Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
+7
Mr de Talaru
Dominique Poulin
Trianon
Roi-cavalerie
La nuit, la neige
Comte d'Hézècques
Mme de Sabran
11 participants
LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: L'histoire de Marie-Antoinette :: Marie-Antoinette et la Révolution française
Page 3 sur 4
Page 3 sur 4 • 1, 2, 3, 4
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
... et puis, la catastrophe !
M. de Vaudreuil au comte d'Artois
Padoue, sd juillet 1791
Ah ! Monseigneur, quel passage subit et effroyable de la joie à l'horreur, à la rage ! Se peut-il que des Français marchent de crime en crime et aient mis le comble à leur infamie par le plus grand des attentats ? Nous venons d'apprendre de la bouche même de l'Empereur, instruit par un courrier de M. le prince de Condé, que le Roi, la Reine, M. le dauphin Madame et Madame Elisabeth ont été arrêtés à Varennes, à six lieues des frontières de France. Jugez, parce que vous éprouvez de notre accablement, car vous ne vous tromperez jamais en jugeant nos sentiments d'après les vôtres. Voilà donc les projets, les plans de ce barone ( Breteuil ) , qui croit qu'on ne peut rien sans lui, et qu'on peut tout par lui !
Mais laissons là les reproches, les imprécations, les regrets, et parlons du remède. Je puis à présent vous répondre qu'il sera sûr et prompt. Nous venons de passer trois heures avec l'Empereur, et voici les résultats. Sa parole nous en est donnée, et il nous permet de vous la faire passer. Il va attendre les détails du funeste événement qui nous est annoncé, parce qu'il espère encore, et nous espérons aussi que sur la route le Roi trouvera des défenseurs, des libérateurs, et que les indignes Français ne se couvriront pas impunément du crime d'avoir une seconde fois emprisonné leur Roi ; voilà une hypothèse, et en voici une autre : c'est celle dans laquelle les malheureux auraient consommé leur crime et reconduit le Roi à Paris. Dans les deux cas, l'Empereur est absolument décidé.
Si le Roi a été délivré, il va déployer toutes ses forces pour lui rendre et affermir son trône ; il fait en même temps partir un courrier pour l'Espagne, un pour Turin, un pour la Suisse, et, réuni aux princes de l'Empire, il aura bientôt rétabli son beau-frère, son allié, et servi la cause de tous les rois. Ses pleins pouvoirs seront sur-le-champ envoyés à M. de Mercy et au général Bender, tant pour agir que pour faire précéder l'action par un manifeste.
Si le Roi est retombé dans les chaînes, il n'est plus question que de vengeance, sans plus délibérer. Alors ce sera à Monsieur et à vous à faire le premier manifeste en vos noms, au nom de tous les Français fidèles, et il sera appuyé par celui de l'Espagne et par le sien, et soutenu par des forces imposantes.
L'Empereur ne veut plus de délai que celui nécessaire pour être bien instruit des détails de l'un ou l'autre événement, et le temps nécessaire pour la combinaison des mouvements.
L'Empereur a déployé dans cette occasion toute la tendresse d'un frère, la grandeur d'âme d'un vrai monarque, et la décision des grands hommes dans les grandes circonstances. Je lui ai demandé la permission de vous faire part sur-le-champ de ses projets, et il me l'a accordée. Certes, il n'a pas besoin de témoins de ses engagements ; mais c'est en présence de ses deux enfants et du prince de Lichtenstein qu'il les a pris avec toute la force, toute la loyauté dignes de Léopold. Ne vous laissez donc point abattre par la douleur, ni dominer par la rage. Un frère, une soeur en danger et dans les fers ! Des Français déshonorés ! Quel coup pour l'âme de mon prince ! Mais nous les délivrerons, et nous les vengerons ; mais nous réparerons l'honneur français. Arrêtez donc, contenez encore l'ardeur de tous ces braves croisés qui vous entourent, pour mieux assurer les coups qu'ils vont porter. Le temps n'est pas encore tout à fait arrivé, dès que je ne suis pas à vos côtés ; car qui doute que je ne m'y trouve ?
Je reste, et je crois devoir rester, pour aider le duc de Polignac, saisir tous les moments, et être sûr, avant de partir, que tous les courriers sont partis, que tous les ordres sont donnés. L'Empereur lui-même approuve, désire, veut que j'attende, et j'obéis parce que c'est pour peu et que j'arriverai à temps.
Mon prince éprouvera une vraie consolation dans ses peines, en apprenant que le temps des vengeances est arrivé et que les intrigues même ne peuvent plus y mettre obstacle. En effet, le Roi, arrêté à six lieues des frontières, a dit à l'univers : "J'étais prisonnier ; j'ai voulu rompre mes fers ;" à tous les bons Français : "Délivrez-moi ;" à tous les rois : "Vengez-moi." On ne peut rien opposer à cela et la force de ces motifs doit retentir dans toutes les âmes. Ah ! comme la mienne est émue ! Je vais ménager toutes mes forces pour les employer à servir mon prince, mon Roi, mon pays, et à réparer avec vous et tout ce qui vous entoure la tache imprimée au nom français.
Je n'écris pas à Calonne ; cette lettre est pour lui, pour tous ceux ralliés au panache blanc.
M. de Vaudreuil au comte d'Artois
Padoue, sd juillet 1791
Ah ! Monseigneur, quel passage subit et effroyable de la joie à l'horreur, à la rage ! Se peut-il que des Français marchent de crime en crime et aient mis le comble à leur infamie par le plus grand des attentats ? Nous venons d'apprendre de la bouche même de l'Empereur, instruit par un courrier de M. le prince de Condé, que le Roi, la Reine, M. le dauphin Madame et Madame Elisabeth ont été arrêtés à Varennes, à six lieues des frontières de France. Jugez, parce que vous éprouvez de notre accablement, car vous ne vous tromperez jamais en jugeant nos sentiments d'après les vôtres. Voilà donc les projets, les plans de ce barone ( Breteuil ) , qui croit qu'on ne peut rien sans lui, et qu'on peut tout par lui !
