Les "otages de Louis XVI" durant la Révolution française

C'est l'annonce d'une vente aux enchères d'un objet insolite qui me donne l'idée d'ouvrir ce sujet...
Je cite :

- Rare bague d’otage du roi Louis XVI en or 750 millièmes, à décor ciselé de style néoclassique sur fond amati, le centre à chaton ouvrant sur une miniature peinte représentant Louis XVIII.
A lire la présentation de ce bijou et à voir la miniature, je pense plutôt qu'il s'agit de Louis XVI, mais bon...


Le couvercle inscrit : UNE FOI, UNE LOI, UN ROI avec une pensée ; autour : OTAGES DU ROI MARTYR.
L’anneau orné de deux urnes surmontées de la couronne royale, l’une monogrammée LD, l’autre ME, et de deux tiges fleuries encadrant un coeur gravé du chiffre XVI.
Circa 1815
Poids brut : 4.9 g. L. 2.9 cm. TDD : 71.

Note au catalogue :

Cette rare bague a appartenu à un volontaire qui s’est inscrit sur la liste des candidats otages offrant leur vie et leur liberté pour remplacer le Louis XVI et sa famille dans leur garde à vue aux Tuileries au retour de Varennes.
Ces personnes, au nombre de quelques centaines, essentiellement issues de l’aristocratie ou du clergé, ont été surnommées ‘’otages du roi’’.

Lorsqu’il monta sur le trône de France, Louis XVIII envoya une bague en or, comme celle-ci, à chacun des membres de la liste des candidats, chacune des bagues portant les initiales de l’otage.



* Source et infos complémentaires : Thierry de Maigret SVV - Vente du 20 septembre 2019




En 2016, une autre maison de vente proposait aux enchères cet autre lot, avec un descriptif semblable (le portrait de Louis XVI étant décrit comme celui de la miniature  ) :

Bague « d’otage du roi » en or ciselé avec chaton ouvrant sur une miniature représentant Louis XVI.
Couvercle avec inscription UNE FOI, UNE LOI, UN ROI accompagnée d’une pensée ; tout autour OTAGES DU ROI MARTYR ; anneau orné de deux urnes surmontées d’une couronne fermée, l’une monogrammée LD, l’autre ME, de deux tiges fluries encadrant un cœur gravé du chiffe XVI.
Vers 1815
H 4 × L 2,8 cm / Poids : 11 g



Descriptif au catalogue :

Cette rare bague a appartenu à un volontaire qui s’est inscrit sur la liste des candidats otages offrant leur vie et leur liberté pour remplacer le roi et sa famille dans leur garde à vue aux Tuileries du retour de Varennes.
Ces personnes, au nombre de quelques centaines – voire quelques milliers d’après certains - essentiellement issues de l’aristocratie ou du clergé, ont été surnommées « otages du roi ».

Lorsqu’il monta sur le trône de France, Louis XVIII envoya une bague en or, comme celle-ci, à chacun des membres de la liste des candidats, chacune des bagues portant les initiales de l’otage.

* Source et infos complémentaires : Piasa SVV - Vente Haute époque et curiosités (2016)


Sur le site internet des Amis et passionnés du Père Lachaise, nous retrouvons la présentation du marquis Jean-Baptiste d'Alesme (1775 - 1849), inhumé dans ce cimetière.
Je cite un extrait de cette biographie :

Jean Baptiste d’Alesme, lors de la Révolution, émigra deux fois en 1792. Il fut arrêté porteur de messages et de dépêches pour les princes. (Moniteur du 19 février 1792, article Senlis).
Il dut subir alors un acte d’accusation devant l’assemblée législative, et ne fut mis en liberté que par un ordre du Roi.

Il continua à servir la Maison de Bourbon et fut "otage du Roi Louis XVI" après la fuite à Varennes et l’échec de cette dernière, garantissant la présence du souverain contre sa propre vie.

Il fut pendant dix ans, l’un des chefs du parti royaliste à Bordeaux et se montra avec le même zèle en avril 1814, à Paris, lors de l’entrée des alliés.

* Article complet, ici : Marquis d'Alesme, otage du roi Louis XVI


Enfin, si vous souhaitez savoir si l'un de vos ancêtres fut "otage du roi", voici une liste de noms, dans l'ordre alphabétique, de ces dévoués sujets du roi...

