Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
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Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Dernière édition par Cosmo le Dim 13 Avr 2014, 11:34, édité 1 fois
cosmo- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Ce n'est peut-être pas elle, si l'on en croit le catalogue de l'exposition que Montreuil a tenue cette année en hommage à la Princesse...
Bien à vous.
Bien à vous.
Invité- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Baron de Batz a écrit:
Mer 24 Oct 2007
Il ressort de la bibliographie d'Elisabeth Reynaud que je lis en ce moment que Mme Elisabeth était quelqu'un d'assez original avec une certaine modernité dans sa façon de s'exprimer...l'utilisation d'abréviations, surnoms donnés à ses copines etc .
Elle était assez fougueuse de nature, surtout petite, et ressemble moins à la dévote qu'on essaie toujours de décrire. Elle avait une foi réelle, mais soumise à de graves périodes de doute, ce qui la rend d'autant plus crédible. Des fois elle se dit trop écoeurée par la situation pour pouvoir prier.
Quant à son désir d'agir, son activisme et son soutien pour la position d'Artois je nuancerai les propos que certains ont écrits ici. Ce qui la frustrait était la semblante inertie de son frère, elle ne comprenait pas le fait qu'il accède à tant de demandes des factieux.
Là dessus je ne lui donne pas entièrement tort. Du moment que le Roi accède à certaines demandes, certes motivé par son désir de ne pas faire couler une goutte du sang de ses "enfants" le peuple, la monarchie est condamnée. Louis XVI, avec sa douceur et sa forte croyance dans le rôle paternaliste et protecteur du souverain, n'était pas l'homme de cette situation-là.
Mme de Sabran- Messages : 55383
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Petit Normand a écrit:
Sam 2 Fév 2008 -
Je suis également en train de lire la biographie de Madame Elisabeth par Elisabeth Reynaud (et je vous trouve bien sévères, messieurs les critiques ).
Comme l'a dit le baron, cela révèle en effet une facette du personnage qui est habituellement occultée. Tandis qu'on nous présente souvent Elisabeth comme une femme austère -voire même peu avenante à en croire certains auteurs- on découvre ici une jeune femme pleine de vie, jamais en reste quand il s'agissait de se livrer à des jeux innocents et frivoles, et qui dans ce registre n'avait rien à envier à Marie-Antoinette. Et s'il est vrai qu'elle appelait Bombe la marquise de Bombelles, elle l'appelait parfois aussi Bombelinette, ce que je trouve vraiment très drôle.
Une anecdote rapportée par Mme Reynaud met d'ailleurs Elisabeth en scène avec la Reine. Elisabeth vient trouver Marie-Antoinette dans ses appartements, afin de lui demander une faveur pour sa favorite Mme de Raigecourt. A peine entrée, Elisabeth s'écrit :
"Promettez-moi de m'accorder ce que je vais vous demander, ma chère soeur.
- Quoi donc ? demande Marie-Antoinette, qui éclate de rire, je veux avant de répondre savoir de quoi il s'agit.
- Non, dites oui d'abord !"
Comme Marie-Antoinette continue de refuser, les deux jeunes femmes se livrent à une bataille de coussins, à laquelle prennent aussitôt part toutes les dames de compagnie de la Reine !
On reconnaît bien là notre sacrée Marie-Antoinette ! Mais ce qui est intéressant, c'est qu'on découvre une Madame Elisabeth en fait très semblable à sa belle-soeur, assez loin de l'image austère qu'on donne d'elle. Une autre image fausse souvent véhiculée est que Madame Elisabeth ne s'est vraiment rapprochée de Marie-Antoinette qu'à partir de l'installation aux Tuileries. Parfois, j'ai même lu que les deux femmes ne s'appréciaient que peu avant cette date. En réalité, il semble qu'elles aient toujours été les meilleures amies du monde, et ce plus particulièrement après le départ de Madame Clotilde, la grande soeur et confidente d'Elisabeth -un départ qui a d'ailleurs profondément traumatisé la petite princesse.
Il semblerait que Madame Elisabeth, tout comme Marie-Antoinette d'ailleurs, ait été écoeurée par les intrigues de Cour et assommée par l'Etiquette. Tout comme la Reine, elle avait tendance à fuir dans son jardin secret, mais plus encore que Marie-Antoinette. Et lorsqu'elle n'était pas avec ses amies, elle aimait plus que tout chevaucher pendant des heures, loin des hommes et de leurs mesquineries, leur préférant les promenades au grand air et la compagnie de ses chevaux qu'elle adorait. Elle avait donc un certain côté misanthrope, en plus de sa grande sensibilité et de ses amusements frivoles. Cette méfiance naturelle ne devait pas faciliter la quête du grand amour...mais je ne peux pas trop vous en dire plus pour l'instant.
Mme de Sabran- Messages : 55383
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
E D T a écrit:
Sam 21 Juin 2008 - 15:40invité a écrit:
Ce n'est pas étonnant .
C'est Robespierre qui a déploré je crois l'exécution de Madame Elisabeth, non?
Autant Marie-Antoinette était détestée par le peuple donc son exécution n'a pas dérangé une majorité, mais Elisabeth c'est différent...par exemple y a-t-il eu de grandes acclamations juste après le passage de la lame, comme ça a été le cas pour Louis XVI et la Reine?
Parlant de sa mort, comment l'ont accueillie les cours d'Europe, du moins sa famille - Artois, Provence, Mme Clotilde, ses belles-sœurs- sa mort?
Élisabeth était effacée à la cour de France et vivait pleinement sa vie à Montreuil, on s'imagine donc que l'on ne connaissait que peu cette princesse.
Le souverains étrangers ont probablement juste vu en sa mort une troisième mort injuste.
Sa famille l'a sûrement beaucoup plus regrettée, pour l'avoir connue, mais à part cela, son décès n'a peu sinon pas d'incidence sur la politique, pour tout dire cela ne rapportait rien aux révolutionnaires à l'exception qu'une autre figure royale avait disparue.
Les royalistes se servirent de sa mort comme propagande, ainsi un sentiment de culpabilité d'avoir tué cette femme se fit ressentir.
Mais qu'en était-il vraiment? A-t-il eu quelqu'un de l'extérieur qui a tenté de la sortir de sa prison? Y avait-il un jureur comme à l'exécution de la Reine?
Si quelqu'un de plus instruit sur ce sujet pouvait répondre, pour ma part je ne connais que peu de chose de la vie de Madame Élisabeth lors de la Révolution.
Mme de Sabran- Messages : 55383
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Monsieur de Castelnau a écrit:
28 octobre 2008
A propos de l'exécution de Madame Elisabeth, il faut savoir qu'elle avait été placée en dernier sur la liste pour être décapitée... et ainsi cruel délice révolutionnaire assister à la mort brutale des personnes de tous âges, de tous sexes et de toutes conditions l'accompagnant.
Les révolutionnaires acharnés souhaitaient, je crois, la voir craquer... Louis XVI et Marie Antoinette étaient morts avec dignité et avaient gâché le "spectacle" des ardents détracteurs de la famille Royale. Avec Madame Elisabeth ils comptaient sur son âge et le choc émotionnel de la "boucherie" de l'échafaud...
Dès la sortie des charrettes de la Conciergerie, la foule criait et vociférait à son habitude... mais lorsqu'elle vit la frêle jeune fille en blanc , calme, un fichu sur la tête (dernière coquetterie pour cacher l'horrible coupe des condamnés) poussant ses "camarades de charrette à rester dignes, dans la foi, calmes et sereins.... eh bien cette même foule fit silence...
En fait beaucoup de personnes ne pensaient pas que Madame Elisabeth était une menace en soi et sa condamnation a, je pense, marqué à sa manière une rupture révolutionnaire.
N'y avait-il pas la famille de Montmorin, dans cette même charrette ? sauf M. de Montmorin lui-même évidemment, puisqu'il avait été massacré déjà (à la manière du duc de Brissac). Je crois me souvenir que Calixte de Montmorin chantait pour accompagner ses compagons d'infortune qui gravissaient l'échafaud. La voix lui a manqué lorsque ce fut le tour de Mme de Montmorin.
Monsieur de Castelnau a écrit:
D'ailleurs son procès est un bel exemple de mascarade révolutionnaire à son apogée ... très certainement le procès de trop.
