Marie-Joseph Chénier ( 1764 - 1811 )
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Marie-Joseph Chénier ( 1764 - 1811 )
Marie-Joseph Blaise Chénier
Cercle de Jacques-Louis David (français, 1748 - 1825)
Portrait de Marie-Joseph Chénier (?)
Cercle de Jacques-Louis David (français, 1748 - 1825)
Portrait de Marie-Joseph Chénier (?)
Marie-Joseph Blaise Chénier est né le 11 février 1764 à Galata, quartier de Constantinople , d’une mère grecque Elisabeth Lhomaca et d’un négociant français, Louis de Chénier.
Elisabeth Santi Lhomaca Chénier
image Wikiwand
La famille rentre en France en 1765, mais le père repart bientôt seul pour être consul au Maroc, à Safi. Il accompagne en Afrique le comte de Brugnon que le roi Louis XVI « envoya pour conclure un traité avec l'[empereur] de Maroc ». Pour en gratifier Louis de Chénier, le roi de France l'institua consul général et, peu près, « chargé d'affaires auprès de cette puissance barbaresque » Il demeura au Maroc jusqu'en 1784, date à laquelle il regagna la France « où il reçut son traitement de retraite ».
Louis le Sauveur de Chénier en 1773.
Image WIKI
Il mit « en ordre les différents matériaux qu'il avait rassemblés et fit paraître en 1787 ses Recherches sur les Maures, qui fut suivi des Révolutions de l'empire Othoman », ainsi que ses Recherches historiques sur les Maures, et l'Histoire de l'empire de Maroc. Deux ans plus tard, fut édité Révolutions de l'empire Othoman et observations sur ses progrès et sur ses revers et, sur l'état présent de cet Empire.
Nous voyons que les bambins avaient de qui tenir car Mme Chénier était également une femme de lettres . Elle aurait eu pour lointaine aïeule la "dernière princesse de Lusignan qui avait régné sur l'île de Chypre". Son père, Antoine Lhomaca, aurait épousé en premières noces "une Smyrniote, descendante des Cornaro de Lusignan."
Sur le tableau ci-dessous, Elisabeth Chénier est très reconnaissable car elle arbore la même étrange ( exotique ? ) coiffure.
La famille Chénier à Paris, en 1783
image Wikiwand
Marie-Joseph et son frère aîné André sont élevés par leur tante Marie et l'époux de celle-ci, André Béraut, à Carcassonne .
Les deux frères sont admis au Collège de Navarre, qui est ouvert sur les idées nouvelles : l'histoire et la géographie sont inspirées de L'Essai sur les mœurs de Voltaire, la philosophie inspirée du sensualisme de Condillac. Ils s'y lient avec des fils de grandes familles, notamment Charles et Michel de Trudaine, ainsi que Louis et François de Pange, grâce auxquels ils purent ensuite fréquenter les milieux littéraires et aristocratiques. Les Trudaine et les Pange sont par ailleurs proches de Turgot, des Lumières et des encyclopédistes. Tous ces jeunes gens ont Condorcet pour maître à penser.
Marie-Joseph devint en 1781, à l'âge de dix-sept ans, cadet gentilhomme dans les dragons de Montmorency et passa deux années en garnison à Niort.
C'est André, et non Marie-Joseph, qui a immortalisé le nom de Chénier, et le cadet n'est le plus souvent cité aujourd'hui qu'en relation avec la mort de l'aîné, dans laquelle il semble pourtant avéré qu'il n'eut aucune responsabilité. Sous la Révolution et l'Empire, il prolonge, en les mettant superficiellement au goût du jour, les formes poétiques et dramatiques du XVIIIe siècle.
Tout comme François de Pange, Marie-Joseph renonça à la carrière militaire pour se consacrer à la littérature, mais le succès ne fut pas au rendez-vous pour les jeunes gens. François de Pange se tourna vers le journalisme, mais Marie-Joseph s'obstina. Il débuta à la Comédie-Française en 1785 avec un drame en deux actes, Edgar, ou le Page supposé, qui fut sifflé du début à la fin.
En 1786, la tragédie d'Azémire,
qu'il dédia à son ancien condisciple François de Pange, ne connut pas une meilleure fortune.
