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La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame"

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 11:47

Comme promis, je m'attèle à présent à Madame Clothilde   Very Happy 
Gâtée ni par la vie, ni par la nature, la pauvrette est appelée par ses contemporains : le Gros Madame.


La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" Heinsi10

Huile sur toile de Johann Ernst Heinsius (vers 1780)

Je laisse la parole à notre spécialiste.
A vous, cher Dominique ! Very Happy 

Dominique Poulin a écrit:
Ven 10 Oct 2008 - 18:06


L'histoire avec un grand H est souvent cruelle. Sur son sillage, elle écarte impitoyablement à l'image d'un rouleau compresseur les personnages au relief imprécis. Leurs falotes biographies au premier abord ne permet pas un examen approfondi pour le plus grand nombre. C'est à peine si leurs dates de naissance et de mort rappellent leur existence sur une pierre tombale, fussent-ils de naissance illustre !
Ce fut le sort posthume de Clotilde de France, sœur de Louis XVI. La postérité a décidé de la dédaigner, pour en faire une princesse de l'oubli, une princesse du néant. De son vivant, les Français l'ont vite oublié. Pourquoi exhumerait-on inutilement sa mémoire un peu plus de deux cent ans après sa mort ? L'étude d'une famille royale comme les Bourbons à la fin du XVIIIe siècle n'est pas sans fondement. Elle explique à travers ses multiples représentants masculins et féminins comment vivait le sommet de l'élite de la société mais aussi et surtout dans notre analyse les rouages et les leviers psychologiques de la famille régnante la plus prestigieuse d'Europe en phase ou en inadéquation avec son époque selon les opinions de chacun.

Ainsi, pour rappeler la composition des membres de la Maison de France en 1774 à l'avènement de Louis XVI jusqu'à la chute de la monarchie en 1792, on compte plus de trente cinq princes et princesses de Bourbon en comptant les branches collatérales.
Clotilde faisait partie des princesses de sang royal par excellence avec le rang prestigieux de Fille de France à égalité avec les filles survivantes de Louis XV, mais aussi avec sa sœur Madame Elisabeth et plus tard la petite Madame Royale. Malheureusement affligée dès l'enfance d'un embonpoint excessif qui reste à expliquer et qui lui valut le sobriquet mi moqueur mi-facétieux de Gros Madame et mariée en 1775 à quinze ans et demie à l'héritier du trône de Piémont-Sardaigne, elle disparut de la mémoire de presque tous. Son éducation de princesse fut tout aussi excellente que sa sœur Elisabeth, à l'exception peut-être d'une trop grande rigidité morale qui l'imprégna sa vie durant dans une austérité religieuse dont elle-même se déclarait pleinement heureuse.
Son vœu secret n'aurait-il pas été d'entrer pleinement en religion comme sa tante Madame Louise ? Beaucoup d'indices le laisseraient penser à travers la reconnaissance du Saint-Siège qui la reconnut Vénérable cinq ans seulement après sa mort, puis la promulgation d'un décret de Jean-Paul II en 1983 soulignant "l'héroïcité de ses vertus", enfin l'entrée au couvent de son époux Charles-Emmanuel IV, désespéré de la mort de son épouse le 7 mars 1802. Il écrivait à son frère le duc de Genevois le 19 mars 1802 :
"Il a plus cher frère au souverain Maître toujours juste et aimable pour sévère qu'il puisse paraitre, de me redemander un trésor qu'il ne m'avait que prêté. Oui, cher frère, j'ai perdu le 7 mars ce que j'avais de plus cher au monde d'une fièvre putride en peu de jours."
Clotilde se reconnaissait avant tout "la servante de Dieu" avant ses titres de princesse de France, de princesse de Piémont et de reine de Sardaigne.

La documentation française sur cette sœur de Lois XVI presque totalement oubliée par nos contemporains est très résiduelle et incomplète. De rarissimes érudits aussi exceptionnels que courageux, tel Joseph Remy ont entrepris de raconter sa mémoire au XIXe siècle mais il semblerait que son travail repose sur une étude hagiographique très exaltée, donc partiale. A l'exception de quelques articles comme celui de Gabriel Pérousse en 1938, reste à rechercher des sources en Italie ou Clotilde a vécue de 1775 jusqu'à sa mort en 1802.
Une ou deux biographies lui ont été consacrées là-bas dont celle de Anita Piovano, "Clotilde di Savoïa" en 1987 mais nous sommes dans l'ignorance de son intérêt documentaire véritable ni si ce document a été construit sur la base d'archives. A propos d'archives, les archives d'Etat de Turin qui reposent en partie sur la conservation des liasses de l'ancien royaume de Piémont-Sardaigne renferment probablement des fonds sur la vie officielle et peut-être privée de la princesse héritière de Piémont, reine de Sardaigne en 1796. Mais entreprendre un tel travail de recherche et de recomposition équivaudrait vraisemblablement à une mission de moine bénédictin peu gratifiante parce que cette sœur inconnue de Lois XVI n'intéresse qu'un nombre très réduit d'initiés !

Nous nous contenterons donc des sources dont nous disposons pour présenter la vie de cette belle-sœur "insolite" de Marie-Antoinette. Nous nous excusons par avance des lacunes de notre documentation mais nous pensons aussi que son frère Louis XVI et sa sœur Madame Elisabeth qui ont suscité tant de travaux historiques n'auraient pas été mécontents outre-tombe d'une amorce de réhabilitation de leur chère sœur Clotilde.
A bientôt.  
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 11:56



Journal du Comte d'Espinchal, le 27 septembre 1789 :

La princesse de Piémont que nous avons vue en France sous le nom de Mdame Clotilde et que vu son embonpoint on appelait "Le Gros Madame" aurait à peine été reconnue d'aucun de nous, tant elle est changée, vieillie, maigrie. Elle a perdu ses dents et toute apparence de fraicheur. Elle a cependant aujourd'hui seulement trente ans. (  La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" 3249736284  ) Elle n'a point d'enfants. Cela manque à son bonheur car elle est parfaitement heureuse avec son mari qui a pour elle la plus grande vénération, sentiment qu'elle a inspiré à toute la Cour. Elle est d'une extrême dévotion et très scrupuleusement attachée à l'étiquette de cette Cour qui n'en est que plus triste.


... et, lé 14 mars 1791 :

J'ai déjà parlé plus d'une fois de la grande et stricte étiquette observée à cette Cour, mais ce qui la rend encore plus triste est l'extrême dévotion du prince et de la princesse de Piémont, ce qui occasionne à Turin beaucoup d'hypocrisie.