Ce fut la section du Panthéon français qui demanda officiellement son procès et sa mort... "il est temps que la terre de la liberté cesse de nourrir ses plus mortels ennemis"... en fait la terre de la liberté préférait s'arroser du sang de victimes innocentes...
Robespierre et le comité du salut public n'ont pas eu un rôle simple... 'une part satisfaire les exigences de la nation... et d'autre part trouver les moyens de discréditer la "sainte du temple" comme dit Monique de Huertas. Rien ne peut être prouvé et articulé contre elle, d'autant que personne n'y croirait... Madame Elisabeth n'est pas Marie Antoinette aux yeux des français.
On parle de dépenses, de "mauvaise vie", de ses diamants qu'elle fit passer à l'étranger, des mauvais traitements sur Louis XVII, de son art elle aussi de dissimulation... bref on cherche avant tout à la supprimer.
On l'extirpe du Temple, on la conduit à la Conciergerie où à son arrivée personne ne lui dit ce qu'il est advenu de la Reine... elle pensait être mise en cellule avec elle, mais devant la gêne et le silence elle pensera que Marie Antoinette en tant que reine déchue est mise au secret...
Par contre, on lui fait un premier interrogatoire proche de celui de la Reine... elle réfute tout et surtout le vol des diamants de la Couronne intervenu alors qu'elle était en détention ... et c'est Chauveau Lagarde qui est nommé pour conseil pour Madame Elisabeth....
Petite parenthèse : mais quand viendra le jour où un cinéaste audacieux offrira cette vie sur des écrans... tous les ingrédients y sont..
Elle occupera le cachot de feu son traître de cousin ce qui fera dire à Richard, le gardien tout puissant, que "voilà où ont reposé le vice et la vertu"...
Chauveau Lagarde ne put s'entretenir avec elle... on lui avait menti sur les dates... et fut surpris de retrouver le jour même Madame Elisabeth dans la salle du tribunal positionnée de façon à ce que l'on ne voit qu'elle... d'ailleurs sur 25 prévenus, l'attention du procès ne porte que sur elle.
Une fille de France c'est rare dans ce temple de justice déraisonnable où les accusés ne peuvent même plus se défendre....
Ils iront même jusqu'à dire que Marie Antoinette avait déposé certains faits et qu'en les niant elle ment... doublement surprenant car depuis quand les révolutionnaires prennent ils pour parole d'évangile ce que dit Marie Antoinette ? et surtout Elisabeth est intelligente, ce que ne soupçonnaient pas les révolutionnaires... ainsi elle ne tombe pas dans leur piège et répond un splendide "tous ces faits qui me sont imputés sont autant d'indignités dont je suis bien loin de m'être souillée".
Chauveau Lagarde , au regard de cette mascarade de procès aura une superbe plaidoirie... "Au lieu d'une défense je n'ai plus à présenter pour la citoyenne Elisabeth que son apologie"... ce à quoi Dumas rétorque "Vous corrompez la morale publique" ... on le voit juger et condamner Madame Elisabeth était très dangereux car il n'y avait rien à articuler contre elle.
Quoiqu'il en soit, elle est condamnée avec ses 25 compagnons de procès. Elle impressionne par son calme, sa douceur... elle ne s'effondre pas et donne l'exemple donc déjà le peuple voit que cette exécution ne sera pas routinière...
On lui refuse le secours d'un prêtre et elle apprend enfin par une accusée le destin de Marie Antoinette... cela fait beaucoup pour cette jeune femme mais chose étonnante cela renforce sa conviction et sa force de caractère .
Elle encourage ses compagnons à la mort, à cette dure fatalité, elle rassure, elle écoute, elle conseille ... en un mot elle est le pilier psychologique de cette fournée pour l'échafaud.
Elle sauve madame de Serilly en la forçant à déclarer sa grossesse...
C'est son médecin et ami, Dassy, qui en la voyant dans la charrette parlera d'ange qu'on mène à l'échafaud... pour tout dire personne ne savait qu'elle allait mourir et je le répète un silence s'imposait lorsque la charrette passait. Les gens qui crient, en reconnaissant la condamnée se taisent car ils sont consternés.
Moelle déclare que "le peuple l'admire et ne l'insulte point"...
Pour répondre à votre question Madame de Sabran, il y avait Calixte de Montmorin (22 ans), madame de Montmorin sa mère, Charles de Lémonie, Charlotte de Lémonie, La Marquise de l'Aigle, Madame de Lamoignon, Georges Folappe, Marcel Letelliet....
Madame Elisabeth récitera à haute voix le De Profundis , Calixte de Montmorin criant "Vive le Roi" à chaque cris de Vive la république... suivi en cela par de jeunes co condamnés domestiques. En tout cas chaque condamné s'inclinera devant la princesse qui donne le baiser de paix à chacune des dames gravissant l'échafaud...
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Monsieur de Castelnau a écrit:
Pour finir je ne reviendrais pas sur l'exécution elle même, la dignité de la princesse et surtout la fameuse odeur de roses signe de martyr et de sainteté...
J'insisterai sur le silence de la foule durant sa montée des marches et sa mort... même pas de tambours le temps semble s'être arrêté...Le capitaine Macé devant donner le signal exécution tombe paralysé et en transe... et le peuple quittera la place en silence...
Cette mort édifiante et mystérieuse pousse à ordonner aux journaux de ne donner aucun détails.
Robespierre accusera Collot d'Herbois d'avoir voulu la mort de Madame Elisabeth, même Billaud Varennes y sera pour quelque chose.
Autant le procès fut expéditif et les réactions ne se firent sentir qu'à l'intérieur du pays... la consternation!
Autant l'Europe ne l'apprit que près d'une semaine après... Provence et Artois sont accablés même s'ils se doutaient de l'issue dramatique pour la vie de leur exemplaire sœur. Pour Provence "c'est de tous leurs crimes le plus inexpiable". Clotilde elle aussi est accablée de douleur et de chagrin... Les émigrés sont sous le choc de la nouvelle et l'Europe coalisée compte une victime de plus dans la famille des Bourbons. Mais pas une victime comme les autres car là il prouve la folie qui règne en France.
Et Napoléon de conclure à son habitude:
"Et celle là pourquoi l'avoir conduite à l'échafaud? Louis XVI ne le méritait pas, mais elle!"
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Avant qu'elle ne meurt ... Siou plaît ... 0033_r10 :
Baptême et enfance
Née le 3 mai 1764 au Château de Versailles, dernière enfant du dauphin Louis-Ferdinand et de son épouse Marie-Josèphe de Saxe, elle est baptisée le jour de sa naissance par l'archevêque de Reims Charles Antoine de La Roche-Aymon dans la chapelle royale du château de Versailles, en présence de son grand-père le roi Louis XV de France - qui pleure encore la mort de sa favorite, la marquise de Pompadour décédée deux semaines plus tôt - de sa grand-mère la reine Marie Lesczynska et de la famille royale. Jean-François Allart, curé de l'église Notre-Dame de Versailles,paroisse où est situé la château rédige l'acte de baptême qui occupe une demi-page du registre et fait signer ses "très hauts et très illustres" paroissiens. Ironie du sort, l'acte suivant mentionne le baptême d'une pauvre enfant naturelle.
Le parrain de la princesse est son oncle par alliance Philippe Ier, infant d'Espagne, duc de Parme, Plaisance et Guastalla, représenté par le futur Louis XVI Louis Auguste de France, et sa marraine est sa grand-tante Élisabeth Farnèse, princesse de Parme, reine douairière d'Espagne, qui lui donne son prénom et est représentée par Marie-Adélaïde de France, fille de Louis XV1.
Une orpheline royale
Son père, le dauphin, mourut de tuberculose l'année suivante et la dauphine le suivit deux ans plus tard dans la tombe. Tous deux n'avaient que 36 ans lors de leur décès. Le couple delphinal laissait cinq enfants survivants dont l'aîné, le futur Louis XVI, avait 13 ans2.
L'arrière grand-père de Madame Élisabeth, Stanislas Lesczynski, roi de Pologne détrôné placé sur le trône de Lorraine par son gendre Français mourut en février 1766. La Lorraine perdit alors son indépendance et devint une province Française.
