Le procès de Louis XVI

Le premier des cinq appels nominaux, au terme du procès de Louis XVI par la Convention, a lieu le 15 janvier 1793. Ces appels s’étaleront jusqu’au 19.
Permettez-moi de poster encore une fois le résultat de ces appels, qui déboucheront sur la condamnation du Roi.
Je sais que cela a déjà été fait les années précédentes, à l’occasion du 21 janvier, mais je souhaite encore une fois revenir sur cette question de LA voix de majorité qui aurait envoyé le Roi à l’échafaud. Cette histoire est pour moi une « fake new » avant la lettre, reprise à l’envi par des historiens, même sérieux. Il suffit pourtant de s’en tenir aux textes et aux chiffres...
Démonstration :

- Les 2 premiers appels portent sur la culpabilité de Louis et sur la ratification (ou non) du verdict par le Peuple: oui pour la première question. Non pour la seconde.

-Les 3e et 4e appels doivent répondre à la question suivante: « quelle peine infliger à Louis Capet ? »
Nous allons voir pourquoi la même question est posée 2 fois... Ce sont les résultats du 4e appel qui seront retenus in fine .

Il y a 721 votants. Donc, majorité absolue = 361 voix

- Résultats du 3e appel :
365 pour la mort sans condition ( = 5 voix de majorité )
25 pour la mort À CONDITION d’examiner en même
temps la question du sursis ( c’est l’idee du député
Mailhe ). Mais ces 25 voix votent tout de même pour la mort ... « avec sursis » ne veut en effet pas dire que la peine ne sera pas appliquée, mais diffèrée, pour certains exécutée à la paix. Certes, je reconnais que le résultat est ambigu ( il donne tout de même la mort sans condition à 5 voix de majorité....)

- Un 4e appel est donc décidé, en particulier par Manuel, qui juge l’amendement Mailhe trop confus. Même question posée, mais on précise que, si l’on choisit la mort assortie du sursis « ce vœu est indépendant de la première proposition » ( ce sont les propres termes employés par les Conventionnels); autrement dit : LA MORT EST TOUT DE MÊME RETENUE . Voici les résultats, ceux qui seront définitifs :
- MORT sans condition : 361, ce qui veut dire qu’il y a eu 4 « repentis » par rapport au 3e appel... (et C’EST LÀ que la légende de LA voix de majorité prend sa source...)
- MORT, mais non immédiate (= avec sursis) : 26. J’insiste : ces 26 députés se sont bien prononcés pour la mort, sans plus d’ambiguïté cette fois-ci. Il faut donc tout naturellement ajouter leurs voix aux 361 ayant voté la mort sans condition. Cela tombe sous le sens ...
- AUTRES condamnations ( réclusion, déportation, bannissement, même galère...) : 334.

Le décompte définitif est donc , sur 721 votants :
- MORT : 361+ 26 = 387 , soit 27 voix de majorité
( cela représente 53,6% des voix ).
- autre solution : 334 voix.

27 voix de majorité, c’est bien peu pour envoyer le Roi à l’échafaud, mais ce n’est pas non plus UNE SEULE voix, cette voix de trop qui, pour beaucoup, vous l’aurez compris, était bien sûr la voix de Philippe Égalité...
Rappelons enfin que ces votes n’étaient pas à bulletin secret , mais prononcés à voix haute devant toute l’assemblée et devant le peuple...
-

Merci, cher Févicq, pour cet exposé .  

Vicq d Azir a écrit:
 27 voix de majorité, c’est bien peu pour envoyer le Roi à l’échafaud, mais ce n’est pas non plus UNE SEULE voix, cette voix de trop qui, pour beaucoup, vous l’aurez compris, était bien sûr la voix de Philippe Égalité...
    -

...  la voix, la fameuse voix de trop qui scelle le sort du roi  :  celle de son propre cousin, le premier prince du sang .
Cela  ne ressemble-t-il pas à une certaine théâtralisation de la condamnation de Louis XVI ?  ...   une recherche du sensationnel le plus malsain ?

Le soir du 16 janvier, M. de Malesherbes entra et annonça au Roi que l'appel nominal n'était pas encore terminé . Le feu prit dans ce moment dans la cheminée d'une chambre où logeait le porteur de bois au Palais du Temple. Un rassemblement de peuple assez considérable entra dans la cour. Un municipal vint tout effrayé dire à M. de Malesherbes de se retirer sur-le-champ. Il sortit après avoir promis au Roi de revenir l'instruire de son jugement . " Quelle est la cause de votre frayeur " demandai-je à ce commissaire ?
" On a mis le feu au Temple, me dit-il, on l'a mis exprès pour sauver Capet dans le tumulte, mais je viens de faire environner les murs par une forte garde."
Bientôt on appris que le feu était éteint, et que c'était un simple accident .