.
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 11:58


Dominique Poulin a écrit:

Je me suis interrogé tout comme vous sur l'obésité de Clotilde jeune fille, et j'avoue ne pas être parvenu à une réponse vraiment rationnelle, mais je pense aussi que les arguments que nous développons rejoignent une thèse recevable.

C'est vrai, la famille de Clotilde était atteinte de surpoids, mais il me semble que c'est son père Louis-Ferdinand, Dauphin de France (1729-1765) et son frère le comte de Provence (1755-1824) qui furent vraiment atteint d'obésité. Si on remonte l'arbre généalogique du coté paternel et maternel, on remarque que les ancêtres saxons et polonais de Clotilde étaient énormes ! Il suffit d'observer les portraits de Stanislas Leczinski, et on a vite compris... !
Toutefois, si tous ces princes et ces princesses avaient tendance à grossir, ils ne faisaient rien pour inverser la tendance. La plupart mangeaient comme des ogres, et je suis tombé sur une citation d'un observateur à propos de l'appétit hors norme de Clotilde, qui ne laisse aucun doute sur la question.
On peut également s'interroger sur les complications physiologiques que cet appétence pouvait provoquer, à savoir un diabète multiplié par x, et les crises de gouttes dont presque tous les Bourbons et les parents allemands, saxons et polonais furent atteints. Et si on remonte encore plus loin, le Grand Dauphin, fils de Louis XIV était très très gros !

"Les lettres de Marie-Antoinette et de Marie-Clotilde, Reine de Sardaigne" publiées par le vicomte de Reiset ne représentent effectivement pas une correspondance simultanée entre les deux princesses.
Ce sont d'une part, les quelques reflexions de Marie-Antoinette à sa mère l'impératrice, à propos de Clotilde et d'autre part la correspondance d'exil de Clotilde à ses beaux-frères. Cette correspondance de la reine de Sardaigne est le plus souvent politique, mais elle donne d'intéressants détails sur sa santé, celle de son mari.
La reine de Sardaigne correspondait aussi avec la princesse Louise de Condé, elle aussi religieuse et qui s'établit quelques temps en Piémont grâce à l'amitié et l'obligeance de Clotilde.


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Message par Invité Dim 09 Mar 2014, 11:59

Encore une bigote !  boudoi29
Décidément, Louis XVI et ses frères et soeurs étaient des vraies grenouilles de bénitiers...  What a Face

La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" Madame26

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:00


Dominique Poulin a écrit:
Mar 14 Oct 2008 - 16:43


Clotilde a la réputation d'avoir bénéficié de beaucoup d'influence sur son époux Charles-Emmanuel IV, certains prétendent sans beaucoup de preuves qu'elle le dominait complètement. Il semblerait que selon pas mal d'historiens italiens, Charles-Emmanuel IV n'ait pas trop bonne presse... On le décrit le plus souvent comme un homme maladif, fragile physiquement et psychologiquement, et influençable. Cela reste à confirmer et ce n'est pas avec les sources françaises dont nous disposons actuellement que la situation risque de changer.

Charles-Emmanuel IV et Clotilde sont montés sur le trône de Piémont-Sardaigne dans des circonstances dramatiques en 1796. Lors de la campagne d'Italie conduite par le général Bonaparte, le Piémont avait été envahi et le vieux roi Victor-Amédée III malgré l'aide de l'Autriche ne fut pas capable de contrer l'armée française. Son armée fut décimée à la bataille de Mondovi tandis que Bonaparte imposait l'armistice de Cherasco qui entérinait l'annexion de la Savoie et du comté de Nice en 1792, une lourde indemnité de guerre, le libre passage des armées françaises sur le territoire... etc. Victor-Amédée III ne put survivre à ce naufrage et s'éteignit rapidement la même année.
Son fils Charles-Emmanuel lui succédait donc dans de bien tristes conditions à quarante-cinq ans. Outre l'agitation révolutionnaire, le roi et la reine ne furent pas capables de manœuvrer face aux dictats de plus en plus autoritaires de l'armée et du gouvernement français le Directoire. La dynastie de Savoie était passionnément cléricale et la mise en vente des bien du clergé en 1798 représenta le coup de grâce, le roi et la reine refusèrent de cautionner cette politique plus longtemps.
Il semblerait aussi que s'estimant de moins en moins en sécurité à Turin ou les complots anti-royalistes se multipliaient, le couple royal préféra se replier à Florence, puis à Gagliari en Sardaigne. Les circonstances de leur départ sont assez obscures car il est question entre autre d'abdication du roi sur la souveraineté du Piémont.
Je pense que la reine Clotilde secondait activement son époux et prenait des décisions lorsque le roi était malade ce qui lui arrivait assez souvent. Mais sur le plan politique, les historiens sont sévères, ils pensent que le couple royal était réactionnaire et ne comprenait rien à rien à l'esprit nouveau. C'est peut-être vrai, quoique sous toute réserve, mais il faut savoir que la ligne politique de la maison de Savoie sous Charles-Emmanuel III qui régna jusqu'en 1773 et de son fils Victor-Amédée III ne privilégiait plus les réformes de fond et s'orientait vers un régime fort et autoritaire.
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Message par Invité Dim 09 Mar 2014, 12:05

Tous gros et grenouilles de bénitiers !

La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" Mme_cl11

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:07

Dominique Poulin a écrit:
Mar 11 Nov 2008 - 18:10


Voici pour commencer l'avant-propos que j'ai décidé de consacrer à l'étude de Madame Clotilde, princesse de France, princesse de Piémont puis reine de Sardaigne :

Avant-Propos


L'étude de la dynastie des Bourbons de France de la fin du XVIIIe siècle a fait l'objet d'une bibliographie considérable, source d'innombrables travaux historiques.
Des personnages centraux comme Louis XVI et Marie-Antoinette ont été très largement analysés et commentés au détriment d'autres, plus secondaires certes, mais aussi attachants. A ce propos, une soeur de Louis XVI, Marie-Adélaîde-Clotilde-Xavière plus connue sous le nom de Madame Clotilde n'a pas retenue l'intérêt des historiens, malgré ses grandes qualités altruistes. Cette princesse représentait pourtant un véritable personnage par une grande humanité d'âme fort rare au sein d'une famille royale. Elle n'en demeure pas moins quasi-inconnue de nos jours et forme un étrange contraste avec sa soeur, Mdame Elisabethn, infiniment plus célèbre.

