Barthélémy François Joseph Moufle d'Angerville
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Barthélémy François Joseph Moufle d'Angerville
MOUFLE D'ANGERVILLE
Article de Tawfik MEKKI-BERRADA
d'après Carriat A., «Un écrivain guérétois méconnu Barthélémy Mouffle d'Angerville (1728-1795), continuateur des Mémoires dits de Bachaumont»
Barthélémy François Joseph Moufle d'Angerville est né à Guéret (Creuse) le 25 juillet 1728, de Benjamin Anne Moufle d'Angerville, né le 4 juillet 1680, receveur des tailles de la Marche à Guéret, mort le 27 janvier 1736, et de Marie Josèphe Keingiaert.
Benjamin Moufle d'Angerville et Marie Josèphe eurent deux garçons dont l'aîné, Louis Benjamin, né vers 1715, est mort à Guéret le 21 janvier 1742.
«Le vingt cinq juillet mil sept cent vingt huit a été baptisé par moy sous signé Barthélémy François Joseph Mouffle fils légitime de Mr Me Benjamin Anne Mouffle, conseiller du roy receveur des tailles de la Marche, et de Dame Marie Joseph Keingiaert né à neuf du matin dans le présent jour, a été son parrain Messire Barthélémy Mouffle prêtre docteur de la maison et société de Sorbonne oncle paternel dudit enfant représenté par M. Jean Baptiste Deumaignaud commis dudit Sr receveur, et sa marraine Dlle Anne Françoise Scolastique Abondance Keingiaert tante maternelle dudit enfant représenté par Dlle Marie Favelle sous signez avec moy. Dubreuil, vicaire de Guéret.»
Mouffle semble ne s'être jamais marié et ne pas avoir eu d'enfants. Il est mort à Paris, le 15 mars 1795, « chez un certain J.B. Machelard, tenant maison garnie rue du Colombier, dans l'ancien Xème arrondissement »
Il a souvent été confondu avec un autre Moufle ( J'entends Momo d'ici : " Normal, les mouffles vont par paire " ) dont l'inspecteur Buhot dit, en 1764 : « M. Moufle est un des fils de M. Moufle, trésorier général de l'extraordinaire des guerres, et demeure avec son frère [...]. C'est un garçon pieux, qui va à la messe tous les jours [...]. La maison de M. Moufle est très rangée et bien montée [...]. L'épicier, qui fait le coin de la rue du faubourg Saint-Denis, à gauche en montant par la porte, est le correspondant ou le bureau d'adresse de ces Messieurs. Un de leurs domestiques y vient tous les jours chercher les lettres et les paquets qu'on y dépose à leur adresse, et y remet ce qu'ils envoient à la Ville, que l'épicier se charge de faire tenir»
(Funck-Brentano).
Mouffle a sans doute commencé ses études au collège des Barnabites à Guéret.
Après la mort de son frère, en 1742, sa mère et lui s'installèrent à Paris où habitaient de nombreux parents du côté de son père, et en particulier, Louis Barthélémy Moufle de Georville, trésorier général de la Marine, qui allait rendre bien des services au jeune Mouffle. Ce que nous savons d'une manière certaine c'est qu'en 1745, Mouffle était déjà installé à Paris .
En 1748, Mouffle entre dans l'administration de la Marine où il est affecté au service de la comptabilité, sans doute grâce à l'intervention du trésorier général. Mouffle aspire à devenir «écrivain de la marine» mais Maurepas l'oblige à se faire recevoir avocat auparavant, et à travailler chez un procureur de la Chambre des Comptes. Mouffle se plia aux exigences du ministre .
En 1750, Mouffle, accusé d'avoir écrit,
en collaboration avec Rochon de Chabannes, un livre licencieux, Les Cannevas de la Pâris, est incarcéré à la Bastille du 27 août au 5 septembre.
