Le Journal du roi Louis XVI et ses Reflexions sur ses entretiens avec Mr le Duc de la Vauguyon

Ayant été dernièrement un peu vache avec Louis XVI et son journal, j'ouvre ici un sujet dédié à son Journal, essentiellement connu pour son célèbre " Rien ", en date du 14 juillet 1789 ; ou encore, à la date du 21 juin 1791 : " Départ à minuit de Paris, arrivé et arresté à Varennes à 11h du soir ".
Pas mieux !  


Image : Le forum de Marie-Antoinette - Lettres autographes et écrits de Louis XVI

Personnellement, ni le personnage ni ses écrits ne m'intéressent ! Mais enfin bon, il était temps de les présenter dans ce forum...

Au préalable, je vous propose la publication en ligne d'une étude consacrée à ce journal.



Elle date, mais elle demeure intéressante, car elle détaille et divise ce journal selon ses différents thèmes.
Et tout compte fait, il y a d'autres mentions que celles des chasses (qui restent majoritaires) ou de la météo du jour.  

Voici la table des matières de cette étude :




L'auteur précise toutefois que : ce qu'il y a de singulier, c'est que, des milliers de pages qu'on va analyser, il sera impossible de déterrer une pensée.

Les milliers de pages sont un chiffre exagéré, puisque l'auteur précise que ce journal, écrit de la main de Louis XVI, contient en tout 344 pages :

9 pages pour les années 1766, 67, 68, 69, 71, 72, 73
10 pages pour 1770
11 pages pour 1774
13 pages pour 1775
14 pages pour 1776, 79, 80, 82, 83, 85, 86, 87, 88, 89, 90 et 92
15 pages pour 1777
16 pages pour 1778, 81, 84, et 91

Le journal de Louis XVI, dauphin, commence le mercredi 1er janvier 1766, et finit le 30 juillet 1774.
Il se compose de 4 cahiers formant 78 pages.

Le journal du Roi commence le 1er août 1774 et finit le 31 juillet 1792.
Il forme 266 pages.

Selon l'auteur de cette étude, ce journal n'aurait pas été écrit au jour le jour, les différences soit d'écriture, soir d'encre, prouvent qu'il était composé après le mois ; et qu'il y a des mois qui ont été faits du même coup, et peut-être aussi des années.


Bref, si cette étude et division des grands thèmes du journal de Louis XVI vous intéresse, c'est ici :

Le journal de Louis XVI. Publié par Louis Nicolardot (1873)


....A suivre !

Le " Journal de Louis XVI " est conservé dans l’Armoire de fer des Archives Nationales, à Paris.


Images : Fondation La sauvegarde du patrimoine français

Le carton du « Journal » de Louis XVI porte le numéro 6, et se trouve rangé ici :







Voici, publiés sur le site internet des Archives nationales, les liens qui renvoient aux feuillets qui composent le "Journal " de Louis XVI.
Ils sont présentés ainsi :

Ces documents font partie d'un ensemble de pièces trouvées aux Tuileries et déposées aux Archives nationales à la suite du décret du 4 floréal an II.
Les pièces ont été réunies dans trois portefeuilles en maroquin rouge I, II, III.
Depuis janvier 1766 à juillet 1792, le roi a noté minutieusement dans ses journaux les moindres évènements de ses journées sans tenir compte de leur importance politique.

Pour consulter ces volumes, il vous suffit de cliquer sur les liens en bleu ci-après. De là, cliquer à nouveau sur l'image des différents feuillets accessibles afin d'ouvrir les documents.  


