait pas de fautes d'orthographe,et la Reine en faisait tant... En effet, elle en faisait: on en dénombre plus de 45 sur l'original...
Mais ce FS. est assez fidèle, contrairement à son "pendant" de la dernière lettre de la Reine, qu'on a nettoyé, corrigé, pour le rendre plus lisible... Ce qui a permis à un "historien" tendancieux et pressé, dans les années cinquante, d' échafauder toute une théorie sur la nature apocryphe de cette sublime lettre: pensez donc, elle n'avait pas de fautes d'orthographe,et la Reine en faisait tant... En effet, elle en faisait: on en dénombre plus de 45 sur l'original...
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Bernard Pivot lui aurait mis un zéro pointé ! :
Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Elle s'était pourtant nettement améliorée quand on compare avec ses lettres d'adolescente. :
Invité- Invité
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
J'y suis déjà allé. dans la chapelle souterraine, il y a une espèce de petit musée consacré aux missionnaires. On peut y voir notamment une cangue chinoise qui a été utilisée pour les torturer
_________________
"Je sais que l'on vient de Paris pour demander ma tête ! Mais j'ai appris de ma mère à ne pas craindre la mort, et je l'attendrai avec fermeté !"
Marie Antoinette
attachboy- Messages : 1492
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Oui, c'est ça. Malheureusement, aucun rappel de l'existence d' Edgeworth... Les missionnaires cités remontent au plus au début du XIXe
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
.
Pendant la nuit du 22 au 23 janvier, l'abbé du Puget, aumônier du Roi, fut introduit dans le cimetière de la Madeleine, et de concert avec le chef des fossoyeurs, il y revêtit ses habits sacerdotaux. Pendant qu'il y récitait l'office des morts à la lueur d'une lanterne sourde, il entendit un vacarme affreux à la porte du cimetière ; c'était une patrouille de bonnets-rouges, et comme il ne douta pas qu'ils n'eussent aperçu de la lumière, et qu'ils ne finissent par enfoncer la porte, il se hâta de procéder à la bénédiction de la fosse où l'on avait jeté le corps du Roi, et quand il se fut acquitté de cette pieuse fonction, pour laquelle il avait été commis par l'abbé de Dampierre :
— Restez ici, dit-il au fossoyeur, et tâchez de vous sauver tandis qu'ils vont être occupés de moi....
Il s'achemina du côté de cette porte, en surplis, avec son étole et sa croix de St-Lazare ; ... il ne doutait pas de marcher au-devant d'une mort certaine ; mais il espérait charitablement que la fureur de ces révolutionnaires allait s'acharner et s'épuiser sur lui.
Tout en avançant dans une obscurité profonde, et dans un trouble qui n'était pas moins profond, il sentit ses deux pieds glisser sur le bord d'une fosse dans laquelle il tomba sur une bière qu'on n'avait pas encore eu le temps de recouvrir de terre, et sur laquelle il se trouva tout naturellement étendu, comme pour y recevoir le coup de la mort.... Quand les sectionnaires eurent forcé la porte et qu'ils eurent fait irruption dans le cimetière, ils n'y aperçurent qu'un autre sans-culotte en bonnet rouge et en sabots qui piochait à la clarté d'une petite lanterne, et qui leur dit :
— Pourquoi donc venez-vous troubler les bons citoyens ? Est-ce que je savais que vous étiez des patriotes ? Vous voyez bien qu'il faut que je travaille la nuit, car voilà une fosse que je n'ai pas encore eu le temps de combler ( ... et c'était celle où se trouvait l'Abbé du Puget. )
— C'est vrai, se dirent les hommes de la patrouille, et ils s'en allèrent.
Ce fossoyeur de la Madeleine avait nom Brutus Gauthier. Nous lui fîmes donner une cinquantaine de mille francs en assignats, ce qui ne le rendit pas bien riche ; mais l'abbé du Puget l'a revu plusieurs fois depuis notre mise en liberté, et si je ne tarde pas à mourir, ainsi qu'il est présumable, ayez la bonté de ne pas lui retrancher les cinquante francs que je lui fournis sur une pension de cinquante écus, à l'effet de payer l'apprentissage de son fils Mutius-Scévola Gauthier, qui se destine à l'épinglerie .
