Ailleurs dans le monde en 1789
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LE FORUM DE MARIE-ANTOINETTE :: La France et le Monde au XVIIIe siècle :: Histoire et événements ailleurs dans le monde
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Après notre halte chez les néerlandais, reprenons notre course pour nous intéresser aux possessions espagnoles.
Alors bien sûr, c'est l'Amérique du Sud qui vient en premier à notre esprit. Mais justement, faisons d'abord escale en des endroits auxquels on ne pense pas toujours et que les espagnols tiennent fermement en 1789.
Les Phillipines : cet archipel (plus de 7000 îles...) est possession espagnole depuis 1565. Il a été découvert par Fernando Magellan, portugais travaillant pour le compte de l'Espagne.
Malheureusement pour les phillipins originels, tribus vivant tranquillement de pêche, chasse et ceuillette, les espagnols ne sont pas les premiers arrivants envahissants... Bien plus tôt, les chinois s'étaient intéressés aux richesses de l'archipel, de même qu'indonésiens, indiens et même lointains négociants arabes. Perles, corail, riz et autres denrées attirèrent donc de hardis marchands de ces pays qui installèrent des comptoirs commerciaux importants sur place.
Mais revenons aux espagnols : ces derniers ne rencontrent guère de résistance et s'installent donc. Plus que les richesses locales, c'est la position géographique de l'archipel qui les motive, offrant une base de départ rêvée pour partir évangéliser la Chine et le Japon. Hé oui, les prêtres ne sont jamais loin des marchands qui suivent eux-mêmes les explorateurs...
Mais les fiers samouraï et les Fils du Ciel envoient paître les missionaires qui vont alors se rabattre sur l'archipel, y implantant la foi chrétienne de manière durable. Et en 1789, l'Eglise a les coudées franches : officiellement, les Phillipines sont administrées depuis... Mexico, par le Vice-Roi (Le second étant à Lima au Pérou). Vice-Roi qui a d'autres chats à fouetter et qui doit en plus attendre les ordres de Madrid, à six mois de traversée environ... Autant dire que l'Eglise, aux Phillipines, est tranquille. Elle a couvert le pays d'églises et de missions et s'est surtout constitué un joli pactole immobilier avec de grands terrains et domaines qu'elle revend, à l'occasion, à des aventuriers ou des audacieux qui viennent s'installer dans l'archipel. Au siècle suivant, on verra apparaître des plantations, de grands domaines où l'on cultive le riz, les arbres (l'hévéa majoritairement) et les essences précieuses pour la fabrication des huiles, savons ou parfums.
Il faudra attendre la fin du XIXème siècle pour voir apparaître un fort sentiment nationaliste phillipin, divisé en deux : ceux qui prônent l'indépendance par les armes et ceux qui tentent un rapprochement avec Madrid en demandant une représentation au Cortès, le Parlement espagnol.
L'Espagne perd l'archipel en 1898 suite à une guerre avec les USA : les Phillipines sont vendues aux USA pour 20 millions de dollars de l'époque. Et de nouveaux maîtres prennent la place des espagnols...
Mais en 1789, les Phillipines sont encore une terre au parfum d'aventure et d'exotisme, un chapelet d'îles encore souvent vierges et sauvages, où rôdent pirates, aventuriers et trafiquants, chinois, malais, portugais ou autres tandis que les différents ordres religieux se disputent âprement, de chapelles en missions le long des côtes...
Alors bien sûr, c'est l'Amérique du Sud qui vient en premier à notre esprit. Mais justement, faisons d'abord escale en des endroits auxquels on ne pense pas toujours et que les espagnols tiennent fermement en 1789.
Les Phillipines : cet archipel (plus de 7000 îles...) est possession espagnole depuis 1565. Il a été découvert par Fernando Magellan, portugais travaillant pour le compte de l'Espagne.
Malheureusement pour les phillipins originels, tribus vivant tranquillement de pêche, chasse et ceuillette, les espagnols ne sont pas les premiers arrivants envahissants... Bien plus tôt, les chinois s'étaient intéressés aux richesses de l'archipel, de même qu'indonésiens, indiens et même lointains négociants arabes. Perles, corail, riz et autres denrées attirèrent donc de hardis marchands de ces pays qui installèrent des comptoirs commerciaux importants sur place.
Mais revenons aux espagnols : ces derniers ne rencontrent guère de résistance et s'installent donc. Plus que les richesses locales, c'est la position géographique de l'archipel qui les motive, offrant une base de départ rêvée pour partir évangéliser la Chine et le Japon. Hé oui, les prêtres ne sont jamais loin des marchands qui suivent eux-mêmes les explorateurs...
Mais les fiers samouraï et les Fils du Ciel envoient paître les missionaires qui vont alors se rabattre sur l'archipel, y implantant la foi chrétienne de manière durable. Et en 1789, l'Eglise a les coudées franches : officiellement, les Phillipines sont administrées depuis... Mexico, par le Vice-Roi (Le second étant à Lima au Pérou). Vice-Roi qui a d'autres chats à fouetter et qui doit en plus attendre les ordres de Madrid, à six mois de traversée environ... Autant dire que l'Eglise, aux Phillipines, est tranquille. Elle a couvert le pays d'églises et de missions et s'est surtout constitué un joli pactole immobilier avec de grands terrains et domaines qu'elle revend, à l'occasion, à des aventuriers ou des audacieux qui viennent s'installer dans l'archipel. Au siècle suivant, on verra apparaître des plantations, de grands domaines où l'on cultive le riz, les arbres (l'hévéa majoritairement) et les essences précieuses pour la fabrication des huiles, savons ou parfums.
Il faudra attendre la fin du XIXème siècle pour voir apparaître un fort sentiment nationaliste phillipin, divisé en deux : ceux qui prônent l'indépendance par les armes et ceux qui tentent un rapprochement avec Madrid en demandant une représentation au Cortès, le Parlement espagnol.
L'Espagne perd l'archipel en 1898 suite à une guerre avec les USA : les Phillipines sont vendues aux USA pour 20 millions de dollars de l'époque. Et de nouveaux maîtres prennent la place des espagnols...