Moufle de Georville, qui a sans doute intercédé encore une fois en sa faveur, obtint qu'il fût rapidement élargi et nommé élève de la Marine à Rochefort (15 oct. 1751) ; le 20 octobre 1752, Mouffle est reçu écrivain ordinaire.
Un état de 1752 du «Personnel civil des ports» porte sur lui cette appréciation : «Proche parent de M. de Georville, trésorier général. A de l'éducation, l'esprit orné, s'applique. C'est un sujet qui doit percer»
Le 26 mai 1753, il embarque sur le « Caméléon » pour la campagne de Louisiane.
Puis, le 1er novembre 1757, il est enfin nommé écrivain principal, toujours sur intervention de son parent lui donne le titre de Commissaire de la Marine : notons qu'à la même époque, Mairobert, son futur collaborateur, travaillait dans la même administration et qu'il allait, quelques années plus tard, porter le même titre.
Le 29 avril 1758, nous retrouvons Mouffle à Brest où il embarque quelque temps plus tard sur le «Zéphyr» en croisière sur les côtes d'Afrique. .
Un certain Hocquart nous rapporte, le 16 novembre 1759 que Mouffle y a une altercation avec le commandant de bord , François Joseph Paul de Grasse.
Jean-Baptiste Mauzaisse, François Joseph Paul de Grasse (1843),
château de Versailles. Image WIKI
Le 14 février 1760 Mouffle quitte la Marine. Puis c'est le silence complet.
Lorsque nous retrouvons les traces de Mouffle 21 ans plus tard, le 22 février 1781, c'est pour apprendre qu'il est embastillé une seconde fois.
Son arrestation coïncide presque jour pour jour avec la sortie d'un livre fulminant contre le règne de Louis XV la Vie privée de Louis XV, dont la Correspondance secrète, politique et littéraire lui accorde la paternité .
Mais il y a aussi une autre raison à l'arrestation de Mouffle ; il y est dit que Mouffle a été arrêté : «Pour les Mémoires secrets de la République des lettres et pour nouvelles à la main »
(Funck-Brentano, Les Lettres de cachet).
Un contemporain de Mouffle résume la situation et nous apporte ces détails précieux : « Après ( la mort de Mairobert ) , M. d'Angerville se chargea de la confection des mémoires secrets ; sous sa plume ils ne perdirent rien de leur agrément et acquirent un degré de correction qu'ils n'avoient point encore eu».
Toujours selon le même chroniqueur, la publication de la Vie privée de Louis XV oblige Lenoir à intervenir ; il fait arrêter Mouffle et son domestique. « Rendu arrêté le premier, dans une chambre qu'il occupoit rue des Arcis, et chez lequel on trouva des nouvelles à la main, avoua qu'il servoit de secrétaire à M. d'Angerville, que c’étoit de lui qu'il tenoit des bulletins ; qu'il n'étoit que chargé de les transcrire, dont l'une étoit envoyée à Rotterdam, l'autre à Minden, & l'autre à Bruxelles».
Mouffle est arrêté aussitôt après : «M. d'Angerville, logé rue de Berry au marais, chez madame de Champigni, sa cousine, et veuve d'un conseiller au parlement, eut le même jour, et sur l'heure de minuit, la visite de MM. de la police, ayant à leur tête M. Chenon, commissaire, et le sieur Henri, conseiller du roi, inspecteur de police. On enleva tous ses papiers et sept cartons remplis de bulletins ou nouvelles à la main, formant une collection depuis 1766 jusqu'en 1781. Après les recherches et le furetage le plus scrupuleux, on mena M. d'Angerville à la Bastille. Son séjour n'y fut pas long ( il fut libéré le 3 avril 1781 : La Bastille dévoilée ) . Nous n'avons pu apprendre ce qu'il devint après sa sortie ; mais nous voyons qu'un an après cette époque, en janvier 1782, il alla chez M. le Noir, réclamer les sept cartons de bulletins qu'on lui avoit enlevés ; que le commissaire Chenon dressa procès-verbal de cette délivrance, à l'hôtel même de la police : ce procès-verbal est ainsi terminé : < les avons remis audit sieur Mouffle d'Angerville, à la charge par lui de les rapporter à M. le lieutenant-général de police, après les corrections dans un an, délai fixé par les magistrats ; à quoi le sieur Mouffle d'Angerville, s'est soumis et a signé >» (La Bastille dévoilée, t. VIII, p. 52-54).