( Mme de Créquy : Souvenirs )
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Pendant la nuit du 22 au 23 janvier, l'abbé du Puget, aumônier du Roi, fut introduit dans le cimetière de la Madeleine, et de concert avec le chef des fossoyeurs, il y revêtit ses habits sacerdotaux. Pendant qu'il y récitait l'office des morts à la lueur d'une lanterne sourde, il entendit un vacarme affreux à la porte du cimetière ; c'était une patrouille de bonnets-rouges, et comme il ne douta pas qu'ils n'eussent aperçu de la lumière, et qu'ils ne finissent par enfoncer la porte, il se hâta de procéder à la bénédiction de la fosse où l'on avait jeté le corps du Roi, et quand il se fut acquitté de cette pieuse fonction, pour laquelle il avait été commis par l'abbé de Dampierre :
— Restez ici, dit-il au fossoyeur, et tâchez de vous sauver tandis qu'ils vont être occupés de moi....
Il s'achemina du côté de cette porte, en surplis, avec son étole et sa croix de St-Lazare ; ... il ne doutait pas de marcher au-devant d'une mort certaine ; mais il espérait charitablement que la fureur de ces révolutionnaires allait s'acharner et s'épuiser sur lui.
Tout en avançant dans une obscurité profonde, et dans un trouble qui n'était pas moins profond, il sentit ses deux pieds glisser sur le bord d'une fosse dans laquelle il tomba sur une bière qu'on n'avait pas encore eu le temps de recouvrir de terre, et sur laquelle il se trouva tout naturellement étendu, comme pour y recevoir le coup de la mort.... Quand les sectionnaires eurent forcé la porte et qu'ils eurent fait irruption dans le cimetière, ils n'y aperçurent qu'un autre sans-culotte en bonnet rouge et en sabots qui piochait à la clarté d'une petite lanterne, et qui leur dit :
— Pourquoi donc venez-vous troubler les bons citoyens ? Est-ce que je savais que vous étiez des patriotes ? Vous voyez bien qu'il faut que je travaille la nuit, car voilà une fosse que je n'ai pas encore eu le temps de combler ( ... et c'était celle où se trouvait l'Abbé du Puget. )
— C'est vrai, se dirent les hommes de la patrouille, et ils s'en allèrent.
Ce fossoyeur de la Madeleine avait nom Brutus Gauthier. Nous lui fîmes donner une cinquantaine de mille francs en assignats, ce qui ne le rendit pas bien riche ; mais l'abbé du Puget l'a revu plusieurs fois depuis notre mise en liberté, et si je ne tarde pas à mourir, ainsi qu'il est présumable, ayez la bonté de ne pas lui retrancher les cinquante francs que je lui fournis sur une pension de cinquante écus, à l'effet de payer l'apprentissage de son fils Mutius-Scévola Gauthier, qui se destine à l'épinglerie .
( Mme de Créquy : Souvenirs )
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Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Je ne connaissais pas cette terrible histoire. Merci.
Invité- Invité
La mort de Louis XVI
Je viens de tomber sur cette vidéo d'un goût...particulier :roll: :
Bien à vous.
Bien à vous.
Invité- Invité
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
;
;;21 janvier 1793 :
A cinq heures, Cléry allume le feu. Au peu de bruit qu’il fait, Louis XVI ouvre les yeux, tire son rideau :
- Cinq heures sont-elles sonnées ?
- Sire, elles le sont à plusieurs horloges, mais pas encore à la pendule.
- J’ai bien dormi, dit le Roy, j’en avais besoin, la journée d’hier m’avait fatigué. Où est Monsieur de Firmont ?
- Sur mon lit.
- Et vous ? où avez-vous dormi ?
- Sur cette chaise.
- J’en suis fâché, murmure Louis XVI, soucieux toujours du bien-être de ses serviteurs.
- Ah, Sire, dit Cléry en lui baisant la main, puis-je penser à moi dans ce moment ?
Il habille et coiffe son maître devant plusieurs municipaux qui, sans respect, sont entrés dans la chambre.
Puis il transporte une commode au milieu de la pièce pour servir d’autel.
Revêtu de la chasuble, l’abbé commence la messe, que sert Cléry.
