Voyage de Paris en 1782. Journal d'un gentilhomme Breton
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Voyage de Paris en 1782. Journal d'un gentilhomme Breton
Chers amis
J'ai trouvé ce beau récit de voyage d'un noble breton de 1782 et je copie sa visite à Versailles.
Leos
Du dimanche 7 juillet 1782
A huit heures du matin, nous sommes partis pour Versailles où nous sommes arrivés à dix heures et demie. Nous sommes descendus à une auberge sur la place Dauphine. Nous nous sommes acheminés vers le château où nous avons pris un Suisse, pour nous conduire
dans tous les appartements. Cet extrait ne saurait suffire pour tout le détail que nous avons vu et je vous renvoie pour le surplus, cher ami, à l'Almanach de Paris en faveur des étrangers' Nous n'avons rien négligé. Une longue suite d'appartements nous a conduits à la grande galerie où nous avons vu une grande quantité de seigneurs qui attendaient le passage de Sa Majesté. Nous avons examiné en détail chacune des pièces où se trouvent le trône et la curieuse horloge si vantée. A midi nous avons vu Sa Majesté se rendre à la messe accompagnée de Monsieur, de ses aumôniers et de différents seigneurs. Le Roy causait familièrement avec M. le duc de Coigny. Nous avons suivi le cortège et, ayant été introduits dans une des travées de la chapelle, nous avons pu jouir pendant toute la messe de la vue de Sa Majesté. Monseigneur l'évêque de Senlis, cordon bleu, a donné les Heures au Roy qui a fait sa prière pendant toute la messe. Rentrés dans la première salle, à l'issue de la cérémonie, nous avons vu le Roy s'en retourner. Aussitôt après, la reine, Madame, madame la comtesse d'Artois et madame Adélaïde sont toutes 3 entrées à la messe, suivies de leurs dames d'honneur, des officiers et de leurs gardes. A une heure et demie nous avons assisté au dîner du Roi et de la Reine, Madame a donné à laver' à la Reine. Le Roy a faiblement diné, la Reine point du tout ils ont beaucoup causé pendant le dîner qui n'a duré qu'une demi-heure, particulièrement le Roy qui a fait beaucoup de questions à différents seigneurs. Leurs Majestés se sont ensuite retirées pour aller chez Madame où la famille a dîné. Nous avons visité tous les appartements du Roy, de la Reine, de madame Adélaïde, de madame la comtesse d'Artois, ainsi que les cabinets de ces divers appartements dont la beauté surpasse l'imagination. Après notre dîner, nous avons été voir les jardins, les bosquets, les pièces d'eau, l'orangerie et tout ce que contiennent de curieux les environs du jardin. A quatre heures, nous avons rencontré Madame, sœur du Roy, sur la terrasse où elle se promenait avec deux de ses dames. A cinq heures nous avons vu le Roy aller aux vêpres avec Monsieur. Nous avons vu aussi dans la grande galerie M. le duc de Chartres avec quantité d'autres seigneurs, cordons bleus, rouges, verts, noirs'- dont on ne paraissait faire aucun cas, la présence de Sa Majesté attirant et méritant tous les regards. Après l'entrée du Roy, la Reine s'est également rendue à vêpres accompagnée de Madame, de madame la comtesse d'Artois et suivie des dames d'honneur, des capitaines des gardes et autres officiers. La Reine et ses dames étaient dans la travée de droite Madame, sœur du Roy, était en bas dans la chapelle, entourée de ses gardes. Après les vêpres, nous sommes retournés dans les jardins et nous nous sommes rendus ensuite à Trianon, maison royale qui, quoique petite, est de toute beauté par son élégance, par les superbes jardins et terrasses qui s'étendent en arrière. Nous avons eu la satisfaction de voir madame Royale qu'on y promenait' elle est âgée d'environ trois ans nous avons aperçu aussi monseigneur le Dauphin' qui était à la fenêtre d'un des appartements avec les dames qui prennent soin de lui il a neuf mois. Ces deux enfants portent sur une très jolie figure les caractères de la majesté royale. J'ai été à la Comédie et soupé à Versailles.