Ces lignes, outre qu'elles confirment la part active prise par Mouffle à la rédaction des Mémoires secrets, soulignent ce fait important qu'il dût jouir de très hautes protections pour qu'il fût relâché si tôt, compte tenu du fait qu'il était récidiviste, et pour qu'on lui eût restitué ses sept cartons de nouvelles à la main prohibées. Elles nous apprennent, enfin que Mouffle versait dans le journalisme depuis 1766 au moins, année où commence la collection de nouvelles à la main saisie chez lui.
François Moureau dans son Répertoire des nouvelles à la main
décrit la perquisition opérée chez Mouffle d’Angerville par le commissaire Chenon le 24 février 1781. On saisit chez lui « sept cartons remplis de bulletins ou nouvelles à la main, formant une collection depuis 1766 jusqu’en 1781 ». On les lui rend un an plus tard, en janvier 1782, « à la charge par lui de les rapporter à M. le Lieutenant général de Police après les corrections dans un an ».
Les Mémoires Secrets reçoivent une permission tacite le 2 février 1782 pour les volumes 19 et 20 (ms. fr. 21982, f° 411).
Le seul manuscrit qui en subsiste est le ms. 679 de la BHVP, pour l’année 1766. Un article des Révolutions de Paris en 1790 confirme la participation de Mouffle aux Mémoires secrets après la mort de Mairobert
« Aprés sa mort, M. Mouffle d’Angerville se chargea de la confection des Mémoires secrets ; ce qui lui valut six semaines de détention, à la Bastille, du 2 février au 3 avril 1781 »
Mouffle avait hérité de son père et fut le seul légataire de son oncle et parrain, Barthélémy Moufle, prêtre, docteur en Sorbonne, décédé le 19 janvier 1740 (C, p. 5 et 13, doc. II), mais rien ne porte à croire qu'il eût joui d'une fortune importante. Il est permis de penser, vu l'empressement avec lequel Mouffle multiplia à volonté additions et suppléments aux numéros donnés par Mairobert, que son procédé était guidé par l'appât du gain.
De plus, l'inventaire établi après sa mort laisse plutôt l'impression d'un état d'indigence : « une mauvaise table, une couchette à deux chevets, un secrétaire en bois de placage, une fontaine en cuivre, une petite armoire, quatre fauteuils, trois chaises, du linge sale, etc.» (C, p. 10). Tout porte à croire que M. a, en partie du moins, vécu des fruits de sa production littéraire et journalistique.
Mouffle aurait été selon Tate : «habitué du salon parisien de Mme Doublet, la fameuse Paroisse» (voir également « Petit de Bachaumont : his circle and the Mémoires secrets»). Cette assertion qui n'est pas documentée est toutefois partiellement appuyée par Carriat, qui évoque certains liens de parenté entre Mouffle et Bachaumont. Mouffle était, toujours selon Tate, en relations épistolaires avec Bachaumont et le comte de Clermont. Il bénéficiait de la bienveillance du lieutenant de la police Le Noir (cf. La Bastille dévoilée, t. VIII, p. 51).
Sur Mme Doublet et Bachaumont voir notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t1164-bachaumont-les-memoires-secrets?highlight=BACHAUMONT
Marie-Anne Doublet et son frère, l’abbé Legendre par Carmontelle.
Image WIKI
Bachaumont, par Carmontelle
Image WIKI
Pour la petite histoire, WIKI nous chuchote que Pidansat de Mairobert, par ailleurs, se prétendait, sans que rien paraisse justifier une pareille prétention, le fils et de Madame Doublet et de Bachaumont !