La reine Marie Lesczynska, grand-mère de Madame Élisabeth, mourut en juin 1768. Le roi qui venait de faire acheter la Corse à la république de Gênes pour affermir la présence française en Méditerranée, trouva également une nouvelle et somptueuse favorite, la comtesse du Barry.
Élisabeth de France fit donc ses premiers pas au sein d'une famille divisée et en deuil. Sa première compagne de jeu fut sa sœur de six ans son aînée Clotilde de France, que son embonpoint avait fait méchamment surnommée par la cour "gros-Madame", comportement indigne et indélicat de l'élite française qui se voulait disciple de Rousseau et de Voltaire (qui vivaient leurs dernières années) envers une enfant de 9 ans.
Baptême et enfance
Née le 3 mai 1764 au Château de Versailles, dernière enfant du dauphin Louis-Ferdinand et de son épouse Marie-Josèphe de Saxe, elle est baptisée le jour de sa naissance par l'archevêque de Reims Charles Antoine de La Roche-Aymon dans la chapelle royale du château de Versailles, en présence de son grand-père le roi Louis XV de France - qui pleure encore la mort de sa favorite, la marquise de Pompadour décédée deux semaines plus tôt - de sa grand-mère la reine Marie Lesczynska et de la famille royale. Jean-François Allart, curé de l'église Notre-Dame de Versailles,paroisse où est situé la château rédige l'acte de baptême qui occupe une demi-page du registre et fait signer ses "très hauts et très illustres" paroissiens. Ironie du sort, l'acte suivant mentionne le baptême d'une pauvre enfant naturelle.
Le parrain de la princesse est son oncle par alliance Philippe Ier, infant d'Espagne, duc de Parme, Plaisance et Guastalla, représenté par le futur Louis XVI Louis Auguste de France, et sa marraine est sa grand-tante Élisabeth Farnèse, princesse de Parme, reine douairière d'Espagne, qui lui donne son prénom et est représentée par Marie-Adélaïde de France, fille de Louis XV1.
Une orpheline royale
Son père, le dauphin, mourut de tuberculose l'année suivante et la dauphine le suivit deux ans plus tard dans la tombe. Tous deux n'avaient que 36 ans lors de leur décès. Le couple delphinal laissait cinq enfants survivants dont l'aîné, le futur Louis XVI, avait 13 ans2.
L'arrière grand-père de Madame Élisabeth, Stanislas Lesczynski, roi de Pologne détrôné placé sur le trône de Lorraine par son gendre Français mourut en février 1766. La Lorraine perdit alors son indépendance et devint une province Française.
La reine Marie Lesczynska, grand-mère de Madame Élisabeth, mourut en juin 1768. Le roi qui venait de faire acheter la Corse à la république de Gênes pour affermir la présence française en Méditerranée, trouva également une nouvelle et somptueuse favorite, la comtesse du Barry.
Élisabeth de France fit donc ses premiers pas au sein d'une famille divisée et en deuil. Sa première compagne de jeu fut sa sœur de six ans son aînée Clotilde de France, que son embonpoint avait fait méchamment surnommée par la cour "gros-Madame", comportement indigne et indélicat de l'élite française qui se voulait disciple de Rousseau et de Voltaire (qui vivaient leurs dernières années) envers une enfant de 9 ans.
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Comtesse Diane- Messages : 7397
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Une éducation princière
Confiée avec sa sœur Madame Clotilde aux soins de la comtesse de Marsan, Madame Élisabeth reçut une excellente éducation. Elle se passionnait pour les sciences.
Madame Élisabeth avec son carlin, peinte vers 1770 par Drouais à l'époque du mariage de son frère le dauphin et de l'archduchesse Marie-Antoinette d'Autriche
Sous l’égide de son maître de mathématiques Antoine-René Mauduit, elle mettra au point une table préparatoire à l’étude des logarithmes dont la précision fut telle qu'elle sera utilisée par les astronomes et les navigateurs.
Pour l’art, en particulier le dessin et alors qu’elle était encore enfant, sa gouvernante, la comtesse de Marsan, l’emmenait avec sa sœur aînée, Madame Clotilde, aux salons de peinture officiels. Par la suite, la princesse montra de réelles dispositions pour le dessin et le musée de Versailles conserve quelques-unes de ses œuvres2.
La princesse apprit à jouer de la harpe mais il faut avouer qu'elle chantait extrêmement faux.
Connue pour sa grande piété, Madame Élisabeth avait subi l’influence de ses Mesdames tantes, filles de Louis XV, qui lui avaient inculqué une grande dévotion, sans altérer en elle une certaine liberté d'esprit, y compris à l'occasion dans le domaine de la religion, ce dont témoigne sa correspondance.
Elle a six ans lorsque son frère Louis-Auguste devenu dauphin épouse l'archiduchesse d'Autriche Marie-Antoinette, jeune fille pleine de charme mais superficielle.
La même année sa tante "Madame Louise" entre au Carmel de Saint-Denis afin de prier pour le salut de son père. Proche de sa jeune nièce sur laquelle elle aura une certaine influence, elle y mourra en 1787.
Le 10 mai 1774, Louis XV meurt et Louis-Auguste à l'âge de 19 ans, devient roi sous le nom de Louis XVI.
L'éducation de "Madame Élisabeth" fut alors confiée à la baronne de Mackau (1723-1801) qui sut conquérir l'affection de la princesse et dont la fille Marie-Angélique de Mackau devint l'amie la plus proche.
La sœur du roi
Quelques mois plus tard, tandis que la princesse assiste au sacre de son frère, le jeune Louis XVI, en la cathédrale de Reims, sa sœur "Madame Clotilde" est mariée au prince de Piémont. La jeune Élisabeth, à peine âgée de 11 ans, voit avec peine sa sœur dont elle était très proche, quitter Versailles pour Turin.
L'âge du mariage ou d'un établissement conforme à son rang approche également pour Élisabeth.
Pressentie en 1777 pour épouser le frère de Marie-Antoinette, l’empereur Joseph II (deux fois veuf mais sans enfant et de 23 ans son aîné), elle obtint de Louis XVI de pouvoir rester à Versailles.
Faute de prince à lui faire épouser, le roi lui proposa la charge de coadjutrice de la prestigieuse abbaye de Remiremont en succession de leur tante Christine de Saxe mais elle se désintéressera de devenir abbesse, préférant les joies de la Cour et la compagnie de son médecin et ami de cœur, le docteur Dacy avec qui elle aurait vécu un amour platonique2.
En 1779, la princesse qui a 15 ans obtient l'autorisation d'avoir sa propre maison et des revenus en propre. Avec l'accord du roi, elle nomme immédiatement Angélique de Mackau première dame d'honneur. Consciente de son rang et de ses devoirs, pieuse, charitable et dépourvue de coquetterie tout en ayant un fort caractère, Madame Élisabeth s'entoure de personnes réputées pour leur moralité. Jamais les nombreux médisants ne pourront la prendre pour cible.
Confiée avec sa sœur Madame Clotilde aux soins de la comtesse de Marsan, Madame Élisabeth reçut une excellente éducation. Elle se passionnait pour les sciences.
Madame Élisabeth avec son carlin, peinte vers 1770 par Drouais à l'époque du mariage de son frère le dauphin et de l'archduchesse Marie-Antoinette d'Autriche
Sous l’égide de son maître de mathématiques Antoine-René Mauduit, elle mettra au point une table préparatoire à l’étude des logarithmes dont la précision fut telle qu'elle sera utilisée par les astronomes et les navigateurs.
Pour l’art, en particulier le dessin et alors qu’elle était encore enfant, sa gouvernante, la comtesse de Marsan, l’emmenait avec sa sœur aînée, Madame Clotilde, aux salons de peinture officiels. Par la suite, la princesse montra de réelles dispositions pour le dessin et le musée de Versailles conserve quelques-unes de ses œuvres2.
La princesse apprit à jouer de la harpe mais il faut avouer qu'elle chantait extrêmement faux.
Connue pour sa grande piété, Madame Élisabeth avait subi l’influence de ses Mesdames tantes, filles de Louis XV, qui lui avaient inculqué une grande dévotion, sans altérer en elle une certaine liberté d'esprit, y compris à l'occasion dans le domaine de la religion, ce dont témoigne sa correspondance.
