Portrait biographique et moral de Louis XVI
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LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: La famille royale et les contemporains de Marie-Antoinette :: Sa famille française :: Louis XVI
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Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Voici un témoignage du duc des Cars
sur la timidité pathologique de Louis XVI :
A peu près dans ce temps, mon frère le marin fut compris dans un échange de prisonniers et revint en France. Son arrivée me fut apprise par le Roi, qui renouvela encore ses éloges sur la glorieuse défense de la frégate "la Prudente". Quinze jours environ s'écoulèrent entre son débarquement à Rochefort et son arrivée à Paris. Tous les jours le Roi me demandait s'il était de retour, tous les jours il reparlait de lui devant tout le monde de manière à croire qu'il le recevrait avec la plus grande distinction.
Enfin il arriva ; le comte des Cars et moi nous le menâmes au coucher du Roi.
Le bon Roi Louis XVI était d'une incroyable timidité avec les personnes qu'il ne voyait pas habituellement. Ayant placé notre marin entre nous deux, le Roi vint droit à nous et en face de lui; il se balança assez longtemps d'un pied sur l'autre, mais sans dire un mot; puis, se plaçant vis-à-vis de moi : " N'avez-vous pas fait campagne avec lui quand vous étiez M. le garde de la marine?— Oui, Sire.
— Vous a-t-il mis aux arrêts? — J'ai plusieurs fois raconté à Votre Majesté qu'il m'y avait mis une fois pendant dix minutes, et quel en avait été le motif "
Puis nouveau balancement en face du marin, suivi d'une longue conversation sur la chasse du jour avec mon frère aîné !
Telle fut la réception d'un homme au sujet duquel son souverain, qui le citait sans cesse comme un des meilleurs officiers de la marine, ne tarissait pas d'éloges ! Quel malheur pour les rois de ne savoir parler qu'avec les gens qu'ils voient tous les jours !
Certes j'aimais beaucoup Louis XVI, mais je ne lui ai jamais pardonné de n'avoir pas vaincu dans ce moment une timidité si désobligeante. Qu'on juge ce qu'elle produisit sur mon frère, au lieu de l'accueil que tant d'éloges précédents, tant d'impatience de son retour, nous avaient autorisés à lui annoncer !
Ce brave marin ne remit point les pieds à Versailles pendant tout le séjour qu'il fit à Paris, et lorsqu'il partit pour aller prendre le commandement du vaisseau le Glorieux, dans l'escadre du comte de Grasse, nous eûmes bien de la peine pour le déterminer à prendre congé du Roi.
Note de l'éditeur :
Il est plus difficile aux rois qu'à tous autres de refaire leurs caractères. Le vicomte des Cars aurait peut-être dû excuser le Roi qu'il devait savoir être bien disposé pour lui et l'eût sans doute mieux reçu une autre fois. C'était un monde renversé, le Roi était intimidé devant son sujet; ce n'était pas une disgrâce. Il n'en est pas moins vrai que cette disposition est bien fâcheuse.
sur la timidité pathologique de Louis XVI :
A peu près dans ce temps, mon frère le marin fut compris dans un échange de prisonniers et revint en France. Son arrivée me fut apprise par le Roi, qui renouvela encore ses éloges sur la glorieuse défense de la frégate "la Prudente". Quinze jours environ s'écoulèrent entre son débarquement à Rochefort et son arrivée à Paris. Tous les jours le Roi me demandait s'il était de retour, tous les jours il reparlait de lui devant tout le monde de manière à croire qu'il le recevrait avec la plus grande distinction.
Enfin il arriva ; le comte des Cars et moi nous le menâmes au coucher du Roi.
Le bon Roi Louis XVI était d'une incroyable timidité avec les personnes qu'il ne voyait pas habituellement. Ayant placé notre marin entre nous deux, le Roi vint droit à nous et en face de lui; il se balança assez longtemps d'un pied sur l'autre, mais sans dire un mot; puis, se plaçant vis-à-vis de moi : " N'avez-vous pas fait campagne avec lui quand vous étiez M. le garde de la marine?— Oui, Sire.
