Ailleurs dans le monde en 1789
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LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: La France et le Monde au XVIIIe siècle :: Histoire et événements ailleurs dans le monde
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Suite à une mauvaise manipulation (merci à la Modération pour son intervention), voici donc mon message consacré à :
Passons un moment à la cour de Tippoo Sahib ou Tipû Sâhib, sultan du Mysore de 1782 à 1799 et notre allié contre la présence anglaise en Inde.
Il serait né le 20 novembre 1750 et se serait montré cultivé et érudit. Si son père, un ancien officier devenu souverain, était analphabète, il voulût que son fils reçoive une éducation soignée. Résultat, le futur roi maîtrise l'urdu, le persan, l'arabe, mais aussi l'équitation, le tir au pistolet, l'escrime… Ce sont des officiers français qui lui enseignent stratégie et art de la guerre, enseignement qu'il met à l'épreuve à 15 ans, accompagnant son père au combat en 1766, lors de la Première Guerre du Mysore.
A 16 ans, il commande un corps de cavalerie lors de l'invasion du Karnatic. Il combat également lors de la guerre entre la Compagnie Anglaise des Indes et les farouches Marathes, puis à 17 ans, il accomplit plusieurs missions diplomatiques pour son père.
Eclate en 1779 la Seconde Guerre du Mysore : les anglais s'emparent du comptoir français de Mahé, placé sous protection du Mysore. Furieux, Haidar, le père de notre homme, riposte par une attaque sur le Karnatic, décidé à chasser les anglais de Madras. En septembre 1780, accompagné de 10 000 hommes et 18 canons, Tippoo Sahib est chargé d'intercepter l'anglais William Baillie qui s'était mis en route pour rejoindre l'aventurier irlandais Sumro que nous avons déjà croisé ici et là. A la bataille de Pollilur, Tippoo Sahib est vainqueur et Sumro, apprenant la nouvelle, décide d'opérer ce qu'on appelle une prudente retraite stratégique… Il se retranche dans Madras, après avoir coulé son artillerie dans un étang pour qu'elle ne tombe pas aux mains de l'ennemi.
Notre futur souverain accumule les victoires, en 1781 puis en 1782. C'est en décembre de cette année que meurt son père. Tippoo Sahib lui succède le 22 décembre 1782. Deux ans plus tard, la guerre prend fin par le traité de Mangalore.
A 32 ans, le nouveau souverain est plus que jamais déterminé à contrer les anglais. Il se tourne alors vers la France. Une ambassade fastueuse est envoyée à Versailles, conduite par Mohammed Dervich Khan, Akbar Ali Khan et Mohammad Osman Khan. Louis XVI les reçoit, commande un superbe service en porcelaine de Sèvres comme cadeau et persuade l'un des ambassadeurs, Mohammed Dervich Khan, de poser pour Elisabeth Vigée-Lebrun :
De son côté, Tippoo Sahib découvre qu'il s'est peut-être trompé d'ennemi… Les Marathes commencent à lui porter problème. Petit retour en arrière…
En 1764 puis 1767, l'énergique Madhavrao Ier, souverain des Marathes, a battu le père de Tippoo, lui arrachant territoires et tributs. Tippoo décide alors de récupérer ces territoires et cesse de payer tribut. Les Marathes, peu accommodants, crient au reniement du traité conclu et sortent les poignards. Le conflit va durer de 1785 à 1787, avec une alternance de victoires et défaites des deux côtés, pour aboutir en 1787 au traité de Gajendragad par lequel, vaincu, Tippoo Sahib restitue aux Marathes tous les territoires conquis et doit payer quatre ans d'arriérés du tribut (et ça fait mal…).
Agacé, humilié, Tippoo s'agite, s'énerve. Ses ambassades en Afghanistan, à Istanbul et en France se révèlent de surcroît infructueuses, décevantes. En 1790, il envahit le Travancore, sous protection britannique. C'est la Troisième Guerre du Mysore qui va durer trois ans et se solder par une défaite cuisante pour Tippoo qui attend en vain un soutien français. Il est vrai qu'à cette époque, Louis XVI avait d'autres soucis en tête…
Cette fois, on ne rigole plus. Les combats sont violents, meurtriers, Tippoo y paie de sa personne, les trombes d'eau de la Mousson s'en mêlent, transformant les routes en bourbier, compliquant déplacements et ravitaillement… Epuisé, Tippoo s'installe un moment à Pondichéry, tentant encore une fois en vain d'entraîner les français avec lui.
En face, se trouve un homme d'envergure, Lord Cornwallis himself :
Hé oui, c'est bien le vaincu de la bataille de Yorktown qui consacra la naissance des USA. Quoi de mieux pour se faire oublier qu'un petit séjour de l'autre côté du monde ? Nommé Gouverneur du Bengale et Commandant en chef des troupes anglaises en Inde, Cornwallis se dit que mater définitivement cet excité de Tippoo lui permettrait de redorer son blason. Pas de cadeaux donc. Au terme d'une succession de combats meurtriers, de victoires et de défaites, Tippoo doit s'incliner. Le 18 mars 1792, par le traité de Srirangapatna, il cède la moitié de ses vastes territoires aux anglais, verse à la Compagnie des Indes trois millions et laisse à Cornwallis deux de ses fils en otages, tant que le paiement, en plusieurs échéances, ne sera pas effectué. C'est fait 18 mois plus tard, l'anglais n'étant que trop heureux de restituer les gamins, aussi turbulents que leur géniteur.
Ulcéré, humilié, Tippoo Sahib cherche de nouveaux soutiens. Si la monarchie française l'a laissé tomber, peut-être les républicains se montreront-ils plus ouverts ? Le souverain n'hésite pas à devenir membre des Jacobins et la République envoie en Inde un certain François Ripaud. Ce corsaire aventureux plante un Arbre de la Liberté dans la capitale du Mysore, de même que le drapeau tricolore, reçoit même quelques régiments français mais ce sera tout.
1799. Richard Wellesley, nouveau gouverneur général des Indes, s'inquiète à propos du turbulent Tippoo. Là-bas, de l'autre côté du monde, Bonaparte débarque en Egypte dans le but évident de perturber les liaisons entre l'Angleterre et l'Inde. Mieux vaut donc neutraliser ce fichu souverain indien qui pourrait rajouter aux problèmes. La victoire de Nelson décide Wellesley qui marche alors en personne sur Mysore. La Quatrième Guerre du Mysore commence. La capitale se retrouve assiégée par 50 000 hommes. Retranché dans son palais, Tippoo Sahib résiste un mois. Mais cette fois, c'est la fin : les britanniques défoncent les portes, franchissent les murs, on se bat dans les rues… Ses conseillers pressent Tippoo de fuir par un passage secret, des relais sont prêts pour couvrir sa fuite et l'emmener en sécurité. "Mieux vaut vivre un jour comme un tigre que mille ans comme un mouton !" rétorque le souverain avant de s'emparer d'un fusil et de rejoindre les murs de son palais.
Tippoo Sahib meurt au combat, à 48 ans, le 4 mai 1799. Il est inhumé le lendemain, aux côtés de ses parents.
Homme énergique, instruit, farouche et impétueux, Tippoo Sahib reste une figure incontournable de l'Inde de cette époque.
On a surtout retenu ses persécutions anti-chrétiennes, massives, sa cruauté envers les prisonniers (lors de la reddition du fort de Mangalore, tous les étrangers non britanniques restants furent massacrés, ainsi que 5 600 catholiques. La rivière était si empuantie par l'odeur des cadavres, que les habitants furent forcés de quitter leurs maisons…), son autorité sans appel.