Elle a six ans lorsque son frère Louis-Auguste devenu dauphin épouse l'archiduchesse d'Autriche Marie-Antoinette, jeune fille pleine de charme mais superficielle.
La même année sa tante "Madame Louise" entre au Carmel de Saint-Denis afin de prier pour le salut de son père. Proche de sa jeune nièce sur laquelle elle aura une certaine influence, elle y mourra en 1787.
Le 10 mai 1774, Louis XV meurt et Louis-Auguste à l'âge de 19 ans, devient roi sous le nom de Louis XVI.
L'éducation de "Madame Élisabeth" fut alors confiée à la baronne de Mackau (1723-1801) qui sut conquérir l'affection de la princesse et dont la fille Marie-Angélique de Mackau devint l'amie la plus proche.
La sœur du roi
Quelques mois plus tard, tandis que la princesse assiste au sacre de son frère, le jeune Louis XVI, en la cathédrale de Reims, sa sœur "Madame Clotilde" est mariée au prince de Piémont. La jeune Élisabeth, à peine âgée de 11 ans, voit avec peine sa sœur dont elle était très proche, quitter Versailles pour Turin.
L'âge du mariage ou d'un établissement conforme à son rang approche également pour Élisabeth.
Pressentie en 1777 pour épouser le frère de Marie-Antoinette, l’empereur Joseph II (deux fois veuf mais sans enfant et de 23 ans son aîné), elle obtint de Louis XVI de pouvoir rester à Versailles.
Faute de prince à lui faire épouser, le roi lui proposa la charge de coadjutrice de la prestigieuse abbaye de Remiremont en succession de leur tante Christine de Saxe mais elle se désintéressera de devenir abbesse, préférant les joies de la Cour et la compagnie de son médecin et ami de cœur, le docteur Dacy avec qui elle aurait vécu un amour platonique2.
En 1779, la princesse qui a 15 ans obtient l'autorisation d'avoir sa propre maison et des revenus en propre. Avec l'accord du roi, elle nomme immédiatement Angélique de Mackau première dame d'honneur. Consciente de son rang et de ses devoirs, pieuse, charitable et dépourvue de coquetterie tout en ayant un fort caractère, Madame Élisabeth s'entoure de personnes réputées pour leur moralité. Jamais les nombreux médisants ne pourront la prendre pour cible.
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Comtesse Diane- Messages : 7397
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Comtesse Diane a écrit:Avant qu'elle ne meurt ... Siou plaît ... 0033_r10 :
Saperlipopette ! C'est ben vrai ça !!! : Merci, Comtesse !!! :n,,;::::!!!:
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55383
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Comtesse Diane a écrit:
Faute de prince à lui faire épouser, le roi lui proposa la charge de coadjutrice de la prestigieuse abbaye de Remiremont en succession de leur tante Christine de Saxe mais elle se désintéressera de devenir abbesse, préférant les joies de la Cour et la compagnie de son médecin et ami de cœur, le docteur Dacy avec qui elle aurait vécu un amour platonique .
Du reste Majesté disait-il joliment :
Majesté a écrit:
Le mardi 23 Oct 2007
Tu penses là à la passion amoureuse que j'avais suggérée sur Passion Histoire et qui l'aurait poussée à ne pas se marier, pour y rester fidèle?
En effet, Madame Elisabeth n'avait pas l'orgueil de sa Tante Adélaïde pour refuser le mariage afin de demeurer Fille de France. Aussi, en plus de son attachement à sa famille, ai-je pensé qu'il pouvait y avoir une passion secrète en ce coeur si discret...
Elisabeth était une grande admiratrice de l'oeuvre de Jean Racine, qui est pleine de passion ; cette jeune fille n'a donc pu être insensible à l'Amour... boudoi29
Bien à vous.
Mme de Sabran- Messages : 55383
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Montreuil
Domaine de Montreuil (Versailles, Yvelines), état actuel
En 1783, le roi lui offrit le domaine de Montreuil, acheté aux Rohan-Guéméné et situé dans le village de Montreuil non loin du château de Versailles.
La princesse consciente de son rang et voulant se protéger des médisants s'engagea à n'y jamais passer la nuit avant sa majorité (25 ans à l'époque) et ne s'entoura que de Dames de la plus haute moralité.
De 1784 à la Révolution, d'importants travaux de reconstruction et d'aménagement furent entrepris par Jean-Jacques Huvé, inspecteur des Bâtiments du Roi, et attaché au département des Dehors du château de Versailles (Grande Écurie, Petite Écurie, Grand Commun, Hôtels du Grand Maître de France, du Chancelier, Louveterie, Chenil, etc.). Les bâtiments furent reconstruits dans le goût néo-classique et les jardins dans le goût anglo-chinois alors en vogue (grotte factice, cours d'eau, cascade, etc.). Sous la direction d'Huvé, le château fut meublé avec des pièces commandées à l'ébéniste Jean-Baptiste-Claude Sené, exposées aujourd'hui au Musée du Louvre et au Musée Nissim-de-Camondo.
Madame Élisabeth, consciente de la médiocrité du monde curial et des divisions de sa famille, ne sera jamais proche de sa belle-sœur la reine Marie-Antoinette, élevée au sein d'une famille unie à Vienne, que son manque de retenue et l'inconsciente naïveté rendra impopulaire.
A Montreuil, la princesse fit venir de Suisse la promise de son vacher qui se morfondait et fit célébrer leur mariage en l'Église saint-Symphorien. C'est l'origine de la fameuse comptine "Pauvre Jacques".
Elle sut montrer sa compassion envers les pauvres, faisant donner du lait de ses vaches aux enfants.
Favorable à la Variolisation qui permettait de se prémunir contre la petite vérole, maladie contagiause mortelle et fréquente qui touchait indifféremment toutes les couches de la population laissant au mieux d'horribles cicatrice sur le visage, elle fit appeler son médecin. Celui-ci fut surpris de la trouver entourée de ses dames mais aussi des paysans de ses terres qui purent ainsi bénéficier gracieusement des progrès de la médecine.
Elle se priva également pendant quatre ans des étrennes que le roi lui donnait afin qu'une de ses dames pour accompagner, Mademoiselle de Causans, puisse constituer la dot nécessaire à son marige avec le marquis de Raigecourt, gentilhomme Lorrain dont elle était éprise.
Domaine de Montreuil (Versailles, Yvelines), état actuel
En 1783, le roi lui offrit le domaine de Montreuil, acheté aux Rohan-Guéméné et situé dans le village de Montreuil non loin du château de Versailles.
La princesse consciente de son rang et voulant se protéger des médisants s'engagea à n'y jamais passer la nuit avant sa majorité (25 ans à l'époque) et ne s'entoura que de Dames de la plus haute moralité.
De 1784 à la Révolution, d'importants travaux de reconstruction et d'aménagement furent entrepris par Jean-Jacques Huvé, inspecteur des Bâtiments du Roi, et attaché au département des Dehors du château de Versailles (Grande Écurie, Petite Écurie, Grand Commun, Hôtels du Grand Maître de France, du Chancelier, Louveterie, Chenil, etc.). Les bâtiments furent reconstruits dans le goût néo-classique et les jardins dans le goût anglo-chinois alors en vogue (grotte factice, cours d'eau, cascade, etc.). Sous la direction d'Huvé, le château fut meublé avec des pièces commandées à l'ébéniste Jean-Baptiste-Claude Sené, exposées aujourd'hui au Musée du Louvre et au Musée Nissim-de-Camondo.
Madame Élisabeth, consciente de la médiocrité du monde curial et des divisions de sa famille, ne sera jamais proche de sa belle-sœur la reine Marie-Antoinette, élevée au sein d'une famille unie à Vienne, que son manque de retenue et l'inconsciente naïveté rendra impopulaire.
A Montreuil, la princesse fit venir de Suisse la promise de son vacher qui se morfondait et fit célébrer leur mariage en l'Église saint-Symphorien. C'est l'origine de la fameuse comptine "Pauvre Jacques".
Elle sut montrer sa compassion envers les pauvres, faisant donner du lait de ses vaches aux enfants.
Favorable à la Variolisation qui permettait de se prémunir contre la petite vérole, maladie contagiause mortelle et fréquente qui touchait indifféremment toutes les couches de la population laissant au mieux d'horribles cicatrice sur le visage, elle fit appeler son médecin. Celui-ci fut surpris de la trouver entourée de ses dames mais aussi des paysans de ses terres qui purent ainsi bénéficier gracieusement des progrès de la médecine.
