Le château de Saint-Cloud

Merci
La chambre de la reine peut être la prochaine réalisation, même si je suis pour le moment concentré sur la période du Second Empire.
Il faudrait trouver un lit du modèle décrit dans l'inventaire "un lit à la polonaise à pilastres et colonnes, sculpté de palmettes antiques, vases, muguets, perles et carquois ; aux dossiers, sphinx ailés et couronne de fleurs ; sur les faces tête de Flore avec branches de pavots ; les courbes et l'impériale regorgent de trèfles, guirlandes enrubannées et cassolettes aux angles, tandis que le couronnement, décoré d'aigles sur les côtés, est surmonté du chiffre de la reine porté par deux enfants". (source . F. Austin Montenay)
et un tissu pouvant servir d'équivalence, "un pékin fond blanc peint à petites figures chinoises et vues champêtres", (idem) comme le pékin du paravent ou des rideaux de la bibliothèque du roi à Versailles.

C'est formidable d'avoir même retrouvé un équivalent de ce " pékin fond blanc peint à petites figures chinoises et vues champêtres" !!!

Merci beaucoup Hardouin.
C'est tellement beau, cela touche l'âme quand on a la chance de visiter de tels lieux.. J'adore la sobriété de ce luxe. En tout cas, on imagine bien, et cela m'apaise seulement à la vue.

Si on pouvait trouver un équivalent avec les paysages ce serait encore mieux !

On (qui est toujours bien informé!) dit que le lit de la chambre d'apparat du château des Princes de Ligne à Beloeil (Belgique) que j'ai eu l'occasion de visiter, est un lit de Marie Antoinette... En tout cas la richesse de sa sculpture et son caractère de lit à la polonaise en ferait un bon équivalent pour celui de Saint Cloud :

D'autres suggestions?

hardouin a écrit:

On (qui est toujours bien informé!)

Alors faisons-lui entière confiance !

Mme de Sabran a écrit:C'est formidable d'avoir même retrouvé un équivalent de ce " pékin fond blanc peint à petites figures chinoises et vues champêtres" !!!

Mais oui, je l'aime bien...

hardouin a écrit:
D'autres suggestions?

Pour le lit, je ne saurais dire ; mais pour le '"pékin fond blanc peint à petites figures chinoises et vues champêtres", vous pouvez toujours regarder du côté des créations de Jean-Baptiste Pillement.
Il travailla d'ailleurs pour Marie-Antoinette à la fin des années 1770.

J'ai eu l'occasion de me rendre aux archives nationales et j'ai pu consulter (notamment) le mémoire  de l'architecte du palais, Clerget, qui restaure la pièce (et tout le reste de l'appartement) en 1853. La grande "nouvelle" est que la pièce est entièrement peinte en blanc sauf les cadres des tableaux qui restent dorés semble-t-il.  Cela est conforme à l'étiquette habituelle de la succession des pièces dans un palais français! J'ai donc repris la modélisation pour la rendre conforme à ces informations. On apprend en outre que les baguettes du décor sont la réutilisation des baguettes anciennes qui tenaient les "tapisseries", soit les tentures sur lesquelles prenait place une série de tableaux sous Louis Philippe et sans doute la tenture de toile peinte à trophée de guerre sous Louis XVI. J'en ai profité pour compléter le mobilier par des oeuvres d'art qui s'y trouvaient.





Les boiseries anciennes qui encadraient le tissu sur lequel étaient exposés des tableaux sous Louis Philippe ont été conservées et simplement retaillées aux dimensions voulues pour les six grands  tableaux installés en 1853. On a un dessin de la disposition des tableaux en 1847 :


Clerget, l'architecte en charge du palais,  indique que la transformation principale issue des travaux de 1853 est la suppression d'un "coffre", d'une avancée du mur latéral côté  salon rouge, que l'on voit clairement sur le dessin de la pièce dans le registre 37DD3, ce qui a permis d'aligner le mur sur la porte et d'installer le tableau en 1853. Ce coffre datait sans doute de Louis XVI.

Extrait du registre montrant le coffre en saillie du mur :


Vu du mur du fond avec le dessus de porte de Teniers. La porte est ouverte sur le passage qui fait communiquer l'antichambre avec le salon de stuc , ancienne antichambre de la reine et antichambre de l'empereur en 1853. Ce mur a été avancé sous Louis Philippe pour créer un passage entre les deux appartements. La porte à droite dans le passage ouvre sur le couloir  de service, et une porte symétrique à gauche sur un escalier.


Le coffre occupait approximativement la place du buffet. S'y trouvait sans doute, face à l'entrée, une statuette en marbre attribuée à Pigalle, en réalité d'Allegrain, Narcisse datée de 1753. Cette statuette était les appartements impériaux ou royaux depuis le Premier Empire et a sans doute disparu dans l'incendie. Il en existe cependant plusieurs exemplaires, ce qui a permis de la "replacer" ici. J'ai assombri les tapisseries car le vert était un peu trop "clinquant". J'ai interverti Le sens d'ouverture des portes vers le salon rouge par rapport à la précédente version car on ne voit pas les portes dans le reflet de l'aquarelle de Fortuné de Fournier, c'est donc qu'elles s'ouvrent dans l'antichambre.