Mais en 1789, les Phillipines sont encore une terre au parfum d'aventure et d'exotisme, un chapelet d'îles encore souvent vierges et sauvages, où rôdent pirates, aventuriers et trafiquants, chinois, malais, portugais ou autres tandis que les différents ordres religieux se disputent âprement, de chapelles en missions le long des côtes...
Calonne- Messages : 1098
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Poursuivons en terre espagnole avec les possessions ibériques en Amérique... du Nord.
Hé oui, il n'y avait pas que l'Amérique Latine. En Amérique du Nord, en 1789, les espagnols sont les maîtres de la "Nouvelle Espagne" qui comprend la Floride, le Texas, le Nouveau-Mexique, l'Arizona et, gros morceau, la Californie.
Cette dernière est espagnole depuis le XVIème siècle, principalement occupée par les ordres religieux. Missions, monastères et couvents parsèment la côte et ont donné lieu à quantité de localités toujours existantes, Carmel, Montecito, Santa Barbara (Hé oui...) Sans oublier deux bourgades insignifiantes fondées respectivement en 1776 et 1781, San Francisco et Los Angeles. Cette dernière, à cette époque, n'est qu'un pueblo (village) groupé autour de son église. La Californie ne sera perdue qu'au siècle suivant. Rapellez-vous les aventures d'un certain Don Diego de la Vega, alias un certain justicier qui surgit de la nuit au galop, et qui se passent à Los Angeles, toujours possession espagnole.
Les autres états de la région se partagent également entre religieux et indiens, en Arizona et Nouveau-Mexique principalement, la "cohabitation" étant plus ou moins heureuse selon les lieux et époques.
La Floride, elle, a été cédée aux anglais par le Traité de Paris en 1763. Elle est restée fidèle à la couronne pendant la guerre d'Indépendance, mais retombe entre les mains espagnoles au Traité de Versailles de 1783. Elle sera cédée aux USA en 1819.
Là aussi, les pauvres indiens et amérindiens ne sont que des perdants et font les frais de ces conflits successifs. Beaucoup s'enfuient vers les nombreuses îles au large de la péninsule, îles devenues repaires de pirates, flibustiers et esclaves en fuite. D'autant plus que les possessions espagnoles dans les Antilles sont toutes proches (Saint-Domingue, Cuba, Porto Rico...)
Signalons enfin que les territoires que nous venons d'aborder étaient gérés par l'un des deux Vice-Roi, celui de Mexico.
Hé oui, il n'y avait pas que l'Amérique Latine. En Amérique du Nord, en 1789, les espagnols sont les maîtres de la "Nouvelle Espagne" qui comprend la Floride, le Texas, le Nouveau-Mexique, l'Arizona et, gros morceau, la Californie.
Cette dernière est espagnole depuis le XVIème siècle, principalement occupée par les ordres religieux. Missions, monastères et couvents parsèment la côte et ont donné lieu à quantité de localités toujours existantes, Carmel, Montecito, Santa Barbara (Hé oui...) Sans oublier deux bourgades insignifiantes fondées respectivement en 1776 et 1781, San Francisco et Los Angeles. Cette dernière, à cette époque, n'est qu'un pueblo (village) groupé autour de son église. La Californie ne sera perdue qu'au siècle suivant. Rapellez-vous les aventures d'un certain Don Diego de la Vega, alias un certain justicier qui surgit de la nuit au galop, et qui se passent à Los Angeles, toujours possession espagnole.
Les autres états de la région se partagent également entre religieux et indiens, en Arizona et Nouveau-Mexique principalement, la "cohabitation" étant plus ou moins heureuse selon les lieux et époques.
La Floride, elle, a été cédée aux anglais par le Traité de Paris en 1763. Elle est restée fidèle à la couronne pendant la guerre d'Indépendance, mais retombe entre les mains espagnoles au Traité de Versailles de 1783. Elle sera cédée aux USA en 1819.
Là aussi, les pauvres indiens et amérindiens ne sont que des perdants et font les frais de ces conflits successifs. Beaucoup s'enfuient vers les nombreuses îles au large de la péninsule, îles devenues repaires de pirates, flibustiers et esclaves en fuite. D'autant plus que les possessions espagnoles dans les Antilles sont toutes proches (Saint-Domingue, Cuba, Porto Rico...)
Signalons enfin que les territoires que nous venons d'aborder étaient gérés par l'un des deux Vice-Roi, celui de Mexico.
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J'ai oublié hier, je ne sais pas ce que sera demain, mais aujourd'hui je t'aime
Calonne- Messages : 1098
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Et si nous reprenions notre petit tour du monde ? Intéressons-nous maintenant au Portugal...
Certes, en 1789, le royaume lusitanien n'est plus que l'ombre de lui-même, sans oublier le terrible séisme de Lisbonne en 1755. Mais il a encore de beaux restes et pas toujours où l'on s'y attend...
Le Brésil bien sûr, découvert en 1500 et colonisé à partir de 1530. La famille royale portugaise s'y réfugiera (si tu vas à Rio...) pour échapper aux troupes de Napoléon. Seule la côte est habitée alors, le reste du territoire est vierge.
Mais il y surtout l'Afrique et le Moyen-Orient. Hé oui ! On l'oublie souvent, mais les hardis navigateurs portugais ont laissé en ces contrées une empreinte durable. Sénégal, Mauritanie, Golfe de Guinée, l'île de Zanzibar et ses épices fabuleuses, le sud de la Somalie, le Ghana, le Mozambique... De nombreux comptoirs portugais sont alors implantés le long des côtes africaines du côté de l'océan indien. Les négociants venus de Lisbonne s'installent dès le XVème siècle à Mogadiscio, Sofala, Kilwa... supplantant les marchands arabes et perses. Et c'est un missionnaire portugais qui débarque, stupéfait, à la cour impériale d'Ethiopie, découvrant la fabuleuse cité monastique de Lalibela et ses églises rupestres.
Côté oriental, le ton monte entre Lisbonne et Constantinople. Hé oui ! Nos portugais se sont implantés du côté d'Ormuz, d'Oman, du Golfe Persique... Au point de menacer les villes saintes de l'Islam et d'inquiéter Soliman le Magnifique. Les portugais vont jusqu'à verrouiller la Mer Rouge, fermant le Golfe Arabo-Persique aux galères musulmanes, frappant à mort le commerce de ces derniers, la Mecque elle-même est menacée.