Elle se priva également pendant quatre ans des étrennes que le roi lui donnait afin qu'une de ses dames pour accompagner, Mademoiselle de Causans, puisse constituer la dot nécessaire à son marige avec le marquis de Raigecourt, gentilhomme Lorrain dont elle était éprise.
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Auprès du Roi
Le 4 juin 1789, le dauphin, s'éteint à l'âge de 8 ans au Château de Meudon. Si la famille royale est consternée, le peuple et les députés des États généraux font preuve d'une indifférence indécente. Le roi ayant demandé à reculer la date de réception des députés pour se remettre de son deuil, se voit opposer une fin de non-recevoir. "Madame Élisabeth" se rapproche de la reine, sa belle-sœur, pour soutenir le roi.
Madame Élisabeth peinte par Mme Vigée-Lebrun en 1790
Le 6 octobre 1789, la famille royale est ramenée de force par le peuple à Paris.
Alors qu’elle aurait pu se retirer avec ses tantes au château de Bellevue près de Meudon, elle choisit de partager le sort de son frère. Elle disposa désormais d’un appartement aux Tuileries à Paris où elle est officieusement condamnée à une liberté d'action réduite.
Malgré les apparences, la princesse était une femme de caractère, mûre et réfléchie, qui tenait parfois tête à son frère ou à sa belle-sœur Marie-Antoinette. Leurs affrontements portaient sur des choix de stratégie politique, la princesse adoptant une position ultra, sans la moindre concession aux partisans d’une monarchie constitutionnelle.
Dès 1790, elle soutenait le principe d’une alliance des émigrés avec les puissances étrangères dont elle attendait le salut. Par l’intermédiaire du comte de Virieu, entre autres personnes, elle correspondait régulièrement avec le comte d’Artois, son frère, émigré à Turin puis à Coblence dont elle partageait les idées.
Une de ses lettres au comte d’Artois fut découverte un jour sur un officier qui la transportait, et la missive fut remise pour examen à l’Assemblée Nationale. La princesse Élisabeth disait du roi qu’il se laissait mener par ses ministres vendus à l’assemblée, et qu’il n’y avait rien à espérer sans aide extérieure. Elle recommandait au comte d’Artois d’agir par lui-même, l’engageant à mettre les autres souverains d’Europe dans leurs intérêts, car, disait-elle, Louis XVI est si faible qu’il signerait sa propre condamnation si on l’exigeait de lui.
Elle s’opposa également à la constitution civile du clergé et à toute mesure qui diminuait les prérogatives royales ou celles de l'Eglise.
Refus d'émigrer
Le 4 juin 1789, le dauphin, s'éteint à l'âge de 8 ans au Château de Meudon. Si la famille royale est consternée, le peuple et les députés des États généraux font preuve d'une indifférence indécente. Le roi ayant demandé à reculer la date de réception des députés pour se remettre de son deuil, se voit opposer une fin de non-recevoir. "Madame Élisabeth" se rapproche de la reine, sa belle-sœur, pour soutenir le roi.
Madame Élisabeth peinte par Mme Vigée-Lebrun en 1790
Le 6 octobre 1789, la famille royale est ramenée de force par le peuple à Paris.
Alors qu’elle aurait pu se retirer avec ses tantes au château de Bellevue près de Meudon, elle choisit de partager le sort de son frère. Elle disposa désormais d’un appartement aux Tuileries à Paris où elle est officieusement condamnée à une liberté d'action réduite.
Malgré les apparences, la princesse était une femme de caractère, mûre et réfléchie, qui tenait parfois tête à son frère ou à sa belle-sœur Marie-Antoinette. Leurs affrontements portaient sur des choix de stratégie politique, la princesse adoptant une position ultra, sans la moindre concession aux partisans d’une monarchie constitutionnelle.
Dès 1790, elle soutenait le principe d’une alliance des émigrés avec les puissances étrangères dont elle attendait le salut. Par l’intermédiaire du comte de Virieu, entre autres personnes, elle correspondait régulièrement avec le comte d’Artois, son frère, émigré à Turin puis à Coblence dont elle partageait les idées.
Une de ses lettres au comte d’Artois fut découverte un jour sur un officier qui la transportait, et la missive fut remise pour examen à l’Assemblée Nationale. La princesse Élisabeth disait du roi qu’il se laissait mener par ses ministres vendus à l’assemblée, et qu’il n’y avait rien à espérer sans aide extérieure. Elle recommandait au comte d’Artois d’agir par lui-même, l’engageant à mettre les autres souverains d’Europe dans leurs intérêts, car, disait-elle, Louis XVI est si faible qu’il signerait sa propre condamnation si on l’exigeait de lui.
Elle s’opposa également à la constitution civile du clergé et à toute mesure qui diminuait les prérogatives royales ou celles de l'Eglise.
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Il se pourrait bien que cette jolie dame ne soit pas Madame Elisabeth ainsi qu'on nous le présentait lors de l'exposition de Montreuil... On n'est pas certain non plus qu'il est d'Elisabeth Vigée-Lebrun...
Il a même été attribué à Pierre de Nolhac, alors conservateur du Château de Versailles.
Cependant vu son ancienneté et les copies dont il a été l'objet, on admet aujourd'hui qu'il doit dater des années 1780-1785.
Bien à vous.
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Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Je recommande vivement la biographie sur Madame Elisabeth, de Anne Bernet. Un livre extrêmement bien fait et passionnant.
Longtemps "sous la coupe" de Louis XVI et Marie-Antoinette (la reine constituera la quasi-totalité de son entourage), Anne Bernet montre comment cette princesse a progressivement pris son indépendance.
En 1775, Mme Elisabeth est très jeune et totalement soumise à son frère Louis XVI et à sa belle-sœur Marie-Antoinette, qui décident de tout à sa place. Marie-Antoinette fera par exemple nommer le joli Coigny à la charge de premier écuyer de Mme Elisabeth alors qu'il était d'usage, dans le cas des jeunes princesses vierges et célibataires, de nommer des vieux grigous à ce type de charge. La reine placera également Diane de Polignac auprès de Mme Elisabeth etc...
Louis XVI se désintéresse quelque peu de sa soeur, de sorte qu'en pratique, Marie-Antoinette a tendance à régenter directement sa belle-soeur... non sans heurts.
Au fur et à mesure que le temps passe, les frictions se multiplient en effet entre Marie-Antoinette et Madame Elisabeth.
Le premier incident sérieux entre les deux femmes trouve semble-t-il, son origine dans une cabale de cour, orchestrée par la marquise de Bombelles et Diane de Polignac (ennemies d’ordinaire mais alliées pour la circonstance) à l’encontre de la vicomtesse d’Aumale, amie intime de Madame Elisabeth.
Jalouses de la vicomtesse d’Aumale, qui était entrée dans les bonnes grâces de la reine et s’était fait nommer gouvernante de Madame Royale, le "cher Ange" (Angélique de Bombelles) et Diane de Polignac réussirent à persuader la reine, que la vicomtesse d’Aumale montait sa fille (Madame Royale) et sa belle-sœur (Elisabeth) contre elle. Lorsque la reine fît une chute grave à cheval et faillit se tuer, Madame Royale à qui l’abbé de Vermond avait expliqué que "sa maman aurait pu mourir" avait en effet répondu que "cela lui eût été égal". Madame Elisabeth et Marie-Antoinette avaient en outre eu une querelle au mois de juillet 1782, Marie-Antoinette reprochant à Madame Elisabeth d’être arrivée en retard à un rendez-vous qu’elle lui avait donné.
C’est alors qu’une rumeur, selon laquelle Madame Elisabeth entendait fuguer et se réfugier chez les carmélites de Saint-Denis, se répandît. Rumeur dont Anne Bernet suppose qu’elle fût entretenue par la marquise de Bombelles et Mme de Polignac ("Qui pouvait, mieux que Mme de Polignac, sa dame d’honneur et la marquise de Bombelles, sa meilleure amie, connaître les escapades d’Elisabeth à Saint-Cyr ou Saint-Denis ? Qui, plus qu’Angélique, se trouvait assez avant dans ses confidences pour savoir quelque chose de ses troubles de conscience, ses vagues aspirations à la vie conventuelle ?... ").