Mais laissons là les reproches, les imprécations, les regrets, et parlons du remède. Je puis à présent vous répondre qu'il sera sûr et prompt. Nous venons de passer trois heures avec l'Empereur, et voici les résultats. Sa parole nous en est donnée, et il nous permet de vous la faire passer. Il va attendre les détails du funeste événement qui nous est annoncé, parce qu'il espère encore, et nous espérons aussi que sur la route le Roi trouvera des défenseurs, des libérateurs, et que les indignes Français ne se couvriront pas impunément du crime d'avoir une seconde fois emprisonné leur Roi ; voilà une hypothèse, et en voici une autre : c'est celle dans laquelle les malheureux auraient consommé leur crime et reconduit le Roi à Paris. Dans les deux cas, l'Empereur est absolument décidé.
Si le Roi a été délivré, il va déployer toutes ses forces pour lui rendre et affermir son trône ; il fait en même temps partir un courrier pour l'Espagne, un pour Turin, un pour la Suisse, et, réuni aux princes de l'Empire, il aura bientôt rétabli son beau-frère, son allié, et servi la cause de tous les rois. Ses pleins pouvoirs seront sur-le-champ envoyés à M. de Mercy et au général Bender, tant pour agir que pour faire précéder l'action par un manifeste.
Si le Roi est retombé dans les chaînes, il n'est plus question que de vengeance, sans plus délibérer. Alors ce sera à Monsieur et à vous à faire le premier manifeste en vos noms, au nom de tous les Français fidèles, et il sera appuyé par celui de l'Espagne et par le sien, et soutenu par des forces imposantes.
L'Empereur ne veut plus de délai que celui nécessaire pour être bien instruit des détails de l'un ou l'autre événement, et le temps nécessaire pour la combinaison des mouvements.
L'Empereur a déployé dans cette occasion toute la tendresse d'un frère, la grandeur d'âme d'un vrai monarque, et la décision des grands hommes dans les grandes circonstances. Je lui ai demandé la permission de vous faire part sur-le-champ de ses projets, et il me l'a accordée. Certes, il n'a pas besoin de témoins de ses engagements ; mais c'est en présence de ses deux enfants et du prince de Lichtenstein qu'il les a pris avec toute la force, toute la loyauté dignes de Léopold. Ne vous laissez donc point abattre par la douleur, ni dominer par la rage. Un frère, une soeur en danger et dans les fers ! Des Français déshonorés ! Quel coup pour l'âme de mon prince ! Mais nous les délivrerons, et nous les vengerons ; mais nous réparerons l'honneur français. Arrêtez donc, contenez encore l'ardeur de tous ces braves croisés qui vous entourent, pour mieux assurer les coups qu'ils vont porter. Le temps n'est pas encore tout à fait arrivé, dès que je ne suis pas à vos côtés ; car qui doute que je ne m'y trouve ?
Je reste, et je crois devoir rester, pour aider le duc de Polignac, saisir tous les moments, et être sûr, avant de partir, que tous les courriers sont partis, que tous les ordres sont donnés. L'Empereur lui-même approuve, désire, veut que j'attende, et j'obéis parce que c'est pour peu et que j'arriverai à temps.
Mon prince éprouvera une vraie consolation dans ses peines, en apprenant que le temps des vengeances est arrivé et que les intrigues même ne peuvent plus y mettre obstacle. En effet, le Roi, arrêté à six lieues des frontières, a dit à l'univers : "J'étais prisonnier ; j'ai voulu rompre mes fers ;" à tous les bons Français : "Délivrez-moi ;" à tous les rois : "Vengez-moi." On ne peut rien opposer à cela et la force de ces motifs doit retentir dans toutes les âmes. Ah ! comme la mienne est émue ! Je vais ménager toutes mes forces pour les employer à servir mon prince, mon Roi, mon pays, et à réparer avec vous et tout ce qui vous entoure la tache imprimée au nom français.
Je n'écris pas à Calonne ; cette lettre est pour lui, pour tous ceux ralliés au panache blanc.
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Merci d’avoir posté cette lettre de Vaudreuil, protestation (plutôt emphatique à mon goût) de fidélité à l’égard du Roi.
Que les choses soient bien claires: je ne suis pas le défenseur de la thèse de la trahison, ni particulièrement adepte du complotisme...
Simplement, j’ecoute et lis les points de vue différents. Je pense aussi que le dossier Varennes n’est pas clos.
Donc, si l’on accepte de ne pas éliminer a priori une trahison dont Bouillé aurait été l’instrument, on peut penser que, parmi les émigrés, certains considéraient dès 1791 le pion « Louis XVI » hors jeu. Et que sa tentative de fuite de Paris en juin n’y changerait rien. Il n’y a donc pas besoin de rajouter le traitre Provence à ce concert pour en convaincre plus d’un à Coblentz ou ailleurs. Quant à l’Autriche, on sait quel zèle elle déploya tout au cours de la Révolution pour venir au secours de Louis XVI, pour ne pas être dupe des larmes de crocodile de l’Empereur Léopold dont Vaudreuil se fait l’echo...
Que les choses soient bien claires: je ne suis pas le défenseur de la thèse de la trahison, ni particulièrement adepte du complotisme...
Simplement, j’ecoute et lis les points de vue différents. Je pense aussi que le dossier Varennes n’est pas clos.
Donc, si l’on accepte de ne pas éliminer a priori une trahison dont Bouillé aurait été l’instrument, on peut penser que, parmi les émigrés, certains considéraient dès 1791 le pion « Louis XVI » hors jeu. Et que sa tentative de fuite de Paris en juin n’y changerait rien. Il n’y a donc pas besoin de rajouter le traitre Provence à ce concert pour en convaincre plus d’un à Coblentz ou ailleurs. Quant à l’Autriche, on sait quel zèle elle déploya tout au cours de la Révolution pour venir au secours de Louis XVI, pour ne pas être dupe des larmes de crocodile de l’Empereur Léopold dont Vaudreuil se fait l’echo...
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Vicq d Azir a écrit:Merci d’avoir posté cette lettre de Vaudreui, protestation (plutôt emphatique à mon goût) de fidélité à l’égard du Roi.
..
Vous avez lu les deux précédentes juste au-dessus, j'espère ?
Cela en fait trois .