Aujourd'hui encore, on retrouve dans ces régions, surtout au Sultanat d'Oman, de nombreuses forteresses portugaises. Sans oublier les châteaux de Gondar, en Ethiopie, bâtis sur le modèle portugais de l'époque par les Negus (empereurs).
L'Extrême-Orient ? Nos portugais y possèdent Macao, ont établis des comptoirs en Chine, au Japon (Nagasaki), en Inde et gardent une influence certaine sur place grâce aux missionnaires jésuites. Ils sont depuis longtemps en rivalité dans l'océan indien avec les hollandais pour la route des épices.
Enfin, plus près de nous, il y a des possessions comme Madère, les Açores, le Cap-Vert...
En 1789, les portugais ont perdu depuis longtemps une partie de cet empire, comme Ceylan (actuel Sri-Lanka), mais aussi Malacca, Ormuz, les îles des Moluques...
Mais ils tiennent solidement le Brésil (ils le perdront en 1822, le souverain de l'époque proclamant l'indépendance du pays) et surtout leurs possessions africaines : ces dernières n'obtiendront leur indépendance qu'à la fin du XXème siècle pour la plupart tandis que Macao sera rétrocédé à la Chine en 1999.
Certes, en 1789, le royaume lusitanien n'est plus que l'ombre de lui-même, sans oublier le terrible séisme de Lisbonne en 1755. Mais il a encore de beaux restes et pas toujours où l'on s'y attend...
Le Brésil bien sûr, découvert en 1500 et colonisé à partir de 1530. La famille royale portugaise s'y réfugiera (si tu vas à Rio...) pour échapper aux troupes de Napoléon. Seule la côte est habitée alors, le reste du territoire est vierge.
Mais il y surtout l'Afrique et le Moyen-Orient. Hé oui ! On l'oublie souvent, mais les hardis navigateurs portugais ont laissé en ces contrées une empreinte durable. Sénégal, Mauritanie, Golfe de Guinée, l'île de Zanzibar et ses épices fabuleuses, le sud de la Somalie, le Ghana, le Mozambique... De nombreux comptoirs portugais sont alors implantés le long des côtes africaines du côté de l'océan indien. Les négociants venus de Lisbonne s'installent dès le XVème siècle à Mogadiscio, Sofala, Kilwa... supplantant les marchands arabes et perses. Et c'est un missionnaire portugais qui débarque, stupéfait, à la cour impériale d'Ethiopie, découvrant la fabuleuse cité monastique de Lalibela et ses églises rupestres.
Côté oriental, le ton monte entre Lisbonne et Constantinople. Hé oui ! Nos portugais se sont implantés du côté d'Ormuz, d'Oman, du Golfe Persique... Au point de menacer les villes saintes de l'Islam et d'inquiéter Soliman le Magnifique. Les portugais vont jusqu'à verrouiller la Mer Rouge, fermant le Golfe Arabo-Persique aux galères musulmanes, frappant à mort le commerce de ces derniers, la Mecque elle-même est menacée.
Aujourd'hui encore, on retrouve dans ces régions, surtout au Sultanat d'Oman, de nombreuses forteresses portugaises. Sans oublier les châteaux de Gondar, en Ethiopie, bâtis sur le modèle portugais de l'époque par les Negus (empereurs).
L'Extrême-Orient ? Nos portugais y possèdent Macao, ont établis des comptoirs en Chine, au Japon (Nagasaki), en Inde et gardent une influence certaine sur place grâce aux missionnaires jésuites. Ils sont depuis longtemps en rivalité dans l'océan indien avec les hollandais pour la route des épices.
Enfin, plus près de nous, il y a des possessions comme Madère, les Açores, le Cap-Vert...
En 1789, les portugais ont perdu depuis longtemps une partie de cet empire, comme Ceylan (actuel Sri-Lanka), mais aussi Malacca, Ormuz, les îles des Moluques...
Mais ils tiennent solidement le Brésil (ils le perdront en 1822, le souverain de l'époque proclamant l'indépendance du pays) et surtout leurs possessions africaines : ces dernières n'obtiendront leur indépendance qu'à la fin du XXème siècle pour la plupart tandis que Macao sera rétrocédé à la Chine en 1999.
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Calonne- Messages : 1098
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Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Calonne a écrit:Et si nous reprenions notre petit tour du monde ?.
C'est parti, mon kiki !!! 48333310 ( ventre à terre, comme toujours ! )
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Mme de Sabran- Messages : 55309
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Tu vois comme nous sommes restés à quai depuis ton absence?
Merci de te faire Philéas et de nous emporter à nouveau dans tes bagages !
Bien à toi
Merci de te faire Philéas et de nous emporter à nouveau dans tes bagages !
Bien à toi
Invité- Invité
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Hé bien, poursuivons avec la Perse...
Rappelez-vous Angélique et le Roi où notre belle héroïne devait "accueillir" l'envoyé du souverain perse à Versailles...
La Perse, Iran actuel, c'est une civilisation millénaire qui, au XVIIIème siècle, a encore de beaux restes et une partition à jouer. C'est une route vers l'Extrême-Orient et de nombreux rois européens s'y sont intéressés. Même notre Loulou ! En 1784, il envoie le comte de Ferrière comme envoyé extraordinaire à la cour du Shâh. Avant de revenir sur ce personnage assez trouble, coup d'oeil donc sur la Perse de l'époque.
Cette dernière est dominée par le conflit avec les afghans, en une succession de guerres, de défaites et de victoires. En 1722, les afghans se font menaçants, s'emparent d'une partie du pays. En 1730, ils sont repoussés et en 1736, c'est l'avènement d'une nouvelle dynastie, fondée par Nadir Shâh et qui fait rayonner l'influence perse jusqu'en Inde. Voilà même l'afghanistan occupé (il le restera jusqu'en 1747).
A l'époque qui nous concerne, c'est Kerim Shâh qui règne. Erudit, féru de poésie et de jardins, il déplaça la capitale à Chirâz, y fît édifier de magnifiques monuments (dont une superbe citadelle) et jardins, y consacra des bâtiments à Hâfiz, le grand poète persan.