"On" (Diane+Mackau) persuada alors la reine qu’il existait une cabale, orchestrée par Madame Louise et le parti dévot, visant à faire entrer Madame Elisabeth au carmel et l’éloigner du couple royal, la vicomtesse d’Aumale, amie intime de Madame Elisabeth, jouant le rôle d’ "agent de liaison" entre Madame Elisabeth et Madame Louise. Comme chacun sait, la reine détestait le parti dévot et Mesdames Tantes, qui s’étaient opposés à l’alliance autrichienne, et avaient répandu des calomnies infâmes sur son compte.
Madame d’Aumale, qualifiée de "suppôt" du parti dévot, fût donc contrainte, par la reine, de démissionner et reçut même l’ordre de quitter la cour et Versailles. La disgrâce. En fait, Madame Elisabeth n’avait jamais prévu de s’enfuir et l’on s’était servi d’elle, pour régler des problèmes qui ne la concernaient pas. "Les Polignac et les Mackau, d’ordinaire à couteaux tirés, s’étaient entendus sur le dos d’une rivale commune, Rosalie d’Aumale, soupçonnée de saper leurs faveurs respectives." (A. Bernet).
Advint alors un événement auquel personne ne s’était attendu : Madame Elisabeth se rebella et alla chez son frère afin de remettre les choses au point et défendre son amie. Comme à son habitude, Louis XVI changea d’avis et lui permit de revoir son amie. Il accorda même une pension à Mme d’Aumale. Ayant remporté une victoire, Madame Elisabeth eut ensuite une dispute mémorable avec Marie-Antoinette. "La reine, apprenant le revirement de son mari, entra dans une violente colère. Très remontée, elle entreprit sa belle-sœur sur ce grand "sentiment" pour la vicomtesse d’Aumale, lui dit qu’elle "ne le comprenait pas" - ce qui signifiait qu’elle le désapprouvait -, conclut qu’un pareil "attachement ne pouvait être que l’effet de la séduction d’une femme adroite." (…) Au lieu de se soumettre, Madame Elisabeth répliqua, ce qui laissa Marie-Antoinette pantoise." Le ton monta si bien entre elles, que Marie-Antoinette finît par "interdire" à Elisabeth de revoir Mme d’Aumale. Elisabeth se rua alors chez son frère et lui demanda "la permission de poursuivre avec Mme d’Aumale une liaison aussi satisfaisante pour son esprit et pour son cœur." Louis XVI n’osa pas dire non, et "Elisabeth prit soin de se rendre régulièrement et ostensiblement à Paris voir la vicomtesse, avant d’obtenir la permission de la recevoir à Versailles, là encore très publiquement." (A. Bernet).
Suite à cet incident, la reine cherchera à éloigner Elisabeth de la cour... en lui proposant la charge d'abbesse de Rimeront :
"La reine, après s'être tant agitée afin de retenir Elisabeth à Versailles, encourageait son mari à satisfaire "les voeux" de la princesse. Il y avait deux causes à ce revirement : la première était que sa belle-soeur l'agaçait et qu'elle n'eût pas été fâchée de l'éloigner; la seconde qu'un des plus prestigieux bénéfices de Lorraine se trouvait à pourvoir et que la reine prenait intérêt à la question. Anne Charlotte de Lorraine, abbesse de Remiremont, plus noble chapitre féminin d'Europe déclinait ; sa succession était affaire de semaines. Or Remiront jouissait d'un statut unique. (...) Les chanoinesses avaient officieusement demandé à Louis XVI s'il accepterait de nommer Madame Elisabeth à l'abbatiat. Marie-Antoinette jugeait ce projet excellent, le soutenait, escomptait que sa belle-soeur y souscrirait. N'osant toutefois lui en parler, la reine fit sonder ses intentions par Mme de Bombelles. Cette tentative ne fut pas positive mais, dans son désir de complaire à la reine, Angélique voila les réticences de son amie, les présentant plutôt comme des scrupules que comme un refus. Le 18 mars 1786, Louis XVI convoqua sa soeur, convaincu de son assentiment, et se heurta à un non ferme et définitif: Elisabeth ne voulait pas de cet abbatiat. (...) Marie-Antoinette, piquée au vif de ce refus, voulait la faire changer d'avis; quant aux Bombelles, après avoir laissé croire qu'Elisabeth approuvait le projet, ils avaient inventé pour se justifier une intervention de la vicomtesse d'Aumale, toujours leur bête noire, soutenant qu'elle était allée mettre des scrupules en tête à la princesse et l'avait détournée par jalousie d'un abbatiat qu'elle était prête à accepter. Allégation habile puisqu'elle ravivait les calomnies contre Rosalie d'Aumale et contribuait à écarter tout danger de la voir rentrer en grâce. Marie-Antoinette revint à la charge. (...)". (A. Bernet, Madame Elisabeth, soeur de Louis XVI).
In fine, Elisabeth réussit à obtenir un dernier entretien, seule à seul, avec Louis XVI, hors la présence de Marie-Antoinette. Entretien au cours duquel Elisabeth obtint que Mlle de Condé fut nommée, à sa place, comme abbesse de Remiront. Anne Bernet écrit que "Louis XVI voyait peu sa cadette, ne s'en préoccupait guère, se laissait influencer, dans ses jugements sur elle par l'opinion de la reine, ou d'autres, négatifs (...)".
Marie-Antoinette et Mme Elisabeth continueront à avoir des frictions sous la Révolution, en particulier aux Tuileries, lorsque Mme Elisabeth entretient une correspondance secrète avec Artois, correspondance que Marie-Antoinette désapprouve (la reine craint plus que tout, l'intervention des émigrés français).
Pour conclure, le livre d'Anne Bernet laisse le sentiment que Mme Elisabeth était un personnage assez complexe. A la fois passionnée de sciences (notamment de mathématiques) et bigote jusqu'à la moëlle. Capable de l'antisémitisme le plus abject, comme du dévouement le plus total envers son frère.
A. Bernet croit penser que la religiosité de Mme Elisabeth trouverait son origine dans la mort de Mme Sophie (fille de Louis XV), qui l'aurait beaucoup affectée. Elle en aurait conçu une sorte d'obsession de donner un sens à sa vie, à travers Dieu et la religion. Mme Elisabeth refusera toujours, même après Varennes, d'émigrer, alors que l'Assemblée ne se serait sans doute pas opposée à son départ (à l'instar de ce qui s'était passé par Mesdames Tantes, autorisées à quitter le territoire). Mais finalement, ce qui l'a fait tenir, ce n'est pas tant l'amour qu'elle pouvait éprouver pour son frère et sa belle-soeur que son fanatisme : sa volonté de défendre, coûte que coûte, le trône et l'autel, la monarchie absolue et les curés. Mme Elisabeth est une psycho-rigide, engoncée dans des principes moribonds. Il est pathétique de la voir se refuser à son seul amour, le docteur Dassy, au motif que c'est un roturier. Sans le sacrifice du grand soir, Mme Elisabeth serait passée aussi inaperçue que Madame Sophie (fille de Louis XV), pâle princesse à la vie inutile, dont la mort laissa toute la Cour complètement indifférente. Telle était la hantise de Mme Elisabeth : mourir comme Madame Sophie, dans l'indifférence générale.
Longtemps "sous la coupe" de Louis XVI et Marie-Antoinette (la reine constituera la quasi-totalité de son entourage), Anne Bernet montre comment cette princesse a progressivement pris son indépendance.
En 1775, Mme Elisabeth est très jeune et totalement soumise à son frère Louis XVI et à sa belle-sœur Marie-Antoinette, qui décident de tout à sa place. Marie-Antoinette fera par exemple nommer le joli Coigny à la charge de premier écuyer de Mme Elisabeth alors qu'il était d'usage, dans le cas des jeunes princesses vierges et célibataires, de nommer des vieux grigous à ce type de charge. La reine placera également Diane de Polignac auprès de Mme Elisabeth etc...
Louis XVI se désintéresse quelque peu de sa soeur, de sorte qu'en pratique, Marie-Antoinette a tendance à régenter directement sa belle-soeur... non sans heurts.
Au fur et à mesure que le temps passe, les frictions se multiplient en effet entre Marie-Antoinette et Madame Elisabeth.