Comme poète, Marie-Joseph Chénier a composé des satires qui ne manquent pas de mordant, des épigrammes parfois bien trouvées, des élégies, comme La Promenade, des épîtres, dont la plus appréciée en son temps fut l'Epître à Voltaire (1806), qui renferme trois vers souvent cités sur l'immortalité d'Homère, inférieurs cependant à ceux d'Écouchard-Lebrun sur le même sujet :
Trois mille ans ont passé sur la cendre d'Homère,
Et depuis trois mille ans, Homère respecté
Est jeune encor de gloire et d'immortalité.
Il avait un réel talent satirique. Dans Les Nouveaux Saints (1800), il raille avec esprit Morellet :
Enfant de soixante ans qui promet quelque chose
ou La Harpe :
Le grand Perrin-Dandin de la littérature.
Dans la Petite épître à Jacques Delille (1802), il moque :
Marchand de vers, jadis poète,
Abbé, valet, vieille coquette.
Son talent – qui est réel – le porte malheureusement presque toujours à la déclamation, à l'emphase et à la boursouflure.
Madame de Staël l'a jugé avec justesse :
« C'était un homme d'esprit et d'imagination, mais tellement dominé par son amour-propre qu'il s'étonnait de lui-même, au lieu de travailler à se perfectionner. »
Au théâtre, il se signale surtout par le choix presque systématique de sujets mettant en scène le fanatisme aux prises avec l'esprit de liberté. Camille Desmoulins le loue d'avoir décoré Melpomène de la cocarde tricolore.
Sa tragédie Charles IX, ou la Saint-Barthélemy, rebaptisée quelques années plus tard Charles IX, ou l'école des rois, mettait en scène, à l'époque des guerres de Religion, le fanatisme aux prises avec l'esprit de liberté.
Dès juillet 1789, en se proclamant Théâtre de la Nation, la Comédie-Française n'avait fait que s'adapter aux circonstances. Réceptifs aux idées nouvelles, mais attachés à leurs traditions, les comédiens n'hésitaient pas à pratiquer la mondanité progressiste à la mode, avec tolérance et légèreté des opinions contradictoires.
Le discours d'ouverture prononcé par Talma le 20 avril 1789 proclame avec force l'importance institutionnelle de la Comédie-Française. La Réunion des États généraux est le signal d'une prise en compte nouvelle des doléances du Tiers État, jusqu'ici peu écouté. La nuit du 4 août et l'abolition des privilèges, par la violence du fait, créer, au sein de la société, des factions tranchées, et à la Comédie-Française, les Rouges (groupés autour de Talma) et les Noirs s'opposent dans des débats d'idées qui ne se refusent pas à la programmation.
C'est la pire image de la monarchie que vient applaudir un public de plus en plus agité, dans le Charles IX, ou l'École des rois, de Marie-Joseph Chénier. La pièce, reçue avant la prise de la Bastille, était alors sous-titrée ou la Saint-Barthélemy. Le personnage du roi assassin de son peuple paraît aux comédiens si insupportable que les acteurs pressentis déclinent le rôle. Seul Talma, acquis aux idées nouvelles et pressé de paraître au premier plan, accepte d'enthousiasme ce "mauvais rôle".
Portrait of Francois Joseph Talma (1763-1826) as Hamlet
(oil on canvas) - Anthelme Francois Lagrenée
Les comédiens renâclent, malgré l'insistance d'un public habilement manipulé par Marie-Joseph Chénier, pour qui leur hésitation est une manifestation réactionnaire.
Le 14 octobre 1789, l'Assemblée générale des Représentants de la Commune définitive de la ville de Paris suspend les représentations de la tragédie Charles IX. Chénier lance plusieurs pamphlets – Dénonciation des inquisiteurs de la pensée (1789), De la Liberté du Théâtre en France (1789) – qui emportèrent finalement l'autorisation de représenter la pièce non sans piquer la curiosité du public.
La première eut lieu après la prise de la Bastille, le 4 novembre 1789, avec un grand succès, comparable à celui du Mariage de Figaro. Le sujet, en accord avec l'esprit du temps, plut au public, que le mouvement de la pièce – manquant par ailleurs d'intrigue, de caractères et de style – et le talent de Talma, dont la réputation commençait à s'établir, achevèrent de conquérir.