Armoire de fer ; Carton n° 6 : Louis XVI
Journal de Louis XVI

TOME 1
Contenant jour après jour la mention de ses promenades, voyages, revues, fêtes et cérémonies auxquelles il assistait (1766-1792)

I. 1 (1766-1770)

I. 2 (1770-1774)
Ici, le mois de mai 1770, son mariage avec Marie-Antoinette...



I. 3 (1774-1784)

I. 4 (1785 - 1791)
C'est dans ce volume-ci que se trouve le fameux " Rien " à la date du 14 juillet 1789...



I. 5 (1792)

I. 6 (1789 - 1792)

I. 7 (Pièces diverses)

I. 8 (Inventaires)


TOME 2
Contenant les dépenses particulières, pensions et gratifications sur la cassette, (1772-1792)

II. 1 (Comptes, 1772-1773)

II. 2 (Comptes, 1774)

II. 3 (Dépenses particulières, 1775-1784)

II. 4 (Dépenses particulières, 1791)

II. 5 (Pensions, gratifications, 1776-1792)

II. 6 (Inventaires)


TOME 3
Contenant des cahiers relatant les chasses du roi dans les forêts de Versailles et de Rambouillet de 1769 à 1791

III. I. 1 (Chasses du roi, 1771-1782)

III. I. 2 (Chasses du roi, 1780)

III. I. 3 (Chasses du roi, 1781)

III. I. 4 (Chasses du roi, 1782

III. I. 5 (Chasses du roi, 1783)

III. I. 7 (Chasses du roi, 1784)

III. I. 8 (Chasses du roi, 1786)

III. I. 9 (Chasses du roi, 1787)

III. I. 10 (Chasses du roi, 1788)

III. 2 (Chasses du roi, 1778-1788)

III. 4 (Chasses du roi, 1778)

III. 5 (Liste des chevaux, 1769-1790)
Où l'on apprend, parmi tous les noms des chevaux montés par Louis XVI, que le dernier d'entre-eux, à la date de 1790, se nommait : " Le garçon ".
En mars 1785, le roi montait "Le diamant", quelques mois plus tard, éclatera l'affaire dite du collier de la reine...



III. 6 (Chasses du roi, du duc de Bourbon et du prince de Condé, 1769-1790

III. 7 (Inventaires)

Une autre archive, peut-être moins connue, mais probablement importante si l'on s'intéresse à la jeunesse de Louis XVI et aux années de sa " formation " auprès du duc de la Vauguyon.

Antoine-Paul-Jacques de Quelen de Stuer de Caussade, duc de La Vauguyon
Par Sophie Lambert, dite Rochard
Huile sur toile, 1838-1848
Image : RMN-GP (Château de Versailles) / Gérard Blot

Voir notre sujet :

L'éducation du roi à la cour de France

Le Dauphin, fils de Louis XV, et la Dauphine, assistent à la leçon donnée à leurs trois enfants par leur précepteur, M. de La Vauguyon, et leur gouverneur l'ancien évêque de Limoges
Par Charles Monnet (1732-1808)
Vers 1764-1765 (XVIIIe siècle)
Ancienne collection Jules et Edmond de Goncourt ; collection Château de Versailles (2013)
Photo : Château de Versailles, Dist. RMN / Christophe Fouin

Sont représentés le dauphin Louis (1729-1765) et Marie-Josèphe de Saxe (1731-1767) avec leurs enfants, le duc de Berry, le comte de Provence et le comte d’Artois.
Ceux-ci sont entourés de leur précepteur, l’ancien évêque de Limoges Jean-Gilles de Coëtlosquet (1700-1784), et d’Antoine de Quélen (1706- 1772), duc de La Vauguyon (1759), premier gentilhomme de la chambre et grand maître de la garde-robe des Enfants de France, puis leur gouverneur à partir de 1758.

Celui-ci, appartenant plutôt au parti des dévots, tint le Dauphin éloigné des Encyclopédistes, négligea son éducation militaire, mais lui enseigna les disciplines scientifiques et les langues étrangères, ainsi que le sens moral et du devoir de roi chrétien.


Le jeune Louis-Auguste a pris soin de noter dans ce cahier (manuscrit autographe de 101 pages, rédigé vers 1762-1769) le compte de ses entretiens avec son gouverneur : plus d'une trentaine.