Nous nous sommes interrogés sur les raisons de cette éviction qui la plonge aujourd'hui dans un oubli presque total. Faut-il avancer son mariage précoce avec un prince étranger au coeur de son adolescence ? sans doute, car son mariage représenta le dernier mariage royal célébré à Versailles. Clotilde ne revint jamais en France mais retrouva certains menbres de sa nombreuse parentèle chassée par la Révolution. D'autre part, son apparence physique assez ingrate ne lui fut pas favorable. Elle n'était ni jolie ni laide, mais son envahissant embonpoint provoqua des sourires sarcastiques à la Cour de France. Sur le plan psychologique, sa personnalité profonde ne la prédisposait pas à l'esprit de légèreté et d'ambiance mouchetée qui régnait à Versailles à la fin du règne de son grand-père Louis XV et au début de l'avènement de Louis XVI.
Probablement fut-elle très marquée par les décès successifs de ses parents qui la laissèrent orpheline à huit ans et de plus l'éducation stricte et profondément religieuse inculquée par sa gouvernante laissèrent une empreinte indélébile dans l'âme de la princesse. On perçoit dans le trajectoire de sa vie, une volonté de sacrifice peut-être guidée par un obscur sentiment de culpabilité...

Son sens rigoureux du devoir et sa foncière bonté lui gagnèrent spontanément les coeurs à la très sérieuse Cour de Turin. Elle était très estimée par ses beaux-parents, le roi et la reine de Sardaigne et adorée de son mari, le futur roi Charles-Emmanuel IV. On ne sait toutefois quel type d'union lia les époux. Aucun enfant ne devait naître et des rumeurs de stérilité furent imputées à Clotilde tandis que la virilité de son mari était entachée d'impuissance !
En 1789, les premiers émigrés réfugiés à Turin furent à la fois stupéfaits par le vieillissement accéléré de la princesse de Piémont et par la religiosité implacable de la vie de la Cour de Piémont-Sardaigne. La Révolution Française ne fut pas clémente avec la nouvelle patrie de Clotilde. Elle lui arracha d'abord des provinces avant d'envahir le pays et de lui imposer sa loi. Clotilde devint reine au plus mauvais moment en 1796 alors que la monarchie était entrée dans un processus de déliquescence tel que les nouveaux souverains ne purent se maintenir que deux ans dans une capitale gouvernée par les intérêts français.
Ensuite, le couple royal entama un long exil de Florence à Rome, en passant par Cagliari en Sardaigne avant d'échouer à Naples. C'est là que mourût Clotilde, épuisée physiquement et nerveusement en 1802. En Europe, plusieurs personnalités royales s'émurent de son courage et de son abnégation. On l'appela "La malheureuse reine de Sardaigne" Le pape Pie VII, impressionné par sa grandeur, la déclara Vénérable six ans seulement après sa mort en 1808.

Prochains chapitres :

I La princesse "Gros Madame" 1759-1774

II Mariage franco-savoyard 1775

III La princesse de Piémont 1775-1789

IV Quand les lys se fânent 1789-1796

V "C'est une couronne d'épines que le ciel m'envoie" 1796-1798

VI "La malheureuse reine de Sardaigne" 1798-1802



Merci, Dominique, pour ce portrait attachant et cette courte biographie du "Gros Madame" . Cette princesse est très injustement bien méconnue. Il est intéressant de constater combien les vicissitudes de la Révolution française eurent de retombées dans toute l'Europe. Ainsi Clotilde et son époux devaient , eux aussi, être dépossédés de leurs couronnes et prérogatives royales, comme plus au sud et dans la foulée, Marie-Caroline et Ferdinand.
L'histoire avance avec la légèreté et la délicatesse du bulldozer ...

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:21




Nous pouvons lire Madame Clothile sur le Net  Very Happy  :

http://gallica.bnf.fr/Catalogue/noticesInd/FRBNF34026286.htm
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:23

Dominique Poulin a écrit:
Mer 12 Nov 2008 - 16:36

Oui effectivement la quasi-totalité des trônes italiens furent contaminés par la Révolution et l'occupation des armées de la République. Outre le royaume de Piémont-Sardaigne, on compte à quelques années de distance la chute du duché de Parme, de Plaisance et de Guastalla, le duché de Modène de la famille d'Este, le royaume de Naples, le Grand-duché de Toscane de la maison d'Autriche et même les Etats Pontificaux.


Je ne peux pas certifier sur l'honneur si les lettres de Clotilde à ses beaux-frères savoyards sont authentiques mais je pense très fortement pour le oui. C'est le vicomte de Reiset, historien du début du XXe siècle qui les a mises à jour. Je crois bien qu'elles proviennent des archives personnelles de la maison royale de Savoie.


IL existe quelques sources italiennes sur Clotilde, mais au demeurant peu de choses. J'ai renoncé à les consulter du fait que je ne maitrise pas cette langue. Je me suis contenté des sources françaises et j'avoue qu'il faut beaucoup de persévérance pour en dénicher quelques unes.
A la fin de ma petite biographie, je vous donnerais la liste de ma bibliographie bien sûr.

.
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:30

Clothilde musicienne ... La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" Sm.guitare02par François-Hubert Drouais

La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" Image557
Marie-Clotilde-Xavière de France, reine de Sardaigne, dite Madame Clotilde
François-Hubert Drouais
Huile sur toile, 1775
Image : RMN-GP (Château de Versailles) / Daniel Arnaudet
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:49

La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" Imagep44
Portrait de Marie-Clotilde-Xavière de France
Réplique d'un original au paltel commandé par les Menus-Plaisirs du roi en 1768
Attribué à Ducreux, Joseph (peintre)
Anciennement attribué à d'après Drouais, François-Hubert (peintre)
D'après Ducreux, Joseph (pastelliste)
Photo : RMN-GP (Château de Versailles) / Gérard Blot / Franck Raux
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:53



Dominique Poulin a écrit:
Mar 6 Jan 2009 - 12:25



Chapitre I

La princesse "Gros Madame" 1759-1774

Première partie 1759-1770


Le chapitre I " La princesse Gros Madame" consacré à la vie de Clotilde de France, soeur de Louis XVI sera partagé en deux parties chronologiques. La première, de 1759 à 1770, à la veille du mariage du dauphin avec l'archiduchesse Marie-Antoinette.
La seconde partie sera diffusée dans les jours qui viennent et s'étalera de 1770 à 1774, jusqu'à la mort de Louis XV, son grand-père.

Afin de bien suivre le déroulement de la première partie, je vous demande d'avoir l'amabilité de ne pas intervenir avant la fin du récit, car plusieurs posts de paragraphes seront postés au fur et à mesure. Merci de votre attention et de votre gentillesse comme toujours.

