Lettre de Marie-Antoinette au duc de Polignac (4 mars 1790)

Selon le Figaro, la maison Aguttes passera prochainement aux enchères une lettre de Marie-Antoinette, datant du mois de mars 1790, au duc de Polignac, indiquant notamment : "J'ai du courage, et pour mes enfants et mes amis, je saurai me soutenir".

Il s'agit de l'une des nombreuses ventes réalisées dans le cadre de la liquidation des biens de la société Aristophil : Des documents de Staline et Marie-Antoinette aux enchères (article du Figaro)

Une lettre inédite nouvelle, c'est super !!! et de Marie-Antoinette au duc Jules, c'est inattendu .
Merci, Notre Grâce, toujours truffe au sol !
Vivement que nous en sachions davantage . Nous comptons sur toi .
De Staline à Marie-Antoinette, en passant par Marat, Henri IV, Condorcet, Eluard, Raimbaud entre autres must ... quel programme éclectique !

Mme de Sabran a écrit:
Merci, Notre Grâce, toujours truffe au sol !  

Nous avions annoncé les ventes fleuves des collections Aristophil, dont celle organisée par la maison Aguttes, qui propose, entre autres nombreuses lettes de figures du XVIIIe siècle (à suivre dans nos autres sujets) :


Marie-Antoinette, reine de France.
Lettre
L.A., 4 mars 1790, au duc Jules de POLIGNAC; 1 page in-8.


Photo : Aguttes

Note au catalogue :

Émouvante lettre de la Reine, pleine de courage et de grandeur face à l'adversité, au mari de sa favorite.
Jules de Polignac (1746-1817) avait épousé en 1767 Gabrielle de Polastron (1749- 1793), qui fut gouvernante des enfants de France et favorite de Marie-Antoinette ; ils émigrèrent dès le 16 juillet 1789. Leur fils Armand épousera à Venise le 6 septembre 1790 Mlle de Nyvenheim.

«J'ai montré votre lettre au roi, et vous ne devez pas douter monsieur, du plaisir que nous avons a consentire au mariage de votre fils, puisse t'il au moins vous rendre une partie du bonheur que vous et mon amie, méritez a tant de titre, dites lui bien que mon amitié pour elle, est inaltérable, je sens bien tous ce que son coeur eprouve pour moi, dans les nouveaux malheures qui m'accablent, mais j'ai du courage et pour mes enfants et mes amies je saurai me soutenir. Adieu monsieur dites mil chose pour moi a tous les votres, pour vos enfantes ils savent bien que j'aime a les regarder comme les miens, et que mon amitié pour eux comme pour leur père ne finira qu'avec ma vie».
Correspondance (éd. Évelyne Lever), p. 504



Photos : Aguttes

 Source et informations complémentaires : Aguttes - Vente collections Aristophil, grandes figures historiques, écrits et correspondances

Merci, cher ami, pour cette jolie lettre dans laquelle éclate toute la sensibilité de Marie-Antoinette, ainsi que sa profonde tendresse pour Mme de Polignac et les siens ! Son arrivée à Venise est mentionnée dans la correspondance Vaudreuil / Artois, je tâcherai de retrouver l'extrait .

Il est intéressant de constater que même en exil, et alors que la Révolution fait rage en France, les Polignac demandent le consentement du roi et de la reine pour le mariage de leur fils, conformément aux usages de l'Ancien Régime .

Dans la haute noblesse, tu te mariais de l'agrément du roi . Napoléon rétablira cet usage.

Oui tout à fait. C'est ce qui explique pourquoi le roi et la reine, ainsi que le reste de la famille royale, sont souvent signataires des contrats de mariage de la haute noblesse : cf par exemple ce Contrat de mariage entre Monsieur Colbert de Lordat et Mademoiselle de Tilly portant la signature de Marie-Antoinette, ainsi que celles de Louis XVI, du comte et de la comtesse de Provence, du comte et de la comtesse d'Artois, de Madame Elisabeth, de Madame Adélaïde, de Madame Victoire, de Madame Sophie, du duc d'Orléans (le "Gros duc") et de son fils le futur Philippe Egalité, du prince de Condé et de la princesse de Conti

Le revers de la médaille c'est que cela signifie que le roi, de même, pouvait s'opposer à un mariage .

Oui , ce qui fut le cas du mariage de la Grande Mademoiselle et du duc de Caumont-La Force par exemple. Pour avoir bravé l'interdiction de Louis XIV, le duc de Caumont-La Force passa quelque temps au cachot si ma mémoire est bonne.

N'était-ce pas Lauzun plutôt que Caumont la Force ?

... ça doit être ça oui !

