Révolution française : La Convention
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Révolution française : La Convention
La convention nationale est l'assemblée (élue au suffrage universel masculin pendant l'été 1792) qui dirige la République française de la démocratie de l'an I à la dictature de la Convention (1792-1795)
La Convention, réunie le 20 septembre 1792, prononce la déchéance du roi dès le lendemain, proclame que la royauté est abolie en France et qu’à cette date commence l’an I de la République. Le 25 septembre, la République française est déclarée « une et indivisible ».
Marianne entourée de députés prêtant serment, le bras levé vers la Constitution, et, des soldats symbolisent l'armée de la République. Inscription : "Vivre libre ou mourir". Sculpture de François Sicard (1920).
Le 14 juillet avait délivré.
Le 10 août avait foudroyé.
Le 21 septembre fonda.
Le 21 septembre, l’équinoxe, l’équilibre. Libra. La balance.
Ce fut, suivant la remarque de Romme, sous ce signe de l’Égalité et de la Justice que la république fut proclamée. Une constellation fit l’annonce. La Convention est le premier avatar du peuple. C’est par la Convention que s’ouvrit la grande page nouvelle et que l’avenir d’aujourd’hui commença.
À toute idée il faut une enveloppe visible, à tout principe il faut une habitation ; une église, c’est Dieu entre quatre murs ; à tout dogme, il faut un temple. Quand la Convention fut, il y eut un premier problème à résoudre, loger la Convention. On prit d’abord le Manège, puis les Tuileries.
On y dressa un châssis, un décor, une grande grisaille peinte par David, des bancs symétriques, une tribune carrée, des pilastres parallèles, des socles pareils à des billots, de longues étraves rectilignes, des alvéoles rectangulaires où se pressait la multitude et qu’on appelait les tribunes publiques, un velarium romain, des draperies grecques, et dans ces angles droits et dans ces lignes droites on installa la Convention ; dans cette géométrie on mit la tempête. Sur la tribune le bonnet rouge était peint en gris. Les royalistes commencèrent par rire de ce bonnet rouge gris, de cette salle postiche, de ce monument de carton, de ce sanctuaire de papier mâché, de ce panthéon de boue et de crachat. Comme cela devait disparaître vite ! Les colonnes étaient en douves de tonneau, les voûtes étaient en volige, les bas-reliefs étaient en mastic, les entablements étaient en sapin, les statues étaient en plâtre, les marbres étaient en peinture, les murailles étaient en toile, et dans ce provisoire la France a fait de
l’éternel.
Les murailles de la salle du Manège, quand la Convention vint y tenir séance, étaient toutes couvertes des affiches qui avaient pullulé dans Paris à l’époque du retour de Varennes. On lisait sur l’une : – Le roi rentre. Bâtonner qui l’applaudira, pendre qui l’insultera. – Sur une autre : – Paix là. Chapeaux sur la tête. Il va parler devant ses juges. – Sur une autre : – Le roi a couché la nation en joue. Il a fait long feu, à la nation de tirer maintenant. – Sur une autre : – La Loi ! la Loi ! Ce fut entre ces murs-là que la Convention jugea Louis XVI.
Aux Tuileries, où la Convention vint siéger le 10 mai 1793, et qui s’appelèrent le Palais National, la salle des séances occupait tout l’intervalle entre le pavillon de l’Horloge appelé pavillon-Unité et le pavillon Marsan appelé pavillon-Liberté. Le pavillon de Flore s’appelait pavillon-Égalité. C’est par le grand escalier de Jean Bullant qu’on montait à la salle des séances. Sous le premier étage occupé par l’assemblée, tout le rez-de-chaussée du palais était une sorte de longue salle des gardes encombrée des faisceaux et des lits de camp des troupes de toutes armes qui veillaient autour de la Convention. L’assemblée avait une garde d’honneur qu’on appelait « les grenadiers de la Convention ».
Un ruban tricolore séparait le château où était l’assemblée du jardin où le peuple allait et venait.
( Victor Hugo, Quatrevingt-treize )
La Convention, réunie le 20 septembre 1792, prononce la déchéance du roi dès le lendemain, proclame que la royauté est abolie en France et qu’à cette date commence l’an I de la République. Le 25 septembre, la République française est déclarée « une et indivisible ».
Marianne entourée de députés prêtant serment, le bras levé vers la Constitution, et, des soldats symbolisent l'armée de la République. Inscription : "Vivre libre ou mourir". Sculpture de François Sicard (1920).
Le 14 juillet avait délivré.
Le 10 août avait foudroyé.
Le 21 septembre fonda.
Le 21 septembre, l’équinoxe, l’équilibre. Libra. La balance.
Ce fut, suivant la remarque de Romme, sous ce signe de l’Égalité et de la Justice que la république fut proclamée. Une constellation fit l’annonce. La Convention est le premier avatar du peuple. C’est par la Convention que s’ouvrit la grande page nouvelle et que l’avenir d’aujourd’hui commença.
À toute idée il faut une enveloppe visible, à tout principe il faut une habitation ; une église, c’est Dieu entre quatre murs ; à tout dogme, il faut un temple. Quand la Convention fut, il y eut un premier problème à résoudre, loger la Convention. On prit d’abord le Manège, puis les Tuileries.