La pièce, malgré son succès, provoque néanmoins de grandes turbulences au sein de la troupe. Après manifestations, interdictions, duels, intervention des forces de l'ordre, Charles IX finit par disparaît d'affiche en 1790 après 36 représentations. La question se pose de la réelle influence du spectacle sur les esprits échauffés par le retour du roi à Paris et sa semi-séquestration aux Tuileries.
La légende révolutionnaire attribuée à Charles IX , "première tragédie attribuée nationale" selon Palissot, revêt une importance sans doute exagérée, d'ailleurs colportée à l'envi par les déclarations attribuées à Camille Desmoulins :
"Cette pièce avance plus nos affaires que les journées d'octobre"
" Si Figaro a tué la noblesse, Charles IX tuera la royauté".
Le témoignage du marquis de La Ferrière, dans l'autre camp, semble pourtant confirmer le fait :
Les représentations de cette tragédie opérèrent un changement fatal dans le personnage du peuple de Paris : l'en sortit ivre de vengeance et tourmenté d'une soif de sang. On le voit, lorsqu'à la fin du 4 e acte, une cloche lugubre annonce le moment du massacre, on le voit se procurer avec un sombre rugissement, crier d'un ton de fureur : « Silence ! silence! " comme s'il craint que les sons de cette cloche de mort n'eussent pas retenu assez fortement dans son cœur, et de perdre ainsi quelques-unes des sensations de haine qu'elle était destinée à y alimenter .
( Ch . E. de Ferrières , Mémoires )
Anonyme - Portrait d'homme - dit Marie-Joseph Chénier
Musée Carnavalet
Image Wiki[/center]
Ainsi la création de la pièce de Marie-Joseph Chénier le 4 novembre 1789 est-elle l’une des grandes dates de l’histoire du Théâtre-Français. La pièce, interdite par la censure pendant de long mois, est portée par ce très jeune auteur, convaincu qu’il a tout a attendre de la Révolution. Homme de propagande, il n'avait pas ménagé sa peine et fait paraître tracts, brochures. Il s'était fait le héraut de la liberté d’expression, avait recruté des partisans pour réclamer sa pièce. Immense succès qui égale voire dépasse celui du Mariage de Figaro, cette pièce de circonstance entre en résonance avec les événements politiques de la Révolution. Le soir de sa création, plus de deux mille personnes s’entassent dans la salle inaugurant une série de représentations triomphales.
Chénier avait troussé à son Charles IX une magnifique Epitre dédicatoire à la Nation française.
- Spoiler:
- ÉPITRE DÉDICATOIRE A LA NATION FRANÇAISE.
Français, mes concitoyens, acceptez lʼhommage de cette tragédie patriotique. Je dédie l'ouvrage d'un homme libre à une Nation devenue libre. Sous le despotisme avilissant dont vous avez à peine secoué le joug, l'avarice et la flatterie dictaient les épîtres dédicatoires. Ainsi le sublime Corneille comparait Jules César à Jules Mazarin ; ainsi Voltaire mettait Tancrède sous la protection des maîtresses de Louis XV; ainsi lʼesclavage rapetissait la Nation entière, et jusqu'aux hommes que leur génie plaçait infiniment au-dessus des autres. Malgré leurs efforts, ils descendaient eux-mêmes au niveau du gouvernement ; tant il est vrai qu'il ne saurait exister de grandeur morale où la liberté n'existe pas ! Comment pouvait-on parler de vertu chez une Nation qui supportait une Bastille et des lettres de cachet ? Ces abus monstrueux ne sont plus. Vous avez anéanti l'autorité arbitraire ; vous aurez des lois et des mœurs. Votre scène doit changer avec tout le reste. Un théâtre de femmelettes et d'esclaves n'est plus fait pour des hommes et pour des citoyens. Une chose manquait à vos excellents poètes dramatiques : ce n'est pas du génie certainement ; ce ne sont point des sujets ; c'est un auditoire. Dans le dernier siècle, Britannicus avait cinq représentations; Bérénice en avait trente. C'est que les Français de ce temps-là connaissaient mieux la princesse de Clèves que Tacite. Jʼai conçu, j'ai exécuté avant la révolution, une tragédie que la révolution seule pouvait faire représenter. Les gens que cette révolution contrarie, et qui, dans le moment où j'écris, commencent à lever la tête avec une