Alors, et Vergennes ?
Le roi ne voulait pas voir paraître son épouse à la Cour. Je ne sais plus quelle formule lapidaire il emploie à son encontre ...

Mme de Sabran a écrit:

Le roi ne voulait pas voir paraître son épouse à la Cour.  

Pourquoi ça ?

Parce que c'était une mésalliance, je suppose !

Selon WIKI, Vergennes est rappelé en 1768 de Constantinople , où il était ministre plénipotentiaire, officiellement pour avoir épousé Anne Duvivier (1730-1798) (fille d'Henri Duvivier et de Maria Bulo de Péra et veuve de Francesco Testa (ca. 1720-1754), membre de l'une des plus anciennes et distinguées familles latines de Péra), sans l'autorisation de Choiseul et de Louis XV. Les mauvaises langues la prétendaient une ancienne esclave. Mais il aime toujours Louise Nicaise des Roches, qui tombe enceinte de lui.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Gravier_de_Vergennes

Ah oui c'est vrai j'avais oublié cette histoire .

Mme de Sabran a écrit:
Alors, et Vergennes ?
Le roi ne voulait pas voir paraître son épouse à la Cour.  Je ne sais plus quelle formule lapidaire il emploie à son encontre ...

C'est d'ailleurs pour ça que lorsque Louis XVI lui offrit, pour le récompenser de la conclusion du traité de Versailles, au choix le titre de duc ou une gratification d'un million de livres, Vergennes prit l'argent, sa femme ne pouvant paraître de toute façon à la Cour.

Quelques photos de cette lettre que j'ai pu tenir entre mes mains    avant la vente aux enchères :








Je remarque que Marie-Antoinette a fait une curieuse faute de français. Au lieu d'écrire "vos enfants", elle a écrit "vos enfantes"  :




... son petit accent allemand aurait-il encore fait des siennes ? Cela me rappelle ce billet où elle conseille à son amie la princesse de Hesse-Darmstadt de mettre des "grandes chapeaux" pour l'accompagner à Trianon.  







Estimée 10 000 / 12 000 EUR, cette lettre n'a pas trouvé acquéreur lors de la vente (c'est vrai que c'est cher   ).

Duc d'Ostrogothie a écrit:

... son petit accent allemand aurait-il encore fait des siennes ? Cela me rappelle ce billet où elle conseille à son amie la princesse de Hesse-Darmstadt de mettre des "grandes chapeaux" pour l'accompagner à Trianon.  
.

L'entendre en la lisant, c'est trop charmant !

C'est touchant; adorable; j'adore ces fautes involontaires !

Merci pour ces photos complémentaires !!

Cette lettre, que nous avions longuement présentée ici, sera prochainement, et à nouveau, proposée en vente aux enchères :

- MARIE-ANTOINETTE
Lettre autographe [adressée au Duc de Polignac]. S.l., 4 mars 1790.
1 p. in-12.
Encre brune sur double feuillet de papier filigrané D'Annonay.
Trace d'onglet au verso du second feuillet. Pliure d'envoi.



Note au catalogue :

Émouvante lettre de la reine Marie-Antoinette, pleine de courage, adressée au duc de Polignac, durant la Révolution.

« J’ai montré votre lettre au roi, et vous ne devez pas douter monsieur, du plaisir que nous avons a consentire au mariage de votre fils, puisse t’il au moins vous rendre une partie du bonheur que vous et mon amie, méritez a tant de titre, dites lui bien que mon amitié pour elle, est inaltérable, je sens bien tous ce que son coeur eprouve pour moi, dans les nouveaux malheures qui m’accablent, mais j’ai du courage et pour mes enfants et mes amies je saurai me soutenir.
Adieu monsieur dites mil chose pour moi a tous les votres, pour vos enfantes ils savent bien que j’aime a les regarder comme les miens, et que mon amitié pour eux comme pour leur père ne finira qu’avec ma vie […]».

Évelyne Lever, Correspondance de MarieAntoinette (1770-1793), Tallandier, p. 504

Le duc Jules de Polignac (1746-1817) avait épousé en 1767 Gabrielle de Polastron (1749-1793). Cette dernière fut une grande amie et la favorite de MarieAntoinette ainsi que la gouvernante des Enfants de France. Ils émigrèrent tout deux dès les prémices de la Révolution.
Marie-Antoinette évoque ici le mariage de leur fils aîné, Armand, qui eut lieu le 6 septembre 1790 en Italie.

* Source et infos complémentaires : Maison de vente aux enchères Chativesle (Reims) - Vente du 13 octobre 2019

Merci LNLN !

Rappelons que ce mariage italien du fils Polignac a son sujet ici :

https://marie-antoinette.forumactif.org/t3181-le-mariage-d-armand-et-idalie-de-polignac