C'est sur fond de Guerre de Sept ans, dix jours après la mort du général Montcalm au combat à Quebec et la perte imminente de l'empire colonial français au Canada, que naquit à Versailles, la princesse Marie-Adélaîde-Clotilde-Xavière, le 23 septembre 1759, à cinq heures quarante-cinq du matin.
La naissance de l'enfant fut si précipitée qu'elle bouleversa toutes les règles de l'étiquette de la Cour. La dauphine Marie-Josèphe de Saxe ne pensait pas accoucher de sitôt et imputa les habituelles contactions à la fin de toute grossesse. Mais de grandes douleurs lui rappelèrent sa délivrance et elle alerta derechef ses femmes de service. Une petite fille vit le jour, en la seule présence de son père, le dauphin Louis-Ferdinand, de la première femme de chambre et une sage-femme. L'héritier du trône se félicita de la rapidité de l'accouchement de sa femme : "Jamais, elle n'a eu de couches si heureuses...".

Immédiatement après l'ondoiement, l'enfant est remis aux mains de la Gouvernante des Enfants de France, la comtesse de Marsan, de sa nourrice et de ses femmes de chambre, avant tout chargées de bien le conserver en vie, en un temps ou la mortalité infantile est encore forte. La naissance de l'enfant n'est saluée par aucune réjouissance publique, pas de Te Deum, pas la moindre fête !
Dans son Journal, le bourgeois Barbier, ne marque aucune surprise : "Ce n'est pas étonnant, pour une fille qui a quatre vivants !".

Quatre jeunes princes ont l'honneur de contempler leur nouvelle petite soeur : Louis-Joseph, huit ans, duc de Bourgogne, Louis-Auguste, cinq ans, duc de Berry, Louis-Stanislas-Xavier, trois ans et demie, comte de Provence, et Charles-Philippe, un an et demie, comte d'Artois.

Tandis que la mère se remet de ses couches, le père semble exulter de joie devant l'arrivée de sa fille après une cascade de garçons. Une semaine après la naissance de Clotilde, il écrit à son beau-frère, François-Xavier, comte de Lusace : "Pepa se porte à merveille ; elle a changé aujourd'hui de linge et de lit et reçoit la visite de sa fille qui est une petite miniature très élégante." La famille royale donnait alors le doux surnom de "Pepa" à la dauphine Marie-Josèphe...

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 12:56



Dominique Poulin a écrit:
Mar 6 Jan 2009 - 13:21


On sait très peu de choses de la petite enfance de Clotilde. Elle vécut la première partie de sa vie sous la responsabilité et les soins de sa gouvernante, Madame de Marsan, une dame de très haut rang, de sous-gouvernantes, la comtesse de Breugnon et la baronne de Mackau, et de femmes de chambre et de service, chargées de pourvoir aux besoins de l'enfant royal.
Lorsqu'elle eut trois ans, le peintre Drouais fixa ses traits avec le comte d'Artois, de deux ans son aîné. Drouais représente les bambins insouciants en compagnie dune chevrette dans un bonheur paisible et bucolique... Cette image est probablement trop idyllique pour être vraie. Clotilde a surtout vécu en compagnie de ses gouvernantes. Ses parents supervisaient certes consciencieusement son éducation, mais ne s'en occupaient pas réellement.

La fillette logeait dans l'appartement des Enfants de France au rez-de-chaussée de l'Aile du Midi. C'est là que la rejoignit le 3 mai 1764 sa sœur benjamine, Madame Elisabeth. Clotilde n'avait pas encore cinq ans, mais elle intégra rapidement son rôle de grande sœur aînée, responsable et délicatement protectrice. Dès lors, les petites-filles de Louis XV et de Marie Leszczynska furent appelées à Versailles "Les petites Mesdames" afin de les différencier de leurs quatre tantes, filles de Louis XV, dites "Mesdames de France".
Il semble que la dauphine assista aux premières leçons d Clotilde. Très cultivée mais assez intransigeante en matière d'éducation, Marie-Josèphe s'était réservée l'enseignement de la religion et de l'histoire.
Avec son époux, elle recevait ses enfants deux fois par semaines dans ses appartements privés afin de bien juger de leurs progrès et de leurs bonnes mines...Mais il est malaisé de restituer l'état d'esprit du couple delphinal envers sa progéniture. Furent-ils des princes d'apparence sévère, distillant avec parcimonie, leurs sourires, leurs caresses ou leurs réprimandes ? Difficile de répondre, mais il est probable que pour leurs plus jeunes enfants, en particulier, le comte d'Artois et Mesdames Clotilde et Elisabeth, ces parents un peu intimidants restèrent une énigme. Peut-être, au fond, ne se sont-ils jamais posé la question.

Au cours de ses premières années de développement, la petite princesse donna satisfaction à tout le monde, à Louis XV, à Marie Leszczynska, à ses parents, sa gouvernante et ses précepteurs.
Haute comme quatre pommes, elle révéla très tôt un tempérament placide et doux, foncièrement bon et généreux. Ses maîtres en faisaient ce qu'ils voulaient. son enseignement religieux auquel ses parents tenaient beaucoup et les règles de la bienséance élevées à haut degré de perfection inhérent à son rang royal lui donnèrent le sens de la rectitude mais sans ostentation , le souci d'apprendre, la charité, l'ignorance du vice et la volonté constante de rester occupée. Ces principes d'éducation inculqués dès le plus jeune âge dans l'esprit de la fillette imprégnèrent durablement le déroulement de sa vie à venir.

Coup sur coup, la tuberculose frappa les Enfants de France. Le dauphin Louis-Ferdinand meurt à trente-six ans le 20 décembre 1765. La dauphine ne lui survécut que quinze mois et succomba le 13 mars 1767. Trois jours plus tôt, à son chevet, Marie-Josèphe de Saxe avait voulu voir ses filles pour la dernière fois. Peut-être leur mère leu a-t-elle dit qu'elle ne pourrait plus les voir, car Clotilde qui approche de ses huit ans, perçoit intuitivement le drame et remplit la chambre de ses cris. On doit l'arracher à sa mère pou ne pas augmenter au déchirement des adieux.
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 13:01

Le comte d'Artois enfant soutenant Mlle Clotilde montée sur une chèvre, par Drouais .  Very Happy 