Il s'était pourtant hissé au pouvoir au terme d'une guerre civile sanglante où il n'avait pas fait dans la dentelle, mais bon... Sa succession, en 1794, sera chaotique, dégénérant à nouveau en guerre civile. Une guerre qui verra la victoire de l'ennuque Mohammed Khan, qui fondera une nouvelle dynastie qui règnera jusqu'en 1925 (costaud pour un ennuque quand-même...)
Mais revenons à notre ambassade...
Curieux personnage que Louis-François, comte de Ferrières-Sauvebeuf, né en 1762 au château du Moulin d’Arnac en Corrèze... Aventurier, espion, il est l'agent principal de Vergennes en Orient. Turquie (où Vergennes fût notre ambassadeur de longues années), Syrie, Perse, Bagdad... Notre homme rôde, de déserts en palais, de jardins en bazars, pour le compte de la France (et pour le sien aussi, impliqué dans un trafic d'armes entre la France et la Turquie). A Constantinople, il entre en conflit avec notre ambassadeur, Choiseul-Gouffier, qui le fait renvoyer. Déguisé en turc, notre homme fuit la capitale par les Balkans, mais il est arrêté près de Belgrade et renvoyé à Constantinople où il sera incarcéré avant d'être expulsé vers la France. Précédé d'une réputation sulfureuse d'intrigant, ne pouvant plus compter sur Vergennes (mort entretemps) et poursuivi par la haine de Choiseul-Gouffier, il est incarcéré au château d'If, sur lettre de cachet en 1788.
Sous la Révolution, fait prisonnier, il sauve sa peau en devenant un des principaux indicateurs du Comité de Sûreté Générale, évoluant en eaux troubles, trempant dans combines et intrigues depuis sa cellule.
Libéré par le 9 Thermidor, il cherche un emploi, approchera Fouché, puis Talleyrand, mais ses offres de service seront repoussées, l'homme sent trop le souffre... Il se retire finalement sur ses terres où il meurt en 1814, assassiné. Par qui ? Une victime de ses dénonciations sous la Révolution voulant lui faire payer ? Mystère...
Rappelez-vous Angélique et le Roi où notre belle héroïne devait "accueillir" l'envoyé du souverain perse à Versailles...
La Perse, Iran actuel, c'est une civilisation millénaire qui, au XVIIIème siècle, a encore de beaux restes et une partition à jouer. C'est une route vers l'Extrême-Orient et de nombreux rois européens s'y sont intéressés. Même notre Loulou ! En 1784, il envoie le comte de Ferrière comme envoyé extraordinaire à la cour du Shâh. Avant de revenir sur ce personnage assez trouble, coup d'oeil donc sur la Perse de l'époque.
Cette dernière est dominée par le conflit avec les afghans, en une succession de guerres, de défaites et de victoires. En 1722, les afghans se font menaçants, s'emparent d'une partie du pays. En 1730, ils sont repoussés et en 1736, c'est l'avènement d'une nouvelle dynastie, fondée par Nadir Shâh et qui fait rayonner l'influence perse jusqu'en Inde. Voilà même l'afghanistan occupé (il le restera jusqu'en 1747).
A l'époque qui nous concerne, c'est Kerim Shâh qui règne. Erudit, féru de poésie et de jardins, il déplaça la capitale à Chirâz, y fît édifier de magnifiques monuments (dont une superbe citadelle) et jardins, y consacra des bâtiments à Hâfiz, le grand poète persan.
Il s'était pourtant hissé au pouvoir au terme d'une guerre civile sanglante où il n'avait pas fait dans la dentelle, mais bon... Sa succession, en 1794, sera chaotique, dégénérant à nouveau en guerre civile. Une guerre qui verra la victoire de l'ennuque Mohammed Khan, qui fondera une nouvelle dynastie qui règnera jusqu'en 1925 (costaud pour un ennuque quand-même...)
Mais revenons à notre ambassade...
Curieux personnage que Louis-François, comte de Ferrières-Sauvebeuf, né en 1762 au château du Moulin d’Arnac en Corrèze... Aventurier, espion, il est l'agent principal de Vergennes en Orient. Turquie (où Vergennes fût notre ambassadeur de longues années), Syrie, Perse, Bagdad... Notre homme rôde, de déserts en palais, de jardins en bazars, pour le compte de la France (et pour le sien aussi, impliqué dans un trafic d'armes entre la France et la Turquie). A Constantinople, il entre en conflit avec notre ambassadeur, Choiseul-Gouffier, qui le fait renvoyer. Déguisé en turc, notre homme fuit la capitale par les Balkans, mais il est arrêté près de Belgrade et renvoyé à Constantinople où il sera incarcéré avant d'être expulsé vers la France. Précédé d'une réputation sulfureuse d'intrigant, ne pouvant plus compter sur Vergennes (mort entretemps) et poursuivi par la haine de Choiseul-Gouffier, il est incarcéré au château d'If, sur lettre de cachet en 1788.
Sous la Révolution, fait prisonnier, il sauve sa peau en devenant un des principaux indicateurs du Comité de Sûreté Générale, évoluant en eaux troubles, trempant dans combines et intrigues depuis sa cellule.
Libéré par le 9 Thermidor, il cherche un emploi, approchera Fouché, puis Talleyrand, mais ses offres de service seront repoussées, l'homme sent trop le souffre... Il se retire finalement sur ses terres où il meurt en 1814, assassiné. Par qui ? Une victime de ses dénonciations sous la Révolution voulant lui faire payer ? Mystère...
Calonne- Messages : 1098
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Calonne a écrit:
Curieux personnage que Louis-François, comte de Ferrières-Sauvebeuf, né en 1762 au château du Moulin d’Arnac en Corrèze... ..
Joli, n'est-ce pas ?
J'adore ces portraits en silhouette .
Silhouette portrait of a man, possibly the traveller Count Louis-François de Ferrières-Sauveboeuf.
Excerpt from aria written for male voice.