Vicq d Azir a écrit:
Donc, si l’on accepte de ne pas éliminer a priori une trahison dont Bouillé aurait été l’instrument, on suggère que, parmi les émigrés, certains considéraient que le pion « Louis XVI » était hors jeu, et que sa tentative de fuite de Paris n’y changerait rien. ...
C'est certain.
Les témoignages en ce sens sont multiples.
Vicq d Azir a écrit:
Il n’y a pas besoin de rajouter le traitre Provence à ce concert pour en convaincre plus d’un à Coblentz ou ailleurs. Quant à l’Autriche, on sait quel zèle elle déploya tout au cours de la Révolution pour venir au secours de Louis XVI...
Disons, en ce qui concerne Provence, que lui au moins avait déjà fait preuve de sa félonie . Je pense bien sûr à la farce macabre du malheureux Favras. " Saute, marquis ! "
Il y a sûrement beaucoup encore à tirer au clair concernant le drame de Varennes .
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Oui. Eléonore, j’ai bien lu les trois...
Oui, le sujet de l’émigration et de ce qu’on a appelé la « contre révolution » est très complexe, et à été très travaillé, je crois dans ce forum. Voir pour cela les chapitres consacrés.
Pour Varennes, plus spécialement, il est difficile de se faire une idée précise de ce qu’il s’est passé. Pour moi, en tout cas, cette affaire n’est pas claire. Trop de gens ont ensuite cherché à se disculper.
Ce qui me semble évident c’est que des « forces obscures » ont été à l’oeuvre pour faire échouer l’entreprise : actes manqués, conduites d’echec, petites ou grandes trahisons, probablement non coordonnées, non commanditées. Une situation ( comment dire? ) à laquelle personne ne croit plus, qu’on fait sans enthousiasme en se disant: « à quoi bon? »
Quand je parle de forces obscures, je rassure mes amis: je n’ai pas sombré dans l’ésotérisme... J’évoque plutôt des forces inconscientes, collectives et individuelles, qui auraient tendu vers le constat suivant : l’heure de Louis XVI est passée, il ne sera pas le Roi de la Révolution, et ce n’est pas lui qui pourra sauver la Monarchie...( c’est peut être d’ailleurs ce qu’il pensait, au tréfonds de lui-même...)
Je peux bien sûr me tromper, et j’attends avec plaisir qu’on m’apporte la contradiction, mais enfin, enfin, c’est comme cela que je sens les choses ....
Oui, le sujet de l’émigration et de ce qu’on a appelé la « contre révolution » est très complexe, et à été très travaillé, je crois dans ce forum. Voir pour cela les chapitres consacrés.
Pour Varennes, plus spécialement, il est difficile de se faire une idée précise de ce qu’il s’est passé. Pour moi, en tout cas, cette affaire n’est pas claire. Trop de gens ont ensuite cherché à se disculper.
Ce qui me semble évident c’est que des « forces obscures » ont été à l’oeuvre pour faire échouer l’entreprise : actes manqués, conduites d’echec, petites ou grandes trahisons, probablement non coordonnées, non commanditées. Une situation ( comment dire? ) à laquelle personne ne croit plus, qu’on fait sans enthousiasme en se disant: « à quoi bon? »
Quand je parle de forces obscures, je rassure mes amis: je n’ai pas sombré dans l’ésotérisme... J’évoque plutôt des forces inconscientes, collectives et individuelles, qui auraient tendu vers le constat suivant : l’heure de Louis XVI est passée, il ne sera pas le Roi de la Révolution, et ce n’est pas lui qui pourra sauver la Monarchie...( c’est peut être d’ailleurs ce qu’il pensait, au tréfonds de lui-même...)
Je peux bien sûr me tromper, et j’attends avec plaisir qu’on m’apporte la contradiction, mais enfin, enfin, c’est comme cela que je sens les choses ....
Dernière édition par Vicq d Azir le Mer 12 Sep 2018, 17:48, édité 1 fois
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Vicq d Azir a écrit:
... J’évoque plutôt des forces inconscientes, collectives et individuelles, qui auraient tendu vers le constat suivant : l’heure de Louis XVI est passée, il ne sera pas le Roi de la Révolution, et ce n’est pas lui qui pourra sauver la Monarchie...
Je peux bien sûr me tromper, et j’attends avec plaisir qu’on m’apporte la contradiction, mais enfin, enfin, c’est comme cela que je sens les choses ....
Ce qui est navrant, c'est qu'il ait inconsciemment tout fait pour donner lui-même cette impression de partir perdant .
Pourtant il devait bien y croire tout de même puisqu'il a laissé sa fameuse déclaration .
https://marie-antoinette.forumactif.org/t4065-declaration-de-louis-xvi-a-tous-les-francais-a-sa-sortie-de-paris-20-juin-1791?highlight=DECLARATION
Vicq d Azir a écrit:
Quand je parle de forces obscures, je rassure mes amis: je n’ai pas sombré dans l’ésotérisme...
Non, non, ne sombrons pas ...
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Oui, sa déclaration jetée sur le bureau de l’Assemblee...
Vous avez très justement pointé un jour, à ce sujet, Eléonore que c’était un acte provocateur et irréfléchi ; je rajouterais: infantile ( vous l’illustriez d’ailleurs par un pied de nez, je crois... )
Cet acte n’eut été grandiose que si la fuite avait réussi, mais hélas...
Donc, très certainement 2 Louis XVI: un qui se lache, règle ses comptes, est prêt à monter « cul sur la selle » et pourfendre ses ennemis. C’est l’enfant, le Roi chevalier et son épée de bois... Et l’autre Louis XVI, accablé, vieilli, obligé de faire ce qu’on lui dit de faire, et surtout, SEUL, si seul...
Vous avez très justement pointé un jour, à ce sujet, Eléonore que c’était un acte provocateur et irréfléchi ; je rajouterais: infantile ( vous l’illustriez d’ailleurs par un pied de nez, je crois... )
Cet acte n’eut été grandiose que si la fuite avait réussi, mais hélas...
Donc, très certainement 2 Louis XVI: un qui se lache, règle ses comptes, est prêt à monter « cul sur la selle » et pourfendre ses ennemis. C’est l’enfant, le Roi chevalier et son épée de bois... Et l’autre Louis XVI, accablé, vieilli, obligé de faire ce qu’on lui dit de faire, et surtout, SEUL, si seul...