Le premier incident sérieux entre les deux femmes trouve semble-t-il, son origine dans une cabale de cour, orchestrée par la marquise de Bombelles et Diane de Polignac (ennemies d’ordinaire mais alliées pour la circonstance) à l’encontre de la vicomtesse d’Aumale, amie intime de Madame Elisabeth.
Jalouses de la vicomtesse d’Aumale, qui était entrée dans les bonnes grâces de la reine et s’était fait nommer gouvernante de Madame Royale, le "cher Ange" (Angélique de Bombelles) et Diane de Polignac réussirent à persuader la reine, que la vicomtesse d’Aumale montait sa fille (Madame Royale) et sa belle-sœur (Elisabeth) contre elle. Lorsque la reine fît une chute grave à cheval et faillit se tuer, Madame Royale à qui l’abbé de Vermond avait expliqué que "sa maman aurait pu mourir" avait en effet répondu que "cela lui eût été égal". Madame Elisabeth et Marie-Antoinette avaient en outre eu une querelle au mois de juillet 1782, Marie-Antoinette reprochant à Madame Elisabeth d’être arrivée en retard à un rendez-vous qu’elle lui avait donné.
C’est alors qu’une rumeur, selon laquelle Madame Elisabeth entendait fuguer et se réfugier chez les carmélites de Saint-Denis, se répandît. Rumeur dont Anne Bernet suppose qu’elle fût entretenue par la marquise de Bombelles et Mme de Polignac ("Qui pouvait, mieux que Mme de Polignac, sa dame d’honneur et la marquise de Bombelles, sa meilleure amie, connaître les escapades d’Elisabeth à Saint-Cyr ou Saint-Denis ? Qui, plus qu’Angélique, se trouvait assez avant dans ses confidences pour savoir quelque chose de ses troubles de conscience, ses vagues aspirations à la vie conventuelle ?... ").
"On" (Diane+Mackau) persuada alors la reine qu’il existait une cabale, orchestrée par Madame Louise et le parti dévot, visant à faire entrer Madame Elisabeth au carmel et l’éloigner du couple royal, la vicomtesse d’Aumale, amie intime de Madame Elisabeth, jouant le rôle d’ "agent de liaison" entre Madame Elisabeth et Madame Louise. Comme chacun sait, la reine détestait le parti dévot et Mesdames Tantes, qui s’étaient opposés à l’alliance autrichienne, et avaient répandu des calomnies infâmes sur son compte.
Madame d’Aumale, qualifiée de "suppôt" du parti dévot, fût donc contrainte, par la reine, de démissionner et reçut même l’ordre de quitter la cour et Versailles. La disgrâce. En fait, Madame Elisabeth n’avait jamais prévu de s’enfuir et l’on s’était servi d’elle, pour régler des problèmes qui ne la concernaient pas. "Les Polignac et les Mackau, d’ordinaire à couteaux tirés, s’étaient entendus sur le dos d’une rivale commune, Rosalie d’Aumale, soupçonnée de saper leurs faveurs respectives." (A. Bernet).
Advint alors un événement auquel personne ne s’était attendu : Madame Elisabeth se rebella et alla chez son frère afin de remettre les choses au point et défendre son amie. Comme à son habitude, Louis XVI changea d’avis et lui permit de revoir son amie. Il accorda même une pension à Mme d’Aumale. Ayant remporté une victoire, Madame Elisabeth eut ensuite une dispute mémorable avec Marie-Antoinette. "La reine, apprenant le revirement de son mari, entra dans une violente colère. Très remontée, elle entreprit sa belle-sœur sur ce grand "sentiment" pour la vicomtesse d’Aumale, lui dit qu’elle "ne le comprenait pas" - ce qui signifiait qu’elle le désapprouvait -, conclut qu’un pareil "attachement ne pouvait être que l’effet de la séduction d’une femme adroite." (…) Au lieu de se soumettre, Madame Elisabeth répliqua, ce qui laissa Marie-Antoinette pantoise." Le ton monta si bien entre elles, que Marie-Antoinette finît par "interdire" à Elisabeth de revoir Mme d’Aumale. Elisabeth se rua alors chez son frère et lui demanda "la permission de poursuivre avec Mme d’Aumale une liaison aussi satisfaisante pour son esprit et pour son cœur." Louis XVI n’osa pas dire non, et "Elisabeth prit soin de se rendre régulièrement et ostensiblement à Paris voir la vicomtesse, avant d’obtenir la permission de la recevoir à Versailles, là encore très publiquement." (A. Bernet).
Suite à cet incident, la reine cherchera à éloigner Elisabeth de la cour... en lui proposant la charge d'abbesse de Rimeront :
"La reine, après s'être tant agitée afin de retenir Elisabeth à Versailles, encourageait son mari à satisfaire "les voeux" de la princesse. Il y avait deux causes à ce revirement : la première était que sa belle-soeur l'agaçait et qu'elle n'eût pas été fâchée de l'éloigner; la seconde qu'un des plus prestigieux bénéfices de Lorraine se trouvait à pourvoir et que la reine prenait intérêt à la question. Anne Charlotte de Lorraine, abbesse de Remiremont, plus noble chapitre féminin d'Europe déclinait ; sa succession était affaire de semaines. Or Remiront jouissait d'un statut unique. (...) Les chanoinesses avaient officieusement demandé à Louis XVI s'il accepterait de nommer Madame Elisabeth à l'abbatiat. Marie-Antoinette jugeait ce projet excellent, le soutenait, escomptait que sa belle-soeur y souscrirait. N'osant toutefois lui en parler, la reine fit sonder ses intentions par Mme de Bombelles. Cette tentative ne fut pas positive mais, dans son désir de complaire à la reine, Angélique voila les réticences de son amie, les présentant plutôt comme des scrupules que comme un refus. Le 18 mars 1786, Louis XVI convoqua sa soeur, convaincu de son assentiment, et se heurta à un non ferme et définitif: Elisabeth ne voulait pas de cet abbatiat. (...) Marie-Antoinette, piquée au vif de ce refus, voulait la faire changer d'avis; quant aux Bombelles, après avoir laissé croire qu'Elisabeth approuvait le projet, ils avaient inventé pour se justifier une intervention de la vicomtesse d'Aumale, toujours leur bête noire, soutenant qu'elle était allée mettre des scrupules en tête à la princesse et l'avait détournée par jalousie d'un abbatiat qu'elle était prête à accepter. Allégation habile puisqu'elle ravivait les calomnies contre Rosalie d'Aumale et contribuait à écarter tout danger de la voir rentrer en grâce. Marie-Antoinette revint à la charge. (...)". (A. Bernet, Madame Elisabeth, soeur de Louis XVI).
In fine, Elisabeth réussit à obtenir un dernier entretien, seule à seul, avec Louis XVI, hors la présence de Marie-Antoinette. Entretien au cours duquel Elisabeth obtint que Mlle de Condé fut nommée, à sa place, comme abbesse de Remiront. Anne Bernet écrit que "Louis XVI voyait peu sa cadette, ne s'en préoccupait guère, se laissait influencer, dans ses jugements sur elle par l'opinion de la reine, ou d'autres, négatifs (...)".
Marie-Antoinette et Mme Elisabeth continueront à avoir des frictions sous la Révolution, en particulier aux Tuileries, lorsque Mme Elisabeth entretient une correspondance secrète avec Artois, correspondance que Marie-Antoinette désapprouve (la reine craint plus que tout, l'intervention des émigrés français).
Pour conclure, le livre d'Anne Bernet laisse le sentiment que Mme Elisabeth était un personnage assez complexe. A la fois passionnée de sciences (notamment de mathématiques) et bigote jusqu'à la moëlle. Capable de l'antisémitisme le plus abject, comme du dévouement le plus total envers son frère.