Le plateau des consoles d'entre fenêtre est en acajou et non en marbre ; seuls les dessus du buffet et de la console le sont.


Les deux grands vases de Sèvres fond vert à tête de satyre (Fontainebleau)


Du côté de l'entrée  :
J'ai un peu augmenté la hauteur de l'assise du canapé qui semblait trop basse. Le cuir du bureau est noir. Enfin, j'ai placé les deux vases Lancel, retrouvés par B. Chevallier, qui se trouvaient dans la pièce et peut être sur la grande console.

Les mots me manquent pour vous exprimer mon admiration, cher Hardouin !
Ce blanc est très chic !

Quel souci du détail, jusqu'à retrouver le sens d'ouverture des portes !

Bravo, et merci pour le partage de vos recherches.

Superbe bravo !

Merci ;-)

De l'autre côté du château, Mique avait transformé le "vestibule de marbre" en vestibule haut de l'escalier du roi. Il conserve cette fonction sous les règnes suivants.
Cette pièce,appelée aussi "péristyle du salon de Mars"  en 2 sur le plan ci-dessous  se trouve donc en haut de l'escalier d'honneur (en 1) et ouvre sur le salon de Mars, en 3 :
Son décor est constitué d'éléments qui datent semblent-il de deux périodes :
-les colonnes et sans doute le dallage, avec le plafond qui représentait l'histoire écrivant les victoires de Monsieur, datent de Monsieur
-le décor des murs à base de trophées blanc et or sur fond de marbre est sans doute un enrichissement réalisé par Louis Philippe.

Les photographies après l'incendie montrent une pierre blanche mise à nu sur les murs, on peut donc en déduire que le décor de marbre qu'on voit sur les photos prises avant 1870 est un décor feint.


Les seules informations dont je sois sûr pour les matériaux sont le sol et la plinthe, qu'un mémoire de travaux de 1855 indique en marbre turquin et blanc pour le dallage et en marbre noir veiné de blanc pour la plinthe.
Le marbre Rance des colonnes semble correspondre à celui des photos ainsi que le fond en marbre Campan des panneaux des trophées. Les bases et chapiteaux des pilastres et des colonnes étaient de manière quasi certaine en bronze doré. J'espère trouver bientôt des indications à propos de ces murs.

Vue depuis le haut de l'escalier d'honneur. La grande arcade est de plain-pied avec l'allée la Carrière qui longe le château. J'ai placé une vue de l'arcade qui existe toujours et qui faisait face à cette fenêtre. Elle est surmontée d'une tête de satyre et de deux guirlandes que montrent les photos


Vue depuis l'aile de l'Orangerie vers le salon de Mars ; j'ai pu utiliser une photographie de grande taille pour coloriser les trophées et les insérer dans la maquette. L'entablement en Sarrancolin est hypothétique mais correspond à la dénomination de vestibule de marbre qui désigne aussi cette pièce.


Le mobilier se composait de quatre appliques à deux lumières insérées dans les trophées, de quatre banquettes en bois noirci à filets dorés recouverts de Savonnerie à fleurs et oiseaux, de quatre chaises dites "de forme ancienne" en bois peint en noir et Beauvais, et d'un bureau en bois noirci à pieds de biches.

A noter que la grande porte fenêtre était surmontée à l'extérieur par une grande marquise en fer et verre, elle même surmontée d'un pont suspendu construit sous Charles X pour permettre aux enfants (le duc de Bordeaux et Mademoiselle d'Angoulême) de rejoindre le parc du Trocadéro d'une manière originale.Un arc en plein cintre abritant une vasque soutenait l'arrivée du pont.
Cette photographie du recueil de Gallica montre ces différents éléments :

Le bâtiment en saillie à gauche abrite le salon de Mars.

Cet arc avec deux colonnes en marbre Languedoc est le dernier vestige de cet aménagement (et du château, car des colonnes identiques se trouvaient sur le palier supérieur de l'escalier d'honneur!)
Vue d'un point de vue similaire (photo de 2013) avec le jardin du Trocadéro à droite


L'arc et au dessus l'arrivée du pont avec ses quatre colonnes cuivrées.

Grand merci, cher Hardouin, pour cette suite de la visite . Le vestibule de marbre est somptueux et j'adore l'idée et la réalisation du pont suspendu Charles X .

Comme promis, j'ai commencé une évocation de la chambre sous Marie Antoinette, par la réalisation du décor mural. J'ai cherché à reconstituer les panneaux sculptés en utilisant des morceaux de panneaux de boiseries similaires à ceux visibles sur les photographies.
Et pour servir d'équivalence au "pékin fond blanc peint à petites figures chinoises et vues champêtres", le pékin du paravent ou des rideaux de la bibliothèque du roi à Versailles.