— Vous a-t-il mis aux arrêts? — J'ai plusieurs fois raconté à Votre Majesté qu'il m'y avait mis une fois pendant dix minutes, et quel en avait été le motif "
Puis nouveau balancement en face du marin, suivi d'une longue conversation sur la chasse du jour avec mon frère aîné !
Telle fut la réception d'un homme au sujet duquel son souverain, qui le citait sans cesse comme un des meilleurs officiers de la marine, ne tarissait pas d'éloges ! Quel malheur pour les rois de ne savoir parler qu'avec les gens qu'ils voient tous les jours !
Certes j'aimais beaucoup Louis XVI, mais je ne lui ai jamais pardonné de n'avoir pas vaincu dans ce moment une timidité si désobligeante. Qu'on juge ce qu'elle produisit sur mon frère, au lieu de l'accueil que tant d'éloges précédents, tant d'impatience de son retour, nous avaient autorisés à lui annoncer !
Ce brave marin ne remit point les pieds à Versailles pendant tout le séjour qu'il fit à Paris, et lorsqu'il partit pour aller prendre le commandement du vaisseau le Glorieux, dans l'escadre du comte de Grasse, nous eûmes bien de la peine pour le déterminer à prendre congé du Roi.
Note de l'éditeur :
Il est plus difficile aux rois qu'à tous autres de refaire leurs caractères. Le vicomte des Cars aurait peut-être dû excuser le Roi qu'il devait savoir être bien disposé pour lui et l'eût sans doute mieux reçu une autre fois. C'était un monde renversé, le Roi était intimidé devant son sujet; ce n'était pas une disgrâce. Il n'en est pas moins vrai que cette disposition est bien fâcheuse.
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Mme de Sabran- Messages : 55611
Date d'inscription : 21/12/2013
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Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Sournois, pour moi oui, principalement dans sa relation avec Marie-Antoinette en politique étrangère notamment.
Cette façon qu'il a de l'écouter, de faire semblant de céder, de paraître baisser la tête alors qu'en fait, il n'en a rien à faire de ce qu'elle lui dit. Pareil pour les affaires intérieures : il écoute, il baisse la tête mais il l'ignore au final, quitte à lui accorder une faveur minime ici ou là pour lui faire passer la pilule qu'elle n'aura rien d'autre. Il va même jusqu'à la moquerie quand, un jour qu'elle s'emporte devant lui et s'épuise en récriminations, il lui répond (à peu près, je n'ai plus la phrase exacte en tête) : "Vous voyez bien que j'ai tant de torts que je ne trouve rien à vous répondre" et il la laisse en plan. Et les ministres suivent et il en rit : "N'y allez pas, il n'y fait pas beau aujourd'hui" lance-t-il à Maurepas en le voyant se diriger vers les appartements de la reine qui l'avait convoqué. Au lieu de l'affronter ou d'être franc avec elle, il louvoie, il esquive, il la mène en bateau et sans états d'âme. Marie-Antoinette a eu de la chance : un Louis XIV ou même un Louis XV je pense ne se serait pas gêné pour la remettre à sa place une bonne fois pour toutes.
Par contre, pour "courageux", je suis bien plus dubitatif. Il a certes affronté ses derniers moments avec dignité et force d'âme mais depuis longtemps, il avait baissé les bras. Très vite, il s'est mis dans les habits du martyr, a accepté son sort et, ce faisant, il a fait échouer des tentatives ou efforts qui auraient pu sauver non seulement sa personne mais surtout, sa femme, ses enfants et sa sœur. C'est bien gentil de se comporter en martyr, en victime expiatoire mais c'est aussi dans son cas monstrueusement égoïste. Je suis prêt à mourir, je pars en paix avec moi-même et démerdez-vous... Certes, il est facile de juger quand on est pas concerné et rétrospectivement, mais pour moi il est responsable de la mort de sa femme, de son fils et de sa sœur. Donc "courageux", oui physiquement, il l'a montré à plusieurs reprises. Par contre, moralement, même s'il me déplaît d'utiliser le terme "lâche", c'est pourtant celui qui me vient à l'esprit. Encore une fois, facile de critiquer sans être concerné et à plusieurs siècles de distance mais là, il s'agissait quand-même de la vie de sa femme, de son fils, de sa sœur.