Dernière édition par Vicq d Azir le Mer 12 Sep 2018, 18:23, édité 1 fois
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
C'est vrai qu'il était seul, depuis sa plus tendre enfance. Il n'a jamais eu d'amis.
Madame Adélaïde, semble-t-il, est la seule personne qui se soit intéressée à lui et lui ait donné un peu d'affection .
Madame Adélaïde, semble-t-il, est la seule personne qui se soit intéressée à lui et lui ait donné un peu d'affection .
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
En plus, la solitude du pouvoir... ( « le Roi n’a pas d’amis »)
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Je vous réponds ici, cher Févicq, pour ne pas trop digresser dans le sujet de Varennes : https://marie-antoinette.forumactif.org/t90p175-portrait-moral-de-louis-xvi#130120
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
The return from flight
Edward Matthew Ward, R.A. (1816-1879)
1872
Signed and dated 'E.M. Ward R.A./1872' (lower left) and further signed, inscribed and numbered 'No 1/E M Ward RA/1 Lansdowne/ Road/Kensington/Park' (on the reverse of the frame, upper left corner)
Oil on canvas - 45 3/8 x 52 3/8 in. (115.3 x 133 cm.)
Photo : Christie's
Note :
The return from flight : Louis XVI, Marie Antoinette, the Dauphin, Dauphiness, and Princess Elizabeth insulted by the mob on their road back to Paris after their interception at Varennes by the postmaster Drouet.
* Source et informations complémentaires : Chrisie's - British Art : Victorian, Pre Raphaelite & British Impressionist Art
Photo : Christie's
Photo : Christie's
Photo : Christie's
Edward Matthew Ward, R.A. (1816-1879)
1872
Signed and dated 'E.M. Ward R.A./1872' (lower left) and further signed, inscribed and numbered 'No 1/E M Ward RA/1 Lansdowne/ Road/Kensington/Park' (on the reverse of the frame, upper left corner)
Oil on canvas - 45 3/8 x 52 3/8 in. (115.3 x 133 cm.)
Photo : Christie's
Note :
The return from flight : Louis XVI, Marie Antoinette, the Dauphin, Dauphiness, and Princess Elizabeth insulted by the mob on their road back to Paris after their interception at Varennes by the postmaster Drouet.
* Source et informations complémentaires : Chrisie's - British Art : Victorian, Pre Raphaelite & British Impressionist Art
Photo : Christie's
Photo : Christie's
Photo : Christie's
La nuit, la neige- Messages : 18102
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Mme de Sabran a écrit:Mme de Tourzel, en face de Louis XVI , et à sa gauche, qui crois-tu ?
Les portraits ne sont guère fidèles. A l'exception de Marie-Antoinette, de Louis XVI (toujours affaissé et abattu sur les portraits de Ward), et peut-être le petit Louis-Charles ?
Dans le genre, je trouve ce tableau assez réussi.
Il rend bien l'ambiance terrible qui régnait dans cette berline.
Pour les commentaires "historiques" :
J'ignore qui pourrait autre cette autre femme ?
Disons l'une des femmes de chambre, passée de la seconde voiture à celle-ci un court instant ?
Nous avions également détaillé l'aménagement intérieur de cette voiture.
Je ne sais plus où ?
Il faudrait rechercher cela...
La nuit, la neige- Messages : 18102
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
La nuit, la neige a écrit:
Dans le genre, je trouve ce tableau assez réussi.
Il rend bien l'ambiance terrible qui régnait dans cette berline.
Oui, je trouve aussi. Ce Sans-culotte qui vomit injures et menaces et le poing qui brandit un couteau devant la vitre de la portière me rappellent le témoignage de Mme de Tourzel :
Entre Épernay et Dormans, nous eûmes encore l'inquiétude de voir massacrer un pauvre curé, lié sur le cheval d'un gendarme, qui tenait des propos propres à faire craindre qu'il n'eût l'intention de le faire périr sous les yeux de Sa Majesté. Dans ce moment arrivèrent les trois commissaires de l'Assemblée, qui firent arrêter la voiture du Roi et lui présentèrent leurs pouvoirs. C'étaient MM. de Maubourg, Barnave et Péthion. Ils étaient accompagnés de M. Mathieu Dumas, chargé par l'Assemblée du commandement des troupes qui ramenaient le Roi à Paris. Le Roi pria Barnave de sauver la vie de ce pauvre curé. Il le promit et tint parole, car il a survécu à la Révolution, et n'est mort que peu de temps avant le retour du Roi.
Diable ! Il était moins une !!!
La reine me semble très ressemblante.
Elle ne quittera plus cette expression lointaine empreinte de dignité douloureuse.
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
La nuit, la neige a écrit:
Nous avions également détaillé l'aménagement intérieur de cette voiture.
Je ne sais plus où ?
Il faudrait rechercher cela...
Voici ce que je trouve dans mon Kermina :
A la fin de décembre, Anna de Korff rendit donc à Fersen le service de commander chez un carrossier du faubourg Saint-Germain une berline à six places, robute et confortable, pour une personne qui devait retourner en Russie. Il fallait donc un modèle pourvu de toutes les commodités pour un aussi long voyage. De plus, ajouta-t-elle, " on était très pressé ", la voiture devait être livrée à la fin de février. Quelques jours plus tard, Axel commettait sa première imprudence. Annoncé par la baronne comme " un certain monsieur " , il apportait à l'artisan les éechantillons de tissus choisis par la reine pour la décoration intérieure : capitonnage en velours blanc d'Utrecht, moquette rouge, coussins en maroquin vert et taffetas blanc.
( ... )
Tout était prévu pour le confort des voyageurs, filets à provisions en tresses de soie, petite cuisinière portative, cantine de cuir pour huit bouteilles, lanternes intérieures, il y avait même sous le siège du postillon une collection numérotée de pièces de rechange en cas d'avarie. La voiture coûtait cher, plus de cinq mille livres, cependant, bien que très cossue, elle n'avait sans doute pas l'aspect exceptionnel qu'on a dit. Un témoin l'a trouvée " fort ordinaire dans sa forme, fort simple extérieurement ."