Il fût pourtant aussi un guerrier redoutable et surtout un administrateur avisé : malgré les guerres et les défaites, son royaume connût sous son règne une prospérité sans pareil, qui étonnait les visiteurs étrangers. Le niveau de vie de sa population est à l'époque l'un des plus élevés au monde, supérieur même à celui des anglais. Il met en place une nouvelle monnaie, un nouveau calendrier, développe considérablement l'industrie de la soie et créé un ingénieux et profitable système de revenus fonciers. Ce qui explique que son peuple le suivra toujours. Au combat, il est l'un des premiers à utiliser des "fusées", ancêtre de nos modernes roquettes, qui sèment la panique jusque chez les anglais. Il déploie jusqu'à 5000 lanceurs de fusées en une bataille, causant les dégâts que l'on imagine.
Aujourd'hui encore, Tippo Sahib reste un souverain controversé et sujet à polémique.
Tippoo Sahib, le tigre du Mysore
Passons un moment à la cour de Tippoo Sahib ou Tipû Sâhib, sultan du Mysore de 1782 à 1799 et notre allié contre la présence anglaise en Inde.
Il serait né le 20 novembre 1750 et se serait montré cultivé et érudit. Si son père, un ancien officier devenu souverain, était analphabète, il voulût que son fils reçoive une éducation soignée. Résultat, le futur roi maîtrise l'urdu, le persan, l'arabe, mais aussi l'équitation, le tir au pistolet, l'escrime… Ce sont des officiers français qui lui enseignent stratégie et art de la guerre, enseignement qu'il met à l'épreuve à 15 ans, accompagnant son père au combat en 1766, lors de la Première Guerre du Mysore.
A 16 ans, il commande un corps de cavalerie lors de l'invasion du Karnatic. Il combat également lors de la guerre entre la Compagnie Anglaise des Indes et les farouches Marathes, puis à 17 ans, il accomplit plusieurs missions diplomatiques pour son père.
Eclate en 1779 la Seconde Guerre du Mysore : les anglais s'emparent du comptoir français de Mahé, placé sous protection du Mysore. Furieux, Haidar, le père de notre homme, riposte par une attaque sur le Karnatic, décidé à chasser les anglais de Madras. En septembre 1780, accompagné de 10 000 hommes et 18 canons, Tippoo Sahib est chargé d'intercepter l'anglais William Baillie qui s'était mis en route pour rejoindre l'aventurier irlandais Sumro que nous avons déjà croisé ici et là. A la bataille de Pollilur, Tippoo Sahib est vainqueur et Sumro, apprenant la nouvelle, décide d'opérer ce qu'on appelle une prudente retraite stratégique… Il se retranche dans Madras, après avoir coulé son artillerie dans un étang pour qu'elle ne tombe pas aux mains de l'ennemi.
Notre futur souverain accumule les victoires, en 1781 puis en 1782. C'est en décembre de cette année que meurt son père. Tippoo Sahib lui succède le 22 décembre 1782. Deux ans plus tard, la guerre prend fin par le traité de Mangalore.
A 32 ans, le nouveau souverain est plus que jamais déterminé à contrer les anglais. Il se tourne alors vers la France. Une ambassade fastueuse est envoyée à Versailles, conduite par Mohammed Dervich Khan, Akbar Ali Khan et Mohammad Osman Khan. Louis XVI les reçoit, commande un superbe service en porcelaine de Sèvres comme cadeau et persuade l'un des ambassadeurs, Mohammed Dervich Khan, de poser pour Elisabeth Vigée-Lebrun :
De son côté, Tippoo Sahib découvre qu'il s'est peut-être trompé d'ennemi… Les Marathes commencent à lui porter problème. Petit retour en arrière…
En 1764 puis 1767, l'énergique Madhavrao Ier, souverain des Marathes, a battu le père de Tippoo, lui arrachant territoires et tributs. Tippoo décide alors de récupérer ces territoires et cesse de payer tribut. Les Marathes, peu accommodants, crient au reniement du traité conclu et sortent les poignards. Le conflit va durer de 1785 à 1787, avec une alternance de victoires et défaites des deux côtés, pour aboutir en 1787 au traité de Gajendragad par lequel, vaincu, Tippoo Sahib restitue aux Marathes tous les territoires conquis et doit payer quatre ans d'arriérés du tribut (et ça fait mal…).
Agacé, humilié, Tippoo s'agite, s'énerve. Ses ambassades en Afghanistan, à Istanbul et en France se révèlent de surcroît infructueuses, décevantes. En 1790, il envahit le Travancore, sous protection britannique. C'est la Troisième Guerre du Mysore qui va durer trois ans et se solder par une défaite cuisante pour Tippoo qui attend en vain un soutien français. Il est vrai qu'à cette époque, Louis XVI avait d'autres soucis en tête…
Cette fois, on ne rigole plus. Les combats sont violents, meurtriers, Tippoo y paie de sa personne, les trombes d'eau de la Mousson s'en mêlent, transformant les routes en bourbier, compliquant déplacements et ravitaillement… Epuisé, Tippoo s'installe un moment à Pondichéry, tentant encore une fois en vain d'entraîner les français avec lui.
En face, se trouve un homme d'envergure, Lord Cornwallis himself :
Hé oui, c'est bien le vaincu de la bataille de Yorktown qui consacra la naissance des USA. Quoi de mieux pour se faire oublier qu'un petit séjour de l'autre côté du monde ? Nommé Gouverneur du Bengale et Commandant en chef des troupes anglaises en Inde, Cornwallis se dit que mater définitivement cet excité de Tippoo lui permettrait de redorer son blason. Pas de cadeaux donc. Au terme d'une succession de combats meurtriers, de victoires et de défaites, Tippoo doit s'incliner. Le 18 mars 1792, par le traité de Srirangapatna, il cède la moitié de ses vastes territoires aux anglais, verse à la Compagnie des Indes trois millions et laisse à Cornwallis deux de ses fils en otages, tant que le paiement, en plusieurs échéances, ne sera pas effectué. C'est fait 18 mois plus tard, l'anglais n'étant que trop heureux de restituer les gamins, aussi turbulents que leur géniteur.
Ulcéré, humilié, Tippoo Sahib cherche de nouveaux soutiens. Si la monarchie française l'a laissé tomber, peut-être les républicains se montreront-ils plus ouverts ? Le souverain n'hésite pas à devenir membre des Jacobins et la République envoie en Inde un certain François Ripaud. Ce corsaire aventureux plante un Arbre de la Liberté dans la capitale du Mysore, de même que le drapeau tricolore, reçoit même quelques régiments français mais ce sera tout.
1799. Richard Wellesley, nouveau gouverneur général des Indes, s'inquiète à propos du turbulent Tippoo. Là-bas, de l'autre côté du monde, Bonaparte débarque en Egypte dans le but évident de perturber les liaisons entre l'Angleterre et l'Inde. Mieux vaut donc neutraliser ce fichu souverain indien qui pourrait rajouter aux problèmes. La victoire de Nelson décide Wellesley qui marche alors en personne sur Mysore. La Quatrième Guerre du Mysore commence. La capitale se retrouve assiégée par 50 000 hommes. Retranché dans son palais, Tippoo Sahib résiste un mois. Mais cette fois, c'est la fin : les britanniques défoncent les portes, franchissent les murs, on se bat dans les rues… Ses conseillers pressent Tippoo de fuir par un passage secret, des relais sont prêts pour couvrir sa fuite et l'emmener en sécurité. "Mieux vaut vivre un jour comme un tigre que mille ans comme un mouton !" rétorque le souverain avant de s'emparer d'un fusil et de rejoindre les murs de son palais.
Tippoo Sahib meurt au combat, à 48 ans, le 4 mai 1799. Il est inhumé le lendemain, aux côtés de ses parents.
Homme énergique, instruit, farouche et impétueux, Tippoo Sahib reste une figure incontournable de l'Inde de cette époque.
On a surtout retenu ses persécutions anti-chrétiennes, massives, sa cruauté envers les prisonniers (lors de la reddition du fort de Mangalore, tous les étrangers non britanniques restants furent massacrés, ainsi que 5 600 catholiques. La rivière était si empuantie par l'odeur des cadavres, que les habitants furent forcés de quitter leurs maisons…), son autorité sans appel.