( ... mais fils spirituel, certes, sans nul doute ! )
https://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_Anne_Doublet
Les activités journalistiques de Mouffle
Mémoires secrets pour servir à l'histoire de la République des Lettres en France depuis 1762 jusqu'à nos jours, Londres, J. Adamson, 1777-1789, 36 vol. Chronique rétrospective des événements survenus entre le janvier 1er 1762 et le 31 décembre 1789 (D.P. 1 904).
Mairobert en assura la rédaction du commencement du journal jusqu'à sa mort, le 27 mars 1779 et Mouffle la continua jusqu'à la fin du recueil en 1789. La qualité du journal, disons-le, ne souffrit point sous la direction de Mouffle, mais celui-ci, prétextant de rétablir des suppressions imposées par la censure à son prédécesseur, résolut d'augmenter la matière courante du journal de considérables additions aux notices antérieures, portant ainsi de treize à trente-six les volumes relatifs à une période allant du 1er janvier 1779 au 31 décembre 1787 alors qu'il ne fallut que douze vol. à Mairobert pour couvrir les années 1762 à 1778.
Cette démarche peu astreignante – Mouffle ayant sûrement directement puisé dans les manuscrits de Mairobert – nous porte à croire que l'intérêt matériel n'y était pas étranger. Une autre innovation apportée par Mouffle fut celle d'accorder davantage d'intérêt aux faits politiques.
http://dictionnaire-journalistes.gazettes18e.fr/journaliste/596-barthelemy-moufle-dangerville
Les Mémoires secrets pour servir à l’histoire de la République des Lettres en France depuis 1762 jusqu’à nos jours est une chronique anonyme des événements survenus entre 1762 et 1787. Cette chronique est lune des sources les plus abondantes et les plus réputées pour lhistoire de la deuxième moitié du xviiie siècle. On y trouve beaucoup d’anecdotes curieuses. « Au centre des débats les plus brûlants durant un quart de siècle, qu’il s’agisse de la lutte contre les Jésuites, de l’opposition parlementaire, de procès retentissants comme celui de l’Affaire du Collier de la Reine, ou de l’émergence de nouvelles esthétiques : celle du drame bourgeois, de l’Opéra Gluckiste, du Théâtre de Shakespeare, ils rendent compte, presque au jour le jour, de manière engagée ou distanciée, indignée ou sarcastique, des mouvements éphémères ou profonds d’une opinion publique en train de se constituer. Il semblerait que Bachaumont nait été quun prête-nom. Cest vraisemblablement son secrétaire Pidansat de Mairobert qui a rédigé les premiers volumes publiés à partir de 1777. Puis à sa mort, deux ans plus tard, Mouffle dAngerville aurait pris le relais. Le succès est énorme, à tel point que ce dernier en profite pour ajouter à la fin de chaque livre des additions concernant les années précédentes, utilisant les notes laissées par ses prédécesseurs. En 1830, Ravenel a donné une édition critique et raisonnée pour les 4 premiers volumes. Paul Lacroix en a donné un abrégé en 1858. Une Table alphabétique des auteurs et personnages cités dans les Mémoires secrets parut à Bruxelles en 1866. C’est un outil indispensable pour se repérer dans l’ensemble de l’oeuvre.
http://lettresvieuxpapiers.org/tag/madame/
_________________
... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55509
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Barthélémy François Joseph Moufle d'Angerville
Mme de Sabran a écrit:Il a souvent été confondu avec un autre Moufle ( J'entends Momo d'ici : " Normal, les mouffles vont par paire " )
Mme de Sabran a écrit:« M. Moufle est un des fils de M. Moufle, trésorier général de l'extraordinaire des guerres»
Ce dernier connu, en conséquence, sous le nom de "père de Mouffle", j'ai donc gagné
Gouverneur Morris- Messages : 11796
Date d'inscription : 21/12/2013
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