Il nous raconte ses aventures ! :n,,;::::!!!:
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Mme de Sabran- Messages : 55309
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Le type n'a pas l'air très recommandable... Son activité sous la Terreur est pour le moins trouble. D'après Tatie Wikie, il aurait donc servi "d'indic" aux révolutionnaires, espérant par là retarder sa propre comparution devant Fouquier-Tinville.
Période trouble également en Turquie lorsqu'il entre en conflit avec Choiseul-Gouffier...
Période trouble également en Turquie lorsqu'il entre en conflit avec Choiseul-Gouffier...
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Calonne- Messages : 1098
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Cette fin mystérieuse rappelle celle du comte d'Antraigues ...
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Mme de Sabran- Messages : 55309
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Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Reprenons un instant notre petit tour du monde...
Nous voici de retour en Chine, à la cour de l'empereur Kien Long (Qianlong). Le saviez-vous ? En 1765, l'empereur passe à Louis XV une commande exceptionnelle : seize estampes grand format, Batailles de l'empereur de Chine afin d'illustrer une de ses campagnes en Asie Centrale. Leur réalisation fut dirigée par Charles-Nicolas Cochin fils, à partir, entre autres, de dessins des jésuites français Giuseppe Castiglione et de Jean-Denis Attiret et d'après les peintures sur papier d'An Deyi. Les gravures furent livrées avec les plaques de cuivre ainsi que les outils d'impression nécessaires.
Il s'agissait pour l'empereur, assez ouvert d'esprit, de promouvoir la technique de la gravure en creux dans le Céleste Empire. Une commande assez exceptionnelle, qui répond au goût des "chinoiseries" observé en France à cette époque.
Admiratif d'estampes occidentales qui lui sont montrées par des jésuites séjournant à la cour impériale, le Fils du Ciel décide donc de passer cette commande pour illustrer ses conquêtes de 1755 à 1759. Il demande alors à quatre missionnaires en poste à Pékin d'exécuter les dessins avant de les faire envoyer à Paris. C'est Marigny, directeur général des bâtiments du roi, qui transmet alors la commande impériale aux ateliers français avant de réexpédier le précieux convoi vers l'Empire du Milieu.
Un échange culturel inattendu, qui tranche singulièrement avec l'échec cuisant de l'ambassade anglaise de 1792, à la cour de ce même Quianlong...
Nous voici de retour en Chine, à la cour de l'empereur Kien Long (Qianlong). Le saviez-vous ? En 1765, l'empereur passe à Louis XV une commande exceptionnelle : seize estampes grand format, Batailles de l'empereur de Chine afin d'illustrer une de ses campagnes en Asie Centrale. Leur réalisation fut dirigée par Charles-Nicolas Cochin fils, à partir, entre autres, de dessins des jésuites français Giuseppe Castiglione et de Jean-Denis Attiret et d'après les peintures sur papier d'An Deyi. Les gravures furent livrées avec les plaques de cuivre ainsi que les outils d'impression nécessaires.
Il s'agissait pour l'empereur, assez ouvert d'esprit, de promouvoir la technique de la gravure en creux dans le Céleste Empire. Une commande assez exceptionnelle, qui répond au goût des "chinoiseries" observé en France à cette époque.
Admiratif d'estampes occidentales qui lui sont montrées par des jésuites séjournant à la cour impériale, le Fils du Ciel décide donc de passer cette commande pour illustrer ses conquêtes de 1755 à 1759. Il demande alors à quatre missionnaires en poste à Pékin d'exécuter les dessins avant de les faire envoyer à Paris. C'est Marigny, directeur général des bâtiments du roi, qui transmet alors la commande impériale aux ateliers français avant de réexpédier le précieux convoi vers l'Empire du Milieu.
Un échange culturel inattendu, qui tranche singulièrement avec l'échec cuisant de l'ambassade anglaise de 1792, à la cour de ce même Quianlong...
Calonne- Messages : 1098
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Mais oui ! Quianlong est une ancienne connaissance !
Nous l'avons souventes fois évoqué au gré de nos sujets chinoisants ... Cela a toujours été l'occasion pour la nuit, la neige de nous montrer des merveilles ...
Nous l'avons souventes fois évoqué au gré de nos sujets chinoisants ... Cela a toujours été l'occasion pour la nuit, la neige de nous montrer des merveilles ...
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Mme de Sabran- Messages : 55309
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Il est considéré comme l'un des plus grands empereurs, le quatrième de la dynastie Quing pour être exact. Son règne marque l'apogée de la civilisation chinoise classique, une expansion territoriale très grande et une non moins grande stabilité. Les premiers signes d'engourdissement et d'immobilisme également, vers la fin de son long règne (1735-1796), lui-même ayant vécu jusqu'à un âge avancé.
Un personnage incontournable de sa cour est le peintre jésuite Giuseppe Castiglione qui devînt son portraitiste favori. Il resta 50 ans à la cour impériale où il réalisa, dans l'art du portrait, une fusion entre art occidental et art chinois. Il introduisît par exemple un réalisme certain, peignant l'empereur, l'impératrice et certains dignitaires à différents âges de leur vie, alors que les portraits des souverains étaient souvent idéalisés, très codifiés, présentant une figure "éternelle", figée dans l'image qu'on voulait en donner.
Un personnage incontournable de sa cour est le peintre jésuite Giuseppe Castiglione qui devînt son portraitiste favori. Il resta 50 ans à la cour impériale où il réalisa, dans l'art du portrait, une fusion entre art occidental et art chinois. Il introduisît par exemple un réalisme certain, peignant l'empereur, l'impératrice et certains dignitaires à différents âges de leur vie, alors que les portraits des souverains étaient souvent idéalisés, très codifiés, présentant une figure "éternelle", figée dans l'image qu'on voulait en donner.
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Calonne- Messages : 1098
Date d'inscription : 01/01/2014
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
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Mme de Sabran- Messages : 55309
Date d'inscription : 21/12/2013
Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Il s'agit d'un portrait que Louis XVI avait accroché dans le Cabinet d'angle, parmi de nombreux autres petits tableaux dont le portrait de sa femme qui fait l'objet de mon avatar.
Il faut imaginer tout un ensemble très hétéroclite, avec comme pièce maîtresse le fameux bureau de son grand-père.
Ce portrait de l'empereur chinois, notons-le, est en porcelaine, matière dont raffolait Louis XVI.