Le Roy l’entend à genoux et reçoit la communion, il remercie ensuite le valet de chambre de ses soins et lui recommande son fils :
- Vous lui remettrez ce cachet, vous donnerez cet anneau à la Reine, dites-lui que je le quitte avec peine… Ce petit paquet contient des cheveux de toute ma famille, vous le lui remettrez aussi. Dites à la Reine, à mes chers enfants, à ma soeur, que je leur avais promis de les voir ce matin, mais que j’ai voulu leur épargner la douleur d’une séparation nouvelle…
Essuyant ses larmes, il murmure alors :
- Je vous charge de leur faire mes adieux.
Il s’est approché du feu, y réchauffe ses mains froides. Il a demandé des ciseaux pour que Cléry lui coupe les cheveux au lieu du bourreau. Les municipaux, défiants, les refusent.
Dans l’aube triste de ce dimanche d’hiver, un grand bruit environne la Tour. Alertées par la Commune, toutes les troupes de Paris sont sous les armes. L’assassinat, la veille au soir, de Lepeletier de Saint-Fargeau, l’exalté Montagnard, tué d’un coup de sabre par l’ancien garde du corps Deparis, a fait redoubler les précautions militaires. Partout les tambours battent la générale. Les sections armées défilent dans les rues, les vitres résonnent du passage des canons sur les pavés.
A huit heures Santerre arrive au Temple avec des commissaires de la Commune et des gendarmes. Nul ne se découvre.
- Vous venez me chercher ? interroge le roi.
- Oui.
- Je vous demande une minute.
Il rentre dans son cabinet, s’y munit de son testament et le tend à un municipal qui se trouve être le prêtre défroqué Jacques Roux :
- Je vous prie de remettre ce papier à la Reine… Il se reprend, et dit : « à ma femme. »
- Cela ne me regarde point, répond Roux. Je ne suis pas ici pour faire vos commissions, mais pour vous conduire à l’échafaud.
- C’est juste, dit Louis XVI.
Un autre commissaire s’empare du testament qu’il remettra non à la Reine, mais à la Commune (*).
Louis XVI est vêtu d’un habit brun, avec gilet blanc, culotte grise, bas de soie blancs. Cléry lui présente sa redingote.
- Je n’en ai pas besoin, donnez-moi seulement mon chapeau.
Il lui serre fortement la main, puis, regardant Santerre, dit :
- Partons !
D’un pas égal, il descend l’escalier de la prison. Dans la première cour, il se retourne et regarde à deux reprises l’étage où sont les siens : au double roulement qui a retenti lorsqu’il a franchi la porte de la Tour, ils se sont précipités vainement vers les fenêtres, obstruées par des abat-jour.
- C’en est fait, s’écrie la Reine, nous ne le verrons plus !
Le Roy monte dans sa voiture, un coupé vert, suivi de l’abbé Edgeworth de Firmont. Un lieutenant de gendarmerie et un maréchal des logis s’assoient en face d’eux sur la banquette de devant. Précédés de grenadiers en colonnes denses, de pièces d’artillerie, d’une centaine de tambours, les chevaux partent au pas…
Les fenêtres, comme les boutiques, par ordre restent closes.
Dans la voiture aux vitres embuées, Louis XVI la tête baissée, lit sur le bréviaire du prêtre les prières des agonisants.
Vers dix heures, dans le jour brumeux, la voiture débouche enfin de la rue Royale sur la place de la Révolution. A droite en regardant la Seine, au milieu d’un espace encadré de canons et de cavaliers, non loin du piédestal vide qui supportait naguère la statue de Louis XV, se dresse la guillotine.
La place entière est garnie de troupes. Les spectateurs ont été refoulés très loin. Il ne sort de leur multitude qu’un faible bruit, fait de milliers de halètements, de milliers de soupirs. Tout de suite, sur un ordre de Santerre, l’éclat assourdissant des tambours l’étouffe…
Il est des hommes qui toute leur vie ont paru médiocres mais dont la mort révèle la véritable grandeur : leur âme perce au moment suprême! Louis XVI fut de ces caractères apparemment médiocres que la catastrophe épure et grandit. Son règne est calomnieusement présenté comme n’ayant aucun éclat ni génie, mais nul ne peut nier que sa fin est auréolée de grandeur et de majesté.
L’exécuteur Sanson et deux de ses aides, venus à la voiture, ouvrent la portière ; Louis XVI ne descend pas tout de suite ; il achève sa prière.