( Journal de Cléry )

Vu au Palais Bourbon aujourd’hui :















Clichés personnels

... dans 24 heures

Merci, mon cher Momo, pour tes photos de ces documents exceptionnels .

Voici la dernière déclaration que Louis XVI prononce à la Convention, lors de son procès, le 26 décembre 1792 :


Discours prononcé par Louis XVI devant la Convention nationale après la lecture de sa défense par Romain de Sèze.
26 décembre 1792
Papier manuscrit, 20 x 16 cm
Image : Archives nationales

On vient de vous exposer mes moyens de défense, je ne les renouvellerai point ! En vous parlant peut-être pour la dernière fois, je vous déclare que ma conscience ne me reproche rien, et que mes défenseurs ne vous ont dit que la vérité.
Je n’ai jamais craint que ma conduite fût examinée publiquement, mais mon cœur est déchiré de trouver dans l’acte d’accusation l’imputation d’avoir voulu répandre le sang du peuple, et surtout que les malheurs du 10 août me soient attribués.
J’avoue que les preuves multipliées que j’avais données dans tous les temps de mon amour pour le peuple, et la manière dont je m’étais toujours conduit, me paraissaient devoir prouver que je craignais peu de m’exposer pour épargner son sang, et éloigner à jamais de moi une pareille imputation.

Louis


Procès de Louis XVI à l'assemblée de la Convention Nationale le 26 décembre 1792
Manège des Feuillants (Tuileries)
Gravure anonyme
Image : Musée Carnavalet, Histoire de Paris

Sur le procès de Louis XVI, Robert Badinter :

Louis XVI n'aurait pas dû se prêter à ce qui constituait une parodie de justice.   Ses juges étaient ses accusateurs. Il aurait dû dire : " Je refuse leur qualité de juges et je refuse la qualité d'accusé parce que je considère que je n'ai rien à me reprocher au regard de la nation .  "
Son sort se décidait en dehors de tout ce qu'il pouvait dire, certes, mais pourquoi accepter son sort d'accusé en validant ainsi la procédure qui était ourdie contre lui ???   Non.  Il fallait refuser.

Robespierre dira : En voyant le roi comparaître ainsi dépouillé de tout ce qui faisait sa grandeur extérieure, j'ai senti chanceler en moi la vertu républicaine.

Badinter fait ensuite un vibrant éloge de Malesherbes qui n'avait rien à gagner à défendre Louis XVI,  mais à qui son sens du devoir commandait la démarche de se proposer comme avocat de son roi déchu. Malesherbes est un héros.  Un héros est un homme qui va jusqu'au bout de son devoir.

https://www.google.com/search?q=badinter+louis+XVI&oq=badinter+louis+XVI&gs_lcrp=EgZjaHJvbWUyBggAEEUYOTIHCAEQIRigAdIBCDkzOTRqMGo3qAIAsAIA&sourceid=chrome&ie=UTF-8#fpstate=ive&vld=cid:b73720a2,vid:Pq-vo_v2wZo,st:0

Merci ! Je ne me souvenais plus de cet extrait de l'un des Secrets d'Histoire. Voici la vidéo de cette séquence (durée env. 16 mn) :

Chers amis, tout Marquis de Mirabeau, en attendant de trouver ceux qui m'ont empoisonné discrètement, pour mettre mon décès sur mes "joyeuses nuits de folie", il me faut trouver un livre qui relate les tractations qui ont permis d'obtenir la majorité à l'assemblée pour envoyer Louis XVl à la guillotine...
Soit un livre sur son procès ou peut-être dans un autre livre...
Le Marquis de Mirabeau vous salue bien bas.

Message déplacé ici, dans ce sujet déjà existant.

Je renvoie nos lecteurs à nos précédents messages concernant ces fameux décomptes de votes des députés.


Nous avons présenté dans notre rubrique Bibliographie le livre publié ce mois-ci   :



La mort du roi Louis XVI devant ses juges et face à l'Histoire. De Olivier Betourne

Et plus ancien (publié pour la première fois en 1973 et de nombreuses fois réédité depuis) :



Le procès de Louis XVI. De Albert Soboul

La nuit, la neige a écrit:
Nous avons présenté dans notre rubrique Bibliographie le livre publié ce mois-ci   :



La mort du roi Louis XVI devant ses juges et face à l'Histoire. De Olivier Betourne

Le dernier livre paru doit, normalement, être le plus pointu sur cette question déjà mille fois débattue.
Présente-t-il de nouveaux éléments de réponse ?

Je suis ravie de vous lire, cher Marquis. Vous avez surmonté avec brio la petite difficulté de connexion.

Peut-être bien mon prochain achat !