Il disposait aussi dans le genre exotique d'une famille régnante du Bengale.
Parmi les nombreuses étrangetés composant cette collection recouvrant toutes les magnifiques boiseries de cette pièce (ah quel dommage que le château de Versailles ne l'y présente pas car nombreuses sont les pièces disperses dans tout le château !), il y a entre autres un petit portrait d'Henri IV (oui cela se comprend, avec tous les autres ancêtres, comme il se doit) mais en compagnie de Gabrielle d'Estrées !
Il faut imaginer tout un ensemble très hétéroclite, avec comme pièce maîtresse le fameux bureau de son grand-père.
Ce portrait de l'empereur chinois, notons-le, est en porcelaine, matière dont raffolait Louis XVI.
Il disposait aussi dans le genre exotique d'une famille régnante du Bengale.
Parmi les nombreuses étrangetés composant cette collection recouvrant toutes les magnifiques boiseries de cette pièce (ah quel dommage que le château de Versailles ne l'y présente pas car nombreuses sont les pièces disperses dans tout le château !), il y a entre autres un petit portrait d'Henri IV (oui cela se comprend, avec tous les autres ancêtres, comme il se doit) mais en compagnie de Gabrielle d'Estrées !
Invité- Invité
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Enfin peut-être est-ce un autre portrait du même empereur, n'ayant lu son nom que dans les inventaires.
Invité- Invité
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Oui pardon pour mon erreur, Louis XVI disposait de celui-ci :
Mais toujours le même empereur.
Mais toujours le même empereur.
Invité- Invité
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Poursuivons avec... l'Ethiopie.
Où en est, en 1789, le royaume supposé de la reine de Saba, le royaume du Prêtre Jean qui enflamma l'imagination des explorateurs du Moyen-Age ?
L'Ethiopie, nommée également Abyssinie, est très ancienne. Les égyptiens pharaoniques la mentionnent comme "le pays de Punt" et le royaume d'Aksoum, son "ancêtre", devient chrétien dès 330 après JC.
Ce sont les portugais qui, à la fin du Moyen-Age découvrent ce royaume d'Ethiopie, par un de leurs envoyés reçu à la cour impériale, la cour des Negus. Les portugais auront une grande influence sur l'Ethiopie pendant plusieurs années tout en ne restant que des invités.
Au XVIIIème siècle règne la dynastie des empereurs Salomonides qui prétendent descendre des amours de Salomon et de la reine de Saba, rien de moins. Ils ont transféré la capitale à Gondar, ville surplombée d'un vaste ensemble de châteaux, palais, jardins et églises à l'architecture fortement inspirée du style et des techniques portugaises.
Mais l'Ethiopie passe par de sales moments... L'Eglise est divisée, l'empire encerclé par l'Islam (en plein déclin lui-même) vit en vase clos sans plus aucun contact avec l'extérieur, les seigneurs locaux relèvent la tête... En janvier 1769, l'empereur Ioyas Ier est tué et commence alors "l'ère des Princes" où l'empire va être dirigé de fait par les seigneurs et maires du palais, l'empereur réduit à un rôle de potiche, confiné dans son palais avec ses lions dressés et sa cour, entouré d'un faste tout africain et byzantin. La grande période de prospérité et de stabilité s'achève... Il faudra attendre un peu plus d'un siècle pour voir apparaître de nouveaux grands souverains dont Ménélik II qui fera entrer son empire dans la modernité à grands coups de réformes et bâtira une nouvelle capitale dont le nom, choisi par l'impératrice, sera Addis-Abeba, "Nouvelle fleur"...
Mais en 1789, l'Ethiopie vit une période sombre, en vase clos, coupée du monde et déchirée par les luttes intestines.
Où en est, en 1789, le royaume supposé de la reine de Saba, le royaume du Prêtre Jean qui enflamma l'imagination des explorateurs du Moyen-Age ?
L'Ethiopie, nommée également Abyssinie, est très ancienne. Les égyptiens pharaoniques la mentionnent comme "le pays de Punt" et le royaume d'Aksoum, son "ancêtre", devient chrétien dès 330 après JC.
Ce sont les portugais qui, à la fin du Moyen-Age découvrent ce royaume d'Ethiopie, par un de leurs envoyés reçu à la cour impériale, la cour des Negus. Les portugais auront une grande influence sur l'Ethiopie pendant plusieurs années tout en ne restant que des invités.
Au XVIIIème siècle règne la dynastie des empereurs Salomonides qui prétendent descendre des amours de Salomon et de la reine de Saba, rien de moins. Ils ont transféré la capitale à Gondar, ville surplombée d'un vaste ensemble de châteaux, palais, jardins et églises à l'architecture fortement inspirée du style et des techniques portugaises.
Mais l'Ethiopie passe par de sales moments... L'Eglise est divisée, l'empire encerclé par l'Islam (en plein déclin lui-même) vit en vase clos sans plus aucun contact avec l'extérieur, les seigneurs locaux relèvent la tête... En janvier 1769, l'empereur Ioyas Ier est tué et commence alors "l'ère des Princes" où l'empire va être dirigé de fait par les seigneurs et maires du palais, l'empereur réduit à un rôle de potiche, confiné dans son palais avec ses lions dressés et sa cour, entouré d'un faste tout africain et byzantin. La grande période de prospérité et de stabilité s'achève... Il faudra attendre un peu plus d'un siècle pour voir apparaître de nouveaux grands souverains dont Ménélik II qui fera entrer son empire dans la modernité à grands coups de réformes et bâtira une nouvelle capitale dont le nom, choisi par l'impératrice, sera Addis-Abeba, "Nouvelle fleur"...
Mais en 1789, l'Ethiopie vit une période sombre, en vase clos, coupée du monde et déchirée par les luttes intestines.
Calonne- Messages : 1098
Date d'inscription : 01/01/2014
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Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Calonne a écrit:Reprenons un instant notre petit tour du monde...
Ah ! Merci de reprendre vos voyages...
Puisque vous évoquez Quianlong, nous présentions récemment ce roman, dont il est l'un des sujets principaux.
Peut-être vous intéressera-t-il ?