Il fût pourtant aussi un guerrier redoutable et surtout un administrateur avisé : malgré les guerres et les défaites, son royaume connût sous son règne une prospérité sans pareil, qui étonnait les visiteurs étrangers. Le niveau de vie de sa population est à l'époque l'un des plus élevés au monde, supérieur même à celui des anglais. Il met en place une nouvelle monnaie, un nouveau calendrier, développe considérablement l'industrie de la soie et créé un ingénieux et profitable système de revenus fonciers. Ce qui explique que son peuple le suivra toujours. Au combat, il est l'un des premiers à utiliser des "fusées", ancêtre de nos modernes roquettes, qui sèment la panique jusque chez les anglais. Il déploie jusqu'à 5000 lanceurs de fusées en une bataille, causant les dégâts que l'on imagine.
Aujourd'hui encore, Tippo Sahib reste un souverain controversé et sujet à polémique.
Calonne- Messages : 1134
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Merci mon cher Calonne de nous en apprendre un peu plus sur ce souverain dont nous ne connaissions que sa fameuse ambassade.
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Un verre d'eau pour la Reine.
Mr de Talaru- Messages : 3193
Date d'inscription : 02/01/2014
Age : 65
Localisation : près des Cordeliers...
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Il ne devait pas être très commode quand-même, ses persécutions religieuses et le traitement infligé à ses prisonniers ne plaident guère en sa faveur.
Il était obsédé par l'idée de s'allier avec la France. Déjà son père, Haidar, avait fait des avances, Suffren avait offert un portrait de Louis XVI au souverain. Ces avances sont réciproques et se poursuivent au-delà de la Révolution : quand Bonaparte entre en Egypte, il noue contact avec Tippoo, il lui écrit même mais la lettre est interceptée par les anglais. C'est d'ailleurs cette crainte d'une alliance entre Tippoo et la France qui décide, comme nous l'avons vu, Wellesley à en finir avec le maître du Mysore.
Il était obsédé par l'idée de s'allier avec la France. Déjà son père, Haidar, avait fait des avances, Suffren avait offert un portrait de Louis XVI au souverain. Ces avances sont réciproques et se poursuivent au-delà de la Révolution : quand Bonaparte entre en Egypte, il noue contact avec Tippoo, il lui écrit même mais la lettre est interceptée par les anglais. C'est d'ailleurs cette crainte d'une alliance entre Tippoo et la France qui décide, comme nous l'avons vu, Wellesley à en finir avec le maître du Mysore.
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J'ai oublié hier, je ne sais pas ce que sera demain, mais aujourd'hui je t'aime
Calonne- Messages : 1134
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Le Cap, le crépuscule de la présence Hollandaise
Elle a été fondée en 1652. Cité-Mère de l'Afrique du Sud, elle est devenu "La Taverne des Mers", un emplacement stratégique au carrefour des grandes routes maritimes, une ville où l'on fait volontiers relâche un moment. Une ville décrite comme "jolie et soignée", entre mer et montagne, avec des rues rectilignes, des maisons blanches aux volets verts, des jardins... Le tout dans un style très néerlandais par certains côtés : normal, vous êtes ici en possession hollandaise.
La ville est gérée par la VOC, la Compagnie Néerlandaise des Indes Orientales, qui y règne, toute puissante. Une Compagnie qui ne plaisante pas avec l'ordre établi et peut, si vous vous révélez trop forte tête, vous envoyer méditer sur l'île pénitentiaire proche de Robben Island où un certain Nelson Mandela sera enfermé bien plus tard... Au fil de votre promenade, vous découvrirez une société cosmopolite où les descendants des premiers colons hollandais côtoient esclaves, métis, étrangers de passage, marins et navigateurs, aventuriers de toute sorte. Les tavernes, les pensions et maisons d'hôtes (pour les plus fortunés) sont réputées accueillantes dans cette ville surnommée également "le carrefour des mers". On y commerce activement, le tabac, le riz, le coton, le thé et la soie (venus de Chine), les premiers vins qui feront la fierté de la région, produits sur les grands domaines viticoles en-dehors de la ville... Voisinant avec l'élite blanche, originaire des Pays-Bas, de Scandinavie, de Russie, déambule également une forte population asiatique, malais, javanais, indiens, chinois... Tout le monde se retrouve au Cap, pensez donc : plus de 70 navires par mois y jettent l'ancre et pour un bon moment. Pour autant, en-dehors des fonctionnaires de la Compagnie et de leurs familles, beaucoup ne font que passer : pas d'école, peu d'églises, pas de journaux ni d'imprimerie. On est de passage, on trinque une dernière fois et on largue à nouveau les amarres. Ce qui n'empêche pas l'astronome français Nicolas Louis de Lacaille de faire construire, en 1750, un observatoire, le premier de l'hémisphère sud (cela au cours de sa longue mission d'études astronomiques dans l'hémisphère austral, de 1750 à 1754).
Vous croiserez beaucoup de métis au cours de vos déambulations et pour cause : peu, très peu de femmes blanches au Cap. A tel point que la Compagnie, plus préoccupée par les questions commerciales que raciales, a autorisé officiellement les unions entre européens et esclaves affranchies, voire femmes asiatiques. Simon Van Der Stel, l'actuel gouverneur, n'est-il pas lui-même métis ? Certains noirs que vous croiserez sont des "noirs libres", affranchis, bénéficiant d'un régime spécial accordé par la Compagnie. Ces noirs peuvent travailler pour leur compte, fréquenter les tavernes, y boire, jouer et danser (alors que les esclaves y sont interdits, sauf accompagnant leur maître ou maîtresse) et peuvent se mêler aux bourgeois et marins. Devant ces privilèges, une réaction se fera jour et à la fin du siècle, ces noirs libres se verront finalement imposer un passeport intérieur pour pouvoir circuler en ville, comme les esclaves...
Les véritables esclaves, vous les trouverez en-dehors des murs, au-delà des avants-postes fortifiés de Tulbagh, Klapmuts, Groenekloof et Saldanha Baai : ici, en bordure de la brousse, vivent les agriculteurs qui défrichent toujours un peu plus les terres, repoussant tribus et indigènes, du moins ceux qui n'ont pas succombé à la variole, importée. Des fermes, des plantations, des domaines viticoles ont été créés, exploités (pour les plus riches) par une main-d'oeuvre noire corvéable à merci. Comme Groot Constantia :
Source : travail personnel de Martinvl
Elle date de 1685, elle est restée intacte, devenue musée et c'est une visite à ne pas manquer aujourd'hui encore pour avoir une idée assez précise de la vie dans une propriété agricole prospère de l'époque.
Tout cela donne l'aspect d'une petite ville où, ma foi, il fait bon faire relâche.
Erreur. La domination hollandaise vit son crépuscule. Derrière la société cosmopolite et la jolie ville blanche aux maisons à pignons qui rappellent Amsterdam, on découvre une société fracturée, divisée, composée de minorités ethniques et raciales en proie aux discriminations de toutes sortes. Même au sommet : en-dehors des fonctionnaires de la Compagnie qui s'arrogent les meilleurs place et vivent autour du Château, protégés par une garnison de soldats majoritairement allemands, la société blanche elle-même reste pauvre, mal éduquée, exploitée par la lointaine métropole qui ne se préoccupe guère de son sort tant que les bénéfices rentrent.
En ces années 1780, l'atmosphère se fait lourde... Les anglais rôdent au large, de plus en plus nombreux... De 1781 à 1784, dans le cadre de l'alliance franco-hollandaise, des troupes de l'armée française stationnent même en ville afin de prévenir une invasion britannique... A leur départ, inquiète, la Compagnie engage des mercenaires pour renforcer sa garnison. Les français s'intéressent aussi beaucoup au Cap, ils voudraient en faire une tête de pont pour opérer la jonction avec l'île Bourbon et l'île de France...