" Réflexions sur mes entretiens avec Mr le Duc de la Vauguion "




(...)
Mon plus grand défaut est une paresse d'esprit qui me rend toute application de l'esprit ennuyeuse et pénible : je veux absolument vaincre ce défaut ; et lorsque j'y serai parvenu, comme je l'espère, je m'appliquerai sans relâche à déraciner tous les autres dont on m'a fait le deuil (?), et je cultiverai les bonnes choses qu'on dit être en moi. Je relirai souvent mon portrait afin de juger moi-même de mes progrès, et surtout j'avouerai avec simplicité mes manquements à mes bonnes résolutions, et je demanderai conseil à ceux qui sont chargés de mon caractère pour trouver les moyens de parvenir à les exécuter avec plus de zèle et de fidélité.  





Nombre de passages sont intéressants dont, notamment, celui-ci, à partir de la page 39.
A méditer...  




(...)
De la faiblesse des Rois naissent les factions, les guerres intestines, des secousses qui ébranlent et ruinent l'état et qui finissent par le renverser tout à fait.
Si je pouvais douter de cette vérité je n'aurais qu'à me rappeler l'histoire de toutes les nations, mais puis-je jamais oublier dans la nôtre Louis le Débonnaire, Charles VI, Henri III. l'anarchie plus cruelle que le despotisme le plus tyrannique, est moins funeste aux peuples que la faiblesse d'un Roi.

Si le souverain ne maîtrise pas tout ce qui l'environne, il est nécessairement asservi, et s'il .... une fois, il ne peut plus être heureux, il ne le sera pas même dans le sein de sa propre famille, car il faut quelquefois au prince plus de force pour régler sa maison que pour gouverner-ses états.

Un prince faible sera toute sa vie le jouet ou la victime de ses ministres, de ses amis ou de ses domestiques, également indigne et d'amour et de haine, il sera la honte du trône, le fléau de son peuple, et le mépris de la postérité.


Bref, la centaine de pages est consultable, ici :

Réflexions sur mes entretiens avec Mr le Duc de la Vauguion. Louis-Auguste, duc de Berry, futur Louis XVI (c.1762-1769)

La nuit, la neige a écrit:

Si le souverain ne maîtrise pas tout ce qui l'environne, il est nécessairement asservi, et s'il .... une fois, il ne peut plus être heureux, il ne le sera pas même dans le sein de sa propre famille, car il faut quelquefois au prince plus de force pour régler sa maison que pour gouverner-ses états.

...   et s'il l'est une fois, il ne peut plus être heureux, il ne le sera pas même dans le sein de sa propre famille   ...

C'est très intéressant, merci !
Ce pauvre Louis XVI avait pourtant parfaitement bien compris ce qui ferait de lui un roi digne de sa fonction.   Il anticipe même, avec l'"insuffisance " du monarque,  l'insuffisance de l'homme privé.  On le sent tellement plein de bonne volonté !   Quelle catastrophe que cette faiblesse de caractère dont il était affligé !

J'avoue que je m'attendais à davantage de " bondieuseries " , sachant le duc de La Vauguyon proche du " parti des dévots ", mais il y a des passages intéressants.
Ce n'est certes pas l'Humanisme des Lumières, mais du moins y-a-t-il de bons sentiments...

Un dévot qui néanmoins mit ses « bondieuseries » sous son mouchoir en se rapprochant de la favorite royale, Madame du Barry.

Eh oui !
C'est que nécessité fait loi .

Veuillez expliquer la signification de l'expression "Vu sur la terrasse un homme qui faisait des vers à cheval" daté du 9 août 1767. Que veut dire "à cheval" dans ce contexte?   Merci d'avance.

Bonjour Lowsky, et bienvenue dans le Forum de Marie-Antoinette .  