On y dressa un châssis, un décor, une grande grisaille peinte par David, des bancs symétriques, une tribune carrée, des pilastres parallèles, des socles pareils à des billots, de longues étraves rectilignes, des alvéoles rectangulaires où se pressait la multitude et qu’on appelait les tribunes publiques, un velarium romain, des draperies grecques, et dans ces angles droits et dans ces lignes droites on installa la Convention ; dans cette géométrie on mit la tempête. Sur la tribune le bonnet rouge était peint en gris. Les royalistes commencèrent par rire de ce bonnet rouge gris, de cette salle postiche, de ce monument de carton, de ce sanctuaire de papier mâché, de ce panthéon de boue et de crachat. Comme cela devait disparaître vite ! Les colonnes étaient en douves de tonneau, les voûtes étaient en volige, les bas-reliefs étaient en mastic, les entablements étaient en sapin, les statues étaient en plâtre, les marbres étaient en peinture, les murailles étaient en toile, et dans ce provisoire la France a fait de
l’éternel.
Les murailles de la salle du Manège, quand la Convention vint y tenir séance, étaient toutes couvertes des affiches qui avaient pullulé dans Paris à l’époque du retour de Varennes. On lisait sur l’une : – Le roi rentre. Bâtonner qui l’applaudira, pendre qui l’insultera. – Sur une autre : – Paix là. Chapeaux sur la tête. Il va parler devant ses juges. – Sur une autre : – Le roi a couché la nation en joue. Il a fait long feu, à la nation de tirer maintenant. – Sur une autre : – La Loi ! la Loi ! Ce fut entre ces murs-là que la Convention jugea Louis XVI.
Aux Tuileries, où la Convention vint siéger le 10 mai 1793, et qui s’appelèrent le Palais National, la salle des séances occupait tout l’intervalle entre le pavillon de l’Horloge appelé pavillon-Unité et le pavillon Marsan appelé pavillon-Liberté. Le pavillon de Flore s’appelait pavillon-Égalité. C’est par le grand escalier de Jean Bullant qu’on montait à la salle des séances. Sous le premier étage occupé par l’assemblée, tout le rez-de-chaussée du palais était une sorte de longue salle des gardes encombrée des faisceaux et des lits de camp des troupes de toutes armes qui veillaient autour de la Convention. L’assemblée avait une garde d’honneur qu’on appelait « les grenadiers de la Convention ».
Un ruban tricolore séparait le château où était l’assemblée du jardin où le peuple allait et venait.
( Victor Hugo, Quatrevingt-treize )
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55512
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Révolution française : La Convention
Ma parole, il y était !
Monsieur de la Pérouse- Messages : 506
Date d'inscription : 31/01/2019
Localisation : Enfin à bon port !
Re: Révolution française : La Convention
Comme vous dites, cher la Pérouse ! On le jurerait à l'entendre nommer tous les conventionnels qui se bousculent dans ce chaudron du diable. Ils sont tous là dans un sacré tumulte, ça s'appelle la Révolution française .
Qui voyait l’Assemblée ne songeait plus à la salle. Qui voyait le drame ne pensait plus au théâtre. Rien de plus difforme et de plus sublime. Un tas de héros, un troupeau de lâches. Des fauves sur une montagne, des reptiles dans un marais. Là fourmillaient, se coudoyaient, se provoquaient, se menaçaient, luttaient et vivaient tous ces combattants qui sont aujourd’hui des fantômes. Dénombrement titanique.
À droite, la Gironde, légion de penseurs ; à gauche, la Montagne, groupe d’athlètes. D’un côté, Brissot, qui avait reçu les clefs de la Bastille ; Barbaroux, auquel obéissaient les Marseillais ; Kervélégan, qui avait sous la main le bataillon de Brest caserné au faubourg Saint-Marceau ; Gensonné, qui avait établi la suprématie des représentants sur les généraux ; le fatal Guadet, auquel une nuit, aux Tuileries, la reine avait montré le dauphin endormi ; Guadet baisa le front de l’enfant et fit tomber la tête du père ; Salles, le dénonciateur chimérique des intimités de la Montagne avec l’Autriche ; Sillery, le boiteux de la droite, comme Couthon était le cul-de-jatte de la gauche ( ) ; Lause-Duperret, qui, traité de scélérat par un journaliste, l’invita à dîner en lui disant : « Je sais que « scélérat » veut simplement dire « l’homme qui ne pense pas comme nous » ; Rabaut-Saint-Étienne, qui avait commencé son Almanach de 1790 par ce mot : La Révolution est finie ; Quinette, un de ceux qui précipitèrent Louis XVI ; le janséniste Camus, qui rédigeait la constitution civile du clergé, croyait aux miracles du diacre Pâris, et se prosternait toutes les nuits devant un Christ de sept pieds de haut cloué au mur de sa chambre ; Fauchet, un prêtre qui, avec Camille Desmoulins, avait fait le 14 juillet ; Isnard, qui commit le crime de dire : Paris sera détruit, au moment même où Brunswick disait : Paris sera brûlé ; Jacob Dupont, le premier qui cria : "Je suis athée ", et à qui Robespierre répondit : " L’athéisme est aristocratique " ; Lanjuinais, dure, sagace et vaillante tête bretonne ; Ducos, l’Euryale de Boyer-Fonfrède ; Rebecqui, le Pylade de Barbaroux ; Rebecqui donnait sa démission parce qu’on n’avait pas encore guillotiné Robespierre ; Richaud, qui combattait la permanence des sections ; Lasource, qui avait émis cet apophtegme meurtrier : " Malheur aux nations reconnaissantes ! " et qui, au pied de l’échafaud, devait se contredire par cette fière parole jetée aux montagnards : " Nous mourons parce que le peuple dort, et vous mourrez parce que le peuple se réveillera " ; Biroteau, qui fit décréter l’abolition de l’inviolabilité, fut ainsi, sans le savoir, le forgeron du couperet, et dressa l’échafaud pour lui-même ; Charles Villatte, qui abrita sa conscience sous cette protestation : " Je ne veux pas voter sous les couteaux " ; Louvet, l’auteur de Faublas, qui devait finir libraire au Palais-Royal avec Lodoïska au comptoir ; Mercier, l’auteur du Tableau de Paris, qui s’écriait : " Tous les rois ont senti sur leurs nuques le 21 janvier " ; Marec, qui avait pour souci « la faction des anciennes limites » ; le journaliste Carra qui, au pied de l’échafaud, dit au bourreau : " Ça m’ennuie de mourir. J’aurais voulu voir la suite " ; Vigée, qui s’intitulait grenadier dans le deuxième bataillon de Mayenne-et-Loire, et qui, menacé par les tribunes publiques, s’écriait : " Je demande qu’au premier murmure des tribunes, nous nous retirions tous, et marchions à Versailles, le sabre à la main ! " Buzot, réservé à la mort de faim ; Valazé, promis à son propre poignard ; Condorcet, qui devait périr à Bourg-la-Reine devenu Bourg-Égalité, dénoncé par l’Horace qu’il avait dans sa poche ; Pétion, dont la destinée était d’être adoré par la foule en 1792 et dévoré par les loups en 1793 ; vingt autres encore, Pontécoulant, Marboz, Lidon, Saint-Martin, Dussaulx, traducteur de Juvénal, qui avait fait la campagne de Hanovre, Boilleau, Bertrand, Lesterp-Beauvais, Lesage, Gomaire, Gardien, Mainvielle, Duplantier, Lacaze, Antiboul, et en tête un Barnave qu’on appelait Vergniaud. De l’autre côté, Antoine-Louis-Léon Florelle de Saint-Just, pâle, front bas, profil correct, œil mystérieux, tristesse profonde, vingt-trois ans ; Merlin de Thionville, que les Allemands appelaient Feuer-Teufel, « le diable de feu » ; Merlin de Douai, le coupable auteur de la loi des suspects ; Soubrany, que le peuple de Paris, au premier prairial, demanda pour général ; l’ancien curé Lebon, tenant un sabre de la main qui avait jeté de l’eau bénite ; Billaud-Varennes, qui entrevoyait la magistrature de l’avenir ; pas de juges, des arbitres ; Fabre d’Églantine, qui eut une trouvaille charmante, le calendrier républicain, comme Rouget de Lisle eut une inspiration sublime, la Marseillaise, mais l’un et l’autre sans récidive ; Manuel, le procureur de la Commune, qui avait dit : " Un roi mort n’est par un homme de moins " ; Goujon, qui était entré dans Tripstadt, dans Newstadt et dans Spire, et avait vu fuir l’armée prussienne ; Lacroix, avocat changé en général, fait chevalier de Saint-Louis six jours avant le 10 août ; Fréron-Thersite, fils de Fréron-Zoïle ; Rulh, l’inexorable fouilleur de l’armoire de fer, prédestiné au grand suicide républicain, devant se tuer le jour où mourrait la république ; Fouché, âme de démon, face de cadavre ; Camboulas, l’ami du père Duchesne, lequel disait à Guillotin : " Tu es du club des Feuillants, mais ta fille est du club des Jacobins " ; Jagot, qui à ceux qui plaignaient la nudité des prisonniers répondait ce mot farouche : " Une prison est un habit de pierre " ; Javogues, l’effrayant déterreur des tombeaux de Saint-Denis ; Osselin, proscripteur qui cachait chez lui une proscrite, madame Charry ; Bentabolle, qui, lorsqu’il présidait, faisait signe aux tribunes d’applaudir ou de huer ; le journaliste Robert, mari de mademoiselle Kéralio, laquelle écrivait : " Ni Robespierre, ni Marat ne viennent chez moi, Robespierre y viendra quand il voudra, Marat jamais " ; Garan-Coulon, qui avait fièrement demandé, quand l’Espagne était intervenue dans le procès de Louis XVI, que l’Assemblée ne daignât pas lire la lettre d’un roi pour un roi ; Grégoire, évêque, digne d’abord de la primitive Église, mais qui plus tard sous l’empire effaça le républicain Grégoire par le comte Grégoire ; Amar qui disait : " Toute la terre condamne Louis XVI. À qui donc appeler du jugement ? aux planètes " ; Rouyer, qui s’était opposé, le 21 janvier, à ce qu’on tirât le canon du Pont-Neuf, disant : " Une tête de roi ne doit par faire en tombant plus de bruit que la tête d’un autre homme " ; Chénier, frère d’André ; Vadier, un de ceux qui posaient un pistolet sur la tribune ; Panis, qui disait à Momoro : " – Je veux que Marat et Robespierre s’embrassent à ma table chez moi. – Où demeures-tu ? – À Charenton. – Ailleurs m’eût étonné ", disait Momoro ; Legendre, qui fut le boucher de la révolution de France comme Pride avait été le boucher de la révolution d’Angleterre ; "– Viens, que je t’assomme, criait-il à Lanjuinais. Et Lanjuinais répondait : Fais d’abord décréter que je suis un bœuf " ; Collot d’Herbois, ce lugubre comédien, ayant sur la face l’antique masque aux deux bouches qui disent Oui et Non, approuvant par l’une ce qu’il blâmait par l’autre, flétrissant Carrier à Nantes et déifiant Châlier à Lyon, envoyant Robespierre à l’échafaud et Marat au Panthéon ; Génissieux, qui demandait la peine de mort contre quiconque aurait sur lui la médaille Louis XVI martyrisé ; Léonard Bourdon, le maître d’école qui avait offert sa maison au vieillard du Mont-Jura ; Topsent, marin, Goupilleau, avocat, Laurent Lecointre, marchand, Duhem, médecin, Sergent, statuaire, David, peintre, Joseph ( ) Égalité, prince. D’autres encore : Lecointe Puiraveau, qui demandait que Marat fût déclaré par décret « en état de démence » ; Robert Lindet, l’inquiétant créateur de cette pieuvre dont la tête était le Comité de sûreté générale et qui couvrait la France de ses vingt et un mille bras, qu’on appelait les comités révolutionnaires ; Lebœuf, sur qui Girey-Dupré, dans son Noël des faux patriotes, avait fait ce vers : " Lebœuf vit Legendre et beugla. " Thomas Payne, Américain, et clément ; Anacharsis Cloots, Allemand, baron, millionnaire, athée, hébertiste, candide ; l’intègre Lebas, l’ami des Duplay ; Rovère, un des rares hommes qui sont méchants pour la méchanceté, car l’art pour l’art existe plus qu’on ne croit ; Charlier, qui voulait qu’on dît vous aux aristocrates ; Tallien, élégiaque et féroce, qui fera le 9 thermidor par amour ; Cambacérès, procureur qui sera prince, Carrier, procureur qui sera tigre ; Laplanche, qui s’écria un jour : " Je demande la priorité pour le canon d’alarme " ; Thuriot qui voulait le vote à haute voix des jurés du tribunal révolutionnaire ; Bourdon de l’Oise, qui provoquait en duel Chambon, dénonçait Payne, et était dénoncé par Hébert ; Fayau, qui proposait « l’envoi d’une armée incendiaire » dans la Vendée ; Tavaux, qui le 13 avril fut presque un médiateur entre la Gironde et la Montagne ; Vernier, qui demandait que les chefs girondins et les chefs montagnards allassent servir comme simples soldats ; Rewbell qui s’enferma dans Mayence ; Bourbotte qui eut son cheval tué sous lui à la prise de Saumur ; Guimberteau qui dirigea l’armée des Côtes de Cherbourg ; Jard-Panvilliers qui dirigea l’armée des Côtes de la Rochelle, Lecarpentier qui dirigea l’escadre de Cancale ; Roberjot qu’attendait le guet-apens de Rastadt ; Prieur de la Marne qui portait dans les camps sa vieille contre-épaulette de chef d’escadron ; Levasseur de la Sarthe qui, d’un mot, décidait Serrent, commandant du bataillon de Saint-Amand, à se faire tuer ; Reverchon, Maure, Bernard de Saintes, Charles Richard, Lequinio, et au sommet de ce groupe un Mirabeau qu’on appelait Danton. En dehors de ces deux camps, et les tenant tous deux en respect, se dressait un homme, Robespierre.
Les bas-fonds de l’Assemblée s’appelaient la Plaine. Il y avait là tout ce qui flotte ; les hommes qui doutent, qui hésitent, qui reculent, qui ajournent, qui épient, chacun craignant quelqu’un. La Montagne, c’était une élite ; la Gironde, c’était une élite ; la Plaine, c’était la foule. La Plaine se résumait et se condensait en Sieyès. Sieyès, homme profond qui était devenu creux. Il s’était arrêté au tiers-état, et n’avait pu monter jusqu’au peuple. De certains esprits sont faits pour rester à mi-côte. Sieyès appelait " tigre " Robespierre qui l’appelait " taupe ". Ce métaphysicien avait abouti, non à la sagesse, mais à la prudence. Il était courtisan et non serviteur de la révolution. Il prenait une pelle et allait, avec le peuple, travailler au Champ de Mars, attelé à la même charrette qu’Alexandre de Beauharnais. Il conseillait l’énergie dont il n’usait point. Il disait aux Girondins : " Mettez le canon de votre parti ". Il y a les penseurs qui sont les lutteurs ; ceux-là étaient, comme Condorcet, avec Vergniaud, ou, comme Camille Desmoulins, avec Danton. Il y a les penseurs qui veulent vivre, ceux-ci étaient avec Sieyès.
Lieu immense. Tous les types humains, inhumains et surhumains étaient là. Amas épique d’antagonismes. Guillotin évitant David, Bazire insultant Chabot, Guadet raillant Saint-Just, Vergniaud dédaignant Danton, Louvet attaquant Robespierre, Buzot dénonçant Égalité, Chambon flétrissant Pache, tous exécrant Marat. Et que de noms encore il faudrait enregistrer ! Armonville, dit Bonnet-Rouge, parce qu’il ne siégeait qu’en bonnet phrygien, ami de Robespierre, et voulant, « après Louis XVI, guillotiner Robespierre » par goût de l’équilibre ; Massieu, collègue et ménechme de ce bon Lamourette, évêque fait pour laisser son nom à un baiser ( ... un baiser ! consenti j'espère ? parce que sinon, balance ton Lamourette ! ) ; Lehardy du Morbihan stigmatisant les prêtres de Bretagne ; Barère, l’homme des majorités, qui présidait quand Louis XVI parut à la barre, et qui était à Paméla ce que Louvet était à Lodoïska ; l’oratorien Daunou qui disait : " Gagnons du temps " ; Dubois-Crancé à l’oreille de qui se penchait Marat ; le marquis de Chateauneuf, Laclos, Hérault de Séchelles qui reculait devant Henriot criant : " Canonniers, à vos pièces " ; Julien, qui comparait la Montagne aux Thermopyles ; Gamon, qui voulait une tribune publique réservée uniquement aux femmes ; Laloy, qui décerna les honneurs de la séance à l’évêque Gobel venant à la Convention déposer la mitre et coiffer le bonnet rouge ; Lecomte, qui s’écriait : " C’est donc à qui se déprêtrisera ! " Féraud, dont Boissy d’Anglas saluera la tête ( ), laissant à l’histoire cette question : – Boissy-d’Anglas a-t-il salué la tête, c’est-à-dire la victime, ou la pique, c’est-à-dire les assassins ? – Les deux frères Duprat, l’un montagnard, l’autre girondin, qui se haïssaient comme les deux frères Chénier.