Au bas de l’échafaud, les bourreaux veulent le dévêtir. Il les écarte assez rudement, ôte lui-même son habit et défait son col. Puis il s’agenouille aux pieds du prêtre et reçoit sa bénédiction.
Les aides l’entourent et lui prennent les mains.
- Que voulez-vous ? dit-il.
- Vous lier.
- Me lier, non, je n’y consentirai jamais !
Indigné par l’affront, son visage est soudain devenu très rouge. Les bourreaux semblent décidés à user de la force. Il regarde son confesseur comme pour lui demander conseil. L’abbé Edgeworth murmure :
- Faites ce sacrifice, Sire ; ce nouvel outrage est un dernier trait de ressemblance entre Votre Majesté et le Dieu qui va être sa récompense.
- Faites ce que vous voudrez, je boirai le calice jusqu’à la lie.
On lui attache donc les poignets derrière le dos avec un mouchoir, on lui coupe les cheveux. Puis il monte le roide degré de l’échafaud, appuyé lourdement sur le bras du prêtre. A la dernière marche il se redresse et, marchant d’un pas rapide, il va jusqu’à l’extrémité de la plate-forme. Là, face aux Tuileries, témoins de ses dernières grandeurs et de sa chute, faisant un signe impérieux aux tambours qui, surpris, cessent de battre, il crie d’une voix tonnante :
- Français, je suis innocent, je pardonne aux auteurs de ma mort, je prie Dieu que le sang qui va être répandu ne retombe jamais sur la France ! Et vous, peuple infortuné…
A cheval, Beaufranchet, adjudant général de Santerre, se précipite vers les tambours, leur jette un ordre. Un roulement brutal interrompt le Roy. Il frappe du pied l’échafaud :
- Silence, faites silence !
On ne l’entend plus. Les bourreaux se saisissent de lui, le lient à la planche…
Le couperet tombe. L’un des aides de Sanson prend la tête du Souverain et, la tenant par les cheveux, la montre aux assistants.
Des fédérés, des furieux escaladent l’échafaud et trempent leurs piques, leurs sabres, leurs mouchoirs, leurs mains dans le sang. Ils crient : « Vive la nation! Vive la République! »
Quelques voix leur répondent. Mais le vrai peuple reste muet, pour la simple et bonne raison qu’il n’est pas présent : la grande majorité des parisiens est terrée chez eux, la place n’est occupée que par les soldats de la révolution et, derrière eux, par quelques groupes d’enragés.
L’abbé descend de la plate-forme et fuit, l’esprit perdu.
Une tradition lui a prêté ces mots, adressés au Roy comme adieu : "Fils de Saint Louis, montez au ciel !"
http://leblogdumesnil.unblog.fr/2009/01/16/162-les-dernieres-heures-de-sa-majeste-le-roy-louis-xvi/
;;21 janvier 1793 :
A cinq heures, Cléry allume le feu. Au peu de bruit qu’il fait, Louis XVI ouvre les yeux, tire son rideau :
- Cinq heures sont-elles sonnées ?
- Sire, elles le sont à plusieurs horloges, mais pas encore à la pendule.
- J’ai bien dormi, dit le Roy, j’en avais besoin, la journée d’hier m’avait fatigué. Où est Monsieur de Firmont ?
- Sur mon lit.
- Et vous ? où avez-vous dormi ?
- Sur cette chaise.
- J’en suis fâché, murmure Louis XVI, soucieux toujours du bien-être de ses serviteurs.
- Ah, Sire, dit Cléry en lui baisant la main, puis-je penser à moi dans ce moment ?
Il habille et coiffe son maître devant plusieurs municipaux qui, sans respect, sont entrés dans la chambre.
Puis il transporte une commode au milieu de la pièce pour servir d’autel.
Revêtu de la chasuble, l’abbé commence la messe, que sert Cléry.
Le Roy l’entend à genoux et reçoit la communion, il remercie ensuite le valet de chambre de ses soins et lui recommande son fils :
- Vous lui remettrez ce cachet, vous donnerez cet anneau à la Reine, dites-lui que je le quitte avec peine… Ce petit paquet contient des cheveux de toute ma famille, vous le lui remettrez aussi. Dites à la Reine, à mes chers enfants, à ma soeur, que je leur avais promis de les voir ce matin, mais que j’ai voulu leur épargner la douleur d’une séparation nouvelle…
Essuyant ses larmes, il murmure alors :
- Je vous charge de leur faire mes adieux.