A. Bernet croit penser que la religiosité de Mme Elisabeth trouverait son origine dans la mort de Mme Sophie (fille de Louis XV), qui l'aurait beaucoup affectée. Elle en aurait conçu une sorte d'obsession de donner un sens à sa vie, à travers Dieu et la religion. Mme Elisabeth refusera toujours, même après Varennes, d'émigrer, alors que l'Assemblée ne se serait sans doute pas opposée à son départ (à l'instar de ce qui s'était passé par Mesdames Tantes, autorisées à quitter le territoire). Mais finalement, ce qui l'a fait tenir, ce n'est pas tant l'amour qu'elle pouvait éprouver pour son frère et sa belle-soeur que son fanatisme : sa volonté de défendre, coûte que coûte, le trône et l'autel, la monarchie absolue et les curés. Mme Elisabeth est une psycho-rigide, engoncée dans des principes moribonds. Il est pathétique de la voir se refuser à son seul amour, le docteur Dassy, au motif que c'est un roturier. Sans le sacrifice du grand soir, Mme Elisabeth serait passée aussi inaperçue que Madame Sophie (fille de Louis XV), pâle princesse à la vie inutile, dont la mort laissa toute la Cour complètement indifférente. Telle était la hantise de Mme Elisabeth : mourir comme Madame Sophie, dans l'indifférence générale.
Invité- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Merci Cosmo pour ce résumé complet, complexe même, et passionnant de l'analyse de la religiosité de Madame Elisabeth. Il semble qu'Anne Bernet fait ici une analyse qu'on n'avait jamais faite auparavant pour expliquer la bigoterie de la Princesse...
Il semble cependant que Madame Elisabeth n'ait pas gagné beaucoup de galons dans ton estime...
Bien à vous.
Il semble cependant que Madame Elisabeth n'ait pas gagné beaucoup de galons dans ton estime...
Bien à vous.
Invité- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Merci, cher Cosmo, pour toutes ces informations! Savez-vous que Joseph II avait pour quelques temps le projet de marier la jeune Elisabeth? Mais elle était trop jeune et il abandonna cette idée.
Je trouve aussi les lettres de Madame Elisabeth très intéressantes. Elle avait beaucoup d'esprit quand elle n'était pas pieuse.
C'était la petite oubliée, le jouet de ses alentours, mais elle est devenue sa propre femme et elle avait de caractère. Dans la position où elle se trouvait, c'est une réussite.
Je trouve aussi les lettres de Madame Elisabeth très intéressantes. Elle avait beaucoup d'esprit quand elle n'était pas pieuse.
C'était la petite oubliée, le jouet de ses alentours, mais elle est devenue sa propre femme et elle avait de caractère. Dans la position où elle se trouvait, c'est une réussite.
Invité- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Majesté a écrit:Merci Cosmo pour ce résumé complet, complexe même, et passionnant de l'analyse de la religiosité de Madame Elisabeth. Il semble qu'Anne Bernet fait ici une analyse qu'on n'avait jamais faite auparavant pour expliquer la bigoterie de la Princesse...
Il semble cependant que Madame Elisabeth n'ait pas gagné beaucoup de galons dans ton estime...
Bien à vous.
De rien, mon cher Majesté.
Anne Bernet prend la défense de son personnage, mais je n'ai pas été pleinement convaincu.
C'est que le caractère austère de la princesse, sa bigoterie, son conservatisme me déplaisent énormément.
Elle a eu un parcours complexe. Au départ, c'est une petite "sauvageonne" presque, qui ne sait ni lire ni écrire, et fort agitée. Gros Madame la prend sous son aile et l'aide à s'en sortir, à s'éduquer. Elle se passionnera ensuite de sciences, à l'instar de son frère Louis XVI d'ailleurs.
A la mort de Madame Sophie (fille de Louis XV), elle s'enferme dans une sorte de mélancolie... cette mort lui rappelait peut-être celle de ses parents? Toujours est-il qu'à ce moment-là, elle verse encore plus dans la religion. A tel point d'ailleurs, que le roi et la reine croiront sans problème la rumeur selon laquelle elle aurait le projet de fuguer pour s'enfermer chez les carmélites. En vérité, Mme Elisabeth est fascinée par la vie conventuelle certes, mais elle se garde bien de passer le pas... et elle refusera catégoriquement le poste d'abbesse de Remiront, que Marie-Antoinette souhaite lui donner. Elle est très religieuse certes, mais elle veut rester avec les laïcs, à la cour auprès de son frère.
Elle ne veut pas être remisée de côté, elle cherche à être utile, à donner un sens à sa vie.
Invité- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
evelynfarr a écrit: Savez-vous que Joseph II avait pour quelques temps le projet de marier la jeune Elisabeth? Mais elle était trop jeune et il abandonna cette idée.
Oui. Il avait été envisagé, en 1775, de marier Madame Elisabeth avec l'héritier du trône portugais, afin de renverser l'alliance du Portugal avec l'Angleterre. Les Bragance n'avaient cependant pas donné suite, car ils tenaient dur comme fer à leur alliance anglaise. C'est dans ces conditions qu'un mariage avec Joseph II fût ensuite envisagé... du côté français. Versailles rêvait semble-t-il d'une telle union... mais pas les Autrichiens. :
Selon Anne Bernet, Marie-Thérèse et Joseph II laissèrent courir cette rumeur d'un mariage avec Elisabeth, afin de fournir une "couverture crédible" au voyage de Joseph II en France en 1777. Le vrai but du voyage de Joseph II était de "confesser" sa soeur et son beau-frère sur les difficultés conjugales du couple royal, et de parler d'affaires diplomatiques susceptibles de déboucher sur une conflagration européenne : la question de la Pologne, de la Prusse, de la Bavière, du conflit sur le point d'éclater entre la France et l'Angleterre, sous couvert de révolution américaine.
A l'automne 1776, Mme de Mackau écrit à Marc de Bombelles : "Nous attendons incessamment l'empereur ici. Reste à savoir quelles seront les suites de cette visite auguste. Le public veut que le mariage de Madame Elisabeth en soit le résultat mais les gens qui croient être dans la bouteille à l'encre assurent qu'il n'en sera rien et alors, son séjour ici ne peut faire qu'un mauvais effet pour cette aimable princesse dont on dira qu'il n'a pas voulu après l'avoir vue ..."
Pour sa part, Bachaumont note dans ses Mémoires secrets : "On regarde comme très vague le motif donné de voir Madame Elisabeth. On présume qu'il (l'empereur) est plus curieux de connaître de près notre jeune monarque et de le juger par lui-même, pour savoir comment se conduire à l'occasion. Cette conjecture se fortifie par la tournée que cette Majesté doit faire dans les ports et les villes principales du royaume."
Econduite par l'héritier du trône portugais, puis par Joseph II, Madame Elisabeth dira ensuite à la princesse Dorothée de Wurtemberg, épouse du tsarévitch Paul : "Je ne puis épouser que le fils d'un roi et le fils d'un roi doit régner sur les Etats de son père (...) Je ne serais plus française et je ne veux pas cesser de l'être. Mieux vaut rester ici, au pied du trône de mon frère, que monter sur un autre."
Mieux valait une telle réponse que souligner qu'il ne s'était pas trouvé de fils de roi pour demander sa main.
Invité- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Tu as donc quand même gagné en empathie pour Madame Elisabeth alors.
Je trouve touchant ce portrait qu'Anne Bernet a su faire : une Princesse à qui tout est offert qui cherche à se défiler de cette facilité innée pour devenir quelqu'un.
On croirait lire Beaumarchais dans cet itinéraire : est-ce être que de naître en ayant tout?
Bien à vous.
Je trouve touchant ce portrait qu'Anne Bernet a su faire : une Princesse à qui tout est offert qui cherche à se défiler de cette facilité innée pour devenir quelqu'un.
On croirait lire Beaumarchais dans cet itinéraire : est-ce être que de naître en ayant tout?
Bien à vous.
Invité- Invité
Re: Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
Majesté a écrit:Tu as donc quand même gagné en empathie pour Madame Elisabeth alors.
... pas vraiment !
Majesté a écrit:
Je trouve touchant ce portrait qu'Anne Bernet a su faire : une Princesse à qui tout est offert qui cherche à se défiler de cette facilité innée pour devenir quelqu'un.
On croirait lire Beaumarchais dans cet itinéraire : est-ce être que de naître en ayant tout?
Disons en effet qu'elle goûte assez peu les futilités, la superficialité de la vie à la cour, des courtisans. Elle cherche à se rendre utile auprès de son frère... mais elle reste quand même très attachée au système d'Ancien Régime, qui est profondément inégalitaire. Elle n'est pas du tout fan de Beaumarchais et des Lumières, loin de là. Au contraire même.
Invité- Invité
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