Enfin, je ne pense pas qu'il ne voulait pas d'une épouse autrichienne "à aucun prix". Ses parents sans doute mais lui... Il savait très bien que son mariage serait politique et qu'on ne lui demanderait pas son avis, c'était l'usage. Même s'il avait voulu et réussi à éviter Marie-Antoinette, il n'aurait pas eu son mot à dire sur celle qui l'aurait remplacée.
Cette façon qu'il a de l'écouter, de faire semblant de céder, de paraître baisser la tête alors qu'en fait, il n'en a rien à faire de ce qu'elle lui dit. Pareil pour les affaires intérieures : il écoute, il baisse la tête mais il l'ignore au final, quitte à lui accorder une faveur minime ici ou là pour lui faire passer la pilule qu'elle n'aura rien d'autre. Il va même jusqu'à la moquerie quand, un jour qu'elle s'emporte devant lui et s'épuise en récriminations, il lui répond (à peu près, je n'ai plus la phrase exacte en tête) : "Vous voyez bien que j'ai tant de torts que je ne trouve rien à vous répondre" et il la laisse en plan. Et les ministres suivent et il en rit : "N'y allez pas, il n'y fait pas beau aujourd'hui" lance-t-il à Maurepas en le voyant se diriger vers les appartements de la reine qui l'avait convoqué. Au lieu de l'affronter ou d'être franc avec elle, il louvoie, il esquive, il la mène en bateau et sans états d'âme. Marie-Antoinette a eu de la chance : un Louis XIV ou même un Louis XV je pense ne se serait pas gêné pour la remettre à sa place une bonne fois pour toutes.
Par contre, pour "courageux", je suis bien plus dubitatif. Il a certes affronté ses derniers moments avec dignité et force d'âme mais depuis longtemps, il avait baissé les bras. Très vite, il s'est mis dans les habits du martyr, a accepté son sort et, ce faisant, il a fait échouer des tentatives ou efforts qui auraient pu sauver non seulement sa personne mais surtout, sa femme, ses enfants et sa sœur. C'est bien gentil de se comporter en martyr, en victime expiatoire mais c'est aussi dans son cas monstrueusement égoïste. Je suis prêt à mourir, je pars en paix avec moi-même et démerdez-vous... Certes, il est facile de juger quand on est pas concerné et rétrospectivement, mais pour moi il est responsable de la mort de sa femme, de son fils et de sa sœur. Donc "courageux", oui physiquement, il l'a montré à plusieurs reprises. Par contre, moralement, même s'il me déplaît d'utiliser le terme "lâche", c'est pourtant celui qui me vient à l'esprit. Encore une fois, facile de critiquer sans être concerné et à plusieurs siècles de distance mais là, il s'agissait quand-même de la vie de sa femme, de son fils, de sa sœur.
Enfin, je ne pense pas qu'il ne voulait pas d'une épouse autrichienne "à aucun prix". Ses parents sans doute mais lui... Il savait très bien que son mariage serait politique et qu'on ne lui demanderait pas son avis, c'était l'usage. Même s'il avait voulu et réussi à éviter Marie-Antoinette, il n'aurait pas eu son mot à dire sur celle qui l'aurait remplacée.
Calonne- Messages : 1147
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Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Je suis entièrement d'accord avec toi, mon cher Calonne, sauf sur le chapitre de la sournoiserie. Je ne crois pas Louis XVI sournois mais bien plutôt bonasse, sans aspérités.
Louis XVI, duc de Berri, jeune, réputé impuissant. Les yeux bridés. L’air bête. Honnête. De bons sens. Droit. Formes grossières.
Louis XVI était un neutre. Ni bon ni méchant ; doux et froid, ayant tout l’aspect d’un impuissant, d’abord avec sa femme, puis avec la nation. Roi eunuque en présence d’une révolution à six mamelles.