L'architecte français Louis-Michel Thibaut vient d'ailleurs travailler en ville un bon moment, améliorant notamment de nombreux monuments.
(Aquarelle de Lady Anne Barnard, écrivain et artiste écossaise, qui vécût cinq ans au Cap. Elle donna au Château des réceptions fastueuses-la salle de bal porte depuis son nom d'ailleurs- et laissa derrière elle quantité de journaux, peintures, lettres et dessins, une mine d'informations sur la vie de la colonie à l'époque)
La Dame en question :
Thibaut est même nommé Inspecteur des Bâtiments par la Compagnie. En 1786, il y enseigne l'architecture et les mathématiques. En 1795, il est ingénieur militaire en chef. L'invasion britannique de la même année lui fait perdre fonction et privilèges. Lors du retour temporaire des hollandais, de 1803 à 1806, il retrouve position et prestige. Il meurt dans cette ville qu'il aimait, d'une pneumonie, en novembre 1815.
Une de ses réalisations, le Drostdy de Graaf-Reinet :
Source : Candiotti/FC Georgio
La Compagnie, elle, passe de sales moments. Elle a beaucoup perdu avec sa rivale anglaise qui a brisé son monopole en Indonésie et sur les routes de la Chine. En 1782, elle cesse même de verser des dividendes à ses actionnaires, les salaires arrivent en retard, quand ils arrivent. Sur place, la grogne monte parmi les (environ) 12000 citoyens libres dont seulement 3000 vivent en ville d'ailleurs, la corruption explose, le marché noir aussi.
Le fruit est mûr. En 1795, les britanniques passent à l'offensive, profitant de l'invasion des Pays-Bas par les armées de la Révolution. Le Cap devient possession anglaise. Environ 14000 habitants alors dont un peu plus de 4000 de souche européenne, presque 17000 esclaves et 16000 résidents non-européens. Le Cap en tant que possession hollandaise a vécu.
Calonne- Messages : 1134
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Calonne a écrit:Une ville décrite comme "jolie et soignée", entre mer et montagne, avec des rues rectilignes, des maisons blanches aux volets verts, des jardins... Le tout dans un style très néerlandais par certains côtés
Mais oui, c'est tout à fait l'impression que produisent tes photos, mon cher Calonne . ... une impression de calme et d'harmonie, malgré quelques bémols ...
Lacaille mériterait bien que nous lui ouvrions un sujet, ne penses-tu pas ?
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55517
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
D'accord, je m'en occupe cet après-midi si vous voulez.
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J'ai oublié hier, je ne sais pas ce que sera demain, mais aujourd'hui je t'aime
Calonne- Messages : 1134
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Mme de Sabran- Messages : 55517
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Je me suis intéressée à nos relations avec la Sublime Porte
parce qu'au château de Villandry j'ai croisé le comte Michel-Ange de Castellane en pleine ambassade auprès de Mahmut Ier.
Voici la liste de nos envoyés officiels en Turquie jusqu'au début de la Révolution ...
Nous y rencontrons des personnages bien connus .
Histoire Relations franco-turques
Ambassadeurs, ministres, agents ou résidents français à Istanbul, de 1741 à 1793
1741 : COMTE DE CASTELLANE, Michel-Ange, 26e ambassadeur. Said Pacha est envoyé en France pour remercier Louis XV de sa médiation dans le traité de 1739.
1747 : COMTE DESALLEURS, Roland Puchot, 27e ambassadeur. Fils du 22e ambassadeur, il est envoyé pour promouvoir une alliance contre l'Autriche, pour aider la Pologne. Il meurt à Istanbul en 1754, la même année que Mahmut Ier.
1754 : M. Pérote, agent
1754 : M. de Peysonnel, consul général à Smyrne, chargé d'affaires
1755 : GRAVIER, Comte de Vergennes, Charles, ne déploie d'abord que le caractère de ministre plénipotentiaire. "Son premier soin est de retirer, par ordre de Louis XV, tous les papiers relatifs à la correspondance secrète de ce prince avec le comte Desalleurs, à laquelle M. de Vergennes avait été admis [...] M. de Vergennes annonce à la Porte l'alliance de Versailles du 1er mai 1756 ; déviation de politique, préjudiciable à l'Empire ottoman. Nomination de Stanislas Poniatowski, en 1764. Insinuation en faveur de Stanislas-Auguste mal accueillie. Défiance de la Porte. Troubles de Pologne fomentés par Catherine de Russie. Le gouvernement ottoman ne veut point se mêler des affaires de ce pays. Le duc de Choiseul au ministère. Le baron de Tott consul-général en Crimée auprès de Krim-Ghèraï, khan des Tartares. Confédération de Bar. Déclaration de guerre à la Russie en octobre 1768. Rappel de M. de Vergennes.
Il emporte, en quittant Constantinople, les regrets du Divan et du commerce français. Une députation des négociants lui fait hommage d'une épée en or massif. Le baron de Tott, qui était arrivé à Constantinople avec M. de Vergennes en 1755, y reste attaché au gouvernement ottoman. Il organise, en 1774 et 1775, une artillerie de campagne, établit une fonderie, une machine à mate, une papeterie etc et dirige la construction de forts sur le Bosphore.
1756 : le même, 29e ambassadeur
1768 : COMTE DE SAINT-PRIEST, chevalier Guignard, 29e ambassadeur. Arrive le 13 novembre 1768. L'Empire ottoman essuie de nouvelles défaites. Saint-Priest commence à étudier quels provinces pourraient être conquises par la France, il identifie l'Egypte.
1776 : M. Le Bas, chargé d'affaires pendant les congé de Saint-Priest. Invasion de la Crimée par les Russes. Traité d'alliance de l'Autriche avec la Russie. "La France s'interpose en vain entre les Russes et les Turcs. La guerre recommence. Premier et unique plan de Constantinople par l'ingénieur français Kauffer en 1776".
1778 : M. le comte de Saint-Priest revient cette année-là. Il favorise le développement du commerce de Marseille vers la Mer noire. "Mésintelligence entre la Porte et la cour de Vienne étouffée par les osins de M. de Saint-Priest."
1784 : COMTE DE CHOISEUL-GOUFFIER, 30e ambassadeur. Il amène des savants et des gens de lettre, dont l'abbé Delille. "L'objet de cette ambassade est de protéger l'Empire turc contre une puissance qui ne dissimulait pas, même alors, le projet de le renverser ; c'est aussi de mettre à la disposition de la Porte des ingénieurs militaires et des constructeurs de vaisseaux. Troubles en Egypte réprimés par Haçan Pacha. Voyage de Catherine II en Crimée avec Joseph II en 1787. Inquiétude de la Porte. La guerre éclate entre la Russie et les Turcs. L'Autriche se déclare bientôt contre ces derniers. Perte d'Oczakow après une longue résistance que M. de Choiseul avait préparée, en envoyant pour mettre cette place en état de se défendre, outre un détachement de canonniers, M. Lafitte Clavé, ingénieur français très distingué. Etablissement à l'entrée du Bosphore d'un assez bon système d'ouvrages défensifs. Mort d'Abdul-Hamit, en avril 1789. [...] Prise de Belgrade par les Autrichiens qui la restituent aux Turcs, à la paix, dont les évènements de la révolution française hâtent la conclusion. [...] Les conséquences de la révolution françasie se font déjà sentir dans l'Orient, et influent sur la politique européenne à l'égard de la Porte. Huçein, surnommé Kutchuk parce qu'il était petit et fluet, célèbre Capitan-Pache, favori de Sultan-Selim, homme d'une grande capacité, devient le restaurateur de la marine ottomane.
1792 : M. de Choiseul est déposé en octobre par le gouvernement révolutionnaire et écarté des affaires, en conséquence de la délibération de la Nation à Constantinople. La nation, dans le Levant, est la réunion en assemblée délibérante des chefs des maisons de commerce de chaque EChelle, cautionnées près de la chambre de commerce de Marseille. Antoine Fonton prend la place de Choiseul, mais n'est pas agréé par a Porte.