Ah ben oui, Hugo, c'est du lourd ! Mais quel plaisir de se laisser emporter par ce souffle puissant...
Qui voyait l’Assemblée ne songeait plus à la salle. Qui voyait le drame ne pensait plus au théâtre. Rien de plus difforme et de plus sublime. Un tas de héros, un troupeau de lâches. Des fauves sur une montagne, des reptiles dans un marais. Là fourmillaient, se coudoyaient, se provoquaient, se menaçaient, luttaient et vivaient tous ces combattants qui sont aujourd’hui des fantômes. Dénombrement titanique.
À droite, la Gironde, légion de penseurs ; à gauche, la Montagne, groupe d’athlètes. D’un côté, Brissot, qui avait reçu les clefs de la Bastille ; Barbaroux, auquel obéissaient les Marseillais ; Kervélégan, qui avait sous la main le bataillon de Brest caserné au faubourg Saint-Marceau ; Gensonné, qui avait établi la suprématie des représentants sur les généraux ; le fatal Guadet, auquel une nuit, aux Tuileries, la reine avait montré le dauphin endormi ; Guadet baisa le front de l’enfant et fit tomber la tête du père ; Salles, le dénonciateur chimérique des intimités de la Montagne avec l’Autriche ; Sillery, le boiteux de la droite, comme Couthon était le cul-de-jatte de la gauche ( ) ; Lause-Duperret, qui, traité de scélérat par un journaliste, l’invita à dîner en lui disant : « Je sais que « scélérat » veut simplement dire « l’homme qui ne pense pas comme nous » ; Rabaut-Saint-Étienne, qui avait commencé son Almanach de 1790 par ce mot : La Révolution est finie ; Quinette, un de ceux qui précipitèrent Louis XVI ; le janséniste Camus, qui rédigeait la constitution civile du clergé, croyait aux miracles du diacre Pâris, et se prosternait toutes les nuits devant un Christ de sept pieds de haut cloué au mur de sa chambre ; Fauchet, un prêtre qui, avec Camille Desmoulins, avait fait le 14 juillet ; Isnard, qui commit le crime de dire : Paris sera détruit, au moment même où Brunswick disait : Paris sera brûlé ; Jacob Dupont, le premier qui cria : "Je suis athée ", et à qui Robespierre répondit : " L’athéisme est aristocratique " ; Lanjuinais, dure, sagace et vaillante tête bretonne ; Ducos, l’Euryale de Boyer-Fonfrède ; Rebecqui, le Pylade de Barbaroux ; Rebecqui donnait sa démission parce qu’on n’avait pas encore guillotiné Robespierre ; Richaud, qui combattait la permanence des sections ; Lasource, qui avait émis cet apophtegme meurtrier : " Malheur aux nations reconnaissantes ! " et qui, au pied de l’échafaud, devait se contredire par cette fière parole jetée aux montagnards : " Nous mourons parce que le peuple dort, et vous mourrez parce que le peuple se réveillera " ; Biroteau, qui fit décréter l’abolition de l’inviolabilité, fut ainsi, sans le savoir, le forgeron du couperet, et dressa l’échafaud pour lui-même ; Charles Villatte, qui abrita sa conscience sous cette protestation : " Je ne veux pas voter sous les couteaux " ; Louvet, l’auteur de Faublas, qui devait finir libraire au Palais-Royal avec Lodoïska au comptoir ; Mercier, l’auteur du Tableau de Paris, qui s’écriait : " Tous les rois ont senti sur leurs nuques le 21 janvier " ; Marec, qui avait pour souci « la faction des anciennes limites » ; le journaliste Carra qui, au pied de l’échafaud, dit au bourreau : " Ça m’ennuie de mourir. J’aurais voulu voir la suite " ; Vigée, qui s’intitulait grenadier dans le deuxième bataillon de Mayenne-et-Loire, et qui, menacé par les tribunes publiques, s’écriait : " Je demande qu’au premier murmure des tribunes, nous nous retirions tous, et marchions à Versailles, le sabre à la main ! " Buzot, réservé à la mort de faim ; Valazé, promis à son propre poignard ; Condorcet, qui devait périr à Bourg-la-Reine devenu Bourg-Égalité, dénoncé par l’Horace qu’il avait dans sa poche ; Pétion, dont la destinée était d’être adoré par la foule en 1792 et dévoré par les loups en 1793 ; vingt autres encore, Pontécoulant, Marboz, Lidon, Saint-Martin, Dussaulx, traducteur de Juvénal, qui avait fait la campagne de Hanovre, Boilleau, Bertrand, Lesterp-Beauvais, Lesage, Gomaire, Gardien, Mainvielle, Duplantier, Lacaze, Antiboul, et en tête un Barnave qu’on appelait Vergniaud. De l’autre côté, Antoine-Louis-Léon Florelle de Saint-Just, pâle, front bas, profil correct, œil mystérieux, tristesse profonde, vingt-trois ans ; Merlin de Thionville, que les Allemands appelaient Feuer-Teufel, « le diable de feu » ; Merlin de Douai, le coupable auteur de la loi des suspects ; Soubrany, que le peuple de Paris, au premier prairial, demanda pour général ; l’ancien curé Lebon, tenant un sabre de la main qui avait jeté de l’eau bénite ; Billaud-Varennes, qui entrevoyait la magistrature de l’avenir ; pas de juges, des arbitres ; Fabre d’Églantine, qui eut une trouvaille charmante, le calendrier républicain, comme Rouget de Lisle eut une inspiration sublime, la Marseillaise, mais l’un et l’autre sans récidive ; Manuel, le procureur de la Commune, qui avait dit : " Un roi mort n’est par un homme de moins " ; Goujon, qui était entré dans