Il s’est approché du feu, y réchauffe ses mains froides. Il a demandé des ciseaux pour que Cléry lui coupe les cheveux au lieu du bourreau. Les municipaux, défiants, les refusent.
Dans l’aube triste de ce dimanche d’hiver, un grand bruit environne la Tour. Alertées par la Commune, toutes les troupes de Paris sont sous les armes. L’assassinat, la veille au soir, de Lepeletier de Saint-Fargeau, l’exalté Montagnard, tué d’un coup de sabre par l’ancien garde du corps Deparis, a fait redoubler les précautions militaires. Partout les tambours battent la générale. Les sections armées défilent dans les rues, les vitres résonnent du passage des canons sur les pavés.
A huit heures Santerre arrive au Temple avec des commissaires de la Commune et des gendarmes. Nul ne se découvre.
- Vous venez me chercher ? interroge le roi.
- Oui.
- Je vous demande une minute.
Il rentre dans son cabinet, s’y munit de son testament et le tend à un municipal qui se trouve être le prêtre défroqué Jacques Roux :
- Je vous prie de remettre ce papier à la Reine… Il se reprend, et dit : « à ma femme. »
- Cela ne me regarde point, répond Roux. Je ne suis pas ici pour faire vos commissions, mais pour vous conduire à l’échafaud.
- C’est juste, dit Louis XVI.
Un autre commissaire s’empare du testament qu’il remettra non à la Reine, mais à la Commune (*).
Louis XVI est vêtu d’un habit brun, avec gilet blanc, culotte grise, bas de soie blancs. Cléry lui présente sa redingote.
- Je n’en ai pas besoin, donnez-moi seulement mon chapeau.
Il lui serre fortement la main, puis, regardant Santerre, dit :
- Partons !
D’un pas égal, il descend l’escalier de la prison. Dans la première cour, il se retourne et regarde à deux reprises l’étage où sont les siens : au double roulement qui a retenti lorsqu’il a franchi la porte de la Tour, ils se sont précipités vainement vers les fenêtres, obstruées par des abat-jour.
- C’en est fait, s’écrie la Reine, nous ne le verrons plus !
Le Roy monte dans sa voiture, un coupé vert, suivi de l’abbé Edgeworth de Firmont. Un lieutenant de gendarmerie et un maréchal des logis s’assoient en face d’eux sur la banquette de devant. Précédés de grenadiers en colonnes denses, de pièces d’artillerie, d’une centaine de tambours, les chevaux partent au pas…
Les fenêtres, comme les boutiques, par ordre restent closes.
Dans la voiture aux vitres embuées, Louis XVI la tête baissée, lit sur le bréviaire du prêtre les prières des agonisants.
Vers dix heures, dans le jour brumeux, la voiture débouche enfin de la rue Royale sur la place de la Révolution. A droite en regardant la Seine, au milieu d’un espace encadré de canons et de cavaliers, non loin du piédestal vide qui supportait naguère la statue de Louis XV, se dresse la guillotine.
La place entière est garnie de troupes. Les spectateurs ont été refoulés très loin. Il ne sort de leur multitude qu’un faible bruit, fait de milliers de halètements, de milliers de soupirs. Tout de suite, sur un ordre de Santerre, l’éclat assourdissant des tambours l’étouffe…
Il est des hommes qui toute leur vie ont paru médiocres mais dont la mort révèle la véritable grandeur : leur âme perce au moment suprême! Louis XVI fut de ces caractères apparemment médiocres que la catastrophe épure et grandit. Son règne est calomnieusement présenté comme n’ayant aucun éclat ni génie, mais nul ne peut nier que sa fin est auréolée de grandeur et de majesté.
L’exécuteur Sanson et deux de ses aides, venus à la voiture, ouvrent la portière ; Louis XVI ne descend pas tout de suite ; il achève sa prière.
Au bas de l’échafaud, les bourreaux veulent le dévêtir. Il les écarte assez rudement, ôte lui-même son habit et défait son col. Puis il s’agenouille aux pieds du prêtre et reçoit sa bénédiction.
Les aides l’entourent et lui prennent les mains.
- Que voulez-vous ? dit-il.