audace qui n'est que ridicule, n'ont pas manqué de trouver atroce que la Saint-Barthélemy fût offerte aux yeux du peuple français. Mais Voltaire, dont l'autorité est aussi grande que la leur est misérable, Voltaire, après avoir crayonné dans sa Henriade ce grand et terrible sujet, prédit des temps heureux où il sera transporté sur la scène nationale. Ceux qui sont encore gouvernés par des préjugés ne sont pas Français. Qu'ils courent dans le nord retrouver la féodalité ; qu'ils choisissent pour leur patrie ces belles et déplorables contrées où l'inquisition abâtardit les hommes, anéantit les vertus, les talentne sont pas Français. Qu'ils courent dans le nord retrouver la féodalité ; qu'ils choisissent pour leur patrie ces belles et déplorables contrées où l'inquisition abâtardit les hommes, anéantit les vertus, les talents, l'industrie et parvient à rendre stériles les champs les plus favorisés par le soleil. Je n'ai pas besoin d'assurer ces mauvais citoyens de mon profond mépris pour eux. Je m'honorerai de leurs injures devant mes contemporains et devant la postérité. Ils sont mes ennemis, parce qu'ils détestent la liberté. Je n'en resterai point là ; qu'ils frémissent. D'autres grands sujets s'offrent en foule à ma plume ; et, malgré ma jeunesse, le temps pourra me manquer, mais jamais la volonté, jamais le courage. Ces hommes si éclairés, osent dire qu'il nʼy a plus de fanatisme religieux au dix-huitième siècle. Mais les horribles procès, les assassinats juridiques de Jean Calas et du chevalier de La Barre sont du dix-huitième siècle. Mais bien plus récemment, on a refusé d'ensevelir dans Paris un vieillard couvert de gloire, le génie le plus brillant qu'ait eu la France, l'auteur d'Alzire et de Mahomet, le défenseur des Calas et du chevalier de La Barre. Quel était le crime de Voltaire? d'avoir lutté soixante ans contre le fanatisme. Qu'est-ce qui s'est vengé ? le fanatisme. Qu'est-ce qu'il faut écraser? le fanatisme. Il rampe, mais il existe encore ; il écrit de plats libelles anonymes, des mandements d'évêques contre l'Assemblée nationale, et d'infâmes journaux où tous les bons citoyens sont outragés à tant la feuille. Ce sont ces mêmes hommes, qui pour le malheur de la France, ne sont pas tous au-delà des frontières, ce sont eux qui ont osé porter jusqu'au pied du trône d'insolentes calomnies contre une pièce aussi morale qu'énergique.
O Louis XVI ! roi plein de justice et de bonté, vous êtes, digne d'être le chef des Français. Mais des méchants veulent toujours établir un mur de séparation entre votre peuple et vous. Ils cherchent à vous persuader que vous n'êtes point aimé de ce peuple. Ah ! venez au théâtre de la Nation quand on représente Charles IX: vous entendrez les acclamations des Français ; vous verrez couler leurs larmes de tendresse ; vous jouirez de l'enthousiasme que vos vertus leur inspirent ; et l'auteur patriote recueillera le plus beau fruit de son travail. Femmes, sexe timide et sensible, fait pour être la consolation d'un sexe qui est votre appui, ne craignez point cette austère et tragique peinture des forfaits politiques. Le théâtre est d'une influence immense sur les mœurs générales. Il fut longtemps une école d'adulation, de fadeur et de libertinage : il faut en faire une école de vertu et de liberté. Les hommes n'y recevront plus de ces molles impressions qui les dénaturent. Ils deviendront meilleurs et plus dignes de votre amour : ils redeviendront des hommes. Les mœurs des villes ne se modèleront plus sur les mœurs dépravées de la cour. On ne verra plus en France, hommes et femmes, sans pudeur et même sans passions, troquer de sexe, pour ainsi dire, et se déshonorer mutuellement par cet échange monstrueux. Pères de famille, laissez fréquenter à vos enfants ces spectacles sévères. Avec le respect des lois et de la morale, ils y puiseront le goût de notre histoire, étrangement négligée dans les collèges. Et vous, enfants, nation future, espérance de la patrie et d'un siècle qui n'est pas encore, vous ne serez point les hommes des anciens préjugés et de l'ancien esclavage ; vous serez les