1793 : Le premier député du commerce est donc chargé des affaires
: M. Descorches (marquis de Sainte-Croix), est envoyé par la Convention nationale, sans caractère public pour détourner la Porte d'entrer dans la coalition des Puissances contre la France. Firman de la Porte pour observer la neutralité en mer. Deux pavillons français flottent dans les mers du Levant.
: M. de Chalgrin, chargé des affaires du roi.
https://www.turquie-culture.fr/pages/histoire/relations-franco-turques/liste-des-ambassadeurs-ministres-agents-ou-residents-francais-a-istanbul-de-1524-a-1840.html
parce qu'au château de Villandry j'ai croisé le comte Michel-Ange de Castellane en pleine ambassade auprès de Mahmut Ier.
Voici la liste de nos envoyés officiels en Turquie jusqu'au début de la Révolution ...
Nous y rencontrons des personnages bien connus .
Histoire Relations franco-turques
Ambassadeurs, ministres, agents ou résidents français à Istanbul, de 1741 à 1793
1741 : COMTE DE CASTELLANE, Michel-Ange, 26e ambassadeur. Said Pacha est envoyé en France pour remercier Louis XV de sa médiation dans le traité de 1739.
1747 : COMTE DESALLEURS, Roland Puchot, 27e ambassadeur. Fils du 22e ambassadeur, il est envoyé pour promouvoir une alliance contre l'Autriche, pour aider la Pologne. Il meurt à Istanbul en 1754, la même année que Mahmut Ier.
1754 : M. Pérote, agent
1754 : M. de Peysonnel, consul général à Smyrne, chargé d'affaires
1755 : GRAVIER, Comte de Vergennes, Charles, ne déploie d'abord que le caractère de ministre plénipotentiaire. "Son premier soin est de retirer, par ordre de Louis XV, tous les papiers relatifs à la correspondance secrète de ce prince avec le comte Desalleurs, à laquelle M. de Vergennes avait été admis [...] M. de Vergennes annonce à la Porte l'alliance de Versailles du 1er mai 1756 ; déviation de politique, préjudiciable à l'Empire ottoman. Nomination de Stanislas Poniatowski, en 1764. Insinuation en faveur de Stanislas-Auguste mal accueillie. Défiance de la Porte. Troubles de Pologne fomentés par Catherine de Russie. Le gouvernement ottoman ne veut point se mêler des affaires de ce pays. Le duc de Choiseul au ministère. Le baron de Tott consul-général en Crimée auprès de Krim-Ghèraï, khan des Tartares. Confédération de Bar. Déclaration de guerre à la Russie en octobre 1768. Rappel de M. de Vergennes.
Il emporte, en quittant Constantinople, les regrets du Divan et du commerce français. Une députation des négociants lui fait hommage d'une épée en or massif. Le baron de Tott, qui était arrivé à Constantinople avec M. de Vergennes en 1755, y reste attaché au gouvernement ottoman. Il organise, en 1774 et 1775, une artillerie de campagne, établit une fonderie, une machine à mate, une papeterie etc et dirige la construction de forts sur le Bosphore.
1756 : le même, 29e ambassadeur
1768 : COMTE DE SAINT-PRIEST, chevalier Guignard, 29e ambassadeur. Arrive le 13 novembre 1768. L'Empire ottoman essuie de nouvelles défaites. Saint-Priest commence à étudier quels provinces pourraient être conquises par la France, il identifie l'Egypte.
1776 : M. Le Bas, chargé d'affaires pendant les congé de Saint-Priest. Invasion de la Crimée par les Russes. Traité d'alliance de l'Autriche avec la Russie. "La France s'interpose en vain entre les Russes et les Turcs. La guerre recommence. Premier et unique plan de Constantinople par l'ingénieur français Kauffer en 1776".
1778 : M. le comte de Saint-Priest revient cette année-là. Il favorise le développement du commerce de Marseille vers la Mer noire. "Mésintelligence entre la Porte et la cour de Vienne étouffée par les osins de M. de Saint-Priest."
1784 : COMTE DE CHOISEUL-GOUFFIER, 30e ambassadeur. Il amène des savants et des gens de lettre, dont l'abbé Delille. "L'objet de cette ambassade est de protéger l'Empire turc contre une puissance qui ne dissimulait pas, même alors, le projet de le renverser ; c'est aussi de mettre à la disposition de la Porte des ingénieurs militaires et des constructeurs de vaisseaux. Troubles en Egypte réprimés par Haçan Pacha. Voyage de Catherine II en Crimée avec Joseph II en 1787. Inquiétude de la Porte. La guerre éclate entre la Russie et les Turcs. L'Autriche se déclare bientôt contre ces derniers. Perte d'Oczakow après une longue résistance que M. de Choiseul avait préparée, en envoyant pour mettre cette place en état de se défendre, outre un détachement de canonniers, M. Lafitte Clavé, ingénieur français très distingué. Etablissement à l'entrée du Bosphore d'un assez bon système d'ouvrages défensifs. Mort d'Abdul-Hamit, en avril 1789. [...] Prise de Belgrade par les Autrichiens qui la restituent aux Turcs, à la paix, dont les évènements de la révolution française hâtent la conclusion. [...] Les conséquences de la révolution françasie se font déjà sentir dans l'Orient, et influent sur la politique européenne à l'égard de la Porte. Huçein, surnommé Kutchuk parce qu'il était petit et fluet, célèbre Capitan-Pache, favori de Sultan-Selim, homme d'une grande capacité, devient le restaurateur de la marine ottomane.
1792 : M. de Choiseul est déposé en octobre par le gouvernement révolutionnaire et écarté des affaires, en conséquence de la délibération de la Nation à Constantinople. La nation, dans le Levant, est la réunion en assemblée délibérante des chefs des maisons de commerce de chaque EChelle, cautionnées près de la chambre de commerce de Marseille. Antoine Fonton prend la place de Choiseul, mais n'est pas agréé par a Porte.
1793 : Le premier député du commerce est donc chargé des affaires
: M. Descorches (marquis de Sainte-Croix), est envoyé par la Convention nationale, sans caractère public pour détourner la Porte d'entrer dans la coalition des Puissances contre la France. Firman de la Porte pour observer la neutralité en mer. Deux pavillons français flottent dans les mers du Levant.
: M. de Chalgrin, chargé des affaires du roi.
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Mme de Sabran- Messages : 55517
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Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Merci Eléonore ! Et n’oublions pas que bien plus précieuse qu’une épée en or massif, Vergennes repartit surtout de Turquie... avec une femme, son épouse
Gouverneur Morris- Messages : 11798
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Le lui a-t-on assez reproché ! La pauvrette était persona non grata à Versailles ...
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Mme de Sabran- Messages : 55517
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Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
On lui a dit de prendre la Porte.
Monsieur de la Pérouse- Messages : 506
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Localisation : Enfin à bon port !
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Monsieur de la Pérouse a écrit:
On lui a dit de prendre la Porte.
...
Michel-Ange de CASTELLANE (2 octobre 1703 – 26 septembre 1782)
Le marquis de CASTELLANE, donc, est ambassadeur du roi Louis XV à la Porte Ottomane (de 1741 à 1747) et brigadier des armées du roi. Il est issu d’une des plus anciennes et illustres familles de Provence. Il acquiert le domaine de Villandry en 1754 où il meurt à le 26 septembre 1782 . Il est inhumé dans le caveau seigneurial de l’église de Villandry.
Dans le salon oriental du château de Villandry, quatre grands tableaux illustrent la première et la seconde audiences accordées par Mahmud Ier au marquis de Castellane .
Nous voyons d'abord arriver Castellane et sa suite .
Mahmud sait recevoir. Il régale ses hôtes, les couvre de cadeaux...
Mais avons-nous bien affaire au marquis de Castellane ?
Certainement dans le tableau qui figure la seconde audience car le marquis est nommé dans le cartouche.