Bonjour Hardouin,

Tout d'abord bravo pour votre patient travail !

Permettez moi une toute petite remarque cependant, concernant les marbres, qui sont une de mes marottes.
Il me semble que les contraste entre le Campan, très lumineux, et le Rance, très sombre, donne un effet trop zébré. Il me semble que pour approcher un effet plus réaliste et plus réel aussi, il faudrait atténuer le beige du Campan, et rendre un peu de son rouge au Rance, comme on peut les voir dans le salon de la Guerre par exemple. Le blanc des trophées dorés devrait plus ressortir.

En ce qui concerne le sarrancolin en entablement, je suis un peu dubitatif. Les entablements des salons de Versailles contemporains au décors de Saint-Cloud présente tous une frise dorée. Les quelques frises de marbres au Trianon reprennent le marbre des pilastres .... mais on peut toujours être surpris par la réalité !

Merci Lucius pour ces suggestions!
De fait Versailles peut être un bon "modèle" pour cette antichambre. La difficulté principale est que (pour le moment) je ne dispose que d'informations très parcellaires sur la nature des marbres de ces décors, et que seules les photographies publiées par Florence Austin Montenay de l'état avant l'incendie apportent des indications. De plus, il est possible que le décor ait été transformé sous Louis Philippe notamment, pendant la campagne de restauration de 1838 des Grands Appartements, avec sans doute l'ajout des trophées qui font très XIXe. Les photographies après l'incendie semblent montrer aussi que ce décor de marbre était feint, tant sur les colonnes que sur les murs.

L'intérêt de la 3D virtuelle est de pouvoir faire rapidement des changements. Voici donc une proposition (plus convaincante, j'en conviens  ) de cette antichambre selon vos suggestions. J'ai remplacé le fond doré des murs par du marbre blanc et le marbre campan rubanné par du campan vert pour "coller" avec le modèle versaillais des salons de la Guerre et de la Paix.

hardouin a écrit:Voici donc une proposition (plus convaincante, j'en conviens  ) de cette antichambre selon vos suggestions.

C'est une collaboration très heureuse que la vôtre, Messieurs !
Le résultat est de toute beauté ...

Sur la seconde version l'accord entre le chapiteau doré et le Rance est beaucoup plus riche, ça sonne juste !

L'emploi du campan vert "fait" plus campagne des travaux d'Hardouin-Mansart que campagne Le Vau. Peut-être un Campan grand mélange conviendrait plus à l'identité esthétique de cette première période, comme par exemple l'arcade de la niche du salon de Vénus.

Les bronzes font en effet très Louis-Philippe, surtout les bras de lumière. A la rigueur les mascarons pourraient être anciens ... à voir.

L'encadrement en marbre blanc marche très bien.

C'est superbe !

Les chapiteaux et bases étaient-ils vraiment de bronze doré ?
Sur la photo post-incendie on les distingue encore et ils ne sont pas déformés ce qui tendrait à croire qu'ils étaient plutôt en marbre (blanc?) . D'ailleurs le chapiteau de gauche est brisé , comme l'aurait été un élément minéral -pierre ou marbre- après un violent incendie

Bravo pour vos restitutions virtuelles que je découvre !!

Merci pour ces remarques
Pour le fond de marbre, cher Lucius, je n'ai pour le moment comme informations que celles, bien maigres, données par l'aspect du marbre sur les photos en noir et blanc...
Pour cette antichambre, Florence Austin Montenay a publié deux photos montrant les murs transversaux (ceux avec les trophées) avant l'incendie. Cette photo montre notamment sur le panneau gauche un effet moucheté qui peut effectivement laisser penser à du campan

J'ai retenu votre suggestion pour le campan grand mélange, et voici une 3e proposition, en core plus luxueuse que la précédente!



Et une simulation de ce qu'on pouvait apercevoir en montant l'escalier


La voûte (dont le profil est connu par une vue en coupe) était ornée d'une peinture d"Audran représentant l'histoire écrivant la vie de Philippe d'Orléans" ; j'ai pris une peinture (non plafonnante) représentant l'histoire écrivant les victoires du grand Condé en équivalence

Pour les chapiteaux, cher hastur, je me suis basé sur une photo avant l'incendie qui montre des reflets brillants semblables à ceux de l'escalier d'honneur ou des trophées en arcades. Il se peut que les chapiteaux aient été en pierre ou en plomb (comme ceux de la galerie de Versailles), mais dorés.  
J'espère avoir une réponse archivistique à ces questions sous peu!

C'est vraiment génial, inouï.

Une question à Lucius : Mique avait fait transporter le grand escalier construit par Jules Hardouin Mansart dans l'aile sud,  au centre du château. Ses balustres étaient en marbre "rouge" mais je n'ai trouvé aucune indication sur le type de marbre en question. Auriez vous une idée?
Je dispose de cette photo très nette qui montre les détails des veines du marbre