hommes de la liberté nouvelle. C'est à vous surtout que mes écrits conviennent. Je sais qu'un philosophe, un poète, un écrivain, ne doit attendre de justice complète que lorsqu'il n'en peut plus jouir, et quʼil est enseveli dans la poussière du tombeau. Mais ceux qui commencent la vie sont peu jaloux de ceux qui approchent du terme ; et si j'existe encore dans trente années, au milieu des clabauderies qui m'auront suivi dès ma jeunesse, vos suffrages consoleront sans doute la vieillesse du poète national. Nation spirituelle, industrieuse et magnanime, vous avez daigné accueillir les prémices d'un faible talent qui vous sera toujours consacré. Soutenez-moi dans la carrière pénible que je veux fournir. J'ai désormais pour ennemis irréconciliables tous ceux qui devaient leur existence aux préjugés, tous ceux qui regrettent la servitude. Je dois avoir pour amis tous ceux qui chérissent la patrie, tous les véritables Français. Vous donnez un grand exemple au monde. Le reste de l'édifice féodal va bientôt s'écrouler sous les efforts de l'auguste Assemblée qui vous représente. Votre admirable constitution est fondée sur l'égalité. Nous verrons disparaître ces titres, ces distinctions anti-sociales, ces différences absurdes qu'on n'a point rougi de reconnaître entre l'homme et l'homme, entre la terre et la terre. Si la tyrannie ou l'esclavage osent encore se montrer à découvert, que votre théâtre en fasse justice, et devienne en tout rival du théâtre d'Athènes. Mais c'est à vous, c'est à la Nation seule qu'il appartient de protéger les poètes citoyens qui descendront dans cette lice glorieuse pour terrasser les ennemis de la Nation.
15 décembre 1789
Mais au sein de la Troupe, l’équilibre est menacé par ce succès, par le rôle prépondérant qu’acquiert tout à coup le jeune Talma, par le cours des événements extérieurs annulant les privilèges de la Comédie-Française et modifiant sa relation au politique. Charles IX a été représenté 54 fois dont 36 représentations durant les années 1789-1790. Charles IX n’ a jamais été joué dans son entier depuis 1830. (texte extrait du programme remis à l’entrée).
Le texte est en ligne sur Libre Théâtre.
https://libretheatre.fr/wp-content/uploads/2015/11/CharlesIX_Chenier_LT.pdf
Notons que le Charles IX de Chénier a inspiré à Gabriel Brizard un pendant Les Imitateurs de Charles IX ou les Conspirateurs foudroyés, drame en 5 actes et en prose sous, bien entendu, une publication anonyme... car Les Imitateurs est un pamphlet aussi féroce que libidineux.
Les personnages ne sont plus Charles IX , Catherine de Médicis, Coligny and Co, mais bien Marie-Antoinette, Madame de Polignac, Louis XVI, Artois etc ...
- Spoiler:
Revenons à Marie-Joseph Chénier ... Il fit jouer, en 1791, Henri VIII et Jean Calas, puis, en 1792, Caïus Gracchus dont on a retenu l'hémistiche fameux : « Des lois, et non du sang ! » qui lui valut d'être interdite, à l'initiative du député montagnard Albitte ( cet Arbitte mourut lors de la retraite de Russie ) , car on crut y voir une critique du régime révolutionnaire.
Fénelon (1793), brode à nouveau sur le fanatisme et la liberté, non sans invraisemblance : on y voit l'archevêque de Cambrai délivrer une religieuse renfermée depuis quinze ans dans un cachot par ordre de son abbesse. La pièce fut critiquée car elle ne mettait pas en scène des rois et des princes, au mépris des règles de la tragédie classique établies par Aristote.
Timoléon (1794), avec des chœurs mis en musique par Étienne Nicolas Méhul, parut attaquer Robespierre dans le personnage de l'ambitieux Timophane que ses amis veulent maladroitement couronner au milieu de l'assemblée du peuple. La pièce fut interdite et les manuscrits supprimés. La pièce fut reprise après la chute de Robespierre, mais cette fois, on crut voir dans le personnage du fratricide Timoléon le héraut d'une sorte de confession déguisée : elle donna le signal d'une vigoureuse campagne accusant Marie-Joseph Chénier d'avoir fait exécuter son frère, accusation dont il se défendit dans son Épître sur la calomnie (1796), une de ses meilleures pièces en vers.