Quant aux autres ... il semble y avoir contestation :
http://www.apamee.com/mosaiqueImperialeVI.htm
https://www.persee.fr/doc/anatm_1297-8094_1992_num_3_1_906
https://artsandculture.google.com/asset/audience-granted-by-the-sultan-mahmud-i-french-school-pupils-of-the-artist-jean-baptiste-van-mour/wgFYtXYbAX7y5A?hl=fr
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
La révolte de Pougatchev
Nous voici en Russie, à la rencontre du seul homme qui ait vraiment fait trembler Catherine II.
Emelian Pougatchev est né en 1742 dans un village où, fils de Cosaque, il était un petit propriétaire terrien.
Il participe à la Guerre de Sept Ans puis à la guerre russo-turque de 1768-1774.
Le retour à la vie civile ne lui réussit pas : désoeuvré, il se met à errer par les routes au point d'être arrêté pour vagabondage. Sorti de prison, il hante alors les monastères et se rapproche des Vieux-croyants. Ces derniers, en rupture avec l'Eglise orthodoxe depuis les réformes du Patriarche Nikon, profondément traditionnalistes, exercent sur notre homme une grande influence. Pougatchev en devient mystique et ne tarde pas à se proclamer "empereur Pierre III", en référence à l'époux assassiné de Catherine II. Il organise alors une révolte paysanne qui s'étend rapidement dans toute la Basse-Volga. A Saint-Pétersbourg, on se contente de hausser les épaules.
Mais très vite, le mouvement s'étend... Pougatchev s'empare de forteresses dans l'Oural, soulève l'enthousiasme des foules, assiège la ville d'Orenbourg, s'allie aux Bachkirs, une communauté turque musulmane qui vit en Russie... Dans la grande ville de Novgorod, c'est le soulèvement : les serfs se révoltent, égorgent leurs maîtres, incendient manoirs et châteaux, pillent et ravagent la ville. De plus, le rebelle entretiendrait une correspondance avec cette aventurière qui se prétend fille d'Elizabeth Ière, sans oublier les seigneurs polonais de la Confédération de Bar, qui se dressent contre l'influence russe. Affolée, l'impératrice réagit enfin : une division d'élite est envoyée sur place à bride abattue pour en finir.
Dans le même temps, Pougatchev est lâché par les Cosaques, lassés de ses frasques, de ses excès et de ses crises mystiques. Des Cosaques qui ne supportent pas non plus de devoir s'allier avec des serfs pour lesquels ils n'éprouvent que du mépris. Le général Mikhelson inflige une défaite définitive à cette armée divisée et Pougatchev, trahi, lui est livré en septembre 1774. Sur ordre de l'impératrice, le colosse barbu et hirsute est alors promené en cage et exhibé, couvert de crachats et d'insultes par ces mêmes foules qui l'acclamaient autrefois avant d'être décapité à la hache et d'avoir bras et jambes tranchés de même.
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Les péripéties historiques finissent souvent en boucherie ...
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
D'autant plus que Catherine II n'était pas du genre à faire de cadeaux...
Elizabeth était "la clémente", Catherine elle était "la grande" et ça ne l'engageait pas à grand-chose niveau amour du prochain.
Elizabeth était "la clémente", Catherine elle était "la grande" et ça ne l'engageait pas à grand-chose niveau amour du prochain.
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La révolte de Tupac-Amaru II
La révolte de Tupac-Amaru II
Après la révolte russe, la révolte péruvienne.
Nous voici sur le continent sud-américain, à la rencontre d'un personnage né en 1738.
José Gabriel Condorcanqui Noguera, plus tard nommé Tupac Amaru II, est un cacique (chef de tribu) né au Pérou, alors possession de l'empire espagnol. C'est en 1780 qu'il prend la tête d'une révolte contre l'occupant espagnol, révolte qui sera la plus importante et violente de l'Amérique du Sud de l'époque. Surnommé "la Grande Rébellion", ce mouvement est déclenché en 1780 avec la capture et l'exécution d'un haut fonctionnaire espagnol.
Qui est donc notre homme ? Comme dans beaucoup de cas, il faut démêler l'histoire et la légende...
José Gabriel Condorcanqui était vraisemblablement un métis, avec une ascendance aussi bien espagnole qu'indienne. Kuraka (administrateur indigène, intermédiaire entre les autorités espagnoles et les indigènes), il gérait un vaste domaine qui lui assurait de gros revenus, fût élevé par un prêtre jusqu'à ses 12 ans avant de fréquenter un collège réputé de Cuzco, parlant latin et s'habillant à l'espagnole. Ce n'est que plus tard qu'il mettra en avant ses origines indiennes, parlera la langue indienne et s'habillera en seigneur inca, se proclamant descendant direct de Tupac Amaru Ier, le dernier souverain inca. Le tout avant d'être excommunié par l'Eglise.
Son programme réclamait la liberté totale pour toute l'Amérique, la fin de l'exploitation des indiens, la suppression de toutes les taxes et impositions ordonnées par Madrid. Il n'oubliait pas les noirs non plus, proclamant en 1780 l'abolition de l'esclavage de ces derniers. Devenu "Inca, seigneur des Césars et de l'Amazone", notre homme tenta dans un premier temps de se concilier la couronne espagnole, souhaitant simplement mettre fin à la mauvaise gestion et aux abus des hauts fonctionnaires envoyés par Madrid. Mais très vite, son mouvement se radicalisa, sans que l'on sache trop si ce fût de son fait ou s'il se laissa dépasser par les évènements.
La révolte se propage alors très vite, des dizaines de milliers d'hommes en armes se joignent à lui et se soulèvent. Et ne regardent pas trop à la casse : les massacres perpétrés contre les espagnols suscitent la peur et le rejet même chez certains indiens, de même que chez les criollos, espagnols nés sur place et en conflit avec ceux venus du pays mère qui s'arrogeaient les places les plus fructueuses.
Amaru n'en marche pas moins sur Cuzco où souffle un vent de panique, parvient même à défaire une troupe de 1800 hommes chargée de l'arrêter. Mais la capitale tient bon et s'ensuit une succession de défaites et une pénible débandade. Trahi par ses officiers qui sentent le vent tourner, Tupac Amaru est capturé en 1781.
Enchaîné, monté sur une mule, le rebelle gagne Cuzco, son entrée saluée par les cloches de la cathédrale. Emprisonné au couvent des Jésuites, il est interrogé et impitoyablement torturé (on raconte qu'il tenta de faire passer des messages écrits avec son sang...).
Le 18 mai 1781, Tupac Amaru II est écartelé, en présence de sa famille et après avoir dû assister à la mise à mort de ses anciens compagnons, de ses fils et de son épouse. Il était si robuste que les chevaux ne purent accomplir leur besogne et il finît décapité, sa tête plantée sur une pique. Son corps fût dépecé et les différentes parties exposées en différentes villes du pays.
Son fils cadet, Fernando, fût épargné en raison de son jeune âge (10 ans) et, après avoir assisté au massacre de sa famille, fût déporté en Afrique. Mais le vaisseau qui l'emportait fût dérouté vers Cadix et Fernando termina sa vie emprisonné en Espagne, disparaissant de façon trouble en 1798.
Si la révolte de Tupac Amaru dura peu, de 1780 à 1782 pour les derniers combattants, elle eût un retentissement énorme, comme Spartacus avec les romains. Le rebelle devînt une figure légendaire, presque messianique : pour communiquer avec les masses indiennes, Amaru utilisait un langage symbolique, de tendance messianique et religieuse. Ce langage s’accompagnait de l'utilisation d’instruments de musique traditionnels, ainsi que de bannières, insignes et tenues vestimentaires incas traditionnelles. Il se proclamait rédempteur, Sauveur, voire même thaumaturge et les indiens lui prêtaient de nombreux pouvoirs et miracles.