C'est ici : Liste générale des otages de Louis XVI et de sa famille

Oh merci beaucoup LNLN je découvre ces « otages ». Passionnant !

J'ai parcouru dans les grandes diagonales ce livre, écrit par un témoin du temps, qui relate cet épisode et cite donc la liste principale des noms de ces "otages".



Le ton est grandiloquent et donne dans le larmoyant de la Restauration, mais les informations peuvent être intéressantes si l'on s'intéresse à ce sujet.

L'initiative de cet appel aux Français pour les engager à se présenter comme "otages" est venue d'un certain M. de Rozoi, journaliste toulousain, et rédacteur de la Gazette de Paris.
Le récit s'attarde sur les différentes pétitions et démarches auprès de l'Assemblée nationale ; l'arrestation de six "volontaires" à Auxerre ; l'on apprend également que des femmes s'étaient proposées d'être "otages de la reine".
L'action s'achève le 13 septembre 1791, lorsque Louis XVI accepte la nouvelle (et première) constitution transférant sa souveraineté à la Nation.

Livre à consulter, ici : Les otages de Louis XVI et de sa famille

Quelle histoire extraordinaire !
Je la découvre.
La miniature est effectivement bien le portrait de Louis XVI. Du reste, celui de Louis XVIII n'aurait eu aucun sens .

Dans la liste de ces dévoués fidèles au roi, entre autres noms, nous retrouvons un d'Orlan de Polignac et son fils.
Ils étaient originaires de Condom.

Nous évoquions cette famille (sans lien avec les Polignac, proches de Marie-Antoinette) dans le sujet dédié à ce bâtiment, sélectionné parmi les "chefs-d'oeuvres architecturaux" en péril du premier "Loto du patrimoine", organisé par l'ami Stéphane Bern...



C'était ici : L'Hôtel de Polignac (Condom, Gers)

Oui, je me souviens !

Ces " otages " de Louis XVI voulaient sans doute constituer une manière de " bouclier humain " comme on dit .
... mais quant à son efficacité, hélas !

Mme de Sabran a écrit:
Ces " otages " de Louis XVI voulaient sans doute constituer une manière de " bouclier humain " comme on dit .  

Après lecture (rapide) du livre que j'ai inséré en lien, il s'agissait, dans un premier temps, de se porter garant afin que le roi puisse retrouver sa liberté perdue après l'épisode de Varennes, et notamment celle de pouvoir réfléchir "librement" à l'acceptation (ou pas) de la constitution en cours de rédaction par les députés.  
A noter que les plus téméraires de ces "otages déclarés" étaient prêts à un sacrifice plus ultime : quelques-uns des pétitionnaires ayant souligné que le roi pouvait être amené à tenter, une seconde fois, une sortie de Paris afin de retrouver sa pleine liberté, hors pression des clubs révolutionnaires.

Mme de Sabran a écrit:...    mais quant à son efficacité, hélas !

L'Assemblée a ignoré cette initiative portée par ses pétitionnaires, sauf erreur de ma part, jusqu'a ce que Louis XVI accepte la nouvelle constitution et prête serment.

N’oublions pas que Louis XVI et ceux qui l’accompagnaient dans cette équipée rentrent prisonniers à Paris. Ils sont dans un premier temps consignés aux Tuileries, gardés à vue et interrogés. Ce n’est qu’au bout d’une semaine, dans un revirement dont la Révolution a le secret, que l’Assemblée décide en quelque sorte de les acquitter, et accrédite cette idée farfelue d’une tentative d’enlèvement du Roi pour expliquer sa fuite...
On sait aujourd’hui que ce revirement tient au fait que l’Assemblée avait besoin du Roi pour signer la Constitution, et surtout qu’elle n’était pas encore républicaine.

Ces otages du roi, c'est une info incroyable dont on n'entend jamais parler, je me trompe?

Je découvre l'un de ces  " otages du Roi ",    
le chevalier d'Hespel d'Hocron , qui se porta volontaire à l'armée de Condé, et sur le recueil de Souvenirs duquel je suis tombée hier, tout à fait par  hasard .  