Tripstadt, dans Newstadt et dans Spire, et avait vu fuir l’armée prussienne ; Lacroix, avocat changé en général, fait chevalier de Saint-Louis six jours avant le 10 août ; Fréron-Thersite, fils de Fréron-Zoïle ; Rulh, l’inexorable fouilleur de l’armoire de fer, prédestiné au grand suicide républicain, devant se tuer le jour où mourrait la république ; Fouché, âme de démon, face de cadavre ; Camboulas, l’ami du père Duchesne, lequel disait à Guillotin : " Tu es du club des Feuillants, mais ta fille est du club des Jacobins " ; Jagot, qui à ceux qui plaignaient la nudité des prisonniers répondait ce mot farouche : " Une prison est un habit de pierre " ; Javogues, l’effrayant déterreur des tombeaux de Saint-Denis ; Osselin, proscripteur qui cachait chez lui une proscrite, madame Charry ; Bentabolle, qui, lorsqu’il présidait, faisait signe aux tribunes d’applaudir ou de huer ; le journaliste Robert, mari de mademoiselle Kéralio, laquelle écrivait : " Ni Robespierre, ni Marat ne viennent chez moi, Robespierre y viendra quand il voudra, Marat jamais " ; Garan-Coulon, qui avait fièrement demandé, quand l’Espagne était intervenue dans le procès de Louis XVI, que l’Assemblée ne daignât pas lire la lettre d’un roi pour un roi ; Grégoire, évêque, digne d’abord de la primitive Église, mais qui plus tard sous l’empire effaça le républicain Grégoire par le comte Grégoire ; Amar qui disait : " Toute la terre condamne Louis XVI. À qui donc appeler du jugement ? aux planètes " ; Rouyer, qui s’était opposé, le 21 janvier, à ce qu’on tirât le canon du Pont-Neuf, disant : " Une tête de roi ne doit par faire en tombant plus de bruit que la tête d’un autre homme " ; Chénier, frère d’André ; Vadier, un de ceux qui posaient un pistolet sur la tribune ; Panis, qui disait à Momoro : " – Je veux que Marat et Robespierre s’embrassent à ma table chez moi. – Où demeures-tu ? – À Charenton. – Ailleurs m’eût étonné ", disait Momoro ; Legendre, qui fut le boucher de la révolution de France comme Pride avait été le boucher de la révolution d’Angleterre ; "– Viens, que je t’assomme, criait-il à Lanjuinais. Et Lanjuinais répondait : Fais d’abord décréter que je suis un bœuf " ; Collot d’Herbois, ce lugubre comédien, ayant sur la face l’antique masque aux deux bouches qui disent Oui et Non, approuvant par l’une ce qu’il blâmait par l’autre, flétrissant Carrier à Nantes et déifiant Châlier à Lyon, envoyant Robespierre à l’échafaud et Marat au Panthéon ; Génissieux, qui demandait la peine de mort contre quiconque aurait sur lui la médaille Louis XVI martyrisé ; Léonard Bourdon, le maître d’école qui avait offert sa maison au vieillard du Mont-Jura ; Topsent, marin, Goupilleau, avocat, Laurent Lecointre, marchand, Duhem, médecin, Sergent, statuaire, David, peintre, Joseph ( ) Égalité, prince. D’autres encore : Lecointe Puiraveau, qui demandait que Marat fût déclaré par décret « en état de démence » ; Robert Lindet, l’inquiétant créateur de cette pieuvre dont la tête était le Comité de sûreté générale et qui couvrait la France de ses vingt et un mille bras, qu’on appelait les comités révolutionnaires ; Lebœuf, sur qui Girey-Dupré, dans son Noël des faux patriotes, avait fait ce vers : " Lebœuf vit Legendre et beugla. " Thomas Payne, Américain, et clément ; Anacharsis Cloots, Allemand, baron, millionnaire, athée, hébertiste, candide ; l’intègre Lebas, l’ami des Duplay ; Rovère, un des rares hommes qui sont méchants pour la méchanceté, car l’art pour l’art existe plus qu’on ne croit ; Charlier, qui voulait qu’on dît vous aux aristocrates ; Tallien, élégiaque et féroce, qui fera le 9 thermidor par amour ; Cambacérès, procureur qui sera prince, Carrier, procureur qui sera tigre ; Laplanche, qui s’écria un jour : " Je demande la priorité pour le canon d’alarme " ; Thuriot qui voulait le vote à haute voix des jurés du tribunal révolutionnaire ; Bourdon de l’Oise, qui provoquait en duel Chambon, dénonçait Payne, et était dénoncé par Hébert ; Fayau, qui proposait « l’envoi d’une armée incendiaire » dans la Vendée ; Tavaux, qui le 13 avril fut presque un médiateur entre la Gironde et la Montagne ; Vernier, qui demandait que les chefs girondins et les chefs montagnards allassent servir comme simples soldats ; Rewbell qui s’enferma dans Mayence ; Bourbotte qui eut son cheval tué sous lui à la prise de Saumur ; Guimberteau qui dirigea l’armée des Côtes de Cherbourg ; Jard-Panvilliers qui dirigea l’armée des Côtes de la Rochelle, Lecarpentier qui dirigea l’escadre de Cancale ; Roberjot qu’attendait le guet-apens de Rastadt ; Prieur de la Marne qui portait dans les camps sa vieille contre-épaulette de chef d’escadron ; Levasseur de la Sarthe qui, d’un mot, décidait Serrent, commandant du bataillon de Saint-Amand, à se faire tuer ; Reverchon, Maure, Bernard de Saintes, Charles Richard, Lequinio, et au sommet de ce groupe un Mirabeau qu’on appelait Danton. En dehors de ces deux camps, et les tenant tous deux en respect, se dressait un homme, Robespierre.