Son mouvement était également source d'inspiration : après son exécution, son cousin poursuivît la lutte dans des régions isolées et difficiles d'accès tandis que la révolte s'étendait à l'Argentine. Ce fameux cousin, Diego Cristobal, se tailla même un éphémère royaume entre Bolivie, Chili et Argentine avant d'être vaincu et exécuté à son tour en 1783.
On peut aussi parler de la conspiration des trois Antoine, ourdie contre les espagnols en 1780 dans la Capitainerie du Chili, à l'initiative de trois officiers tous prénommés Antoine, dont deux français. Ces derniers, influencés par les idées des Lumières, projetèrent de renverser le pouvoir en place pour instaurer une République indépendante, faite pour "le bonheur du peuple" avec "égalité de toutes les classes sociales". La conspiration échoua pour une raison dérisoire : l'un des conjurés perdît au cours d'un déplacement le portefeuille où se trouvaient le projet et ses échanges avec ses complices... Les documents retrouvés et traduits, les trois hommes furent arrêtés.
- Antoine Rojas, haut personnage espagnol, fût exilé en Espagne, retourna au Chili où il s'agita à nouveau jusqu'à être impliqué dans un autre complot et mourir en détention en 1814.
- Antoine Berney et Antoine Gramusset, les deux français, furent traités avec égards, Madrid ne voulant pas se froisser avec Versailles. Ils furent envoyés en Espagne pour y être jugés mais leur navire sombra au cours d'un violente tempête au large du Portugal. Berney mourût pendant le naufrage, Gramusset survécût. Mais profondément marqué par la catastrophe, il mourût trois mois plus tard...
Calonne- Messages : 1134
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Calonne a écrit:Ce n'est que plus tard qu'il mettra en avant ses origines indiennes, parlera la langue indienne et s'habillera en seigneur inca, se proclamant descendant direct de Tupac Amaru Ier, le dernier souverain inca. Le tout avant d'être excommunié par l'Eglise.
Son programme réclamait la liberté totale pour toute l'Amérique, la fin de l'exploitation des indiens, la suppression de toutes les taxes et impositions ordonnées par Madrid. Il n'oubliait pas les noirs non plus, proclamant en 1780 l'abolition de l'esclavage de ces derniers.
C'est effroyable, ces guerres civiles ethniques fratricides, cette volonté d'extermination d'une autre communauté ou de son élimination par l'éducation forcée d'enfants enlevés à leurs famille. Hier soir, sur ARTE ( 28 minutes ) était dénoncée la découverte récente des restes de 215 enfants autochtones en Colombie-Britannique ...
Nous avons entendu pareilles horreurs lors de notre voyage en Australie où les Aborigènes furent aussi ignoblement traités . Et pas au XVIIIème siècle .
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Les Allemagnes
Retour en Europe pour faire un petit tour outre-Rhin. Une tasse de schnaps et en route !
L'Allemagne ? Les Allemagnes plutôt... Comme l'Italie plus au sud, l'Allemagne, en ces années 1780, n'aura jamais si peu existé.
Le Saint Empire Romain Germanique, hérité du Moyen-Age, n'est plus qu'un décor de théâtre. Un vieux décor, institué au Xème siècle, et qui se voulait le continuateur d'Auguste et Charlemagne, rien de moins. Frédéric Barberousse lui rajouta même une touche de divin, histoire de mieux asseoir son autorité (ce qui n'empêcha pas l'empereur de bêtement se noyer au cours d'une croisade après avoir voulu faire trempette...). Certes, au temps de sa splendeur, le saint empire en impose, englobant Europe centrale, Pays-Bas, Belgique, Luxembourg, Suisse, ainsi que des parties de la France et de l'Italie.
Mais au XVIIIème siècle, tout ça n'est plus qu'un souvenir.
L'Empire, l'Allemagne, est éclaté en une nuée de territoires indépendants dans les faits, certains minuscules, une foule de villes libres, d'évêchés, de principautés... qui mènent chacun leur petite vie, bien tranquille.
L'empereur ? Il est élu par neufs électeurs : Bohême, Saxe, Brandebourg, Hanovre, Bavière, Palatinat et les trois archevêchés de Mayence, Trêves et Cologne. De plus, il doit faire avec la Diète, qui siège à Ratisbonne. On est loin de l'autorité de droit divin de Frédéric... L'Allemagne en tant que telle, ce sont 343 divisions territoriales et 30 états différents, soumis à l'autorité impériale. Sur le papier...
L'un des plus fameux est le duché de Brunswick, qui a tout de la carte postale avec ses maisons à colombages, ses chaumières, sa petite rivière et ses oiseaux qui pépient partout (les brunswickois de l'époque sont fous des oiseaux, on en trouve partout, dans des centaines de cages, que l'on emporte parfois avec soi en promenade). Une carte postale on vous dit, qui célèbre la paix des champs, youpla boum... Si vous êtes bien né, vous voilà Holf-fähige, c'est à dire admis à fréquenter la cour. A vous les fêtes et soupers (copiés sur ceux de Trianon) à "Little Richmond", la villa privée de la duchesse, gardée par des grenadiers aux belles moustaches. Seriez-vous roturier ? Dans ce cas, vous voilà Holf-unfähige et il ne vous reste plus que les oiseaux... On vous l'a dit, la vie ici est délicieusement simple.
Le duc ? Charles Guillaume Ferdinand, 53 ans en 1789, couvert de gloire militaire.
Portrait of Duke Ferdinand of Brunswick-Wolfenbüttel (1721–1792),
Prussian Field-Marshal,
showing him in his robe of the Order of the Garter with the blue ribbon of the Garter under his left knee
Mais notre redoutable guerrier commence sérieusement à faiblir... Quatre fils dont deux morts, un aveugle et le dernier, faible d'esprit, caché dans un manoir retiré. Les filles ? Louise Augusta, l'aînée, abandonnée par son mari le prince de Württemberg (qui lui préférait les charmes capiteux de la future femme de Quentin Crawford) s'est rendue en Russie.
Une fois là, elle a eu la mauvaise idée de se consoler avec un bel officier qui partageait déjà le lit de Catherine II. Peu prêteuse, l'impératrice s'est donc fâchée et la pauvre Louise se morfond, prisonnière, dans un château perdu de Finlande (elle mourra à 23 ans, non sans avoir eu des enfants dont une fille, Catherine de Würtemberg, qui épousera Jérôme Bonaparte).
La cadette ? Caroline, morne, trop bavarde, pas vraiment intelligente, n'a pas grand chose à offrir.
Ce qui ne l'empêchera pas d'épouser son cousin germain le prince de Galles, héritier de Georges III, et de devenir reine d'Angleterre (enfin pas vraiment... peu de temps après le mariage, les deux époux qui ne peuvent s'encadrer, se séparent d'un commun accord. Devenu Georges IV, son mari ne reculera pas devant le scandale, lui intentant de nombreux procès pour adultère et lui interdira d'être présente au couronnement et de porter son titre de reine. Elle mourra un an plus tard). Quant au duc, il sera vaincu à Valmy, se prendra une raclée face aux troupes de Hoche et mourra finalement de ses blessures.
Pour une meilleure idée de l'état pathétique dans lequel est tombé l'Allemagne, vous pouvez lire les souvenirs de voyage de Léger de sans fonds, un voyageur anonyme ne manquant pas d'humour, qui séjourna longuement sur place. Homme raffiné et tendance, à la pointe de la mode, il crût être revenu au Moyen Age :"Le mot est fort, je l'avoue, mais je le répète : quel nom donner à des vandales fumant lorsqu'ils ne boivent pas et buvant dès qu'ils quittent la pipe, fort peu doués pour convenir à la moindre finesse. Autant imaginer un papillon égaré parmi les chenilles". Chou blanc auprès des dames aussi, totalement hermétiques à l'art de converser et au marivaudage à la française : elles le surnommèrent Wind-Gentel, traduisez "poche de vent"... "J'aurais donc parcouru 400 lieues pour trouver uniquement un sobriquet". Pas de bol...