En effet, cette phrase est un peu singulière.  Elle nous fait imaginer un cavalier griffonnant sur un petit calepin sans descendre de sa monture. Pourquoi pas, après tout ?  
Il faisait des vers.  Peut-être n'écrivait-il pas mais déclamait-il ses vers ?  
Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une expression idiomatique et qu'il faille comprendre autre chose. Louis XVI est toujours très laconique.

Mme de Sabran, merci beaucoup pour votre réponse. En effet, au début, j'ai compris cette phrase au sens littéral: un homme fait des vers sur le dos d'un cheval. Mais j’ai du mal à imaginer un cavalier sur la terrasse du palais royal devant le roi, composant insouciant de la poésie. Peut-être que "à cheval" devrait être compris au sens figuré – "dans la dignité". Ce n'est pas non plus très clair. Pensez-vous qu'il faisait des vers non pas en les écrivant, mais en les parlant? Votre explication m'a beaucoup aidé. Merci encore

lowsky a écrit: Peut-être que "à cheval" devrait être compris au sens figuré – "dans la dignité".

Non vraiment, je ne crois pas. Pas " à cheval " tout court.
Au sens figuré " à cheval " sur les principes, sur la discipline, sur l'étiquette, par exemple, signifie que l'on ne s'en écarte pas.

Être à cheval sur...
Sens : Être très pointilleux.Origine : L'expression vient de l'équitation. En effet, dans cette discipline les sauts et les pas appris aux chevaux sont très stricts, d'où le sens de l'expression "être à cheval sur..." qui signifie "être très pointilleux".
Être à cheval sur ses prérogatives
Sens : Appliquer fermement ses prérogatives.
https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/a-cheval/

Je crois que ce cavalier, sur la terrasse, récite des vers tout simplement.

Désolé, je n'ai pas tout de suite compris votre réponse à ma première question. Alors vous insistez que la phrase du journal de Louis XVI ne doit être comprise que littéralement: un homme à cheval fait des vers, et, en plus, "faire des vers" ici = réciter des vers déjà écrits?

Voici deux définitions du Dictionnaire de L'Académie Française de 1762 qui pourraient donner un sens de cette phrase.

- Être à cheval : se dit communément d'une personne montée sur un cheval, et même d'une personne qui se tient jambe deçà, jambe delà, sur une poutre, une muraille &c.
- Être à cheval sur sa grandeur pour dire avoir de la morgue sur sa grandeur.
- On dit familièrement écrire une lettre à cheval, pour dire, lui écrire avec hauteur, avec menace.

Traduction    : un homme à cheval sur un mur qui déclamait des vers avec morgue et hauteur  

Louis XVI  ( enfin, le dauphin ) ne parle pas de mur.  
En revanche, il note qu'il s'agit d'une revue des carabiniers dans la plaine de Royallieu  ( près de Compiègne, me dit WIKI )  : il s'agit donc bien d'un cavalier.  
Les carabiniers à cheval constituent un corps de cavalerie lourde créé sous l'Ancien Régime, et qui persistera jusque sous le Second Empire.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Carabiniers_%C3%A0_cheval_(France)
Notre carabinier est-il l'auteur de ces vers ?  Il semblerait que oui.
Il est peut-être amoureux, cet homme, et pris d'un accès de lyrisme ?!

"A cheval" est le puissant moto de Louis XIII, le roi guerrier, s'il en est..
Par de là les faiblesses du royaume, le péril militaire d'être l'inférieur, les urgences, les conseils insiffisants de sa mère, de Richelieu et autres conseillers,
Louis XIII dit "a cheval" et part avec son ou ses régiments de Gardes.
et ça marche ....


cf Roland Mousnier. L'Homme Rouge.

Pardon, mais quel rapport avec la revue des carabiniers ?

je divaguais sur
"Vu sur la terrasse un homme qui faisait des vers à cheval" ......

N'oublions quand même pas la célèbre sentence "Je suis très à cheval sur la literie", à l'hôtel du Glôôôôôbe !