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Ah ! Merci pour cette recherche...
La nuit, la neige- Messages : 18102
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Autour d'une Révolution : 1788-1799 /
par le comte d'Hérisson
Lettre de Mallet du Pan à Mounier, sur Varennes :
Vous voyez l'ascendant qu'ont pris les Jacobins dans l'Assemblée nationale et dans les places; mais l'opinion s'est bien refroidie en leur faveur. Cependant ils sont toujours assurés des bandits, des affamés, des fanatiques, des intéressés de tout genre à la suite des désordres. La Cour n'a, pour leur tenir tête, que des intrigants et des lâches. Elle a résolu de rester sur la défensive, et ses Ministres lui donnent pour tous remparts, la Constitution et l'empire de la loi. C'est assez vous avertir qu'il n'y aura plus de Monarchie avant trois mois, si une puissante résistance ne se développe.
J'opinais, il y a six semaines, à la publication de votre ouvrage aujourd'hui je balance à vous en donner le conseil. Je crains qu'il n'offre un nouveau texte de controverse entre les royalistes, sans convertir un révolutionnaire. La lecture seule de l'écrit, me donnerait l'idée de ses effets. Cependant, je vois qu'il faut le publier maintenant ou jamais. Ainsi, j'ôpine à l'envoi que vous m'annoncez; j'en conférerai avec Malouet et Bergasse, et, sauf votre avis, nous prendrons un dernier parti. Il pourrait aider puissamment les causes de revirement naturel qui existent dans le royaume, s'il renferme des issues pour tous les intérêts blessés, sans fermer celles qu'invoqueront les hommes raisonnables.
Il fallait lire en effet dans le Mercure, le Maitre de poste de Sainte-Menehould. Le rapport de ce dernier, ainsi que ceux de Varennes, et des aides de camp; sont plus ou moins chargés de faussetés grossières. L'aide de camp arriva à Varennes avant le Roi, ainsi que le Maître de poste. Celui-ci avait été, en effet, averti par Baillon.
Personne ne doute que La Fayette ne sût l'évasion. Cette femme de la Reine qui l'avait dénoncée au Comité des recherches, était maîtresse de Gouvion. Trente indices décèlent qu'ils étaient avertis, mais qu'ils furent trompés de 24 heures seulement d'exécution. La Fayette jura à 7 heures du matin à l'Hôtel de Ville, et promit sur sa tête que le Roi serait ramené.
Je vous apprendrai de plus que, si ce Prince l'a été, c'est qu'il l'a bien voulu. ( )
Il eut cinq 'heures entières pour sortir librement de Varennes, sous l'escorte de Goguelat et de ses hussards. Goguelat me l'a certifié et m'a remis toutes les preuves de ce fait. Une fois reconnu, le Roi ne voulut employer que la persuasion pour se faire libérer il insista bientôt sur son retour à Paris, et laissa au tocsin le temps nécessaire pour amener autour de lui la Garde nationale des environs. Je pourrais vous apprendre des circonstances bien désespérantes de cet événement, qui devrait ôter l'envie de servir, à jamais, ce Prince. •
Je vous embrasse. Mille tendres compliments aux dames des Granges et mes respects à Mme. Meunier. Je tâcherai de voir Mme d'Hénin. L'argent était hier à 31 p. 100 de perte. Je vois venir que le Roi, forcé par le Garde des Sceaux, espèce de furibond constitutionnel, sanctionnera le décret sur les prêtres.
Mallet du Pan
par le comte d'Hérisson
Lettre de Mallet du Pan à Mounier, sur Varennes :
Vous voyez l'ascendant qu'ont pris les Jacobins dans l'Assemblée nationale et dans les places; mais l'opinion s'est bien refroidie en leur faveur. Cependant ils sont toujours assurés des bandits, des affamés, des fanatiques, des intéressés de tout genre à la suite des désordres. La Cour n'a, pour leur tenir tête, que des intrigants et des lâches. Elle a résolu de rester sur la défensive, et ses Ministres lui donnent pour tous remparts, la Constitution et l'empire de la loi. C'est assez vous avertir qu'il n'y aura plus de Monarchie avant trois mois, si une puissante résistance ne se développe.
J'opinais, il y a six semaines, à la publication de votre ouvrage aujourd'hui je balance à vous en donner le conseil. Je crains qu'il n'offre un nouveau texte de controverse entre les royalistes, sans convertir un révolutionnaire. La lecture seule de l'écrit, me donnerait l'idée de ses effets. Cependant, je vois qu'il faut le publier maintenant ou jamais. Ainsi, j'ôpine à l'envoi que vous m'annoncez; j'en conférerai avec Malouet et Bergasse, et, sauf votre avis, nous prendrons un dernier parti. Il pourrait aider puissamment les causes de revirement naturel qui existent dans le royaume, s'il renferme des issues pour tous les intérêts blessés, sans fermer celles qu'invoqueront les hommes raisonnables.
Il fallait lire en effet dans le Mercure, le Maitre de poste de Sainte-Menehould. Le rapport de ce dernier, ainsi que ceux de Varennes, et des aides de camp; sont plus ou moins chargés de faussetés grossières. L'aide de camp arriva à Varennes avant le Roi, ainsi que le Maître de poste. Celui-ci avait été, en effet, averti par Baillon.
Personne ne doute que La Fayette ne sût l'évasion. Cette femme de la Reine qui l'avait dénoncée au Comité des recherches, était maîtresse de Gouvion. Trente indices décèlent qu'ils étaient avertis, mais qu'ils furent trompés de 24 heures seulement d'exécution. La Fayette jura à 7 heures du matin à l'Hôtel de Ville, et promit sur sa tête que le Roi serait ramené.