Du lundi 8 juillet 1782
Je suis parti ce matin, cher confident, pour l'abbaye royale de Saint-Cyr, et sur la route, je me suis arrêté à la ménagerie du Roy pour y voir les différents animaux qu'elle contient. Elle est assez dégarnie en ce moment. Cet établissement consiste en plusieurs cours qui communiquent des unes aux autres et dans lesquelles on voit les animaux. Au milieu est un pavillon avec une galerie circulaire; c'est le lieu de repos de la famille royale quand elle va à la ménagerie. Voici ce que j'y ai vu des oiseaux de mer dans une volière très longue et très-spacieuse où il y a des jets d'eau un éléphant privé des moutons de Barbarie des cerfs des Indes un rhinocéros très sauvage, animal monstrueux gros comme un de nos plus forts bœufs et dont on n'approche qu'avec précaution deux buffles un lion un ours une panthère; une lionne; un tigre un mandrill deux porc-épic un chien-loup un rat des Indes un chevrotin ou chat porte musc un grand duc; un pélican. Arrivé à Saint-Cyr, j'ai demandé Madame de Champlais, supérieure de la maison, à qui j'ai remis une lettre de son frère l'abbé. Elle m'a bien accueilli et m'a promis ses bons offices auprès de M. d'Ormesson. Je suis revenu à Paris dans un carrosse de la Cour et l'après-midi nous avons été voir le nouveau jardin pittoresque de M. le duc de Chartres. Le jardin de Monceau consiste surtout en singularités ce sont des bosquets, des prairies, des cours d'eau, de petits bâtiments qui paraissent en ruines et dont l'intérieur offre des temples de volupté, des rivières qui se perdent dans des gouffres, des ponts ruinés, des moulins à vent et à eau à demi tombés, une laiterie charmante dans laquelle on nous a offert des rafraîchissements, des carrousels, des cabinets, des antres sous des rochers amoncelés avec art, des serres chaudes dans lesquelles on fait venir des plantes et des fruits étrangers, le jardin offre, en un mot, une variété des plus curieuses.
https://www.kerbernard.bzh/familles/VoyageDeParis/VoyageDeParis1782.pdf
J'ai trouvé ce beau récit de voyage d'un noble breton de 1782 et je copie sa visite à Versailles.
Leos
Du dimanche 7 juillet 1782
A huit heures du matin, nous sommes partis pour Versailles où nous sommes arrivés à dix heures et demie. Nous sommes descendus à une auberge sur la place Dauphine. Nous nous sommes acheminés vers le château où nous avons pris un Suisse, pour nous conduire
dans tous les appartements. Cet extrait ne saurait suffire pour tout le détail que nous avons vu et je vous renvoie pour le surplus, cher ami, à l'Almanach de Paris en faveur des étrangers' Nous n'avons rien négligé. Une longue suite d'appartements nous a conduits à la grande galerie où nous avons vu une grande quantité de seigneurs qui attendaient le passage de Sa Majesté. Nous avons examiné en détail chacune des pièces où se trouvent le trône et la curieuse horloge si vantée. A midi nous avons vu Sa Majesté se rendre à la messe accompagnée de Monsieur, de ses aumôniers et de différents seigneurs. Le Roy causait familièrement avec M. le duc de Coigny. Nous avons suivi le cortège et, ayant été introduits dans une des travées de la chapelle, nous avons pu jouir pendant toute la messe de la vue de Sa Majesté. Monseigneur l'évêque de Senlis, cordon bleu, a donné les Heures au Roy qui a fait sa prière pendant toute la messe. Rentrés dans la première salle, à l'issue de la cérémonie, nous avons vu le Roy s'en retourner. Aussitôt après, la reine, Madame, madame la comtesse d'Artois et madame Adélaïde sont toutes 3 entrées à la messe, suivies de leurs dames d'honneur, des officiers et de leurs gardes. A une heure et demie nous avons assisté au dîner du Roi et de la Reine, Madame a donné à laver' à la Reine. Le Roy a faiblement diné, la Reine point du tout ils ont beaucoup causé pendant le dîner qui n'a duré qu'une demi-heure, particulièrement le Roy qui a fait beaucoup de questions à différents seigneurs. Leurs Majestés se sont ensuite retirées pour aller chez Madame où la famille a dîné. Nous avons visité tous les appartements du Roy, de la Reine, de madame Adélaïde, de madame la comtesse d'Artois, ainsi que les cabinets de ces divers appartements dont la beauté surpasse l'imagination. Après notre dîner, nous avons été voir les jardins, les bosquets, les pièces d'eau, l'orangerie et tout ce que contiennent de curieux les environs du jardin. A quatre heures, nous avons rencontré Madame, sœur du Roy, sur la terrasse où elle se promenait avec deux de ses dames. A cinq heures nous avons vu le Roy aller aux vêpres avec Monsieur. Nous avons vu aussi dans la grande galerie M. le duc de Chartres avec quantité d'autres seigneurs, cordons bleus, rouges, verts, noirs'- dont on ne paraissait faire aucun cas, la présence de Sa Majesté attirant et méritant tous les regards. Après l'entrée du Roy, la Reine s'est également rendue à vêpres accompagnée de Madame, de madame la comtesse d'Artois et suivie des dames d'honneur, des capitaines des gardes et autres officiers. La Reine et ses dames étaient dans la travée de droite Madame, sœur du Roy, était en bas dans la chapelle, entourée de ses gardes. Après les vêpres, nous sommes retournés dans les jardins et nous nous sommes rendus ensuite à Trianon, maison royale qui, quoique petite, est de toute beauté par son élégance, par les superbes jardins et terrasses qui s'étendent en arrière. Nous avons eu la satisfaction de voir madame Royale qu'on y promenait' elle est âgée d'environ trois ans nous avons aperçu aussi monseigneur le Dauphin' qui était à la fenêtre d'un des appartements avec les dames qui prennent soin de lui il a neuf mois. Ces deux enfants portent sur une très jolie figure les caractères de la majesté royale. J'ai été à la Comédie et soupé à Versailles.