- Vous lier.
- Me lier, non, je n’y consentirai jamais !
Indigné par l’affront, son visage est soudain devenu très rouge. Les bourreaux semblent décidés à user de la force. Il regarde son confesseur comme pour lui demander conseil. L’abbé Edgeworth murmure :
- Faites ce sacrifice, Sire ; ce nouvel outrage est un dernier trait de ressemblance entre Votre Majesté et le Dieu qui va être sa récompense.
- Faites ce que vous voudrez, je boirai le calice jusqu’à la lie.
On lui attache donc les poignets derrière le dos avec un mouchoir, on lui coupe les cheveux. Puis il monte le roide degré de l’échafaud, appuyé lourdement sur le bras du prêtre. A la dernière marche il se redresse et, marchant d’un pas rapide, il va jusqu’à l’extrémité de la plate-forme. Là, face aux Tuileries, témoins de ses dernières grandeurs et de sa chute, faisant un signe impérieux aux tambours qui, surpris, cessent de battre, il crie d’une voix tonnante :
- Français, je suis innocent, je pardonne aux auteurs de ma mort, je prie Dieu que le sang qui va être répandu ne retombe jamais sur la France ! Et vous, peuple infortuné…
A cheval, Beaufranchet, adjudant général de Santerre, se précipite vers les tambours, leur jette un ordre. Un roulement brutal interrompt le Roy. Il frappe du pied l’échafaud :
- Silence, faites silence !
On ne l’entend plus. Les bourreaux se saisissent de lui, le lient à la planche…
Le couperet tombe. L’un des aides de Sanson prend la tête du Souverain et, la tenant par les cheveux, la montre aux assistants.
Des fédérés, des furieux escaladent l’échafaud et trempent leurs piques, leurs sabres, leurs mouchoirs, leurs mains dans le sang. Ils crient : « Vive la nation! Vive la République! »
Quelques voix leur répondent. Mais le vrai peuple reste muet, pour la simple et bonne raison qu’il n’est pas présent : la grande majorité des parisiens est terrée chez eux, la place n’est occupée que par les soldats de la révolution et, derrière eux, par quelques groupes d’enragés.
L’abbé descend de la plate-forme et fuit, l’esprit perdu.
Une tradition lui a prêté ces mots, adressés au Roy comme adieu : "Fils de Saint Louis, montez au ciel !"
http://leblogdumesnil.unblog.fr/2009/01/16/162-les-dernieres-heures-de-sa-majeste-le-roy-louis-xvi/
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55522
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Louis XVI avait donc un lit à baldaquin au Temple...Mme de Sabran a écrit:;
Au peu de bruit qu’il fait, Louis XVI ouvre les yeux, tire son rideau :
Ce qui n'était pas le cas du reste de la famille si l'on se réfère au mobilier du Temple qui est conservé au Musée Carnavalet...
Bien à vous.
Invité- Invité
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Une pensée pour cette victime de la Révolution. Révolution qui s'est trompée de coupable;
Les fondements de la République n'en sortent pas grandis;
Les fondements de la République n'en sortent pas grandis;
Invité- Invité
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Louise-Adélaïde a écrit:Une pensée pour cette victime de la Révolution. Révolution qui s'est trompée de coupable;
Les fondements de la République n'en sortent pas grandis;
Triste anniversaire pour notre Bon Roi Louis XVI. Les larmes viendraient presque.
Trianon- Messages : 3305
Date d'inscription : 22/12/2013
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
Tout à fait d'accord .Louise-Adélaïde a écrit:Une pensée pour cette victime de la Révolution. Révolution qui s'est trompée de coupable;
Les fondements de la République n'en sortent pas grandis;
Grand canal- Messages : 113
Date d'inscription : 26/12/2015
Age : 67
Localisation : Entre Versailles et Fontainebleau
Re: L'exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793
L'ami FRANCK FERRAND en ce sinistre jour anniversaire, après avoir évoque MAYERLING, proposait le sujet du jour " la mort de LOUIS XVI"
dans son émission sur EUROPE 1
émissions à retrouver dès demain !!!!
MARIE ANTOINETTE àè-è\':
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MARIE ANTOINETTE àè-è\':
MARIE ANTOINETTE- Messages : 3729
Date d'inscription : 22/12/2013
Age : 78
Localisation : P A R I S
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