Il était fervent chrétien et si dévoué royaliste qu'en 1791, après le triste retour de Varennes, alors que Louis XVI et les siens étaient en réalité prisonniers aux Tuileries, il fut de ceux qui s'offrirent comme " otages pour le Roi ", et il n'offrit pas seulement sa personne mais encore celles de ses deux fils, l'aîné âgé de treize ans, le cadet de douze ans ...  

( Avant-propos de Hyrvoix de Landosle )

Mme de Sabran a écrit:il fut de ceux qui s'offrirent comme " otages pour le Roi ", et il n'offrit pas seulement sa personne mais encore celles de ses deux fils, l'aîné âgé de treize ans, le cadet de douze ans ...[/i]  

Ils sont bien dans la liste des "otages", que l'on retrouve grâce au lien que j'ai cité ci-dessus.  

Ce ne sont pas les seuls adolescents et enfants !  
Il y en a beaucoup ainsi " offerts " avec leurs parents " otages " du roi ou de la reine, et des bien plus jeunes encore : Charles, le fils du célèbre marquis de Favras a 10 ans ; le petit Henri de Malherbe-Longvillers est âgé de 4 ans et demi, etc.

La nuit, la neige a écrit: Charles, le fils du célèbre marquis de Favras a 10 ans ;

Oui, Charles de Mahy, 10 ans ...

La nuit, la neige a écrit:  le petit Henri de Malherbe-Longvillers est âgé de 4 ans et demi, etc.

La famille Malherbe, vieille noblesse normande, le poète est né à Caen.  
4 ans et demi, qui dit mieux ?  
Quelles étaient supposées être les conditions de cette position " otages du roi " ?   ...  car apparemment c'étaient de jeunes enfants sans leurs mères.      
Est-ce que les femmes ne pouvaient pas, elles aussi, être " otages  du roi " ?

Si.    Dans la liste dont tu nous donnes le lien plus haut, il y a beaucoup de femmes otages, avec leurs enfants .

...   par exemple, la marquise Alexandre d'Hanache et ses six enfants !!!  

Et les deux petits, Mahy et Malherbe, sont bien accompagnés de leurs mères :

390. MAHI (Charlesde), fils du marquis de FAVRAS,

391 MAHI (la comtesse de).

392 MALHERBE ( Louis de).

393. MALHERBE-LONGVILLERS (de) ; Caen.

394. Son Epouse, et leurs deux enfans , qui sont :

395 Henri;

396. ( Le nom de la fille n'est pas connu. )

Oui. La plupart du temps du temps ces femmes se proposaient d'être " otages de la reine ".

Rappelons toutefois qu'il s'agissait du projet de se porter garant le temps que Louis XVI puisse réfléchir " librement " à l'acceptation de la Constitution. Il n'a pas été question d'un enfermement en un lieu quelconque.
Un projet, sous forme de pétitions, auquel Louis XVI et Marie-Antoinette n'ont pas souscrit, évidemment ; et que les députés de la Constituante ont ignoré.

Il n'en reste pas moins que cette démarche - publique - était courageuse.
Et l'on peut se demander ce que sont devenus ces fidèles du roi lorsque la répression s'est abattue sur les partisans de l'Ancien Régime après le 10 août ?

La nuit, la neige a écrit:
Il n'en reste pas moins que cette démarche - publique - était courageuse.

Oui, très !

La nuit, la neige a écrit:
Et l'on peut se demander ce que sont devenus ces fidèles du roi lorsque la répression s'est abattue sur les partisans de l'Ancien Régime après le 10 août ?

Beaucoup sont morts sur l'échafaud .
Notamment le rédacteur en chef de la Gazette de Paris, Barnabe Farmain du Rozoi, que nous trouvons dans la liste des Otages, est condamné à mort par le tribunal révolutionnaire, le 17 août et guillotiné le 25 août 1792 ...   lui qui appelait ses lecteurs à suivre son exemple et s'offrir en otages pour la liberté du roi enfermé aux Tuileries.

Le chancelier Pasquier ( oui, oui, le bon ami de Mme de Boigne ) a écrit :

La captivité du Roi a inspiré à des royalistes dévoués la touchante pensée d'offrir des otages qui seraient emprisonnés à sa place. Sans doute il serait insensé de croire qu'une telle proposition serait adoptée, et cependant elle était faite par le plus grand nombre avec une entière bonne foi. J'en ai connu plusieurs ...