( Notes de Victor Hugo, pour l'écriture de son 1793 )
Notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t4863-la-famille-royale-notes-de-victor-hugo?highlight=hugo
S'il ne remet pas Marie-Antoinette à sa place une bonne fois pour toutes, comme tu dis, n'est-ce pas par faiblesse, par peur de l'affronter plutôt que par sournoiserie ? Il y a, dans la sournoiserie, de la fausseté, de la bassesse , méchanceté, peut-être même cruauté. Louis XVI est fuyant, mou, indécis, insaisissable, mais pas " mauvais ". Il se balance d'un pied sur l'autre devant un simple sujet quand il ne trouve rien à dire, alors tu imagines, devant sa femme qui , elle, est dotée d'un sacré tempérament et n'hésite pas à le contrer vent debout !
L'attitude de Louis XVI vis à vis d'elle que tu décris, très bien d'ailleurs, correspond à la période du début de règne quand il se sent épaulé par un Maurepas, un Vergennes ... elle ne dure pas. Dès que surgissent les difficultés, Louis XVI perd pied et se cache derrière Marie-Antoinette. C'est elle l'interlocutrice d'acteurs de la Révolution et de la contre-révolution. Lui est tragiquement absent, incolore, inexistant. Elle l'écrit à Mercy ( qui le répète à Kaunitz ) : le personnage qui est au-dessus de moi n'est pas en état. Je m'interroge d'ailleurs énormément sur ce " n'est pas en état " . Cela signifie-t-il comme disent les uns qu'il est frappé d'imbécilité, ou comme disent les autres qu'il boit ?
Comme elle n'est qu'à la deuxième place, que c'est lui qui a le pouvoir décisionnaire et que, justement, il se refuse à prendre des décisions, hou la la c'est mal parti ! Quand tout est perdu parce qu'il n'a eu aucune réaction à Varennes, il croit se "sublimer" dans le rôle de martyr ... et sacrifie dans la foulée épouse, soeur et enfants . C'est terrifiant.
Résigné, battu d'avance, oui, mais sournois je ne le sens pas . Enfin bon, ce n'est que mon impression personnelle.
Louis XVI, duc de Berri, jeune, réputé impuissant. Les yeux bridés. L’air bête. Honnête. De bons sens. Droit. Formes grossières.
Louis XVI était un neutre. Ni bon ni méchant ; doux et froid, ayant tout l’aspect d’un impuissant, d’abord avec sa femme, puis avec la nation. Roi eunuque en présence d’une révolution à six mamelles.
( Notes de Victor Hugo, pour l'écriture de son 1793 )
Notre sujet :
https://marie-antoinette.forumactif.org/t4863-la-famille-royale-notes-de-victor-hugo?highlight=hugo
S'il ne remet pas Marie-Antoinette à sa place une bonne fois pour toutes, comme tu dis, n'est-ce pas par faiblesse, par peur de l'affronter plutôt que par sournoiserie ? Il y a, dans la sournoiserie, de la fausseté, de la bassesse , méchanceté, peut-être même cruauté. Louis XVI est fuyant, mou, indécis, insaisissable, mais pas " mauvais ". Il se balance d'un pied sur l'autre devant un simple sujet quand il ne trouve rien à dire, alors tu imagines, devant sa femme qui , elle, est dotée d'un sacré tempérament et n'hésite pas à le contrer vent debout !
L'attitude de Louis XVI vis à vis d'elle que tu décris, très bien d'ailleurs, correspond à la période du début de règne quand il se sent épaulé par un Maurepas, un Vergennes ... elle ne dure pas. Dès que surgissent les difficultés, Louis XVI perd pied et se cache derrière Marie-Antoinette. C'est elle l'interlocutrice d'acteurs de la Révolution et de la contre-révolution. Lui est tragiquement absent, incolore, inexistant. Elle l'écrit à Mercy ( qui le répète à Kaunitz ) : le personnage qui est au-dessus de moi n'est pas en état. Je m'interroge d'ailleurs énormément sur ce " n'est pas en état " . Cela signifie-t-il comme disent les uns qu'il est frappé d'imbécilité, ou comme disent les autres qu'il boit ?
Comme elle n'est qu'à la deuxième place, que c'est lui qui a le pouvoir décisionnaire et que, justement, il se refuse à prendre des décisions, hou la la c'est mal parti ! Quand tout est perdu parce qu'il n'a eu aucune réaction à Varennes, il croit se "sublimer" dans le rôle de martyr ... et sacrifie dans la foulée épouse, soeur et enfants . C'est terrifiant.