Du lundi 8 juillet 1782
Je suis parti ce matin, cher confident, pour l'abbaye royale de Saint-Cyr, et sur la route, je me suis arrêté à la ménagerie du Roy pour y voir les différents animaux qu'elle contient. Elle est assez dégarnie en ce moment. Cet établissement consiste en plusieurs cours qui communiquent des unes aux autres et dans lesquelles on voit les animaux. Au milieu est un pavillon avec une galerie circulaire; c'est le lieu de repos de la famille royale quand elle va à la ménagerie. Voici ce que j'y ai vu des oiseaux de mer dans une volière très longue et très-spacieuse où il y a des jets d'eau un éléphant privé des moutons de Barbarie des cerfs des Indes un rhinocéros très sauvage, animal monstrueux gros comme un de nos plus forts bœufs et dont on n'approche qu'avec précaution deux buffles un lion un ours une panthère; une lionne; un tigre un mandrill deux porc-épic un chien-loup un rat des Indes un chevrotin ou chat porte musc un grand duc; un pélican. Arrivé à Saint-Cyr, j'ai demandé Madame de Champlais, supérieure de la maison, à qui j'ai remis une lettre de son frère l'abbé. Elle m'a bien accueilli et m'a promis ses bons offices auprès de M. d'Ormesson. Je suis revenu à Paris dans un carrosse de la Cour et l'après-midi nous avons été voir le nouveau jardin pittoresque de M. le duc de Chartres. Le jardin de Monceau consiste surtout en singularités ce sont des bosquets, des prairies, des cours d'eau, de petits bâtiments qui paraissent en ruines et dont l'intérieur offre des temples de volupté, des rivières qui se perdent dans des gouffres, des ponts ruinés, des moulins à vent et à eau à demi tombés, une laiterie charmante dans laquelle on nous a offert des rafraîchissements, des carrousels, des cabinets, des antres sous des rochers amoncelés avec art, des serres chaudes dans lesquelles on fait venir des plantes et des fruits étrangers, le jardin offre, en un mot, une variété des plus curieuses.
https://www.kerbernard.bzh/familles/VoyageDeParis/VoyageDeParis1782.pdf
Leos- Messages : 794
Date d'inscription : 29/12/2013
Age : 54
Localisation : Zlin, Tcheque
Re: Voyage de Paris en 1782. Journal d'un gentilhomme Breton
Grand merci, mon cher Leos, pour cet intéressant récit . Nous sommes vraiment avec toi sur les talons de ce noble voyageur breton. Il nous semble tout découvrir en même temps que lui .
Le fameux rhinocéros de Louis XV fait sensation.
Le fameux rhinocéros de Louis XV fait sensation.
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Voyage de Paris en 1782. Journal d'un gentilhomme Breton
Chere Eli,
Je n'ai jamais lu de témoignage selon lequel quelqu'un aurait vu la reine dans la ménagerie, mais je crois qu'elle s'y rendait aussi avec ses enfants pour observer les animaux.
Leos
Je n'ai jamais lu de témoignage selon lequel quelqu'un aurait vu la reine dans la ménagerie, mais je crois qu'elle s'y rendait aussi avec ses enfants pour observer les animaux.
Leos
Leos- Messages : 794
Date d'inscription : 29/12/2013
Age : 54
Localisation : Zlin, Tcheque
Re: Voyage de Paris en 1782. Journal d'un gentilhomme Breton
A vrai dire, moi non plus, mais cela me semble tout à fait certain.
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Mme de Sabran- Messages : 55497
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
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