Je vous apprendrai de plus que, si ce Prince l'a été, c'est qu'il l'a bien voulu. ( )
Il eut cinq 'heures entières pour sortir librement de Varennes, sous l'escorte de Goguelat et de ses hussards. Goguelat me l'a certifié et m'a remis toutes les preuves de ce fait. Une fois reconnu, le Roi ne voulut employer que la persuasion pour se faire libérer il insista bientôt sur son retour à Paris, et laissa au tocsin le temps nécessaire pour amener autour de lui la Garde nationale des environs. Je pourrais vous apprendre des circonstances bien désespérantes de cet événement, qui devrait ôter l'envie de servir, à jamais, ce Prince. •
Je vous embrasse. Mille tendres compliments aux dames des Granges et mes respects à Mme. Meunier. Je tâcherai de voir Mme d'Hénin. L'argent était hier à 31 p. 100 de perte. Je vois venir que le Roi, forcé par le Garde des Sceaux, espèce de furibond constitutionnel, sanctionnera le décret sur les prêtres.
Mallet du Pan
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Quel nœud de vipères, quel panier de crabes que ces Tuileries en 1791...
Gouverneur Morris- Messages : 11741
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Gouverneur Morris a écrit:Quel nœud de vipères, quel panier de crabes que ces Tuileries en 1791...
Il est toujours dommage que l'on s'en rende compte trop tard !!!! Et je vous dirai même plus, certains refusent toujours d'admettre cette réalité, hier comme aujourd'hui.
Comme vous me connaissez, et pour alléger un peu la donne : il paraît que tout est bon dans le porc. Je me rappelle avoir goûté le pied de porc, et c'est vrai c'était succulent (mais oui Eléonore, essayez et vous comprendrez), alors Louis XVI (tout Roi qu'Il était et dans cette mauvaise impasse d'évasion), avait le palais gourmand, mais peut-être trop. J'essaye toujours de trouver un peu d'humour même lorsqu'il s'agit de choses graves.....
Trianon- Messages : 3305
Date d'inscription : 22/12/2013
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Message copié depuis notre sujet "Jeu de l'hiver" :
Vicq d Azir a écrit:
Il s’agit de la dernière enseigne de l’hôtel de Rohan à Epernay. La berline de la famille royale prisonnière s’y arrêta le 23 juin au soir, juste avant la rencontre avec les députés au Chêne Fondu. Madame Royale raconte dans ses mémoires l’enfer de la situation : accueil très hostile de la population, menaces de mort, robe de la Reine déchirée... Les prisonniers repartiront au bout d’une heure, après avoir pris une légère collation.
Aujourd’hui, il ne reste presque plus rien du bâtiment, qui existait encore il y a une vingtaine d’années... La plaque apposée sur le bâtiment a elle aussi disparu... Ne reste qu’une porte, un passage et cette enseigne, dans la rue principale de la ville...
État du site de l’hôtel de Rohan en 1989 :
La nuit, la neige- Messages : 18102
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
J'étais en train de propulser les mêmes messages !
Tu m'as prise de vitesse .
Tu m'as prise de vitesse .
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Merci à vous deux...
Nous avons fait, Marie-Antoinette et moi-même une conférence à Epernay sur Varennes. Bon accueil, mais tout souvenir du passage de la berline sur le chemin du retour à été gommé...’
Il faut dire que l’accueil de la population, à l’époque a été une honte...( je crois me souvenir qu’on connaît les détails de cet accueil par l’écrivain Cazotte, qui était témoin ).
Nous avons fait, Marie-Antoinette et moi-même une conférence à Epernay sur Varennes. Bon accueil, mais tout souvenir du passage de la berline sur le chemin du retour à été gommé...’
Il faut dire que l’accueil de la population, à l’époque a été une honte...( je crois me souvenir qu’on connaît les détails de cet accueil par l’écrivain Cazotte, qui était témoin ).
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Hôtel de Rohan (Epernay)
Autrefois une plaque commémorant le passage de la famille royale se trouvait sur la façade.
Elle a été enlevée.
Ici se passe un épisode curieux qui aurait pu changer le cours de l'histoire. En effet, c'est Scévole Cazotte, le fils du célèbre Jacques Cazotte auteur du "Diable amoureux " et prophète de la révolution qui commande la garde. C'est ce fameux Cazotte qui a conseillé l'itinéraire par Epernay et suggéré une halte dans sa maison de Pierry. Il s'agissait bien évidemment d'un projet d'évasion. Mais la tentative échoue car le projet est refusé et c'est à l'Hôtel de Rohan (qui appartenait à la famille de Rohan-Soubise) que la famille royale va être hébergée quelques heures afin de se restaurer. (cet hôtel existe toujours, il est situé rue du Général Leclerc. Mais autrefois il occupait environ la moitié de la rue car juste à côté se trouvait une auberge (à l'emplacement des n° actuels 28 à 30). La famille royale va faire halte à l'Hôtel de Rohan mais également dans l'auberge (Si l'Hôtel fut en grande partie détruit en 1918, l'auberge du XVIII existe toujours et possède encore des lambris et des boiseries de l'époque. L'Hôtel et l'auberge possédait une cour, des écuries, des caves d'époque, des granges, pressoirs et logements de postillons. Elle était alors dirigée par Mémie Cousin. J'ai eu la chance de connaître les anciens occupants de cette maison, une très vieille famille d'aristocrates champenois. A cette époque de nombreux éléments étaient encore en place (la cour où s'était arrêtée la berline, des toilettes Louis XV, une belle rampe en fer forgée où la main de la reine s'était posée et la chambre où s'était reposée la reine, occupée par la fille de cette famille (au coin de la rue de Châlons (Gal Leclerc) et de la rue des Berceaux).
Le passage à l'Hôtel de Rohan où la berline parvient à 17 h le 23 Juin va être très éprouvant. Il est probable que Cazotte et son fils avaient là aussi échafaudé une tentative d'évasion mais la foule était si compacte et haineuse, armée de fourches et de piques, que la reine faillit défaillir sous les injures de la foule, les menaces de mort et les tentatives de lui arracher sa robe (qu'elle sera obligée de faire recoudre pendant la halte). Quant à l'enfant royal, il fut presque étouffé par la pression des révolutionnaires en délire. Il ne durent leur salut qu'à Scévole Cazotte. Ils parviennent enfin sous la protection de la garde et l'oppression d'une foule énorme (environ 15 000 personnes s'étaient massées aux alentours) à l'intérieur de l'Hôtel. Mais les imprécations et les huées continuent de pleuvoir à l'extérieur, on brandit des haches, des fourches, on promet qu'on va manger leur manger le coeur et le foie... C'est d'ailleurs ce qui va arriver à un malheureux curé qui avait eu l'audace de s'approcher un peu trop près des manifestants. Tandis que Marie-Antoinette fait recoudre sa robe déchirée le roi se restaure d'une omelette... Puis après un moment de repos le convoi reprend la route vers Paris. Une rouquine s'échappe alors de la foule et vocifère à l'encontre de la reine : " Allez, ma petite belle, on vous en fera voir bien d'autres ! "
"Avec quelle barbarie on lui a tenu parole ! " commentera Scévole.