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 13:04



Dominique Poulin a écrit:
Mar 6 Jan 2009 - 14:46


Désormais doublement orphelines, les princesses se rapprochèrent instinctivement de la personne qui leur était la plus proche dans leur vie quotidienne, leur gouvernante, la comtesse de Marsan. Qui était réellement, Mme de Marsan ? Les uns la décrivent comme une femme hautaine, voire comme une intrigante sans grand cœur. D'autres louent son dévouement dans ses fonctions. Nous savons qu'elle aimait se faire appeler par ses pupilles "La petite chère amie"et que le comte de Provence qui l'aimait beaucoup la présentait comme sa "chère petite chère maman". Le nouveau dauphin, futur Louis XVI, lui reprocha secrètement d'avoir donné une préférence marquée à son aîné, le duc de Bourgogne, décédé à dix ans en 1761, puis au comte de Provence, que Mme de Marsan affectionnait trop visiblement.
Quant à Clotilde, son véritable attachement ne nous est pas connu, mais il semble bien qu'elle la respectait et l'écoutait beaucoup. Fut-elle une sorte de "mère de substitution"? On ne peut pas se prononcer, les éléments manquent.
Reçut-elle un peu d'affection de son grand-père Louis XV, "Grand-Papa Roi" comme l'appelait ses petits-enfants ? c'est possible, Elle se présentait à lui tous les matins quelques instants, mais ce rituel représentait plus un devoir d'étiquette, qu'un réel témoignage de tendresse.

Dès que la petite Madame Elisabeth prit quelques années, elle vécut davantage dans le sillage de Clotilde et les deux sœurs complices vécurent l'une près de l'autre presque quotidiennement. Cette connivence ne se développa pas sans nuages ! Elisabeth a cinq ou six ans se révélait comme le contraire de Clotilde : coléreuse, têtue, un brun rebelle... Mme de Marsan lui désignait alors l'exemple de sa sœur Clotilde si docile et obéissante. Cette comparaison risquée produisit son effet. Elisabeth nourrit de la jalousie envers Clotilde si "parfaite" et se récria un jour alors qu'elle n'obtenait pas une faveur qu'elle demandait : "Si c'était ma sœur Clotilde qui l'eut demandée, elle l'eut obtenue !". Cet antagonisme passager disparût lorsque Clotilde qui avait de l'affection pour deux, apprendra les rudiments de l'alphabet à sa petite sœur. Elle entourera également Madame Elisabeth de sa bienveillante sollicitude lorsqu'elle tomba malade vers 1769. A partir de ce moment, tout rentra dans l'ordre et les deux sœurs s'unirent dans une complicité à toute épreuve.

Clotilde atteint dix ans le 23 septembre 1769. Ce n'est qu'une princesse-enfant, mais déjà se profile à son sujet d'informels projets de mariage. Sans doute n'a-t-elle encore aucune connaissance de ce que l'on projette pour elle. Plus concrètement, son entrée officielle à la Cour avance à grand pas et il appartient à la comtesse de Marsan de l'instruire dans les moindres détails sur le protocole en vigueur à Versailles. La jeune princesse doit savoir tenir son rang en toute occasion et en toute circonstance sur ce grand théâtre qu'est la Cour.
Vraisemblablement, la princesse a reçu des marques de contentement de sa gouvernante. Clotilde, depuis toujours, est d'une nature aimable, soucieuse de complaire à son entourage. Une conduite si lisse révélait-elle un manque de caractère ? Au contraire, la fillette instruite par de solides principes moraux et religieux démontrera au cours de sa vie une grande volonté altruiste, un courage égal à sa naissance et un dévouement rare.


Mar 6 Jan 2009 - 15:26


En revanche, vers l'âge de dix ans, l'apparence de Clotilde ne prêtait pas à son avantage. Ses traits trop pleins manquaient de finesse bien qu'empreinte d'une grande aménité soulignés par des yeux ombragés d'une évidente douceur. L'ensemble du visage reflétait un menton lourd, un ovale incertain, le nez un peu long légèrement épaté, la bouche mince. Le seul apanage de beauté que la princesse pouvait s'enorgueillir de posséder reposait en sa chevelure qu'elle avait blonde et abondante comme sa feue mère.
A l'aube de l'adolescence, Clotilde était anormalement ronde et dodue, d'une corpulence telle qu'elle semble avoir choqué les contemporains. Madame Campan, femme de chambre de Marie-Antoinette le confirme : "Cette princesse était dans son enfance d'une si énorme grosseur que le peuple lui avait donné le sobriquet de Gros Madame."
Un visiteur étranger, le comte Von Zizendorf, consigna dans son journal le 23 janvier 1769 la note suivante : "Le matin, un moment chez le peintre Ducreux, rue Dauphine, que le roi envoie à Vienne. Il avait chez lui le portrait de Madame, assez ressemblant, à la graisse près qu'il a un peu diminuée." Ce surnom de "Gros Madame" lui resta comme un stigmate...
Qui fut à l'origine de ce sobriquet ? Nul ne sait réellement de quelle bouche il fut prononcé le premier. Cependant, on ne peut s'empêcher de penser à son grand-père Louis XV qui amateur de mots d'esprit, avait lui-même désigné ses filles sous les épithètes peu flatteuses de Torche, Coche, Graille et Chiffe !
On a dit aussi qu'un garde suisse de Versailles aurait lancé malencontreusement ce surnom colporté ensuite de bouche en bouche comme une traînée de poudre ! Un jour, une dame de la Cour s'abaissa dans l'irrespect jusqu'à prononcer les deux mots fatals en présence de la jeune altesse. C'est alors que l'omniprésente comtesse de Marsan s'interposa avec toute l'énergie dont elle était capable en réprimandant la dame de ne plus se présenter devant la petite-fille du roi... C'était mal connaître Madame Clotilde, parée de son inaltérable sollicitude. Elle fit revenir la dame congédiée en lui disant : "Ma gouvernante a fait son devoir et je vais faire le mien ; revenez nous faire votre Cour, et ne vous rappelez plus une étourderie que j'ai moi-même oubliée."

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 13:38

Dominique Poulin a écrit:

Un visiteur étranger, le comte Von Zizendorf, consigna dans son journal le 23 janvier 1769 la note suivante : "Le matin, un moment chez le peintre Ducreux, rue Dauphine, que le roi envoie à Vienne. Il avait chez lui le portrait de Madame, assez ressemblant, à la graisse près qu'il a un peu diminuée." Ce surnom de "Gros Madame" lui resta comme un stigmate...