Calonne- Messages : 1134
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Je te remercie, mon cher Calonne, pour ce petit aperçu bien utile " des Allemagnes ".
Je me suis permis ( et non pas " permise " , la féminisation de l'orthographe m'horripile ) d'insérer dans ton message quelques illustrations que m'a fournies ta Tatie Wikie.
Je me suis permis ( et non pas " permise " , la féminisation de l'orthographe m'horripile ) d'insérer dans ton message quelques illustrations que m'a fournies ta Tatie Wikie.
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Mme de Sabran- Messages : 55517
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Grand merci !
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Calonne- Messages : 1134
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
... mais je t'en prie, c'est un plaisir !
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
L'Italie
Situation comparable plus au sud. On pourrait là aussi utiliser le pluriel car l'Italie en tant que telle est loin d'exister (elle ne le sera qu'en 1861). Autant contempler un manteau d'Arlequin, une mosaïques de républiques, villes, principautés et royaumes de rien du tout. Inventaire :
Le royaume de Piémont-Sardaigne a sa capitale à Turin. Il existe depuis 1720 à peine et appartient à la maison des ducs de Savoie. Il comprend à notre date l'île de Sardaigne, la Savoie, le Piémont, la vallée d'Aoste et le comté de Nice. L'ensemble fait d'ailleurs plus ou moins partie du Saint Empire Romain Germanique vu plus haut. Dépendant de l'Espagne jusqu'en 1714, il passe donc sous contrôle autrichien en 1720 via les ducs de Savoie (leur précédente capitale était Chambéry). A notre date, 1789, c'est Victor Amédée III de Savoie qui règne, le papa de la comtesse de Provence et de la comtesse d'Artois. Son fiston et successeur a lui épousé Clotilde, soeur de Louis XVI.
Venise ? Les vénitiens ne se sont pas remis de la découverte du Nouveau Monde et d'un univers atlantique venu prendre la place d'un univers méditerranéen. La Sérenissime ne brille plus que pendant son carnaval.
Gênes ? La puissante et prospère république de Gênes a beau avoir été surnommée "la Superbe République", elle n'est plus qu'un souvenir, réduit à de la figuration. Elle a même dû céder la Corse à la France en 1768.
La Toscane ? Un grand duché prospère et actif, sous domination autrichienne. C'est Léopold, futur empereur d'Autriche, frère de Marie-Antoinette qui y règne, en despote éclairé. Il donna une prospérité certaine à son duché en même temps que 16 enfants à sa femme, même si ses sujets n'appréciaient pas son air froid et réservé, sa rigueur qui tournait parfois à l'avarice. Il fermera ses portes aux émigrés sous la Révolution et se contentera, devenu empereur d'Autriche, de bercer sa pauvre soeur la reine de France de belles promesses.
Les états pontificaux ? Paradoxalement, ils sont parmi les plus corrompus, amoraux et mal administrés de la péninsule. Un vaste ensemble au centre du pays, de Bologne au sud de Rome et qui en a vu de belles, de Jules II le pape terrible aux Borgia. En 1789, c'est Pie VI qui pose ses augustes fesses sur le trône de Saint-Pierre et sous le magnifique baldaquin du Bernin. Il impose une législation anti-juive sévère et, dans le même temps, renoue avec les fastes des Borgia. Il se heurte à Joseph II, frère de Marie-Antoinette, qui a ses idées bien à lui sur la religion et va même le voir à Vienne en 1782 pour tenter de le faire changer d'avis. Il est certainement plus détendu en compagnie du délicieux cardinal de Bernis, notre ambassadeur à Rome, "babet la bouquetière", qui dit tout avec des fleurs, même les choses déplaisantes et qui accueillera madame de Polignac de passage ("un sourire parmi les ruines") et Mesdames, qu'il ne pourra recevoir avec son faste coutumier, ses biens ayant été saisis entretemps par la Révolution. C'est également Pie VI qui se prendra la Révolution en pleine poire. Anecdote amusante : les romains insatisfaits écrivaient leurs doléances ou reproches sur le socle de la statue de Pasquino, un fragment de statue de l'Antiquité, devenue "la statue parlante". C'est là que les gens déversaient leurs griefs contre la cour papale, par des graffitis, des billets, des inscriptions, qui permettaient de se faire une idée de l'état d'esprit de l'opinion publique. Régulièrement, un cardinal allait y lire les messages pour en rendre compte au Pape. Elle existe toujours, du côté de la Piazza Navona et on y trouve encore des messages...
Le royaume de Naples ? Une colonie anglaise camouflée. Rien d'étonnant à ce que le meilleur ami du couple royal soit un certain Horatio Nelson, toujours prêt à faire relâche à Naples pour y retrouver son ardente maîtresse, Emma Hamilton, épouse de l'ambassadeur anglais sur place... Le royaume de Naples et des deux Siciles occupe tout le sud de l'Italie, les provinces les plus pauvres à l'époque. A Naples, la capitale, déambule une foule désoeuvrée, oisive, vivant d'on ne sait trop quoi, dominée par une noblesse surtitrée et toute aussi désoeuvrée et un clergé rapace. Heureusement, il fait beau. Le couple royal ? Tout droit sorti de la Comedia dell'arte... Ferdinand Ier, moche, peu cultivé, faible, est surnommé le roi Nasone (gros nez) par ses sujets, en raison de son appendice nasal imposant. Il est gentil mais pas très futé. La reine ? Marie-Caroline, soeur de Marie-Antoinette. Restée autrichienne de coeur, elle n'est devenue napolitaine que sur un point, la facilité des moeurs. Son favori et peut-être amant est John Acton, arrivé à Naples en 1778 pour prendre la tête de la marine, puis de l'armée royale. Il vivait au palais Salerno, d'où il dirigeait les intérêts de l'Angleterre de concert avec l'ambassadeur Hamilton. Uni le couple royal ? "Il est bon, il est brave, mais c'est un bouffon" écrivait Marie-Caroline sur son mari tandis que ce dernier assurait, au lendemain de ses noces, que sa femme "transpirait comme un porc". Ce qui ne les empêcha pas d'avoir 18 enfants...
Tutto va bene...
Calonne- Messages : 1134
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
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... demain est un autre jour .
Mme de Sabran- Messages : 55517
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Pour les amateurs de curiosités, la fameuse "statue parlante" :
Très dégradée, elle représenterait un gladiateur, Pasquin.
Depuis le XVIème siècle, les romains ont donc l'habitude d'inscrire sur son socle leurs doléances, critiques, remarques, sous forme de graffitis, billets... Un bon moyen pour les Papes de l'époque d'avoir une idée de l'état d'esprit de la population ou de leur image dans l'opinion. L'usage est toujours d'actualité, la municipalité a même mis en place à côté un panneau pour y afficher les messages mais les romains continuent à écrire et afficher leurs "pasquinades" sur le socle. Au grand dam des autorités qui le font nettoyer régulièrement...
Elle se trouve sur la place Pasquino, dans un angle du palais Braschi.
Source : relocos.fr
Très dégradée, elle représenterait un gladiateur, Pasquin.
Depuis le XVIème siècle, les romains ont donc l'habitude d'inscrire sur son socle leurs doléances, critiques, remarques, sous forme de graffitis, billets... Un bon moyen pour les Papes de l'époque d'avoir une idée de l'état d'esprit de la population ou de leur image dans l'opinion. L'usage est toujours d'actualité, la municipalité a même mis en place à côté un panneau pour y afficher les messages mais les romains continuent à écrire et afficher leurs "pasquinades" sur le socle. Au grand dam des autorités qui le font nettoyer régulièrement...
Elle se trouve sur la place Pasquino, dans un angle du palais Braschi.
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J'ai oublié hier, je ne sais pas ce que sera demain, mais aujourd'hui je t'aime
Calonne- Messages : 1134
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Cette statue parle comme les Colosses de Memnon chantent .
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Mme de Sabran- Messages : 55517
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
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