... que l'on peut lire en ligne :
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5450818s/f17.item.texteImage
Malgré des passages creux et déclamatoires, l'Epître sur la calomnie , composée contre ceux qui l'accusaient d'avoir eu part à l'exécution de son frère, vibre d'une belle indignation :
La calomnie honore, en croyant qu'elle outrage.
Ô mon frère, je veux, relisant tes écrits,
Chanter l'hymne funèbre à tes mânes proscrits ;
Là, souvent tu verras près de ton mausolée,
Tes frères gémissants, ta mère désolée,
Quelques amis des arts, un peu d'ombre et des fleurs,
Et ton jeune laurier grandira sous mes pleurs.
En réalité, après quelques tentatives infructueuses pour sauver son frère, Marie-Joseph Chénier dut constater que c'était en se faisant oublier des autorités que son frère aurait les meilleures chances de salut et que ses interventions mal avisées ne feraient que hâter sa fin. Lui-même, alors soupçonné de tiédeur et en mauvais termes avec Robespierre, ne pouvait rien tenter pour le sauver. André Chénier fut exécuté le 7 thermidor an II (25 juillet 1794).
Appel des dernières victimes de la terreur dans la prison Saint-Lazare. 7-9 thermidor 1794
par Charles Müller.
«La Dernière charrette» emmenant le poète André Chénier à la guillotine,1794.
Gravure de Beyer d'après Auguste Raffet (1804-1860).
— (Collection Roger-Viollet / via AFP)
Nos sujets sur André ( mon chouchou, bien-sûr )
https://marie-antoinette.forumactif.org/t4592-le-poete-andre-chenier?highlight=CHENIER
https://marie-antoinette.forumactif.org/t2294-marie-antoinette-sous-la-plume-de-andre-chenier?highlight=ch%C3%A9nier
https://marie-antoinette.forumactif.org/t1578-aimee-de-coigny-la-jeune-captive
Membre du Club des cordeliers et de la Commune de Paris, Marie-Joseph Chénier avait été élu député à la Convention par le département de Seine-et-Oise. Il y fut du parti de Danton. Il vota la mort de Louis XVI. Sur son rapport, à la fin de 1792, fut décidé l'établissement des écoles primaires et, le 3 janvier 1795, l'attribution de 300 000 francs de secours entre 116 savants, littérateurs et artistes. Sous le Directoire, il fut membre du Conseil des Cinq-Cents. Il prit part à l'organisation de l'Institut de France et fut placé dans la troisième classe (littérature et beaux-arts).
Marie-Joseph CHÉNIER (1764-1811) écrivain et homme politique. le 28 août 1792 " an IV de la liberté 1er de l'égalité ", à un " cher patriote "
" L'assemblée générale de la Section de 1792, au moment mème ou elle vous donne une nouvelle preuve de son estime en vous portant aux fonctions d'électeur, a crû devoir passer à l'ordre du jour sur la demande que vous lui faites [...]. Vous sentés en effet quel abus pourrait naitre de la permission de voter quoique absent, dans les assemblées primaires. Comme président de l'assemblée je crois remplir son vœu en vous assurant de son estime, et comme citoyen, c'est un bonheur pour moi de pouvoir vous assurer dans cette occasion de l'attachement fraternel que je vous ai voûé pour la vie "...
Chénier, David, Vergniaud, Saint-Just
Méaulle, Fortuné Louis (Angers, 11–04–1844 - en 1901), graveur
Illustration pour "Quatrevingt-treize" dans l'Edition Hugues,1876, Victor Hugo.
Vers 1876
Méaulle, Fortuné Louis (Angers, 11–04–1844 - en 1901), graveur
Illustration pour "Quatrevingt-treize" dans l'Edition Hugues,1876, Victor Hugo.
Vers 1876
Chénier avait participé, avec le peintre David et le compositeur François-Joseph Gossec, à l'organisation de nombre des grandes fêtes révolutionnaires entre 1790 et 1794.
Si l’hymne qu'il avait préparé pour la fête de l'Être suprême fut refusé par Robespierre, son Chant du départ est presque aussi célèbre que La Marseillaise. Il est tiré d’un poème de Chénier, intitulé : « l’hymne à la liberté » et présenté à Robespierre en ce début d’année 1794. Celui-ci qualifie la poésie de « grandiose et républicaine » il demande sa mise en musique, ce qui sera fait rapidement par Nicolas Méhul.