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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 13:40

Dominique Poulin a écrit:
Mar 6 Jan 2009 - 15:51


En 1770, un événement douloureux dans la famille royale allait profondément marquer Clotilde. En avril, Madame Louise de France, sa tante, entrait au Carmel de Saint-Denis et abandonnait la Cour pour ne plus jamais y revenir. Sans nul doute, déjà fortement habitée par la foi religieuse, Clotilde l'interpréta comme un geste de grandeur.
Elle écrivit à la princesse carmélite, le 16 avril, une lettre assez émouvante, sans doute en partie dictée par Mme de Marsan :

"Ma chère tante,
Je ne puis vous dire le chagrin que j'ai eu de votre retraite à Saint-Denis. La seule pensée que je ne vous verrai plus que très rarement me fait frissonner ; cependant j'espère que l'on me permettra d'aller quelquefois à Saint-Denis, et que j'aurai le plaisir de vous y voir ; ce sera certainement le plus grand que l'on puisse me faire. Le roi nous a promis de souper dans ses petits cabinets mardi prochain ; je puis vous assurer ma chère tante, qu'il ne me me paraitra pas si agréable, puisque vous n'y serez pas. Ce sera aussi ce jour là que je ferai ma première communion. Je vous prie, ma chère tante, de demander à Dieu que je la fasse dignement. Pour moi, je m'acquitterai de votre commission de prier pour vous, quoique je pense que vous n'en ayez nullement besoin. Je vous aime et vous embrasse de tout mon coeur, ma chère tante.
Marie-Adélaïde-Clotilde-Xavière.


Cette lettre nous renseigne sur deux points importants. A dix ans et demie, Clotilde est autorisée à souper avec la famille royale dans les appartements de son grand-père, et d'autre part elle s'apprête à sa première communion. Ces deux évènements dans la vie d'une princesse de France propulsent la fillette dans la lumière de la Cour à laquelle elle est officiellement présentée et son entrée dans le monde.


Fin de la première partie du Chapitre I. La deuxième partie du Chapitre I paraîtra entre le 8 et le 10 janvier.
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 13:58



Eh bien oui, cher Dominique, vous avez vaillamment continué  :n,,;::::!!!:  comme suit :

Dominique Poulin a écrit:
Jeu 8 Jan 2009 - 15:54


Suite du chapitre I

"La princesse Gros Madame" 1759-1774

Deuxième partie : 1770-1774



Très vite sa présence est requise lors des multiples cérémonies d'étiquette et les fêtes qui jalonnent le rituel monarchique de la dynastie. Dès le 24 avril 1770, elle assiste au mariage de ses cousins le duc de Bourbon avec Louise-Bathilde d'Orléans. Ces noces princières ne représentent toutefois qu'un avant-gout au féérique mariage de son frère Louis-Auguste avec l'archiduchesse d'Autriche Marie-Antoinette prévu pour le 16 mai.

Pour Clotilde, c'est une consécration qui honore son rang de princesse et de Fille de France. Aux noces de l'héritier du trône, elle signe en sixième position entre le comte d'Artois et ses tantes, Mesdames Adélaïde, Victoire et Sophie. Dans la soirée, elle prend place au souper public de la famille royale, dit "Grand Couvert" à une immense table de vingt et un convives du sang de France. La petite Madame Clotilde, du haut de ses dix ans et demie, est la plus jeune personne de cette auguste assemblée constellée de pierreries et chamarrée d'atours étincelants. La princesse est assise entre le comte de Provence et sa tante Victoire. En face d'elle, est campée l'altière Madame Adélaïde. Probablement s'est-elle familiarisée avec avec quelques visages qu'elle n'avait pas souvent l'habitude de voir. En tournant discrètement la tête, Clotilde put contempler quelques cousins fort éloignés, comme cette vieille princesse douairière de Conti à la face plâtrée... La succulence et l'abondance des mets l'ont sans doute davantage intéressée. Le public fut témoin de sa boulimie gargantuesque !

La duchesse de Northumberland s'en fit l'écho :
"La petite Madame mangeait avec une voracité et un empressement que je n'ai jamais vu égaler. Tandis qu'elle avalait tout ce qu'il y avait dans son assiette, elle semblait dévorer des yeux tout le reste de ce qui était sur la table."
Peut-être, la princesse souffrait-elle d'une pathologie diabétique proche de son frère le comte de Provence déjà très empâté. En tout état de cause, la frère et la sœur se goinfraient plus que de raison à se rendre malades et justifiaient leur obésité par une alimentation surabondante et très calorique.

Avec l'entrée de Marie-Antoinette dans la constellation de la famille royale, une nouvelle donne apparaît à Versailles. La dauphine a fait la connaissance de ses nouvelles belles-sœurs. Elles sont plus jeunes que Marie-Antoinette, l'aînée n'a pas encore onze ans tandis que la cadette en affiche six. La fille de l'impératrice Marie-Thérèse et naturellement bonne, prévenante et compatissante avec les enfants. Cependant, les jeunes princesses vivent sous le contrôle tatillon de leur gouvernante jalouse de ses prérogatives et la lourdeur de l'étiquette empêche le naturel de prendre le dessus. Mais quelques paroles maladroites de la dauphine aliénèrent la comtesse de Marsan qui selon Madame Campan "donnait une préférence marquée à Madame Elisabeth" : "La gouvernante qui cherchait à faire valoir celle des deux princesses que la nature avait traitée moins favorablement, sut mauvais gré à Madame la Dauphine de son affection particulière pour Madame Elisabeth, et par des plaintes indiscrètes elle refroidit l'amitié qui existait cependant entre madame Clotilde et Marie-Antoinette. Il s'éleva même quelque rivalité sur l'article de l'éducation et on s'expliqua assez haut et très défavorablement sur celle que l'impératrice Marie-Thérèse avait fait donner à ses filles.
L'abbé de Vermond se crut offensé, prit part à cette querelle et unit ses plaintes à celles de Madame la Dauphine sur les critiques de la gouvernante, et s'en permit à son tour même quelques unes sur l'instruction de Madame Clotilde. Tout se sait dans une Cour. Madame de Marsan fut à son tour instruite de ce qui c'était dit chez la dauphine et lui en sut très mauvais gré. A partir de ce moment, il s'établit un foyer d'intrigues, ou plutôt de commérages contre Marie-Antoinette dans la société de Madame de Marsan
."

Portée en dérision la comtesse de Marsan représentait un parti risqué ! Elle était apparentée à la très illustre famille de Rohan qui comptait parmi l'une des toutes premières à la Cour. Les Rohan avaient droit au titre de princes par des attaches avec le Saint Empire Romain Germanique, et c'était sans compter le nombre d'amis, de fidèles et de solliciteurs dont cette maison était pourvue. La nature même de Madame de Marsan pouvait inquiéter : "dévote, fanatique et violente. Ses moindres affections sont des passions. Elle ne connait point les sentiments intermédiaires, tout est pour elle ou haine ou amour."