Résigné, battu d'avance, oui, mais sournois je ne le sens pas . Enfin bon, ce n'est que mon impression personnelle.
Dernière édition par Mme de Sabran le Sam 25 Mar 2023, 08:53, édité 2 fois
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Mme de Sabran- Messages : 55611
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Alors sournois est peut-être un peu fort. Mais...
Quand il "endort" Marie-Antoinette, qu'il l'écoute en se moquant de ce qu'elle lui dit, il en est conscient quand-même, il le fait en toute connaissance de cause et parfois, il en rit. Que ce comportement vienne de lui ou lui ait été inspiré par Maurepas ou un autre, il embobine Marie-Antoinette, il la mène en bateau, il la laisse s'exciter et, au final, se fout d'elle et de ce qu'elle dit ou pense. C'est là que pour moi, il est "sournois". Il n'y a qu'une fois où il la remet vraiment à sa place, quand il claque de la main sur la table et lui répond : "Cela suffit Madame, c'est à moi de faire la décision !"
Mais autrement, il louvoie et biaise avec tout le monde, avec elle, avec ses ministres qu'il laisse tomber les uns après les autres (sauf Vergennes). Il finit toujours par les lâcher. Il me donne l'impression d'être faux avec pas mal de monde.
Après, comme tu le soulignes, c'est peut-être plus de la faiblesse (lâcheté est un peu fort) que de la sournoiserie, c'est vrai.
Mais envers Marie-Antoinette, je relativiserais. Plutôt que la peur de l'affronter, je me demande si ce n'est pas plutôt autre chose. Il n'a pas envie, pas de temps à perdre ni d'efforts, elle le fatigue, elle le saoule et il s'en débarrasse d'une certaine manière. Il l'éloigne, il la laisse faire pour qu'elle lui foute la paix. Pour moi, il ne l'aime pas, il se méfie d'elle mais il est bien obligé de faire avec. Alors il l'éloigne, il l'évite, il cède. Mais pas forcément par faiblesse selon moi. Il n'a pas de temps à perdre avec elle et ne veut pas en perdre, il est pénétré de ses devoirs de roi, appliqué à sa tâche, travailleur et elle est la mouche qui tourne autour de lui, qui bourdonne, qui l'énerve et il l'éloigne, agacé. Et on a vu que quand elle va trop loin, il sait la remettre à sa place. La fameuse "importunité", c'est elle. On a toujours dit que Marie-Antoinette se pensait supérieure à son mari, idée entretenue par son entourage. Mais je pense que lui aussi, de son côté, se pensait largement supérieur à elle, plus mûr, plus intelligent et qu'il la tenait pour quantité négligeable.
Par contre, à la Révolution, il s'écroule psychologiquement et là, leurs rapports changent complètement, je suis d'accord.
Quand il "endort" Marie-Antoinette, qu'il l'écoute en se moquant de ce qu'elle lui dit, il en est conscient quand-même, il le fait en toute connaissance de cause et parfois, il en rit. Que ce comportement vienne de lui ou lui ait été inspiré par Maurepas ou un autre, il embobine Marie-Antoinette, il la mène en bateau, il la laisse s'exciter et, au final, se fout d'elle et de ce qu'elle dit ou pense. C'est là que pour moi, il est "sournois". Il n'y a qu'une fois où il la remet vraiment à sa place, quand il claque de la main sur la table et lui répond : "Cela suffit Madame, c'est à moi de faire la décision !"
Mais autrement, il louvoie et biaise avec tout le monde, avec elle, avec ses ministres qu'il laisse tomber les uns après les autres (sauf Vergennes). Il finit toujours par les lâcher. Il me donne l'impression d'être faux avec pas mal de monde.
Après, comme tu le soulignes, c'est peut-être plus de la faiblesse (lâcheté est un peu fort) que de la sournoiserie, c'est vrai.