Rebaptisé : « le chant du départ » par la volonté de l’Incorruptible, il deviendra son chant préféré.
Les paroles en sont aussi belliqueuses .
Le Chant du départ
La victoire en chantant
Nous ouvre la barrière
La liberté guide nos pas
Et du Nord au Midi
La trompette guerrière
A sonné l'heure, l'heure des combats
Tremblez les ennemis de la France
Rois ivres de sang et d'orgueil
Le Peuple souverain s'avance
Tyrans descendez au cercueil
La République vous appelle
Sachez vaincre ou sachez périr
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir
(La République nous appelle
Sachons vaincre ou sachons périr
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir.
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir)
De Barra, de Viala le sort nous fait envie
Ils sont morts, mais ils ont vaincu
Le lâche accablé d'ans n'a point connu la vie
Qui meurt pour le Peuple a vécu
Vous êtes vaillants, nous le sommes
Guidez-nous contre les tyrans
Les républicains sont des hommes
Les esclaves sont des enfants
La République vous appelle
Sachez vaincre ou sachez périr
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir
(La République nous appelle
Sachons vaincre ou sachons périr
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir.
Un Français doit vivre pour elle
Pour elle un Français doit mourir)
Quant à la Marseillaise de Rouget de Lisle, le septième couplet, dit « couplet des enfants » serait de Chénier. ( ? )
Couplet 7
Nous entrerons dans la carrière
Quand nos aînés n'y seront plus,
Nous y trouverons leur poussière
Et la trace de leurs vertus (bis)
Bien moins jaloux de leur survivre
Que de partager leur cercueil,
Nous aurons le sublime orgueil
De les venger ou de les suivre
Enfants, que l'Honneur, la Patrie
Fassent l'objet de tous nos vœux !
Ayons toujours l'âme nourrie
Des feux qu'ils inspirent tous deux. (Bis)
Soyons unis ! Tout est possible ;
Nos vils ennemis tomberont,
Alors les Français cesseront
De chanter ce refrain terrible :
Nous entrerons dans la carrière
Quand nos aînés n'y seront plus,
Nous y trouverons leur poussière
Et la trace de leurs vertus (bis)
Bien moins jaloux de leur survivre
Que de partager leur cercueil,
Nous aurons le sublime orgueil
De les venger ou de les suivre
Enfants, que l'Honneur, la Patrie
Fassent l'objet de tous nos vœux !
Ayons toujours l'âme nourrie
Des feux qu'ils inspirent tous deux. (Bis)
Soyons unis ! Tout est possible ;
Nos vils ennemis tomberont,
Alors les Français cesseront
De chanter ce refrain terrible :
Chénier est également l'auteur de l’Hymne du Panthéon, mis en musique par Cherubini (1794).
Chénier apporta un soutien sans faille à son ami François de Pange, à qui il permit de revenir d'émigration sans rencontrer de problème et qu'il fit libérer de prison lorsque celui-ci fut pris dans une rixe. Membre du Tribunat sous le Consulat, il en fut chassé en 1802 au moment de l'épuration de cette assemblée. En 1803, il fut néanmoins nommé inspecteur général des études de l'Université. L'année suivante, à l'occasion du couronnement de Napoléon, il fit jouer la tragédie de Cyrus, qui ne fut représentée qu'une fois : s'il y justifiait l'Empire, c'était en donnant des conseils à l'Empereur et en plaidant pour la liberté, ce qui était le meilleur moyen de déplaire, et déplut effectivement.
Voici son Cyrus épinglé par l'Almanach des Muses, en 1806 :
Pièce dans laquelle l'auteur de Charles IX s'était proposé de célébrer le couronnement du héros qui gouverne les Français. Allégorie facile à saisir, mais où l'art du poète s'est trouvé en défaut. Trop de ressemblance avec la Mérope et la Sémiramis de Voltaire. Point d'intérêt, des inconvenances, et de temps en temps, néanmoins de beaux vers qui ont soutenu l'ouvrage jusqu'à la fin. Une seule représentation.