Ici : https://marie-antoinette.forumactif.org/t3463-cox-ou-la-course-du-temps-de-christopher-ransmayr
Les enjeux n'étaient cependant pas du tout les mêmes.Calonne a écrit:Un échange culturel inattendu, qui tranche singulièrement avec l'échec cuisant de l'ambassade anglaise de 1792, à la cour de ce même Quianlong...
Nous en parlons brièvement ici : https://marie-antoinette.forumactif.org/t2151p30-l-imperatrice-cixi-biographie-de-jung-chang#64285
La nuit, la neige- Messages : 18060
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Pour l'ambassade de 1792 en Chine, cette dernière avait commencé à se refermer sur elle-même, dans un immobilisme certain. Qianlong n'était plus aussi ouvert d'esprit et curieux qu'autrefois et l'ambassadeur anglais pas très diplomate, imbu de sa supériorité. Officiellement, la raison de l'échec fût le refus de l'envoyé britannique de se prosterner devant l'empereur à plusieurs reprises comme l'exigeait le protocole impérial. Officieusement, ce fût la rencontre de deux blocs hermétiques, chacun restant sur ses préventions. Alain Peyrefitte en a tiré son livre, L'empire immobile.
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Calonne- Messages : 1098
Date d'inscription : 01/01/2014
Age : 52
Localisation : Un manoir à la campagne
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Ah, il fallait un prétexte . Il paraît bien mineur vu de l'occident ...
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Mme de Sabran- Messages : 55309
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Localisation : l'Ouest sauvage
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Hum...bien mineur, je ne sais pas.
Cette histoire de prosternation ou pas, a pourri cette ambassade mais de nombreuses autres encore par la suite.
Les Anglais trouveront un autre moyen de pénétrer en Chine, mais par la petite porte : l'opium.
Cette histoire de prosternation ou pas, a pourri cette ambassade mais de nombreuses autres encore par la suite.
Les Anglais trouveront un autre moyen de pénétrer en Chine, mais par la petite porte : l'opium.
La nuit, la neige- Messages : 18060
Date d'inscription : 21/12/2013
Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Puisque nous parlions plus haut de la Perse et de ses liens avec le royaume de France, il serait impardonnable de ne pas nous pencher sur un personnage extraordinaire, quitte à remonter un peu en arrière...
Accrochez-vous car voilà un personnage détonnant et une page injustement méconnue de notre histoire.
Années 1700. Marie Petit, dite "La Brelandière", tient un tripot à Paris mais un tripot parfois fréquenté par des gens de qualité venus s'encanailler. Un soir, elle y reçoit le financier Fabre qui lui plaît au point qu'elle décide de le garder pour elle dans son lit. Ces deux-là se plaisent et finissent même par s'aimer, à tel point qu'ils se désolent lorsque Fabre apprend qu'il doit partir, missionné par le roi en personne pour une mission commerciale et diplomatique en Perse. L’expédition prend néanmoins la route avec toute une suite dont le secrétaire de Fabre... qui n’est autre que Marie, déguisée ! Fou d'elle, son amant a donc décidé de l'emmener et l'on imagine le bouleversement causé ainsi dans la vie de la petite brelandière qui n'avait jamais quitté Paris... Mais le climat et les paysages brûlants traversés pendant trois mois pour rejoindre Ispahan furent trop difficiles à supporter pour Fabre qui, exténué, mourut le 15 août 1706, à la frontière de la Perse, non sans avoir confié à Marie ses lettres d’accréditation, lui faisant promettre de mener à bien leur mission. Marie eût le chagrin que l'on imagine mais décida de tenir sa promesse et, avec tout l'aplomb d'une maîtresse-femme, elle prît la tête de la caravane en direction de Trébizonde, où devait débarquer Arnaud, le fils du défunt, envoyé par mer de son côté avec une cargaison de présents pour le Shah.
Pendant ce temps, à Versailles, on apprît la mort de Fabre et un certain Michel, conseiller d'ambassade à Constantinople, fût désigné en urgence pour le remplacer et boucla donc ses malles pour Ispahan. Arrivé là, il tomba sur la petite brelandière qui, entretemps, avait fait la conquête de la cour du Shah... Son charme (et ses charmes aussi...), son audace et son aplomb, sa personnalité atypique l'avaient imposé à la cour où on la surnommait "la princesse franque". Le Shah lui-même, amateur d'exotisme, ne résista pas et logea Marie dans un somptueux palais, la couvrant de présents. Encore plus fort : il était prêt à signer l'accord demandé, mission originelle du défunt Fabre.
On imagine la stupéfaction du fameux Michel qui débarque enfin, épuisé, poudreux et brûlé de soleil pour voir toutes les portes se fermer devant lui et les dignitaires perses lui rétorquer : "Nous nous en remettons à Madame Petit"... Furieux, il se réfugia dans un couvent jésuite et, aidé par ces derniers, protesta, vitupéra, dénonçant cette femme de rien, de mauvaise vie, déguisée en homme et osant parler au nom du roi de France. Le Shah fût donc obligé de le recevoir tandis qu'à Versailles, les ministres n'en croyaient pas ce qu'ils lisaient dans les rapports envoyés d'Ispahan... L'ambassade fût finalement un succès, le traité signé mais selon les dispositions prévues et négociées par Marie, fidèle à sa promesse. Furieux, Michel se contenta d'apposer sa signature.
Notre brelandière aurait pu rester, continuer à boire du thé à la menthe en savourant quelques douceurs et en comptant ses colliers de perles mais la nostalgie la taraudait, elle se sentait isolée, très seule dans ce pays lointain, trop lointain. Marie décida donc, au bout de cinq ans quand-même, de rentrer. Ses hôtes et ses amants, très tristes de la voir partir, la comblèrent d'or et de bijoux et lui fournirent le moyen de quitter le pays en toute sécurité.
Mais une sale surprise attendait la brelandière à son retour... Michel, qui n'avait rien oublié, fît courir le bruit que la jeune femme avait détourné à son profit les présents prévus dans la caravane d'origine pour le Shah. Soutenu par les jésuites, il tenait sa vengeance : qu'attendre d'autre d'une "catin", d'une fille de rien, osant se travestir en homme et vendant sans doute ses charmes ? Débarquée à Marseille, notre pauvre brelandière fût donc accueillie par la police du roi et enfermée au Refuge des Dames de Saint-Vincent. Elle y restera en cellule... deux ans !