La berline parvient à quitter Epernay sans encombre et traverse la forêt d'Epernay (actuelle avenue Jean Jaurès) par la route de Paris dont le trajet n'a pas changé. Ils passent par Mardeuil et mettront une heure pour atteindre le village de Boursault.
C'est alors que l'histoire s'apprête à changer.
A Paris le Club des Cordeliers vient de demander l'établissement de la république.
Les représentants de l'Assemblée Nationale (dont Barnave et Pétion) se sont alors rendus à la rencontre du roi en empruntant cette même route depuis Paris. Ils vont s'arrêter après le village de Port à Binson (autrefois - Pont à Binson) près du Hameau de la Cave où se trouve un petit hameau fait de chaumières : " La Ferme du Chêne Fendu ". (les amateurs de symbolisme s'attarderont sur ce signe...). Entre temps une foule très importante venue des villages voisins s'est massée le long des talus, des fossés et dans les champs près de la Marne. Le tumulte grossit ainsi que les clameurs. La famille royale approche.
La berline va s'arrêter au bas d'une descente en direction du village de Vauciennes près de la Ferme du Chêne Fendu (on peut voir une plaque qui commémore l'événement). A cet instant, Pétion sort de sa poche le décret de l'assemblée et le lit au roi puis, juché sur la berline royale, à la foule.
C'en est fini de la royauté. A partir de maintenant la famille royale est sous la protection de la - nation -.
L'histoire ne s'est pas écrite à Paris mais dans ce hameau isolé de la Champagne. Cependant proche d'un lieu qui pourrait interpeller : c'est en effet non loin de là dans le village de Châtillon sur Marne que s'élève la grande statue du pape Urbain II, village qui était un fief des chevaliers du Temple avant de tomber aux mains du roi Philippe le Bel.
https://www.facebook.com/notes/alexandra-schreyer/hotel-de-rohan-la-famille-royale-arr%C3%AAt%C3%A9e-%C3%A0-varennes-traverse-les-terres-de-champ/719111494801253/
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55403
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Je retrouve cette fameuse plaque, qu’on pouvait voir sur l’ancien hôtel de Rohan à Epernay. Elle a été retirée depuis.
Je l’avais photographiée en 1989. J’avais été surpris du fait que la partie inférieure de cette plaque semblait avoir été « caviardée » à une époque lointaine, et qu’on avait sans doute enduit les inscriptions sous-jacentes. Ainsi, la bonne ville d’Epernay retenait-elle pour la postérité la version « light » de la journée du 23 juin 1791: « SM et sa famille ont dîné là, et se sont montrés au peuple » ...
Je pense qu’il s’agissait sans doute d’une plaque ancienne plutôt de sensibilité royaliste ( le terme Sa Majesté Louis XVI en atteste ). On aimerait donc bien connaître la suite du texte : trop laudatif à l’égard du « Roi fuyard »? Trop anti révolutionnaire ?
La réalité, je le rappelle, c’est que cette « visite »fut un enfer, et que la famille royale faillit bien être lynchée par la foule ce jour là...( cf. le récit de Mme. Royale ).
Je l’avais photographiée en 1989. J’avais été surpris du fait que la partie inférieure de cette plaque semblait avoir été « caviardée » à une époque lointaine, et qu’on avait sans doute enduit les inscriptions sous-jacentes. Ainsi, la bonne ville d’Epernay retenait-elle pour la postérité la version « light » de la journée du 23 juin 1791: « SM et sa famille ont dîné là, et se sont montrés au peuple » ...
Je pense qu’il s’agissait sans doute d’une plaque ancienne plutôt de sensibilité royaliste ( le terme Sa Majesté Louis XVI en atteste ). On aimerait donc bien connaître la suite du texte : trop laudatif à l’égard du « Roi fuyard »? Trop anti révolutionnaire ?
La réalité, je le rappelle, c’est que cette « visite »fut un enfer, et que la famille royale faillit bien être lynchée par la foule ce jour là...( cf. le récit de Mme. Royale ).
Dernière édition par Vicq d Azir le Dim 10 Fév 2019, 00:38, édité 4 fois
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Copié / collé d'un message publié dans notre sujet : Le mur d'enceinte des Fermiers généraux, les barrières et bureaux d'octroi
C'est par cette porte Saint-Martin que la famille royale quittera Paris lors de sa fuite vers Montmédy.
Pavillon d’octroi de la Barrière Saint-Martin, rotonde de la Villette, vers 1820
Suiveur de Auguste-Xavier Leprince (1799-1826)
Huile sur toile, 38 x 46 cm (rentoilée)
Photo : Lucien
Et c'est peu après son passage, et alors à l'extérieur de Paris, que les fugitifs changeront de voiture pour monter dans la berline qui finira sa course à Varennes.
Panorama de la ville de Paris en 1826
Avec notamment le tracé du mur des Fermiers généraux
Par Aristide-Michel Perrot
Photo : Gallica
Voir notre sujet : La fuite à Montmédy et l'arrestation à Varennes
Au retour à Paris, la berline et son escorte contourneront les faubourgs les plus populaires de la ville, en suivant la route de l'enceinte des Fermiers généraux...
...en passant notamment devant la Barrière du Roule (image bien connue) :
Le retour de Varennes
Par Joseph Navlet (1821-1889)
Aquarelle et gouache
Photo : Artnet
Retour de Varennes le 25 juin 1791
Par Jean-Louis Prieur
Dessin à la plume
Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Photo : RMN-Grand Palais / Jean-Gilles Berizzi
...jusqu'à la Barrière de l'Etoile (ou Barrière de Neuilly, Barrière des Champs-Elysées), par laquelle ils passeront enfin pour descendre les Champs-Elysées.