Mais envers Marie-Antoinette, je relativiserais. Plutôt que la peur de l'affronter, je me demande si ce n'est pas plutôt autre chose. Il n'a pas envie, pas de temps à perdre ni d'efforts, elle le fatigue, elle le saoule et il s'en débarrasse d'une certaine manière. Il l'éloigne, il la laisse faire pour qu'elle lui foute la paix. Pour moi, il ne l'aime pas, il se méfie d'elle mais il est bien obligé de faire avec. Alors il l'éloigne, il l'évite, il cède. Mais pas forcément par faiblesse selon moi. Il n'a pas de temps à perdre avec elle et ne veut pas en perdre, il est pénétré de ses devoirs de roi, appliqué à sa tâche, travailleur et elle est la mouche qui tourne autour de lui, qui bourdonne, qui l'énerve et il l'éloigne, agacé. Et on a vu que quand elle va trop loin, il sait la remettre à sa place. La fameuse "importunité", c'est elle. On a toujours dit que Marie-Antoinette se pensait supérieure à son mari, idée entretenue par son entourage. Mais je pense que lui aussi, de son côté, se pensait largement supérieur à elle, plus mûr, plus intelligent et qu'il la tenait pour quantité négligeable.
Par contre, à la Révolution, il s'écroule psychologiquement et là, leurs rapports changent complètement, je suis d'accord.
Calonne- Messages : 1147
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Alors là, je ne te suis pas du tout. Je crois au contraire que dès qu'il voit à Compiègne ce joli petit lot qui charme et qui enjôle sans effort Louis XV et tout le monde, il se sent accablé par un complexe d'infériorité. C'est pourquoi il se montre si mutique et renfrogné. Avec ça, pas sotte : quand elle le taxe de " pauvre homme " ( lettre à Rosenberg ) , Marie-Antoinette a déjà fait le tour de la question .Calonne a écrit: On a toujours dit que Marie-Antoinette se pensait supérieure à son mari, idée entretenue par son entourage. Mais je pense que lui aussi, de son côté, se pensait largement supérieur à elle, plus mûr, plus intelligent et qu'il la tenait pour quantité négligeable.
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Mme de Sabran- Messages : 55611
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Possible bien sûr.
Mais plus le temps passe, moins je vois Louis XVI comme victime d'un "complexe d'infériorité". Timide, apathique, faible moralement, certes. Mais il avait une idée très haute, très forte, de son rang, de son devoir, due en partie à ses convictions religieuses. Il était le roi, seul représentant de son peuple et avec ça, travailleur, sérieux, cultivé.
Certes, il n'est pas brillant, spirituel, mondain et j'en passe. Mais il s'en fout. Pour lui, l'essentiel est ailleurs. Il est persuadé de sa charge, de ses devoirs parce qu'il est le roi, lieutenant de Dieu sur Terre et n'a de comptes à rendre qu'à Dieu. Et quelque part, je dirais que jusqu'à la Révolution, cela lui donne une force morale très forte et le conforte dans ses idées. Et cela l'aveugle complètement aussi. D'où son effondrement psychologique quand il voit tout ce qu'il croyait immuable s'effondrer.
Oui, il est peut-être jaloux de l'esprit de Provence et du charme d'Artois. Oui, il se sent peut-être terne, fadasse, devant sa femme, il se sent peut-être gros, moche et balourd devant Fersen. Mais pour moi, cela ne remet pas en question ses certitudes sur ce qu'il est, sur sa charge, son rôle. Il est et reste le Roi.
Son effondrement n'en sera que plus grand, plus violent.
Mais plus le temps passe, moins je vois Louis XVI comme victime d'un "complexe d'infériorité". Timide, apathique, faible moralement, certes. Mais il avait une idée très haute, très forte, de son rang, de son devoir, due en partie à ses convictions religieuses. Il était le roi, seul représentant de son peuple et avec ça, travailleur, sérieux, cultivé.
Certes, il n'est pas brillant, spirituel, mondain et j'en passe. Mais il s'en fout. Pour lui, l'essentiel est ailleurs. Il est persuadé de sa charge, de ses devoirs parce qu'il est le roi, lieutenant de Dieu sur Terre et n'a de comptes à rendre qu'à Dieu. Et quelque part, je dirais que jusqu'à la Révolution, cela lui donne une force morale très forte et le conforte dans ses idées. Et cela l'aveugle complètement aussi. D'où son effondrement psychologique quand il voit tout ce qu'il croyait immuable s'effondrer.