Dans l'intervalle, on se rendît compte que le Michel, de son côté, détournait des fonds et menait grand train, corrompu jusqu'au trognon. Dans le même temps, les Perses, informés du traitement infligé à leur "princesse franque", protestèrent avec colère. Louis XIV céda, envoya Michel se faire voir ailleurs et fît libérer la jeune femme, lui restitua ses joyaux et sa fortune plus 12 000 livres de dédommagement, pris sur ses fonds personnels.
Séduit par cette personnalité hors du commun, il lui confia même une autre mission, en Pologne cette fois. Tout ceci avant que notre brave aventurière, fatiguée, ne se retire dans une retraite confortable pour mieux ressasser ses fantastiques souvenirs...
Madame Petit ne devrait-elle pas avoir une statue ?
Marie Petit, incroyable (et inattendue !) ambassadeur du Roi-Soleil en Perse...
Accrochez-vous car voilà un personnage détonnant et une page injustement méconnue de notre histoire.
Années 1700. Marie Petit, dite "La Brelandière", tient un tripot à Paris mais un tripot parfois fréquenté par des gens de qualité venus s'encanailler. Un soir, elle y reçoit le financier Fabre qui lui plaît au point qu'elle décide de le garder pour elle dans son lit. Ces deux-là se plaisent et finissent même par s'aimer, à tel point qu'ils se désolent lorsque Fabre apprend qu'il doit partir, missionné par le roi en personne pour une mission commerciale et diplomatique en Perse. L’expédition prend néanmoins la route avec toute une suite dont le secrétaire de Fabre... qui n’est autre que Marie, déguisée ! Fou d'elle, son amant a donc décidé de l'emmener et l'on imagine le bouleversement causé ainsi dans la vie de la petite brelandière qui n'avait jamais quitté Paris... Mais le climat et les paysages brûlants traversés pendant trois mois pour rejoindre Ispahan furent trop difficiles à supporter pour Fabre qui, exténué, mourut le 15 août 1706, à la frontière de la Perse, non sans avoir confié à Marie ses lettres d’accréditation, lui faisant promettre de mener à bien leur mission. Marie eût le chagrin que l'on imagine mais décida de tenir sa promesse et, avec tout l'aplomb d'une maîtresse-femme, elle prît la tête de la caravane en direction de Trébizonde, où devait débarquer Arnaud, le fils du défunt, envoyé par mer de son côté avec une cargaison de présents pour le Shah.
Pendant ce temps, à Versailles, on apprît la mort de Fabre et un certain Michel, conseiller d'ambassade à Constantinople, fût désigné en urgence pour le remplacer et boucla donc ses malles pour Ispahan. Arrivé là, il tomba sur la petite brelandière qui, entretemps, avait fait la conquête de la cour du Shah... Son charme (et ses charmes aussi...), son audace et son aplomb, sa personnalité atypique l'avaient imposé à la cour où on la surnommait "la princesse franque". Le Shah lui-même, amateur d'exotisme, ne résista pas et logea Marie dans un somptueux palais, la couvrant de présents. Encore plus fort : il était prêt à signer l'accord demandé, mission originelle du défunt Fabre.
On imagine la stupéfaction du fameux Michel qui débarque enfin, épuisé, poudreux et brûlé de soleil pour voir toutes les portes se fermer devant lui et les dignitaires perses lui rétorquer : "Nous nous en remettons à Madame Petit"... Furieux, il se réfugia dans un couvent jésuite et, aidé par ces derniers, protesta, vitupéra, dénonçant cette femme de rien, de mauvaise vie, déguisée en homme et osant parler au nom du roi de France. Le Shah fût donc obligé de le recevoir tandis qu'à Versailles, les ministres n'en croyaient pas ce qu'ils lisaient dans les rapports envoyés d'Ispahan... L'ambassade fût finalement un succès, le traité signé mais selon les dispositions prévues et négociées par Marie, fidèle à sa promesse. Furieux, Michel se contenta d'apposer sa signature.
Notre brelandière aurait pu rester, continuer à boire du thé à la menthe en savourant quelques douceurs et en comptant ses colliers de perles mais la nostalgie la taraudait, elle se sentait isolée, très seule dans ce pays lointain, trop lointain. Marie décida donc, au bout de cinq ans quand-même, de rentrer. Ses hôtes et ses amants, très tristes de la voir partir, la comblèrent d'or et de bijoux et lui fournirent le moyen de quitter le pays en toute sécurité.
Mais une sale surprise attendait la brelandière à son retour... Michel, qui n'avait rien oublié, fît courir le bruit que la jeune femme avait détourné à son profit les présents prévus dans la caravane d'origine pour le Shah. Soutenu par les jésuites, il tenait sa vengeance : qu'attendre d'autre d'une "catin", d'une fille de rien, osant se travestir en homme et vendant sans doute ses charmes ? Débarquée à Marseille, notre pauvre brelandière fût donc accueillie par la police du roi et enfermée au Refuge des Dames de Saint-Vincent. Elle y restera en cellule... deux ans !
Dans l'intervalle, on se rendît compte que le Michel, de son côté, détournait des fonds et menait grand train, corrompu jusqu'au trognon. Dans le même temps, les Perses, informés du traitement infligé à leur "princesse franque", protestèrent avec colère. Louis XIV céda, envoya Michel se faire voir ailleurs et fît libérer la jeune femme, lui restitua ses joyaux et sa fortune plus 12 000 livres de dédommagement, pris sur ses fonds personnels.
Séduit par cette personnalité hors du commun, il lui confia même une autre mission, en Pologne cette fois. Tout ceci avant que notre brave aventurière, fatiguée, ne se retire dans une retraite confortable pour mieux ressasser ses fantastiques souvenirs...
Madame Petit ne devrait-elle pas avoir une statue ?
Calonne- Messages : 1098
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Re: Ailleurs dans le monde en 1789
Merci Calonne.
Quelle histoire romanesque ! Je n'en avais jamais entendu parler...
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La nuit, la neige- Messages : 18060
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