Les bas-fonds de l’Assemblée s’appelaient la Plaine. Il y avait là tout ce qui flotte ; les hommes qui doutent, qui hésitent, qui reculent, qui ajournent, qui épient, chacun craignant quelqu’un. La Montagne, c’était une élite ; la Gironde, c’était une élite ; la Plaine, c’était la foule. La Plaine se résumait et se condensait en Sieyès. Sieyès, homme profond qui était devenu creux. Il s’était arrêté au tiers-état, et n’avait pu monter jusqu’au peuple. De certains esprits sont faits pour rester à mi-côte. Sieyès appelait " tigre " Robespierre qui l’appelait " taupe ". Ce métaphysicien avait abouti, non à la sagesse, mais à la prudence. Il était courtisan et non serviteur de la révolution. Il prenait une pelle et allait, avec le peuple, travailler au Champ de Mars, attelé à la même charrette qu’Alexandre de Beauharnais. Il conseillait l’énergie dont il n’usait point. Il disait aux Girondins : " Mettez le canon de votre parti ". Il y a les penseurs qui sont les lutteurs ; ceux-là étaient, comme Condorcet, avec Vergniaud, ou, comme Camille Desmoulins, avec Danton. Il y a les penseurs qui veulent vivre, ceux-ci étaient avec Sieyès.
Lieu immense. Tous les types humains, inhumains et surhumains étaient là. Amas épique d’antagonismes. Guillotin évitant David, Bazire insultant Chabot, Guadet raillant Saint-Just, Vergniaud dédaignant Danton, Louvet attaquant Robespierre, Buzot dénonçant Égalité, Chambon flétrissant Pache, tous exécrant Marat. Et que de noms encore il faudrait enregistrer ! Armonville, dit Bonnet-Rouge, parce qu’il ne siégeait qu’en bonnet phrygien, ami de Robespierre, et voulant, « après Louis XVI, guillotiner Robespierre » par goût de l’équilibre ; Massieu, collègue et ménechme de ce bon Lamourette, évêque fait pour laisser son nom à un baiser ( ... un baiser ! consenti j'espère ? parce que sinon, balance ton Lamourette ! ) ; Lehardy du Morbihan stigmatisant les prêtres de Bretagne ; Barère, l’homme des majorités, qui présidait quand Louis XVI parut à la barre, et qui était à Paméla ce que Louvet était à Lodoïska ; l’oratorien Daunou qui disait : " Gagnons du temps " ; Dubois-Crancé à l’oreille de qui se penchait Marat ; le marquis de Chateauneuf, Laclos, Hérault de Séchelles qui reculait devant Henriot criant : " Canonniers, à vos pièces " ; Julien, qui comparait la Montagne aux Thermopyles ; Gamon, qui voulait une tribune publique réservée uniquement aux femmes ; Laloy, qui décerna les honneurs de la séance à l’évêque Gobel venant à la Convention déposer la mitre et coiffer le bonnet rouge ; Lecomte, qui s’écriait : " C’est donc à qui se déprêtrisera ! " Féraud, dont Boissy d’Anglas saluera la tête ( ), laissant à l’histoire cette question : – Boissy-d’Anglas a-t-il salué la tête, c’est-à-dire la victime, ou la pique, c’est-à-dire les assassins ? – Les deux frères Duprat, l’un montagnard, l’autre girondin, qui se haïssaient comme les deux frères Chénier.
Ah ben oui, Hugo, c'est du lourd ! Mais quel plaisir de se laisser emporter par ce souffle puissant...
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Mme de Sabran- Messages : 55512
Date d'inscription : 21/12/2013
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Re: Révolution française : La Convention
Sublime. Merci Éléonore.
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« La mode est à la France ce que les mines du Pérou sont à l'Espagne » Colbert.
Marie-Jeanne- Messages : 1497
Date d'inscription : 16/09/2018
Re: Révolution française : La Convention
Marie-Jeanne a écrit:Sublime.
N'est-ce pas !
Eh bien tiens, en voici une autre petite louchée :
Les cuves les plus généreuses ont leur lie. Au dessous même de la Plaine, il y avait le Marais. Stagnation hideuse laissant voir les transparences de l’égoïsme. Là grelottait l’attente muette des trembleurs. Rien de plus misérable. Tous les opprobres, et aucune honte ; la colère latente ; la révolte sous la servitude. Ils étaient cyniquement effrayés ; ils avaient tous les courages de la lâcheté ; ils préféraient la Gironde et choisissaient la Montagne ; le dénouement dépendait d’eux ; ils versaient du côté qui réussissait ; ils livraient Louis XVI à Vergniaud, Vergniaud à Danton, Danton à Robespierre, Robespierre à Tallien. Ils piloriaient Marat vivant et divinisaient Marat mort. Ils soutenaient tout jusqu’au jour où ils renversaient tout. Ils avaient l’instinct de la poussée décisive à donner à tout ce qui chancelle. À leurs yeux, comme ils s’étaient mis en service à la condition qu’on fût solide, chanceler, c’était les trahir. Ils étaient le nombre, ils étaient la force, ils étaient la peur. De là l’audace des turpitudes.
De là le 31 mai, le 11 germinal, le 9 thermidor ; tragédies nouées par les géants et dénouées par les nains.
Danton, Marat et Robespierre, au cabaret de la rue du Paon.