Oui, il est peut-être jaloux de l'esprit de Provence et du charme d'Artois. Oui, il se sent peut-être terne, fadasse, devant sa femme, il se sent peut-être gros, moche et balourd devant Fersen. Mais pour moi, cela ne remet pas en question ses certitudes sur ce qu'il est, sur sa charge, son rôle. Il est et reste le Roi.
Son effondrement n'en sera que plus grand, plus violent.
Calonne- Messages : 1147
Date d'inscription : 01/01/2014
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Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Oups, excuse-moi, je faisais mes petites ablutions du matin ...
Dans ce cas, fort de sa conviction d'être le ministre de Dieu sur terre, il aurait dû relever le front, bomber le torse . Comment expliquer son attitude presque constante de balourdise ? Il est comme empêtré de son rang. De plus calés que moi ont parlé d'aboulie, d'autisme ...Calonne a écrit:
Mais plus le temps passe, moins je vois Louis XVI comme victime d'un "complexe d'infériorité". Timide, apathique, faible moralement, certes. Mais il avait une idée très haute, très forte, de son rang, de son devoir, due en partie à ses convictions religieuses. Il était le roi, seul représentant de son peuple et avec ça, travailleur, sérieux, cultivé.
S'il est pleinement conscient de son rang et de ses prérogatives, comment pourrait-il s'en foutre ?Calonne a écrit:Certes, il n'est pas brillant, spirituel, mondain et j'en passe. Mais il s'en fout.
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Mme de Sabran- Messages : 55611
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Pour moi, les deux ne sont pas incompatibles. C'est un peu la différence entre le fond et la forme je dirais.
Il est hautement pénétré de ses devoirs de roi, il est sûr de son rang, de son état, "je suis le seul représentant de mon peuple" et pour lui, il n'y a pas d'autre système que la monarchie absolue et la société à ordres. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu'il y arrive... On peut être sûr de soi, de sa "mission" et se planter ou ne pas savoir s'y prendre. Et l'échec n'en est que plus grand.
" Il y a en lui comme un noyau d'acier, un bloc de certitudes... Sa foi religieuse très vive lui apporte une forme de sérénité... Il ne s'adapte pas, face aux obstacles, il rentre dans sa coquille et attend son heure, qui ne saurait manquer, à ce qu'il croit du moins"
(Simone Bertière)
Il n'est pas fait pour le brillant, le paraître et sans doute en souffre-t-il. Mais je pense que ça reste secondaire pour lui, que pour lui l'essentiel est ailleurs. Il n'a pas besoin de colifichets, de marques de prestige particulières ou de répandre les diamants pour se sentir roi. Il l'est. Et il le sait.
Il est hautement pénétré de ses devoirs de roi, il est sûr de son rang, de son état, "je suis le seul représentant de mon peuple" et pour lui, il n'y a pas d'autre système que la monarchie absolue et la société à ordres. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu'il y arrive... On peut être sûr de soi, de sa "mission" et se planter ou ne pas savoir s'y prendre. Et l'échec n'en est que plus grand.
" Il y a en lui comme un noyau d'acier, un bloc de certitudes... Sa foi religieuse très vive lui apporte une forme de sérénité... Il ne s'adapte pas, face aux obstacles, il rentre dans sa coquille et attend son heure, qui ne saurait manquer, à ce qu'il croit du moins"
(Simone Bertière)
Il n'est pas fait pour le brillant, le paraître et sans doute en souffre-t-il. Mais je pense que ça reste secondaire pour lui, que pour lui l'essentiel est ailleurs. Il n'a pas besoin de colifichets, de marques de prestige particulières ou de répandre les diamants pour se sentir roi. Il l'est. Et il le sait.
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J'ai oublié hier, je ne sais pas ce que sera demain, mais aujourd'hui je t'aime
Calonne- Messages : 1147
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Il l'est, de fait. Il le sait, c'est sûr. Mais se le sent-il ?!Calonne a écrit: Il n'a pas besoin de colifichets, de marques de prestige particulières ou de répandre les diamants pour se sentir roi. Il l'est. Et il le sait.