Entre Marie-Antoinette et la Gouvernante des Enfants de France, s'établit dès lors une rivalité durable à fleurets mouchetés. Il résulte de ces intrigues de Cour beaucoup de bruit pour des motifs véniels. Qu'à-t-on dit dans l'entourage de la dauphine et qui fut le premier à déclarer les hostilités ? Ce que l'on peut avancer sur ce point, c'est probablement l'irresponsabilité de la dauphine bien trop jeune pour juger de l'éducation à donner à une princesse. Il s'agit sans doute d'une rivalité entre les maisons de la dauphine et des Enfants de France ou la jalousie a beaucoup concourue à semer la discorde.

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Message par Invité Dim 09 Mar 2014, 14:01

Clotilde a en effet contribué à "civiliser" Mme Élisabeth , petite "sauvageonne"  :La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" 2028181902 qui refusait d'apprendre à lire et à écrire . Je l'avais lu dans la bio de Mme Élisabeth . Les deux sœurs s'aimaient beaucoup.

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 14:04


Dominique Poulin a écrit:
Jeu 8 Jan 2009 - 17:08


En ce début des années 1770, alors que Clotilde n'a pas encore douze ans et que le mariage du dauphin avec une archiduchesse a scellé l'alliance franco-autrichienne, une autre alliance matrimoniale se profile dans les coulisses du château de Versailles...
Certes la petite-fille de Louis XV est encore trop jeune pour convoler et son éducation n'est pas encore achevée. Néanmoins la raison d'Etat et la politique ont leurs exigences, les princesses sont "exportées" dans les Cours étrangères afin de servir les intérêts des nations. Il importe peu qu'elles n'aiment pas le prétendant que la diplomatie leur a désignée, les exemples à ce sujet sont innombrables ! L'archiduchesse Marie-Caroline l'illustre parfaitement : il fallut que deux de ses sœurs successivement promises au roi de Naples décèdent tour à rour, pour qu'elle soit choisie afin d'épouser le roi Ferdinand IV, qu'elle n'avait évidemment jamais vue... Et lorsqu'elle le vit enfin, elle fut consternée par sa laideur, sa saleté et sa grossièreté.
A Versailles, Louis XV a d'autres petits-enfants à marier. D'abord, les garçons, le comte de Provence et le comte d'Artois. Pour Clotilde, on verra plus tard, mais le roi pense déjà à elle. Discrètement, le souverain active les leviers de sa machine diplomatique afin de sonder les intentions des autres Cours d'Europe.

Vers 1770, Louis XV a déjà arrêté son choix pour le comte de Provence : il sera uni à Marie-Joséphine de Savoie, petite-fille du roi de Piémont-Sardaigne, Charles-Emmanuel III. Depuis longtemps, le roi de France nourrit un intérêt particulier pour la maison de Savoie, il est lui-même issu par sa mère d'une princesse de Savoie, l'émouvante duchesse de Bourgogne, prématurément emportée en 1712. Louis XV avait lui-même songé à une princesse de Savoie pour les secondes noces de son fils le dauphin Louis-Ferdinand avant de se fixer sur une princesse de Saxe.
Après l'Autriche, la France opte pour l'alliance savoyarde. Depuis quatre siècles, le primitif comté de Savoie a accompli une traversée ascendante en obtenant un rang ducal pour développer ensuite son influence en Italie du Nord avec l'incorporation du florissant pays de Piémont et une partie du Milanais. Depuis, la prudente et avisée dynastie de Savoie avait obtenu au terme de grands traités internationaux une couronne royale et l'île de Sardaigne.
A la fin de 1770, les fiançailles du comte de Provence avec la princesse de Savoie sont officielles. Louis XV hésite encore sur le parti à prendre pour le comte d'Artois. Faut-il accorder la main de la charmante Louise de Condé ou demander une autre petite-fille de Charles-Emmanuel III ? En revanche, depuis plusieurs années la Cour de France caresse l'espoir de marier la petite Clotilde avec un prince savoyard. Le projet était ancien et c'est la correspondance de la feue dauphine Marie-Joséphine de Saxe à son frère le comte de Lusace qui nous renseigne :
"A l'égard de l'article du mariage, je ne puis vous dire autre chose si ce n'est que Monsieur le Dauphin avait d'autres vues pour sa fille, qu'il avait lui-même commencé à y travailler, et que le roi semble vouloir les suivre et que je ne m'y refuserais certainement pas..
.".
En effet, le dauphin Louis-Ferdinand escomptait marier Clotilde avec le jeune prince Charles-Emmanuel de Savoie, fils du prince de Piémont Victor-Amédée et de l'infante Marie-Antoinette-Ferdinande et petit-fils du vieux roi Charles-Emmanuel III.

La mort du dauphin en 1765 puis de la dauphine avaient relégué ce projet à l'arrière-plan, mais Louis XV était informé et conservait probablement des dossiers à ce sujet. Mais la Cour de Turin qui avait donné son accord pour octroyer une de ces princesses à la France, ne rejetait pas le projet, mais prenait plaisir à lanterner en louvoyant vers d'autres prétendantes... C'était une des stratégies tactiques de la maison de Savoie qui sur bien des plans échafaudait des combinaisons politiques dans plusieurs directions afin de récolter le maximum d'avantages.

Rien ne pressant pour Clotilde, elle put assister en 1771, puis en 1773, aux fastueuses noces de ses frères Louis-Stanislas et Charles-Philippe. Le 14 mai 1771, le comte de Provence épousa Marie-Joséphe de Savoie, dès lors rebaptisée Marie-Joséphine à partir de son mariage. Le bon cœur de "Gros Madame" dut une nouvelle fois se gonfler de tendresse avec cette nouvelle belle-sœur de six ans son aînée.

Pourtant, l'installation de la comtesse de Provence remporta un verdict mitigé à Versailles. Sur le plan de l'alliance diplomatique, la réussite était consommée et les filles de Louis XV y étaient très favorables, mais l'apparence de la princesse piémontaise pouvait susciter des critiques. Si on loua "ses très beaux yeux" et si on pardonna sa petite taille, son corps menu et ses airs intimidés, on en voulut à ses traits volontaires qui annonçaient plus de caractère que de douceur. Ses cheveux bruns furent jugés communs mais plus grave on crut distinguer une ombre de duvet au-dessus de ses lèvres !
Certes, la comtesse de Provence n'était pas belle, mais Louis XV écrivait d'elle à son petit-fils le duc de Parme : "Sans être jolie, elle est très agréable et si j'avais quelques années de moins après l'avoir vue, je l'aurais bien prise pour moi" et quelques mois plus tard : "Elle est aussi très aimable qu'on peut l'être, aussi je l'aime de tout mon cœur." Les bons rapports d'information sur l'éducation royale de Marie-Joséphine donnée à Turin recueillis par Louis XV s'avérèrent exacts, elle commit peu de maladresses et s'efforça de satisfaire ses deux patries.