Dessin de Diogène Maillart
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Mme de Sabran- Messages : 55512
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Révolution française : La Convention
Quelle édition as-tu ? Je m'apprête à le commander, je le cherche dans un caractère pas trop petit pour les lectures nocturnes.
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« La mode est à la France ce que les mines du Pérou sont à l'Espagne » Colbert.
Marie-Jeanne- Messages : 1497
Date d'inscription : 16/09/2018
Re: Révolution française : La Convention
Marie-Jeanne a écrit:Quelle édition as-tu ?
Je le grappille en ligne, ma chère Marie-Jeanne .
https://beq.ebooksgratuits.com/vents/Hugo-93.pdf
... d'où ce grand confort si appréciable pour des citations-fleuve !
Tiens encore . J'ai entendu, dans je ne sais plus laquelle des multiples émissions consacrées à l'Empereur ces jours-ci, que Napoléon en somme n'avait fait que mettre en pratique les idéaux de réformes mûris sous la Révolution ( exception faite évidemment de l'esclavage rétabli ).
Et quels étaient-ils au juste ?
Hugo les énumère :
En même temps qu’elle dégageait de la révolution, cette assemblée produisait de la civilisation. Fournaise, mais forge. Dans cette cuve où bouillonnait la terreur, le progrès fermentait. De ce chaos d’ombre et de cette tumultueuse fuite de nuages, sortaient d’immenses rayons de lumière parallèles aux lois éternelles. Rayons restés sur l’horizon, visibles à jamais dans le ciel des peuples, et qui sont, l’un la justice, l’autre la tolérance, l’autre la bonté, l’autre la raison, l’autre la vérité, l’autre l’amour.
La Convention promulguait ce grand axiome : La Liberté du citoyen finit où la Liberté d’un autre citoyen commence ; ce qui résume en deux lignes toute la sociabilité humaine. Elle déclarait l’indigence sacrée ; elle déclarait l’infirmité sacrée dans l’aveugle et dans le sourd-muet devenus pupilles de l’État, la maternité sacrée dans la fille-mère qu’elle consolait et relevait, l’enfance sacrée dans l’orphelin qu’elle faisait adopter par la patrie, l’innocence sacrée dans l’accusé acquitté qu’elle indemnisait. Elle flétrissait la traite des noirs ; elle abolissait l’esclavage. Elle proclamait la solidarité civique. Elle décrétait l’instruction gratuite. Elle organisait l’éducation nationale par l’école normale à Paris, l’école centrale au chef-lieu, et l’école primaire dans la commune. Elle créait les conservatoires et les musées. Elle décrétait l’unité de code, l’unité de poids et de mesures, et l’unité de calcul par le système décimal. Elle fondait les finances de la France, et à la longue banqueroute monarchique elle faisait succéder le crédit public. Elle donnait à la circulation le télégraphe, à la vieillesse les hospices dotés, à la maladie les hôpitaux purifiés, à l’enseignement l’école polytechnique, à la science le bureau des longitudes, à l’esprit humain l’institut. En même temps que nationale, elle était cosmopolite. Des onze mille deux cent dix décrets qui sont sortis de la Convention, un tiers a un but politique, les deux tiers ont un but humain. Elle déclarait la morale universelle base de la société et la conscience universelle base de la loi. Et tout cela, servitude abolie, fraternité proclamée, humanité protégée, conscience humaine rectifiée, loi du travail transformée en droit et d’onéreuse devenue secourable, richesse nationale consolidée, enfance éclairée et assistée, lettres et sciences propagées, lumière allumée sur tous les sommets, aide à toutes les misères, promulgation de tous les principes, la Convention le faisait, ayant dans les entrailles cette hydre, la Vendée, et sur les épaules ce tas de tigres, les rois.
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Mme de Sabran- Messages : 55512
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Révolution française : La Convention
Après Hugo, Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe :
Les Conventionnels se piquaient d’être les plus bénins des hommes : bons pères, bons fils, bons maris, ils menaient promener les petits enfants ; ils leur servaient de nourrices ; ils pleuraient de tendresse à leurs simples jeux ; ils prenaient doucement dans leurs bras ces petits agneaux, afin de leur montrer le "dada" des charrettes qui conduisaient les victimes au supplice. Ils chantaient la nature, la paix, la pitié, la bienfaisance, la candeur, les vertus domestiques ; ces béats de philanthropie faisaient couper le cou à leurs voisins avec une extrême sensibilité, pour le plus grand bonheur de l’espèce humaine.
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Mme de Sabran- Messages : 55512
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Révolution française : La Convention
Trouvé récemment à Bruxelles en furetant dans une des nombreuses bouquineries dans la ville, un curieux petit livre portant les usures du temps qui passe ( ) :
Sous le E d'Egalité : ( )
Pas de bol pour ce Tellier ( ) iii ahn iii ahn iii ahn :
J'étais surpris de lire combien d'hommes avaient regretté leur vote de mort après la fin de la Terreur et à l'approche de leur propre mort :
Comme quoi il faut toujours garder la tête froide quand la folie des événements tente de s'emparer de nos esprits.
Sous le E d'Egalité : ( )
Pas de bol pour ce Tellier ( ) iii ahn iii ahn iii ahn :
J'étais surpris de lire combien d'hommes avaient regretté leur vote de mort après la fin de la Terreur et à l'approche de leur propre mort :
Comme quoi il faut toujours garder la tête froide quand la folie des événements tente de s'emparer de nos esprits.
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« elle dominait de la tête toutes les dames de sa cour, comme un grand chêne, dans une forêt, s'élève au-dessus des arbres qui l'environnent. »
Comte d'Hézècques- Messages : 4390
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