Là, je doute beaucoup.
Comme nous tous, Louis XVI a des jours avec et des jours sans. Mais nous ne sommes pas roi de France, tant mieux pour nous, lui si. Il en a la position , la charge, mais pas l'étoffe. Je crois que cet homme a été un grand malheureux devant l'Histoire .
Marie-Antoinette, avec beaucoup d'intuition et de finesse l'a très tôt compris. Bien avant la Révolution. Elle a tâché autant que faire se pouvait de se substituer à lui, déficient, quitte à prendre tous les coups, pour sauver une situation désespérée. Elle a "bénéficié" par les gens qui l'aimaient le plus ( Fersen, Polignac ) des plus mauvais conseils, et s'est complètement plantée .
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Mme de Sabran- Messages : 55611
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Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Son éducation et sa foi en sont, je pense, la grande cause : en gros, c'était soyez bon, pieux, vertueux et Dieu fera le reste. Il était persuadé qu'en agissant ainsi, tout irait pour le mieux dans le meilleur des royaumes. Aucun contact avec le réel, aucune nuance. Même quand la Révolution lui saute à la figure, il continue d'y croire, au moins jusqu'à Varennes. Comme l'a souligné Simone Bertière, aucune nuance, il ne plie pas, ne s'adapte pas, même devant la sanction du réel.
Quant à Marie-Antoinette, je dirais qu'un caractère volatil et inconstant, une éducation minimale et bâclée et la complaisance de son mari l'ont maintenu dans une même ignorance. Quand elle a réagi, avec un courage et une volonté qui l'honorent, c'était trop tard. Elle avait l'énergie, la volonté mais pas l'expérience ni l'intelligence et comme lui, elle était dans un autre monde.
Après, tout ça est facile à dire quant on est pas concerné et à plus de deux siècles de distance, je l'admets bien volontiers.
Qu'aurions-nous fait à leur place, c'est l'éternelle question.
Quant à Marie-Antoinette, je dirais qu'un caractère volatil et inconstant, une éducation minimale et bâclée et la complaisance de son mari l'ont maintenu dans une même ignorance. Quand elle a réagi, avec un courage et une volonté qui l'honorent, c'était trop tard. Elle avait l'énergie, la volonté mais pas l'expérience ni l'intelligence et comme lui, elle était dans un autre monde.
Après, tout ça est facile à dire quant on est pas concerné et à plus de deux siècles de distance, je l'admets bien volontiers.
Qu'aurions-nous fait à leur place, c'est l'éternelle question.
Calonne- Messages : 1147
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Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Là, je suis entièrement d'accord avec toi. La religion a inexorablement tiré Louis XVI vers le fond et Marie-Antoinette n'avait pas l'intelligence politique nécessaire pour faire face à une situation totalement inédite.
Nous dirions aujourd'hui qu'ils étaient hors sol .
Nous dirions aujourd'hui qu'ils étaient hors sol .
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55611
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Cette courte vidéo récemment mise en ligne par le Château de Versailles raconte, à l'attention des plus jeunes (qui ne connaîtraient pas l'histoire de ce roi et celle de la Révolution) :
Il était une fois Louis XVI
Qui est Louis XVI ? Cette vidéo de quelques minutes vous permet de découvrir ce roi discret, passionné de science et de géographie, dernier monarque ayant régné au château de Versailles.
Il était une fois Louis XVI
Qui est Louis XVI ? Cette vidéo de quelques minutes vous permet de découvrir ce roi discret, passionné de science et de géographie, dernier monarque ayant régné au château de Versailles.
Dernière édition par La nuit, la neige le Dim 10 Sep 2023, 19:06, édité 1 fois
La nuit, la neige- Messages : 18162
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Portrait biographique et moral de Louis XVI
Merci, cher la nuit, la neige, pour nos tout petits.La nuit, la neige a écrit: Cette courte vidéo récemment mise en ligne par le Château de Versailles raconte, à l'attention des plus jeunes (qui ne connaîtraient pas l'histoire de ce roi et celle de la Révolution) :
C'est succinct mais attrayant. Ce survol fugace présente l'essentiel des faits .
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Mme de Sabran- Messages : 55611
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
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