_________________
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 14:06




Tu entends ça ?!! Le yéti de Monsieur n'a pas toujours été un repoussoir ! La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" 7914347
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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 14:07

Cosmo a écrit:Clotilde a en effet contribué à "civiliser" Mme Élisabeth , petite "sauvageonne"  :La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" 2028181902 qui refusait d'apprendre à lire et à écrire . Je l'avais lu dans la bio de Mme Élisabeth . Les deux sœurs s'aimaient beaucoup.

Je m'en souviens aussi .  Very Happy 
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Message par Invité Dim 09 Mar 2014, 14:07

La nature même de Madame de Marsan pouvait inquiéter : "dévote, fanatique et violente. Ses moindres affections sont des passions. Elle ne connait point les sentiments intermédiaires, tout est pour elle ou haine ou amour."

Elle a tout pour plaire , cette Rohan !  Shocked
C'est elle qui a rendu la fratrie complètement tarée.

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 14:12


Dominique Poulin a écrit:
Jeu 8 Jan 2009 - 18:05


A l'instar de Marie-Antoinette pour sa famille, la comtesse de Provence est appelée à servir les intérêts de la maison de Savoie. Ses parents encouragés par son brillant mariage, nourrissent l'espoir le marier leurs autres enfants avec des princes français afin de renforcer l'alliance franco-savoyarde. Or, Marie-Joséphine éprouve une vive affection pour Clotilde qui lui rappelle peut-être ses petites sœurs Marie-Thérèse, Marie-Anne et Marie-Caroline restées à Turin. Sans même que l'innocente "Gros Madame" ne se doute de l'audacieuse ambition de sa belle-sœur, Marie-Joséphine avise personnellement son père du parti à prendre de la princesse Clotilde, le 17 mars 1773 :

"Si Madame épouse mon frère, j'en aurais grande joie, car outre que je l'aime beaucoup, c'est une excellente acquisition à faire. On a raconté ici que vous l'aviez promis à feu M. le dauphin, mon beau-père, se cela est, je ne doute pas que le mariage se fasse.
Pour la figure, elle est très bien, une belle physionomie, de beaux cheveux blonds, de belles dents, des yeux bleus bien taillés et un teint admirable. Elle est fort grandie depuis que je suis ici et même un peu maigrie, de plus elle est parfaitement réglée. Voila ce qui en est.
Elle est élevée dans la plus grande perfection, une humeur égale et toujours gaie, avec beaucoup de douceur et d'esprit. Enfin, on peut dire que c'est une princesse accomplie, et heureux qui la possédera ! Pour moi, je l'aime à la folie... Pardonnez mon impertinence de me mêler ou je n'ai que faire, mais il me paraît que ce serait charmant et même plus commode, qu'il fut en même temps que l'autre, soit pour la dépense, soit pour tout. On avait dit, comme vous savez, que Madame était petite, je vous assure qu'il n'en est rien, au contraire, elle est plus grande que moi et elle est fort développée pour on âge, enfin elle a toute la raison possible.
..".

Entre-temps, le père de la comtesse de Provence est devenu le nouveau roi de Piémont-Sardaigne sous le nom de Victor-Amédée III depuis le 20 février. Il répondit à sa fille par une lettre assez franche mais circonspecte ! :
"Je vous parlerai, non comme à la comtesse de Provence, mais comme à Joséphine, c'est-à-dire entre nous deux... Je dis plus, l'éducation que Madame a eue à votre cour est surement celle qui conviendrait le mieux à la nôtre. Son excellent caractère et son visage doivent faire le bonheur d'un mari... , si je ne me trouvai pas dans le cas de vous avouer avec la même sincérité que son grand embonpoint m'épouvante pour plusieurs raisons. La crainte du défaut de succession serait le moindre puisque j'ai beaucoup d'enfants ; mais dans ce pays-ci toutes les Françaises qui y viennent y prennent de l'embonpoint, or vous n'ignorez pas la préférence marquée de Piémont, dès son enfance, a eu pour les femmes minces et élancées et son éloignement décidé pour les femmes grasses ! Il est vrai que cela peut changer, mais en attendant, puis-je consciencieusement risquer de rendre deux personnes malheureuses toute leur vie ?".

Bref, le roi de Sardaigne n'était pas opposé sur le principe du mariage de "Gros Madame" avec le prince de Piémont, mais reculait devant ses formes envahissantes ! Le projet était différé, et pour sa part Louis XV ne voulait rien hâter. Clotilde d'ailleurs n'avait pas encore treize ans accomplis, on pouvait encore attendre... A cette époque, en 1773, la petite princesse ne pouvait échapper aux rumeurs persistantes de son mariage qui gâtaient Versailles et Turin. Des membres de sa famille, la comtesse de Provence ou encore ses tantes, les filles de Louis XV, n'avaient pas manquer de lui glisser des paroles flatteuses sur les grands projets médités pour elle. Dès ce moment, on peut penser que Clotilde avait été psychologiquement préparée à un éventuel déracinement familial.




Jeu 8 Jan 2009 - 18:13


Je n'ai pas encore fini de taper la deuxième partie du chapitre I de "Gros Madame"... J'arrive au bout, mais j'ai encore bien des choses à dire, alors je vous dis à demain pour mettre tout cela en ligne. En attendant, je vais me reposer et quitter Versailles pour me délasser à Rambouillet... j'déconne !  Very Happy 


Et vous avez bien raison, cher Dominique !  Very Happy 
Il faut savoir se lâcher de temps en temps, pas de problème ! La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" N_roll_2

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Message par Mme de Sabran Dim 09 Mar 2014, 14:16

Cosmo a écrit:La nature même de Madame de Marsan pouvait inquiéter : "dévote, fanatique et violente. Ses moindres affections sont des passions. Elle ne connait point les sentiments intermédiaires, tout est pour elle ou haine ou amour."

Elle a tout pour plaire , cette Rohan !  Shocked
C'est elle qui a rendu la fratrie complètement tarée.

Brrrrr ... ça fait froid dans le dos !
C'est le genre de bigote à dégoûter Dieu lui-même ... La princesse Clotilde de France, dite Madame Clotilde, "Gros Madame" 88732212

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