Oeuvres posthumes de M. J. Chénier, tome I (1824),
Notice sur M.-J. Chénier, par M. Daunou :
Cyrus n'a eu qu'une seule représentation : c'était à la fin de 1804, peu de jours après une cérémonie fameuse. On crut apercevoir quelques rapports entre le couronnement de Cyrus et la bénédiction pontificale qui venait de consacrer une usurpation funeste. Il se pouvait bien qu'en effet Chénier eût conçu l'idée d'adresser des leçons sévères au plus impérieux des despotes, de lui retracer les devoirs de cette puissance suprême qu'il osait envahir, et de réclamer solennellement pour la liberté publique les garanties dont il l'avait déjà frustrée. Ce qui est sûr, c'est que le tyran se tint pour offensé ; qu'il employa contre le succès de cette pièce les ressorts et les agents de son pouvoir ; et que cette fois il fut secondé par ses propres ennemis autant que par ses flatteurs. On croyait lui refuser à lui-même les applaudissements qu'on n'accordait point à Cyrus ; et, sans examiner si les reproches qu'on faisait au poète étaient mal ou bien fondés, il suffisait qu'ils parussent tenir lieu de ceux qu'on n'osait point adresser au pontife. Les lecteurs ont pu, bien mieux que les spectateurs, juger des intentions, du plan et du style de cette tragédie: elle a été imprimée pour la première fois en 1818.
http://theatre1789-1815.e-monsite.com/pages/pieces-gens-et-lieux/les-pieces/c/cyrus.html
Mortifié, Chénier revint au parti républicain dans son élégie La Promenade (1805) et, en 1806, démissionna de ses fonctions d'inspecteur général.
En 1806-1807, il donna un cours à l'Athénée sur l'histoire de la littérature. Napoléon Ier lui fit une pension de 8 000 francs et le chargea de la continuation de l'Histoire de France.
Il meurt le 10 janvier 1811, à Paris, et est inhumé au cimetière du Père-Lachaise (8e division).
Dans son discours de réception à l’Académie française, qui ne fut jamais prononcé, Chateaubriand, élu au fauteuil de Chénier, égal à lui-même, ne ménage pas ses critiques à l’endroit de son prédécesseur .
Source WIKI
https://fr.wikipedia.org/wiki/Marie-Joseph_Ch%C3%A9nier
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Re: Marie-Joseph Chénier ( 1764 - 1811 )
En l'année 1793, c'est Marie-Joseph Chénier qui réclame, défend et obtient les entrées de Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, puis de René Descartes, au Panthéon.
24 janvier :
Transfert du cercueil de Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau
Sur proposition de Marie-Joseph Chénier la Convention nationale adopte le texte suivant :
Article I
Mercredi, 23 janvier, l'an second de la République, à une heure après midi seront célébrées, aux frais de la Nation, les funérailles de Michel Lepelletier, député par le département de l'Yonne à la Convention nationale
Article II
La Convention nationale assistera tout entière aux funérailles de Michel Lepelletier. Le Conseil exécutif, les Corps administratifs et judiciaires, y assisteront pareillement.
Article III
Le Conseil exécutif et le Département de Paris se concerteront avec le Comité d'Instruction publique, relativement aux détails de la cérémonie funèbre.
Article IV
Les dernières paroles prononcées par Michel Lepelletier seront gravées sur sa tombe, ainsi qu’il suit :
Je suis satisfait de verser mon sang pour la Patrie ; j’espère qu’il servira à consolider la Libertés et l'Égalité, et à faire reconnaître ses ennemis.
2 octobre :
Sur proposition de Marie-Joseph Chénier, la Convention nationale rend le décret de transférer le cercueil de René Descartes au Panthéon.
Sur proposition de Marie-Joseph Chénier la Convention nationale adopte le texte suivant :
Article I
René Descartes a mérité les honneurs dus aux grands hommes.
Article II
Le corps de ce philosophe sera transféré au Panthéon français.
Article III
Sur le tombeau de Descartes seront gravés ces mots :
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA CONVENTION NATIONALE
À RENÉ DESCARTES
1793, AN SECOND DE LA RÉPUBLIQUE
https://www.techno-science.net/glossaire-definition/Chronologie-du-Pantheon-de-Paris.html
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Re: Marie-Joseph Chénier ( 1764 - 1811 )
Mme de Sabran a écrit:Grrrrr... cette mode des yeux levés au ciel !
Il nous fait une Worlée
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