Barrières des Champs-Elysées en 1791 : fête après suppression des droits d'octroi
Gravure
Photo : Musée Carnavalet Paris
Quelques années plus tard, la Barrière de l'Etoile :
Entrée dans Paris de l’Empereur et l’Impératrice Marie-Louise
Pierre-François-Léonard Fontaine (1762-1853)
A l’entrée solennelle de l’Empereur et de l’archiduchesse Marie-Louise, en 1810, Chalgrin fit élever une maquette en charpente et en toile de l’Arc de triomphe.
Dessin
Musée du Louvre
Photo : Wikipedia
Et peu avant sa démolition, en 1860 :
La barrière de l'Etoile en 1859
Photographie de Charles Marville
Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Photo : Wikipedia
C'est par cette porte Saint-Martin que la famille royale quittera Paris lors de sa fuite vers Montmédy.
Pavillon d’octroi de la Barrière Saint-Martin, rotonde de la Villette, vers 1820
Suiveur de Auguste-Xavier Leprince (1799-1826)
Huile sur toile, 38 x 46 cm (rentoilée)
Photo : Lucien
Et c'est peu après son passage, et alors à l'extérieur de Paris, que les fugitifs changeront de voiture pour monter dans la berline qui finira sa course à Varennes.
Panorama de la ville de Paris en 1826
Avec notamment le tracé du mur des Fermiers généraux
Par Aristide-Michel Perrot
Photo : Gallica
Voir notre sujet : La fuite à Montmédy et l'arrestation à Varennes
Au retour à Paris, la berline et son escorte contourneront les faubourgs les plus populaires de la ville, en suivant la route de l'enceinte des Fermiers généraux...
...en passant notamment devant la Barrière du Roule (image bien connue) :
Le retour de Varennes
Par Joseph Navlet (1821-1889)
Aquarelle et gouache
Photo : Artnet
Retour de Varennes le 25 juin 1791
Par Jean-Louis Prieur
Dessin à la plume
Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Photo : RMN-Grand Palais / Jean-Gilles Berizzi
...jusqu'à la Barrière de l'Etoile (ou Barrière de Neuilly, Barrière des Champs-Elysées), par laquelle ils passeront enfin pour descendre les Champs-Elysées.
Barrières des Champs-Elysées en 1791 : fête après suppression des droits d'octroi
Gravure
Photo : Musée Carnavalet Paris
Quelques années plus tard, la Barrière de l'Etoile :
Entrée dans Paris de l’Empereur et l’Impératrice Marie-Louise
Pierre-François-Léonard Fontaine (1762-1853)
A l’entrée solennelle de l’Empereur et de l’archiduchesse Marie-Louise, en 1810, Chalgrin fit élever une maquette en charpente et en toile de l’Arc de triomphe.
Dessin
Musée du Louvre
Photo : Wikipedia
Et peu avant sa démolition, en 1860 :
La barrière de l'Etoile en 1859
Photographie de Charles Marville
Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Photo : Wikipedia
La nuit, la neige- Messages : 18102
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
On peut regretter la disparition de ces beaux édifices de Ledoux, très inventifs pour l’époque...
Heureusement, restent ceux de la Villette ( la Rotonde ), de la place de la Nation ( barrière du Trône ), et de Denfert, récemment restaurés ...
Heureusement, restent ceux de la Villette ( la Rotonde ), de la place de la Nation ( barrière du Trône ), et de Denfert, récemment restaurés ...
Vicq d Azir- Messages : 3676
Date d'inscription : 07/11/2014
Age : 76
Localisation : Paris x
Re: Le retour de la famille royale de Varennes à Paris (juin 1791)
Présentées en vente aux enchères, ces deux caricatures du temps, qui nous sont bien connues, illustrent les forts ressentiments de la population suite à cet épisode de Varennes...
Je cite la description de la maison de vente :
VILLENEUVE (fin XVIIIe) Caricatures de Louis XVI et de la Baronne de Korf. 1791.
Réunion de deux eaux-fortes avec couleurs au repérage.
Respectivement : 115 x 90 mm et 104 x 78 mm (à vue).
Belles épreuves sur vergé. Petites marges. Cadres anciens en bois sculpté doré à coins bouchés.
* Source et infos complémentaires : Leclere Mdv - Vente du 29 mars 2019
Ben alors ? Ils savent pas qui été la baronne de Korff ??!
Je cite la description de la maison de vente :
VILLENEUVE (fin XVIIIe) Caricatures de Louis XVI et de la Baronne de Korf. 1791.
Réunion de deux eaux-fortes avec couleurs au repérage.
Respectivement : 115 x 90 mm et 104 x 78 mm (à vue).
Belles épreuves sur vergé. Petites marges. Cadres anciens en bois sculpté doré à coins bouchés.
* Source et infos complémentaires : Leclere Mdv - Vente du 29 mars 2019
_____________
Ben alors ? Ils savent pas qui été la baronne de Korff ??!
La nuit, la neige- Messages : 18102
Date d'inscription : 21/12/2013
Page 3 sur 4 • 1, 2, 3, 4
Sujets similaires
» La fuite vers Montmédy et l'arrestation à Varennes, les 20 et 21 juin 1791
» La vie de la famille royale aux Tuileries
» Déclaration de Louis XVI à tous les Français à sa sortie de Paris, le 20 juin 1791, aussi dit " testament politique de Louis XVI "
» Une lettre inédite du marquis de Bouillé à Fersen du 21 avr. 1791 sur l'évasion de la famille royale
» Recherches de J.C Pilayrou : Louis XVII, le cas Louvel et "Le roi perdu" d'Octave Aubry
» La vie de la famille royale aux Tuileries
» Déclaration de Louis XVI à tous les Français à sa sortie de Paris, le 20 juin 1791, aussi dit " testament politique de Louis XVI "
» Une lettre inédite du marquis de Bouillé à Fersen du 21 avr. 1791 sur l'évasion de la famille royale
» Recherches de J.C Pilayrou : Louis XVII, le cas Louvel et "Le roi perdu" d'Octave Aubry
LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: L'histoire de Marie-Antoinette :: Marie-Antoinette et la Révolution française
Page 3 sur 4
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|